Appel à la justice 1.7 - Rapport final

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Table des matières

Introduction

L’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées a publié son rapport final en 2019. Celui-ci contient 231 appels à la justice pour s’attaquer aux causes profondes de la violence faite aux femmes, aux filles, aux personnes bispirituelles et aux personnes de diverses identités de genre des Premières Nations, Inuites et Métis. Comme le souligne l’Enquête nationale, « les mesures visant à mettre un terme à ce génocide et à redresser la situation doivent être aussi importantes que l’ensemble des systèmes et des actions qui ont contribué à perpétuer la violence coloniale pendant des générations ». Parmi elles, l’appel à la justice 1.7 demande aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, en partenariat avec les peuples autochtones, de créer un poste d’ombudsman national des droits des Autochtones et des droits de la personne, qui aura autorité dans tous les domaines de compétence, et de mettre sur pied un tribunal national des droits des Autochtones et des droits de la personne.

De manière générale, les appels à la justice concordent avec les principes énoncés par le gouvernement du Canada. Le très honorable Justin Trudeau, premier ministre du Canada, a déclaré à l’occasion de la Journée nationale des Autochtones en 2017 : « Aucune autre relation n’est plus importante pour le Canada que la relation que nous entretenons avec les peuples autochtones […] Nous sommes déterminés à faire une vraie différence dans la vie des Autochtones – en comblant les écarts socio-économiques, en favorisant une plus grande autodétermination et en créant des opportunités de travailler ensemble à faire avancer nos priorités communes. »

Par ailleurs, le lettre de mandatNote de bas de page 1 du ministre des Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord, qui demande au ministre de mettre en œuvre la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et de travailler en partenariat avec les Autochtones pour mieux faire reconnaître leurs droits, indique également que « la réconciliation ne peut se faire sans l’obtention de la vérité, et [que] le gouvernement continuera d’investir dans la quête de cette vérité. À titre de ministres, nous avons le devoir de faire progresser les travaux à cet égard, tant collectivement qu’individuellement. » Notant les « inégalités et [les] disparités systémiques profondes qui demeurent présentes dans notre tissu social, notamment au sein de nos institutions fondamentales », la lettre de mandat précise également que la mise en œuvre de la Voie fédérale concernant les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones disparues et assassinéesNote de bas de page 2 et du Plan d’action national de 2021 est une priorité importante.

Dans l’accomplissement de ce mandat, le gouvernement du Canada a tenu en janvier 2023 la toute première Table rondeNote de bas de page 3 des dirigeants et représentants autochtones et des ministres fédéraux, provinciaux et territoriaux sur la question des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQI+ autochtones disparues et assassinées. À cette occasion, le ministre fédéral des Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada (RCAANC) a annoncé la nomination d’une représentante spéciale du ministre chargée de présenter des conseils et des recommandations sur la mise en œuvre de l’appel à la justice 1.7, et plus particulièrement sur la création d’un poste d’ombudsman des droits des Autochtones et des droits de la personne.

La représentante spéciale du ministre salue le leadership de l’honorable Gary Anandasangaree, ministre des Relations Couronne-Autochtones, responsable de faire avancer les travaux de mise en œuvre de l’appel à la justice 1.7. Elle salue également le leadership de l’honorable Marc Miller, ancien ministre des Relations Couronne-Autochtones et actuel ministre de l’Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté, qui a reconnu l’importance de l’appel à la justice 1.7 et a entamé des travaux à cet égard. L’appui du Ministère et du Cabinet du ministre des Relations Couronne-Autochtones est également grandement apprécié, tout comme l’investissement du Secrétariat des FFADA.

La représentante spéciale du ministre, qui relève directement du ministre et est indépendante de la fonction publique fédérale, a pour mandat de rencontrer les représentants d’organisations autochtones nationales et régionales, d’entités de responsabilisation gouvernementales et de ministères fédéraux, provinciaux et territoriaux responsables des questions concernant les femmes, les filles, les personnes bispirituelles et les personnes de diverses identités de genre autochtones disparues et assassinées (FFADA2E+) afin de recueillir de l’information et de fournir des conseils et des recommandations sur la voie à suivre.

Le présent rapport reflète les rencontres de mobilisation et de validation avec des organisations et gouvernements des Premières Nations, Inuits et Métis, des organisations de femmes autochtones, des organisations dédiées aux FFADA2E+, ainsi que des organisations d’Autochtones vivant en milieu urbain, en milieu rural ou dans des régions nordiques, qui comptent toutes des membres de familles et des survivantes. Ces rencontres visaient à explorer davantage le besoin urgent de mettre en œuvre l’appel à la justice 1.7 et d’analyser les conséquences qui en découlent. La représentante spéciale du ministre n’a pas pour mandat de fournir des conseils et des recommandations concernant la mise sur pied d’un tribunal national des droits des Autochtones et des droits de la personne.

Comme il en ressort clairement des séances de mobilisation, une nouvelle institution dédiée aux droits des Autochtones est nécessaire pour faire progresser le respect des droits des Premières Nations, des Inuit et des Métis, et plus particulièrement ceux des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones (bispirituelles, lesbiennes, gaies, bisexuelles, transgenres, queers, en questionnement, intersexuées, asexuelles et les personnes qui choisissent l’une des nombreuses autres identités), peu importe le statut de ces personnes et l’endroit où elles habitent.

L’urgence d’agir et de prendre ses responsabilités

Les membres de familles qui ont perdu des êtres chers ainsi que les défenseurs des droits autochtones ont exprimé très clairement tout au long de l’Enquête nationale et du processus de mobilisation de l’appel à la justice 1.7 que les mesures prises étaient insuffisantes selon eux et que la situation était aggravée par un manque d’imputabilité. Ces participants ont mentionné que la création de comités ne constitue pas une action. La consultation permanente ne constitue pas une action. Les mots remplis de bonnes intentions ne constituent pas une action. Un récent examen exhaustif des progrès réalisés concernant les appels à la justice, mené par la CBCNote de bas de page 4 révèle que seuls deux des 231 appels à la justice ont été pleinement réalisés et que, pour plus de la moitié d’entre eux, la mise en œuvre n’a même pas débuté. Les Premières Nations, les Inuit et les Métis ont rappelé tout au long des séances de mobilisation que les travaux de tous les autres appels à la justice devaient commencer sans attendre la mise en œuvre de l’appel à la justice 1.7.

La Commission royale sur les peuples autochtones,Note de bas de page 5 la Commission d’enquête publique sur l’administration de la justice et les AutochtonesNote de bas de page 6, la Commission de vérité et réconciliation du Canada,Note de bas de page 7 et l’Enquête nationaleNote de bas de page 8 parlent toutes en termes généraux de la nécessité de susciter des changements systémiques et, dans certains cas, plus précisément de la nécessité de rendre des comptes. Créée en 1988, la Commission d’enquête publique sur l’administration de la justice et les Autochtones au Manitoba (EJA) avait pour mandat d’enquêter sur les circonstances entourant le meurtre d’Helen Betty Osborne et les coups de feu tirés par les services de police de Winnipeg sur J.J. Harper. Au sujet de la responsabilisation, l’EJA a fait remarquer que le système judiciaire n’avait pas réussi à protéger les Autochtones et qu’il les avait privés de toute forme de justice. Dans le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones (CRPA) publié en 1996, les commissaires ont souligné l’importance de rééquilibrer les pouvoirs politiques et économiques pour favoriser la réparation et la responsabilisation. Plus de 25 ans après la publication du rapport de la CRPA, les appels en faveur d’un vérificateur général dédié, qui rendrait des comptes aux peuples autochtones, n’ont pas été entendus.

Le rapport de 2004 d’Amnistie internationale, intitulé « CANADA. On a volé la vie de nos sœurs; Discrimination et violence contre les femmes autochtones »Note de bas de page 9 et le rapport de 2012 de la Colombie-Britannique, intitulé « FORSAKEN - The Report of the Missing Women Commission of Inquiry »Note de bas de page 10 ont servi de fondement pour documenter et faire connaître la violation des droits, la discrimination et la violence qui constituent les causes de la disparition et l’assassinat des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones. Enfin, dans le rapport final de la Commission de vérité et réconciliation du Canada (CVR)Note de bas de page 11 publié en 2015, les survivants ont demandé des comptes et lancé 94 appels à l’actionNote de bas de page 12 – dont la plupart, d’après les rapports et les évaluations externes, n’ont pas été réalisésNote de bas de page 13. Comme le fait remarquer un rapportNote de bas de page 14 de l’Institut Yellowhead, « [l]a guérison ne peut survenir qu’après la vérité, et la justice et la responsabilité face à ce qu’ont vécu les enfants sont essentielles au processus (p. 39) » [traduction].

Ces rapports, comme l’indique le rapport provisoire de l’Enquête nationale, concluent que les solutions pour mettre fin à la violence doivent être dirigées par les peuples, les communautés et les nations autochtones en situation d’autonomie gouvernementale, et inclure les membres de familles et les survivantesNote de bas de page 15. Les vérités contenues dans ces rapports, notamment le rapport final de la Commission ViensNote de bas de page 16 du Québec, imposent une responsabilité juridique de changement – rien de moins qu’un changement transformationnel – ce qui inclut la mise en place de structures de soutien à la responsabilisation.

« Il faut plus que de simples symboles, nous avons besoin de changements structurels. »

« Ça suffit. »

« Le travail qui concerne directement les FFADA2E+ est essentiel et nous ne pouvons plus attendre que les systèmes changent tandis que les femmes autochtones continuent de mourir. Des solutions immédiates doivent être mises en œuvre pour atténuer la crise. »

Le contexte de l’appel à la justice 1.7

Appel à la justice 1.7

Nous demandons aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux, en partenariat avec les peuples autochtones, de créer un poste d’ombudsman national des droits des Autochtones et des droits de la personne qui aura autorité dans tous les domaines de compétence, et de mettre sur pied un tribunal national des droits des Autochtones et des droits de la personne.

L’ombudsman et le tribunal doivent être indépendants des gouvernements et avoir le pouvoir d’examiner les plaintes en matière de violation des droits autochtones et des droits de la personne déposées tant par des personnes autochtones que par des communautés autochtones. Ils doivent aussi pouvoir mener des évaluations exhaustives et indépendantes des services gouvernementaux destinés aux personnes et aux communautés des Premières Nations des Inuit et des Métis, afin de mesurer la conformité aux lois régissant les droits de la personne et les droits des Autochtones.

L’ombudsman et le tribunal doivent se voir attribuer des ressources suffisantes pour remplir leur mandat, et celui-ci doit être permanent.

Les écarts observésNote de bas de page 17 en matière d’espérance de vie, de résultats sur la santé, d’éducation, de revenus et presque tous les autres indicateurs montrent que les mécanismes existants de protection des droits de la personne ne suffisent pas à protéger les droits des Premières Nations, des Inuit et des Métis, notamment ceux des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA+ autochtonesNote de bas de page 18. En ce qui concerne les FFADA2E+, les statistiques publiées entre autres par l’Observatoire canadien du féminicide pour la justice et la responsabilisationNote de bas de page 19 de l’Université de Guelph soulignent la violence disproportionnée à leur endroit. Comme le démontrent clairement ces données, et comme l’a fait ressortir l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinéesNote de bas de page 20, le racisme, le patriarcat, la misogynie et la discrimination sont profondément ancrés dans nos systèmes et nos structures et ont ensemble l’effet d’un génocide.

L’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées a commencé ses travaux en 2016, en s’appuyant en partie sur l’appel à l’action 41.2 de la Commission de vérité et réconciliation, qui demandait au gouvernement d’établir une enquête publique « chargée de se pencher sur les causes de la disproportion de la victimisation des femmes et des jeunes filles autochtones, et sur les moyens possibles pour y remédier », compte tenu de la longue histoire de violences relevée dans le volume Les séquelles de la CVR. Parallèlement, des décennies de travail de la part des membres de familles et des survivantes toujours en quête de justice ont été à l’origine du processus qui allait s’ensuivre. Le mandat de l’Enquête nationale était vaste et complexe. Il consistait notamment à rendre compte des causes systémiques de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles autochtones, y compris la violence sexuelle, et à examiner les causes sociales, économiques, culturelles, institutionnelles et historiques sous-jacentes qui contribuent à perpétuer la violence envers les femmes des Premières Nations, des Inuit et des Métis au Canada.

L’Enquête nationale a rédigé l’appel à la justice 1.7 en s’appuyant sur son processus de consignation de la vérité, qui a permis de recueillir le témoignage de près de 3 000 personnes venues raconter leurs expériences lors d’audiences communautaires ou par l’entremise de déclarations, de dialogues facilités, de la collection patrimoniale autochtone et de parties ayant qualité pour agir, ainsi que d’ateliers dédiés à l’élaboration conjointe d’appels à la justice avec les personnes les plus touchées. En effet, les familles et les survivantes ont déclaré dans le cadre de l’Enquête nationale être dépourvues de moyen simple, sans obstacle et qui tient compte des traumatismes pour combattre les inégalités dans les programmes et les services gouvernementaux, alors que ce sont ces inégalités qui entraînent les violations de leurs droits.

Le gouvernement du Canada a présenté sa propre réponse à la suite du rapport final de l’Enquête nationale, en rédigeant la Voie fédéraleNote de bas de page 21, pour apporter sa contribution au Plan d’action national. Ce document présente les engagements des gouvernements pour mettre fin à la violence faite aux femmes, aux filles et aux personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones. Elle fait de la reddition de comptes une priorité essentielle dans le domaine de la santé et de la justice.

Dans un contexte plus global, la Voie fédérale a pour but d’apporter une contribution au Plan d’action national de 2021 pour les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones disparues et assassinées, rédigé en collaboration avec le Cercle national des familles et des survivantes et d’autres partenaires. Ce plan fait valoir plus directement l’importance de l’appel à la justice 1.7 et de l’obligation de rendre compte de manière plus générale. Par exemple, l’obligation de rendre des comptes est l’un des piliers du Cercle national des familles et des survivantes et il vise à garantir que les recommandations formulées et les appels lancés au fil des décennies et par l’Enquête nationale soient pleinement mis en œuvre. Comme le préambule de ce document l’indique, « [le processus et les résultats doivent être assortis de mécanismes de responsabilisation permettant de mesurer le changement transformateur ».Note de bas de page 22 En outre, l’un des principaux objectifs du Plan d’action national, considéré comme une priorité à court terme, comprend la mise en place d’un mécanisme national de responsabilisation en matière des droits de la personne des Autochtones qui tiendra compte des droits inhérents, des droits issus des traités et des droits constitutionnels, en lien avec l’appel à la justice 1.7. Le Plan d’action national prévoit que des organes de surveillance, comme un ombudsman autochtone, un tribunal des droits de la personne ou des organes de surveillance de la police, représentent les intérêts des familles, des survivantes et des communautés en examinant et en traitant les plaintes pour mauvaise administration ou violation des droits de la personne.

Les plans d’action nationaux du groupe de travail sur les Autochtones vivant en milieu urbain des FFADA2E+ et du comité des personnes 2ELGBTQQIA+ font état d’enjeux uniques en matière de compétences, comme la suppression des droits, ainsi que d’occasions et de solutions dans un contexte urbain, ce que doit prendre en compte un ombudsman dans le cadre de ses fonctions.

Comme l’indiquent clairement les travaux antérieurs, cette question concerne à la fois la responsabilisation et les droits des Autochtones et de la personne. Tous les êtres humains ont des droits de la personne, et les Premières Nations, les Inuit et les Métis ont également des droits autochtones inhérents et collectifs qui découlent du fait qu’ils sont les premiers peuples à occuper le territoire aujourd’hui nommé Canada. Ces droits collectifs comprennent la reconnaissance légale des femmes autochtones en tant que détentrices de droits individuels. Il s’agit notamment du droit à l’indépendance par l’autodétermination dans des domaines comme la gouvernance, les terres, les ressources et la culture. Les droits, les lois et les traditions juridiques autochtones sont reconnus en vertu de l’article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982Note de bas de page 23 et confirmés à maintes reprises par la Cour suprême du Canada, tout comme le sont leurs droits issus de traités.

En dépit d’engagements nouveaux et plus généraux, comme la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (LDNU)Note de bas de page 24, qui sert à l’interprétation de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones en droit canadien, les droits des Autochtones ne sont pas toujours reconnus ou respectés par les gouvernements coloniaux malgré de longs et coûteux recours légaux. Les dispositions de la LDNU exigent le Canada d’examiner, en consultation et en collaboration avec les Premières Nations, les Inuit et les Métis, des mesures de suivi, de contrôle, de recours ou de réparation, ou d’autres mesures de responsabilisation, susceptibles de favoriser l’atteinte de ces objectifs.

« C’est considérable. L’appel à la justice 1.7 a un potentiel énorme. »

« Ça permettrait d’alléger les souffrances. »

« Une très bonne avenue, un choix sensé. »

« L’histoire fera en sorte que les torts soient complètement réparés. »

Principales réunions et séances de mobilisation

La planification des réunions et des séances de mobilisation par la représentante spéciale du ministre a commencé le 3 avril 2023 avec principalement des discussions en ligne qui ont réuni plus de 600 personnes représentant plus de 125 organisations et gouvernements, dont des organisations autochtones nationales et régionales, ainsi que des entités de responsabilisation gouvernementales, des ministères fédéraux et des ministères provinciaux et territoriaux responsables des questions touchant les FFADA2E+. Une première liste de personnes a été fournie par le Secrétariat des FFADA de RCAANC, avant que d’autres noms de personnes et d’organisations ne soient suggérés par les participants aux réunions, dans les délais prescrits par le mandat. La plupart des réunions et des séances de mobilisation se sont déroulées en petits groupes, certaines ayant duré jusqu’à deux heures et demie pour permettre d’approfondir les discussions. Des réunions de validation ont ensuite été organisées avec les gouvernements et les organisations autochtones pour confirmer et faire avancer les recommandations élaborées conjointement. Les réunions avec les gouvernements et les organisations autochtones ont rassemblé des membres de familles touchées par cette question.

Toutes les informations contenues dans ce rapport proviennent des lignes directrices et des conseils des familles, des survivantes, des dirigeants et des citoyens des Premières Nations, des Inuit et des Métis qui ont pris le temps de partager leurs vérités et leurs attentes en matière de responsabilisation et de changement.

De nombreuses personnes d’organismes de responsabilisation et de gouvernements ont également fait part de leurs points de vue. Les réflexions personnelles, l’honnêteté et la volonté de contribuer au changement sont d’une grande valeur et nous vous en sommes reconnaissants.

Organisations autochtones nationales

Organisations régionales autochtones *en ordre alphabétique

Organismes de responsabilisation *en ordre alphabétique

Ministères et entités du gouvernement fédéral *en ordre alphabétique

Ministères et conseils responsables des questions concernant les FFADA2E+ des gouvernements provinciaux et territoriaux (tels qu’ils sont identifiés par les provinces et les territoires) *en ordre alphabétique

Experts juridiques et des droits

Autres

*Quelques organisations n’ont pas répondu aux invitations aux rencontres

Comme l’ont clairement indiqué les participants, les peuples autochtones au Canada, les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones vivent dans un état d’urgence. Les femmes, les filles, les personnes bispirituelles et les personnes de genres divers autochtones continuent de disparaître et d’être assassinées en raison d’une épidémie de violence qui ne faiblit pas. Le rapport final de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées s’est penché sur les causes profondes de ces assassinats et disparitions. Il souligne notamment le rôle des traumatismes intergénérationnels et multigénérationnels non résolus, de la marginalisation sociale et économique, du manque de volonté des gouvernements qui se traduit par le maintien du statu quo, donc du racisme systémique et de l’oppression, et le refus de reconnaître l’expertise et la capacité d’agir des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones. Il est donc urgent d’assurer la sécurité de ces personnes et de mettre en place des mécanismes permettant de poursuivre les auteurs de violations des droits.

« On ne nous prend pas au sérieux. C’est frustrant, insultant et épuisant. »

« Lorsque des femmes disparaissent, ce sont des générations entières qui sont anéanties. »

« Comme femmes, il est effarant de constater le traitement qui nous est réservé. Nos voix ne sont toujours pas entendues, on nous ignore. Si ce n’était des femmes, il n’y aurait pas d’hommes, ni d’enfants. »

« L’incapacité persistante des systèmes à protéger les femmes autochtones fait en sorte que la violence à leur égard se perpétue. Cette violence illustre ce qui arrive lorsqu’il n’existe pas de réponse adéquate menée par les femmes autochtones pour assurer la sécurité des femmes autochtones. »

Points importants: L’origine et le rôle de l’ombudsman

L’ombudsman, parfois appelé « un ombuds, représentant des citoyens » ou « protecteur du citoyen », est la personne qui reçoit des plaintes, mène des enquêtes, fait rapport, aide à régler la situation et se prononce sur la question du respect des principes de traitement équitable et raisonnable par tous les ordres de gouvernement, ainsi que sur la cohérence avec les lois en matière de droits de la personne.

Ce concept est né en Suède il y a plus de 200 ans. On compte aujourd’hui des ombudsmansNote de bas de page 25 ayant un mandat statutaire dans toutes les provinces et deux des trois territoires canadiens, dans certaines villes et au sein de secteurs de compétence fédérale précis. En outre, on compte des ombudsmans n’ayant pas de mandat statutaire dans certaines institutions bancaires, dans certains collèges et universités, et dans une poignée d’autres organisations. Bien que la taille des bureaux d’ombudsman soit très variable, les ombudsmans disposent généralement d’un personnel qualifié, notamment des personnes qui traitent les demandes, des enquêteurs, des chercheurs, des médiateurs et des juristes.

Actuellement, il n’y a pas d’ombudsman doté d’un mandat précis visant à protéger les droits des Autochtones, malgré les écarts importants et bien documentés entre les populations autochtones et non autochtones au Canada.

« Voyez le travail du Créateur tel qu’il se manifeste ici. Les gens ont prié pour cela… pour que survienne un changement. Nous ne sommes pas seuls, les esprits de nos aînés peuvent venir nous aider à rassembler nos bons esprits. »

Comme les participants aux séances de mobilisation l’ont clairement indiqué, le poste d’ombudsman n’est pas une réalité autochtone à l’origine. Ainsi, la définition du rôle de l’ombudsman devra être réalisée conjointement de façon à répondre aux droits et aux priorités des Premières Nations, des Inuit et des Métis, plutôt que de reproduire le modèle du système colonial. De nombreux participants Première Nations, Inuit et Métis aux séances de mobilisation estiment que la création d’un poste d’ombudsman pour les droits des Autochtones et les droits de la personne peut se traduire par un véritable changement transformateur, à condition de bien faire les choses.

Au cours d’une des premières séances de mobilisation, un Gardien du savoir est venu parler de l’enseignement du tressage de foin d’odeur. Ce n’est pas seulement le tressage qui le rend solide, mais aussi la finition, et si le tressage n’est pas correctement noué, il s’effilochera et se désagrégera.

Les Premières Nations, les Inuit et les Métis qui ont participé aux séances de mobilisation et de validation ont indiqué qu’il nous incombait de nous rassembler et de veiller à terminer correctement le travail, dans les règles de l’art, afin que la responsabilisation, la justice, la sécurité et la guérison mènent à la paix. Il est essentiel que les gouvernements assument leur responsabilité et il leur incombe clairement de donner suite à tous les appels à la justice. C’est une responsabilité sacrée que les participants aux séances de mobilisation nous demandent de remplir ensemble.

Points importants: Confronter les violations des droits

Comme l’indiquent les principes de changement de l’Enquête nationale, qui servent de cadre d’interprétation à tous les appels à la justice, les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones détiennent des droits autochtones inhérents, des droits constitutionnels et des droits de la personne à l’échelle internationale et nationale. À cela s’ajoutent des droits en vertu de traités, de revendications territoriales et d’ententes de règlement pour de nombreux peuples autochtones au Canada. Les obligations en matière de droits de la personne et de droits autochtones découlent des lois internationales et nationales régissant les droits de la personne et les droits des Autochtones, y compris les droits énoncés dans la Charte, la Constitution et l’honneur de la Couronne.

Par conséquent, et comme le précise le rapport final de l’enquête nationale, « toute action et toute mesure corrective destinée à s’attaquer aux causes profondes de la violence doivent être fondées sur les droits de la personne et les droits des Autochtones et mettre l’accent sur l’atteinte de l’égalité réelle pour les peuples autochtones ». De plus, les femmes et les personnes 2ELGBTQQIA+ des Premières Nations des Inuit et des Métis qui sont également victimes de misogynie systémique, de paternalisme et de discrimination fondée sur le genre, ce qui vient aggraver les difficultés auxquelles elles font face, doivent être au cœur des réflexions sur les principes juridiques d’égalité.

Les participants des Premières Nations, des Inuit et des Métis d’organisations autochtones ont soulevé à plusieurs reprises, durant ce processus de mobilisation au sujet de l’appel à la justice 1.7, des préoccupations liées aux droits lors des séances de mobilisation, notamment en ce qui concerne les fonctions de l’ombudsman. Les participants ont fait part de ce qui suit et demandent que leurs préoccupations orientent les priorités des ombudsmans et de leurs bureaux.

Le droit à la santé et au bien-être

Les participants ont mentionné de nombreuses préoccupations concernant le droit à la santé et au bien-être à partir d’une perspective holistique, qui établit un lien entre le droit à la santé et au bien-être et le droit à la culture. Voici quelques exemples de préoccupations :

  • Le racisme et la peur d’aller à l’hôpital
  • Le bien-être mental et le manque de services de toxicomanie de qualité culturellement sécuritaires
  • Des services de guérison disparates et un appel à rétablir la Fondation autochtone de guérison
  • L’importance de lutter contre les disparités dans les résultats de santé et les infrastructures de soins de santé inadéquates dans les communautés autochtones
  • Des défis persistants et des disparités au sein du Programme des services de santé non assurés, avec des tarifs spéciaux pour les citoyens des Premières Nations, et des inégalités structurelles mises en évidence par la disparité entre les frais de transport pour raison médicale et le processus d’autorisation du PSSNA et les frais des programmes fédéraux destinés aux non-Autochtones
  • Le caractère central de la langue et de la culture comme remèdes et l’absence de financement équitable en soutien aux langues des Premières Nations, des Inuit et des Métis comparativement au financement pour les langues coloniales

« Quand la culture et la langue se perdent, vous perdez une partie de vous-même. »

Le droit à la justice

En écho aux points de vue exprimés par les participants des milieux urbains et ruraux, ainsi que par ceux de tous les groupes distincts, l’accès à la justice demeure un problème fondamental auquel sont confrontées de nombreuses femmes et personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones, avec des répercussions particulières pour les jeunes des Premières Nations, des Inuit et des Métis. Voici quelques exemples de préoccupations :

  • La qualité des services de police, le racisme et les interventions policières excessives et insuffisantes auprès des personnes et des communautés autochtones
  • Les problèmes systémiques au sein du système de justice, y compris, mais sans s’y limiter, le surpeuplement dans les prisons et le manque de soutien pendant l’incarcération
  • Le besoin d’une nouvelle classification des délinquants en vertu du Code criminel liée aux définitions de délinquants dangereux qui reflète mieux les expériences vécues par les femmes autochtones qui subissent la violence conjugale et la violence familiale
  • Un accès élargi aux services d’aide juridique et au principe Gladue, et le manque de services juridiques adaptés sur le plan culturel
  • Le besoin d’un meilleur accès aux ressources et à l’aide juridiques, en particulier dans les cas de violation des droits
  • L’établissement en priorité de comités d’examen des décès chez les Autochtones afin de mener plus d’enquêtes sur les cas de violence contre les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones

« La police n’a rien trouvé parce qu’elle n’a pas cherché. »

Le droit à la sûreté, à la sécurité et à la protection

Pour de nombreuses personnes qui ont raconté leur histoire et présenté leurs points de vue, les fonctions de l’ombudsman doivent comprendre l’examen des droits fondamentaux associés aux recherches en cours d’êtres chers, pour refléter le manque de recours qui existe souvent pour ceux dont le droit à la sécurité et à la protection n’est pas assuré. Voici quelques exemples de préoccupations :

  • Une meilleure législation concernant les personnes disparues et la mise en place rapide d’une alerte Robe rouge au Canada en cas de disparition d’une femme, d’une fille ou d’une personne 2ELGBTQQIA+ autochtone
  • Des services et du soutien pour retrouver les personnes disparues, y compris la recherche des dépouilles sacrées des femmes dans des lieux connus comme les sites d’enfouissement
  • Des services et du soutien pour les enfants laissés pour compte lorsqu’une femme est assassinée ou portée disparue
  • Les enjeux de compétences intergouvernementales qui permettent aux prédateurs en position d’autorité de se déplacer d’un territoire à l’autre pour échapper aux conséquences de leurs actes

« Les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones ne devraient pas avoir à mettre en jeu leur sécurité pour subvenir à leurs besoins fondamentaux. »

Le droit des familles de rester unies dans l’intérêt supérieur de l’enfant

Comme indiqué à plusieurs reprises, la préservation de l’unité familiale et ses bienfaits pour les enfants des Premières Nations, des Inuit et des Métis sont des aspects essentiels à prendre en compte lors de la définition du mandat ou des fonctions de l’ombudsman responsable des affaires autochtones. Voici quelques exemples de préoccupations :

  • La rupture du lien sacré avec les familles et les répercussions dévastatrices des systèmes de signalement des naissances, qui résultent du manque d’investissements dans les services aux familles, ce qui permettrait d’éviter la prise en charge dès le départ
  • Le manque de préparation lors de la sortie du système de protection de l’enfance

Le droit au logement

Les Autochtones sont particulièrement touchés par l’accélération de la crise du logement au Canada. Comme l’ont affirmé les participants, un lieu sûr où les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones se sentent chez elles reste une priorité essentielle en matière de recours et de responsabilisation. Voici quelques exemples de préoccupations :

  • La pénurie de lieux de vie sûrs et abordables, y compris le besoin critique de logements de transition
  • Le manque de maisons d’hébergement dans les communautés rurales et éloignées
  • La traite des personnes dans le réseau des maisons d’hébergement

Le droit aux services sociaux et à la dignité

Comme de nombreuses personnes l’ont évoqué au cours de l’Enquête nationale et dans d’autres tribunes par la suite, y compris lors des séances de mobilisation qui ont nourri le présent rapport, il est nécessaire d’apporter des changements structurels pour garantir la dignité humaine et l’accès aux services des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones et de mettre en place des mécanismes de recours pour leur permettre d’interjeter appel lorsque ces droits ne sont pas respectés. Voici quelques exemples de préoccupations :

  • L’appel en faveur d’un revenu de base et de l’autonomie économique pour lutter contre la pauvreté engendrée par l’État
  • Le sous-financement systémique et le manque chronique d’investissement dans les services aux communautés des Premières Nations, des Inuit et des Métis, en particulier les organisations de femmes autochtones et les organisations de personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones. Les participants ont souligné l’existence de nombreux projets pilotes, mais ont fait remarquer que le modèle de projet pilote et le financement par projet n’étaient pas durables et n’apporteraient pas de réel changement.
  • Des obstacles importants, comme s’y retrouver sur les sites Internet du gouvernement fédéral et la longue attente coûteuse en frais de téléphonie avant de pouvoir parler à des employés fédéraux, par exemple lorsqu’il s’agit de demander de l’information sur un renouvellement ou une demande de carte de statut. Les délais de production des cartes de statut, officiellement de 8 à 12 semaines, mais qui peuvent prendre jusqu’à 6 mois, alors que les normes de production des passeports se situent entre 10 et 20 jours ouvrables
  • Des querelles de compétence qui privent les Premières Nations, les Inuit et les Métis de leurs droits de multiples façons

« En ville, la pauvreté est criminalisée. »

Le droit à l’éducation

Comme le montrent clairement les données disponibles et les témoignages des personnes qui ont participé à ce processus ou à d’autres événements de partage de la vérité, le droit à l’éducation demeure non respecté pour de nombreux enfants des Premières Nations, des Inuit et des Métis. La capacité d’interjeter appel en cas de violation des droits dans le domaine de l’accès à l’éducation ou au financement est une priorité clé en matière de responsabilisation. Voici quelques exemples de préoccupations :

  • Les défis liés à une éducation de piètre qualité due au sous-financement des écoles qui accueillent des enfants et des jeunes autochtones, et l’impact important du racisme au sein du système d’éducation sur les taux d’obtention de diplôme, les emplois futurs et les déterminants sociaux de la santé
  • La nécessité de respecter les droits des Autochtones à une éducation qui tient compte de leurs cultures, notamment l’enseignement fondé sur le territoire

Le droit à nos terres et eaux sacrées et les droits issus de traités

Au cœur du bien-être et de la santé, des droits culturels et de la dignité humaine, l’accès aux terres et aux eaux sacrées ainsi qu’aux droits issus de traités joue un rôle essentiel dans la préservation des droits. Voici quelques exemples de préoccupations :

  • Les défis autour de la propriété foncière, de l’extraction des ressources et de la dépossession des terres
  • Les problèmes courants de qualité de l’eau et les besoins d’infrastructures dans les communautés des Premières Nations, des Inuit et des Métis
  • La nécessité d’honorer enfin pleinement les traités

Points importants: Gros plan sur les principaux problèmes et lacunes

Les Premières Nations, les Inuit et les Métis qui ont participé aux séances de mobilisation ont relevé plusieurs problèmes et lacunes majeurs dans la défense de leurs droits au Canada. En voici quelques exemples :

« Nous n’avons aucun recours. »

Points importants: Améliorer les mécanismes de responsabilisation existants

Tout en soulignant la nécessité de mettre en place un mécanisme axé sur les besoins des Autochtones, les participants ont également insisté sur l’importance de continuer à renforcer les mécanismes existants, en instaurant la confiance et en répondant aux besoins des citoyens et des communautés des Premières Nations, des Inuit et des Métis. Les participants ont laissé entendre que les bureaux nationaux des ombudsmans des droits des Autochtones et des droits de la personne pourraient former d’autres entités de responsabilisation afin qu’elles servent mieux les peuples autochtones. Voici quelques conseils aux entités responsables existantes :

  1. Maintenir es familles au cœur de tout processus et affecter des ressources pour permettre aux familles et aux communautés de participer pleinement aux processus, notamment aux enquêtes.
  2. Accorder la priorité à la sécurité des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones et offrir des mesures de soutien et des services fondés sur les cultures autochtones nécessaires à la guérison et à la prévention des décès.
  3. Créer des processus sécuritaires et revoir les processus internes afin de réduire au minimum les situations qui remémorent les expériences traumatisantes.
  4. Réduire les obstacles bureaucratiques par tous les moyens, notamment en favorisant l’accès par un vaste éventail de technologies comme le téléphone, les courriels et les textos, en prolongeant les heures d’ouverture (soir et fin de semaine) et en réduisant les formalités administratives.
  5. Augmenter les effectifs pour réduire l’arriéré des dossiers et les délais de traitement des dossiers et améliorer les délais de réponse, ce qui permettra d’augmenter et d’assurer la représentation des Premières Nations, des Inuit et des Métis à tous les échelons de chaque entité, organisation et ministère fédéral de responsabilisation, où les personnes pourront afficher pleinement leur identité autochtone au travail.
  6. Mettre sur pied des initiatives d’éducation et de sensibilisation du public concernant les droits des Autochtones et les droits de la personne et y consacrer des ressources suffisantes, et mieux faire connaître les entités de responsabilisation.

« Je ne saurais même pas où me renseigner pour connaître les endroits où déposer une plainte. Il n’y a aucune information nulle part. Nous ne savons pas où aller pour porter plainte. »

  1. S’engager à améliorer la collecte et la diffusion de données sur les questions d’identité et d’identité de genre des Premières Nations, des Inuit et des Métis au moment du dépôt des plaintes pour être en mesure de vérifier objectivement si les besoins sont satisfaits ou non et suivre leur évolution dans le temps, tout en s’efforçant de soutenir la collecte et l’analyse de données dirigées par les Autochtones dans le contexte de la souveraineté des données des Première Nations, des Inuit et des Métis , grâce au financement et au soutien de la capacité en matière de statistiques autochtones.
  2. Renforcer la connaissance des lois relatives aux Premières Nations, aux Inuit et aux Métis et interpréter toutes les lois canadiennes à la lumière de la Loi sur la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, en particulier :
    • L’article 22
      1. Une attention particulière est accordée aux droits et aux besoins spéciaux des anciens, des femmes, des jeunes, des enfants et des personnes handicapées autochtones dans l’application de la présente Déclaration.
      2. Les États prennent des mesures, en concertation avec les peuples autochtones, pour veiller à ce que les femmes et les enfants autochtones soient pleinement protégés contre toutes les formes de violence et de discrimination et bénéficient des garanties voulues.
  3. Établir des relations, gagner en crédibilité et en confiance, servir avec respect, reconnaître le racisme systémique, rechercher toutes les possibilités et élaborer conjointement des solutions en collaborant avec les Premières Nations, les Inuit et les Métis, et avec leurs familles.
  4. Reconnaître qu’un changement est nécessaire et y accorder la priorité organisationnelle afin de procéder à la transformation collaborative, être ouvert à l’apprentissage et faire preuve d’humilité culturelle.

Réclamer notre pouvoir et notre place: Recommandations pour centrer les priorités des détenteurs de droits

À l’unanimité, les participants autochtones qui ont fait entendre leur voix sur l’appel à la justice 1.7 ont souligné la nécessité d’ajouter des mécanismes de responsabilisation. Cependant, tous les participants ont insisté sur l’importance de prêter attention aux détails entourant la mise en œuvre de l’appel à la justice 1.7 afin que la création des postes et des bureaux d’ombudsman soit une réussite. La création de postes d’ombudsman pour les droits des Autochtones et les droits de la personne à l’échelle nationale et régionale doit être dirigée par les Autochtones et fermement ancrée dans les droits et les priorités des Premières Nations, des Inuit et des Métis.

« N’en faites pas des tours d’ivoire, des lieux où des personnes autochtones feraient simplement le travail des Blancs de façon à perpétuer les systèmes coloniaux. »

Aux dires des participants, le Canada a l’occasion de donner vie à l’appel à la justice 1.7 de manière crédible, courageuse et proactive. Afin d’éviter que la création des bureaux d’ombudsman ne s’appuie sur des concepts coloniaux, les participants aux séances de mobilisation ont formulé les recommandations suivantes.

Cependant, comme les commissaires de la Commission des pertes massives l’ont fait remarquer dans le volume 6 de leur rapport final,Note de bas de page 26 qui traite des obstacles à la mise en œuvre, « le fossé qui s’est souvent creusé entre recommander et agir en faveur de changements a soulevé quelques interrogations chez certains quant à savoir si le terme "recommandation" exprimait de façon adéquate l’urgence, la nécessité, voire l’obligation de conformité ». Par conséquent, les recommandations suivantes doivent être considérées comme des mesures urgentes, dont la priorité absolue est la création dans les meilleurs délais d’une entité de responsabilisation des droits des Autochtones et des droits de la personne.

Recommandations générales

Recommandation : Une portée nationale et régionale

  • Les participants autochtones ont proposé la création de quatre postes d’ombudsman nationaux des droits des Autochtones et des droits de la personne : un pour les Premières Nations, un pour les Inuit, un pour les Métis et un pour les Autochtones en milieu urbain. En vertu de cette approche, les quatre ombudsmans respecteront et refléteront les distinctions, tout en travaillant ensemble dans un seul bureau dans la région de la capitale nationale, de manière à protéger et à défendre tous les droits des Autochtones et tous les droits de la personne.
  • En outre, il faut établir des bureaux régionaux dans chaque province et territoire, avec un ombudsman régional à leur tête. Ces 13 bureaux veilleront à ce que la diversité régionale des cultures, des langues, des coutumes, des pratiques, des protocoles et des traditions juridiques des Premières Nations, des Inuit et des Métis soit reflétée partout au Canada. Les 13 ombudsmans régionaux et leurs bureaux devront collaborer avec tous les peuples autochtones de leur région et relèveront des ombudsmans nationaux des droits des Autochtones et des droits de la personne, qui à leur tour travailleront en collaboration avec les ombudsmans régionaux, les soutiendront et seront tenus responsables de leur travail.
  • Afin d’être davantage présent et de nouer des relations, chaque bureau régional aura besoin d’un bureau mobile ou ponctuel qui pourra en tout temps se déplacer au sein de la région, afin de recevoir les plaintes, de mener des activités d’information et de sensibilisation aux droits, d’organiser des ateliers sur les droits et de rendre les bureaux véritablement accessibles.

« L’établissement de bureaux régionaux est la bonne réponse à cette question. »

« Les gens ne connaissent pas leurs droits. »

Recommandation : Ériger les fondations

  • Les ombudsmans nationaux et régionaux des droits des Autochtones et des droits de la personne doivent détenir une compétence qui s’étend à l’ensemble des ministères, organismes, conseils, commissions et autres instances du gouvernement fédéral, y compris toute société d’État mère et toute filiale à cent pour cent d’une telle société, au sens de l’article 83 de la Loi sur la gestion des finances publiquesNote de bas de page 27.
  • Une loi fédérale sera essentielle et un cadre législatif provisoire sera fourni en s’appuyant sur le présent rapport pour soutenir le processus collaboratif. La loi fédérale permettra de recevoir des plaintes concernant les ministères, les organismes, les conseils, les commissions et les autres instances fédérales.
  • Si des agents du Parlement ont une compétence commune, par exemple le Bureau de l’ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels ou l’enquêteur correctionnel du Canada, il est possible de déposer une plainte auprès de l’entité de responsabilisation de son choix.
  • Les participants autochtones aux séances de mobilisation ont souligné que l'appel à la justice 1.7 demandait aux gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux de travailler en partenariat avec les peuples autochtones pour établir un poste d’ombudsman et un tribunal, et que les appels à la justice définissaient « tous les gouvernements » comme étant les gouvernements fédéral, provinciaux, territoriaux, municipaux et autochtones et les entités connexes. À la suite de la mise en œuvre des bureaux nationaux et régionaux des ombudsmans relevant de la compétence fédérale, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux sont encouragés à travailler ensemble conformément à l’objectif et à la philosophie de l’appel à la justice 1.7 afin de trouver des solutions adaptées à leur province ou territoire, telles que :
    • Une loi provinciale/territoriale qui permet aux ombudsmans provinciaux/territoriaux de conclure des accords avec les ombudsmans nationaux et régionaux des droits des Autochtones et des droits de la personne pour qu’ils puissent recevoir des plaintes au nom de l’autre ombudsman et échanger des informations dans le but d’offrir un service à guichet unique (« pas de mauvais point d’accès »).
    • La création d’un poste d’ombudsman adjoint autochtone ou de postes d’agents de liaison autochtones au sein des bureaux des ombudsmans provinciaux et territoriaux, comme c’est le cas en Colombie-BritanniqueNote de bas de page 28.

Recommandation : Un modèle fondé sur le choix

  • Le savoir et les visions du monde autochtones doivent occuper une place centrale durant tout le processus de création des postes d’ombudsman et de leurs bureaux, notamment les modes de vie, les systèmes de connaissances et les récits autochtones. Chaque bureau doit être inauguré par une cérémonie dirigée par un Aîné et un Gardien du savoir, dans le respect des protocoles, des pratiques spirituelles et culturelles et des objets sacrés des nations et des communautés de la région.
  • Tout plaignant des Premières Nations, Inuit ou Métis estimant que ses droits sont bafoués peut déposer une plainte auprès du Bureau de l’ombudsman des droits des Autochtones et des droits de la personne de sa région. Le personnel responsable de la réception des plaintes informera la personne qui dépose une plainte de toutes les possibilités qui s’offrent à elle, y compris le recours aux services d’autres entités de responsabilisation, comme les bureaux des ombudsmans provinciaux et territoriaux, et à des services de soutien en santé. Ainsi, la personne qui dépose une plainte pourra choisir ce qui lui convient le mieux et s’adresser à un organisme de responsabilisation dans un premier temps, avant de faire appel éventuellement à d’autres organismes par la suite. Ce modèle fondé sur les choix, qui donne aux personnes et aux communautés le pouvoir d’agir, existe déjà au Canada et présente des chevauchements.

Recommandation : Le processus de nomination

  • Les quatre ombudsmans nationaux des droits des Autochtones et des droits de la personne doivent être recrutés par un organe de sélection composé de dirigeants des Premières Nations, Inuit et Métis représentant notamment des familles de FFADA2E+, des organisations de femmes autochtones, des organisations de personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones, des organisations autochtones nationales élues et des organisations d’Autochtones en milieu urbain. L’organe de sélection doit être dirigé conjointement par une femme autochtone et une personne 2ELGBTQQIA+ autochtone.
    • Il doit être composé d’au plus 13 représentants et d’au moins trois membres des Premières Nations, trois Inuit et trois Métis. Chacun doit être le décideur de l’organe autochtone qu’il représente.
    • Chaque membre doit s’engager à travailler de bonne foi et dans un esprit de collaboration et de consensus, n’oubliant jamais que le choix des ombudsmans nationaux est une responsabilité sacrée.
    • L’organe de sélection recommandera quatre candidats, soit une personne pour chacun des quatre postes, et un comité du Parlement représentant tous les partis politiques recommandera au Parlement de nommer les personnes désignées au moyen d’une résolution de la Chambre des communes.
  • Les quatre ombudsmans nationaux relèveront directement des Premières Nations, des Inuit, des Métis et du Parlement, et non d’un ministre, étant donné qu’ils pourront enquêter sur les ministères fédéraux.
  • La sélection des 13 ombudsmans régionaux des droits des Autochtones et des droits de la personne doit être effectuée par des organes régionaux de sélection composés de dirigeants des Premières Nations, Inuit et Métis vivant dans les provinces et territoires concernés et d’au moins un ombudsman national, avec des représentants des familles et des organisations régionales de FFADA2E+, des organisations de femmes autochtones, des organisations de personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones, des organisations d’Autochtones en milieu urbain régionales et des organisations autochtones régionales élues (organisations provinciales/territoriales). Chaque organe régional de sélection doit être dirigé conjointement par une femme autochtone et une personne 2ELGBTQQIA+ autochtone.
    • L’organe de sélection doit être composé d’au plus 13 représentants des peuples autochtones de leur région. Chacun doit être le décideur de l’organe autochtone qu’il représente.
    • Chaque membre doit s’engager à travailler de bonne foi et dans un esprit de collaboration et de consensus, n’oubliant jamais que le choix des ombudsmans régionaux est une responsabilité sacrée.
    • Chacun des 13 organes de sélection régionaux recommandera un candidat et un comité du Parlement représentant tous les partis politiques recommandera au Parlement que les personnes désignées soient nommées par résolution de la Chambre des communes.
  • La composition des ombudsmans régionaux et de leurs bureaux sera représentative de leur territoire de résidence et de la population de cette province ou de ce territoire, dans le respect des protocoles et des pratiques qui y sont en vigueur.
  • Le mandat des ombudsmans nationaux et des ombudsmans régionaux doit être fixé à cinq ans avec une possibilité de reconduction. Pour éviter que tous les mandats arrivent à terme en même temps, le second mandat des ombudsmans nationaux doit être échelonné pour une reconduction de trois, quatre, cinq et six ans, et un protocole similairement échelonné doit être mis en place pour le second mandat des 13 ombudsmans régionaux.
  • Les postes d’ombudsman nationaux et régionaux ne doivent pas être vacants. Un an avant l’expiration du mandat d’un ombudsman, ou dès que l’on sait qu’un poste sera à pourvoir d’ici un an, un comité de sélection se réunit pour entamer un processus de recherche.
  • Les organes de sélection chargés du recrutement doivent procéder à une évaluation à mi-parcours pour tous les ombudsmans qu’ils ont élus respectivement. Un mécanisme de destitution doit être prévu si l’ombudsman ne s’acquitte pas de son mandat.
  • L’identité autochtone de tous les ombudsmans sera confirmée au terme d’un processus de vérification rigoureux, ainsi que celle des personnes, des organisations et des gouvernements autochtones qui participent au processus de sélection pour éviter toute fraude d’identité.

Recommandation : Un mandat en soutien à la justice

  • Les ombudsmans doivent faire le tri des demandes d’assistance, les traiter, mener des enquêtes, offrir des services de médiation, surveiller, protéger et faire avancer les droits et, s’il y a lieu, recommander des modifications aux lois, aux politiques, aux pratiques et aux procédures, ou recommander la mise en place d’autres mesures correctives afin d’éviter toute violation des droits à l’avenir. Le changement transformationnel nécessitera une approche pangouvernementale de la part de l’ensemble des ministères, organismes, conseils, commissions et autres organes, y compris toute société d’État mère.
    • Un spécialiste principal autochtone des FFADA2E+ et un spécialiste principal autochtone des personnes 2ELGBTQQIA+ doivent être présents dans les bureaux nationaux et régionaux. Ces postes viseront notamment à améliorer la réponse du système de justice pénale aux cas de FFADA2E+.
    • Les modèles autochtones de résolution des conflits, comme la médiation, la justice réparatrice et les cercles de discussion, doivent être offerts tout au long du processus.
    • Ultérieurement, lorsque le tribunal sera établi, les questions que les ombudsmans ne sont pas en mesure de résoudre dans un délai approprié doivent être renvoyées devant un tribunal, y compris certaines ordonnances exécutoires comme les frais à l’encontre des gouvernements.
  • L'appel à la justice 1.10 peut être placé sous le mandat du Bureau national des droits des Autochtones et des droits de la personne, qui peut chaque année faire rapport au Parlement sur la mise en œuvre des appels à la justice de l’Enquête nationale.
  • Toutes les lois et normes relatives aux droits de la personne doivent être interprétées à la lumière de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, de la Déclaration des droits de l’enfant des Nations Unies, de la loi fédérale et des traditions juridiques autochtones, y compris les récits transmis oralement, conformément à l’appel à la justice 1.2(v). Les ombudsmans doivent tenir compte de toutes les lois pertinentes relatives aux droits des Autochtones et aux droits de la personne.
  • À l’avenir, les rapports sur l’application de la LDNU pourraient relever du mandat du Bureau national des droits des Autochtones et des droits de la personne, qui présenterait un rapport annuel au Parlement sur la mise en œuvre de la loi fédérale et du plan d’action.
  • En raison de la demande de services anticipée et pour éviter les difficultés liées à la mise sur pied efficace d’enquêtes et de commissions, la mise en œuvre doit se faire par étapes mais selon un calendrier rigoureux. Début 2024, il faudra donc accorder une attention toute particulière à la loi élaborée conjointement en fonction du cadre législatif provisoire, conforme au présent rapport.
    • Les ombudsmans nationaux doivent être nommés dès que possible et au plus tard le 31 décembre 2024, et les 13 ombudsmans régionaux doivent être nommés dans les six mois suivants et au plus tard le 30 juin 2025. Les bureaux nationaux et régionaux doivent être dotés en personnel et ouverts dans les six mois suivant la nomination des ombudsmans régionaux et au plus tard le 31 décembre 2025.
    • Les travaux d’élaboration, de mise en œuvre et de réalisation par phases doivent être clairement communiqués sur un site Web public mis à jour régulièrement.
  • Les participants autochtones aux séances de mobilisation ont déclaré que les droits collectifs étaient absents des mécanismes de responsabilisation actuels et que, conformément à l’appel à la justice 1.7, les communautés, les établissements, les nations, les conseils tribaux, les organisations autochtones et les organisations de femmes autochtones doivent avoir la possibilité de déposer des plaintes. Cette approche est conforme à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.
    • Les participants autochtones aux séances de mobilisation nous rappellent que nous avons une responsabilité collective les uns envers les autres et que les victimes ne sont pas toujours en mesure de se défendre elles-mêmes. Lorsque les victimes d’une violation des droits le souhaitent, elles doivent pouvoir, au moment du dépôt de leur plainte ou à tout autre moment, désigner une personne ou une entité, comme un gouvernement ou une organisation autochtone, pour réaliser le processus en leur nom. Les gouvernements et les organisations autochtones doivent recevoir les fonds nécessaires pour assumer cette nouvelle responsabilité.
  • L’obligation de référer doit faire partie du mandat des ombudsmans afin que les personnes ayant besoin d’aide soient orientées vers des services, notamment en matière de santé, pour qu’elles ne soient pas laissées pour compte.
  • La loi doit prévoir la possibilité de mener des enquêtes conjointes avec d’autres organismes de responsabilisation, ainsi qu’un mandat d’éducation du public.

Recommandation : Responsabilités, pouvoirs et indépendance des ombudsmans

  • Les ombudsmans et les bureaux doivent être inscrits dans une loi. La loi doit inclure le pouvoir de présenter des motions de sa propre initiative. . De cette façon, les ombudsmans pourraient être proactifs et examiner les problèmes systémiques avant qu’ils n’aboutissent à une crise.
  • Les ombudsmans doivent disposer de pouvoirs d’enquête importants, semblables à ceux des ombudsmans provinciaux et territoriaux. Cela comprend le pouvoir d’exiger la production de documents, notamment de documents qui ne peuvent pas, en principe, être communiqués en vertu de la Loi sur l’accès à l’information. Dans le cadre de leurs enquêtes sur des autorités publiques fédérales relevant de leurs compétences, les ombudsmans doivent être en mesure d’interroger, notamment sous serment, des professionnels et d’autres personnes, y compris des représentants d’institutions qui ont déjà dans le passé violé les droits des Autochtones. Les ombudsmans doivent détenir suffisamment de pouvoir et d’autorité pour exercer leur mandat de manière efficace et disposer d’un système de poids et de contrepoids qui atténue le risque d’abus. Il est essentiel d’équilibrer les dynamiques de pouvoir et de prévenir les abus de pouvoir pour favoriser l’établissement de relations saines et équitables entre les systèmes et les citoyens.
  • Les ombudsmans doivent disposer d’importants pouvoirs d’application de la loi pour contraindre les témoins à comparaître et à fournir des documents ou des dossiers, y compris le pouvoir de faire de l’obstruction un délit, assorti de sanctions en cas de non-respect des règles. Les ombudsmans doivent pouvoir rendre publics les cas où aucune mesure n’est entreprise à la suite de recommandations et peuvent à leur discrétion demander l’application de la loi par l’entremise du tribunal, une fois celui-ci créé.
  • L'indépendance vis-à-vis des gouvernements est essentielle pour que les bureaux d’ombudsman puissent jouer leur rôle et pour faciliter l’établissement de liens de confiance. Les ombudsmans doivent être véritablement indépendants afin d’éviter toute perception d’une quelconque influence politique sur les décisions. Les bureaux d’ombudsman doivent être indépendants des gouvernements, à l’instar du Bureau du vérificateur général et du Bureau du directeur parlementaire du budget. Il convient de prendre en considération les « principes de Venise » à l’égard des ombudsmans, la résolution des Nations Unies sur les ombudsmans et d’autres principes juridiques internationaux qui garantissent l’indépendance de la fonction d’ombudsman.
  • Un cadre législatif, stratégique et de ressources doit refléter les principes de changement de l’Enquête nationale qui comprennent une approche fondée sur l’égalité réelle et la décolonisation, la participation des familles et des survivantes, ainsi que des solutions autodéterminées et des services dirigés par les Autochtones qui reconnaissent les distinctions, sont axés sur la sécurisation culturelle et tiennent compte des traumatismes.
  • Les mesures correctives peuvent inclure des recommandations formulées par les ombudsmans des droits des Autochtones et des droits de la personne qui visent à modifier les politiques, les pratiques, les procédures, la législation ou d’autres mesures correctives afin d’empêcher les violations des droits à l’avenir.

Recommandation : Réflexion sur la gouvernance

« Combiner la gouvernance autochtone traditionnelle avec les fonctions de surveillance d’un bureau d’ombudsman peut aider à trouver un équilibre entre le respect des valeurs culturelles et la responsabilisation dans un contexte juridique et administratif contemporain. »

  • Un Conseil national des ombudsmans doit être officiellement inscrit dans la loi. Le Conseil doit évoluer entre les deux univers et intégrer les principes traditionnels de gouvernance autochtone aux responsabilités du conseil en vertu de la loi canadienne et inclure les familles des FFADA2E+, les organisations de femmes autochtones, les organisations de personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones, les organisations autochtones nationales élues et les organisations nationales d’Autochtones en milieu urbain. Par ailleurs, les nominations doivent être effectuées au moyen d’un processus rigoureux mené par le comité national de sélection sans qu’il soit nécessaire d’être affilié, sur le plan politique ou autrement.
    • Quatre sièges au Conseil national des ombudsmans doivent être réservés aux jeunes, soit pour un jeune des Premières Nations, un jeune Inuit, un jeune Métis et un jeune Autochtone vivant en milieu urbain. À cette fin, les jeunes sont définis comme des personnes âgées de 18 à 29 ans.
    • Les conseils régionaux des ombudsmans doivent guider et soutenir tous les ombudsmans régionaux, les membres du Conseil national des ombudsmans siégeant à titre de membres du Conseil régional des ombudsmans correspondant à leur territoire. La représentation doit être assurée au moyen d’un processus de nomination rigoureux dirigé par le comité régional de sélection sans qu’il soit nécessaire d’être affilié, sur le plan politique ou autrement, et comprendre la représentation des familles et des organisations régionales des FFADA2E+, des organisations régionales de femmes autochtones, des organisations régionales de personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones, des organisations autochtones régionales en milieu urbain et des organisations autochtones régionales élues (organisations provinciales/territoriales). Des sièges pour les jeunes, âgés de 16 à 29 ans, doivent être réservés au Conseil régional des ombudsmans.
    • Les conseils doivent se réunir entre quatre et neuf fois par an, et le mandat d’un conseiller doit être échelonné.
  • Des cercles consultatifs avec des Aînés et des Gardiens du savoir doivent être créés pour chaque bureau d’ombudsman et intégrés officiellement dans la loi afin de conseiller et de soutenir chaque bureau et de puiser dans la diversité et la sagesse des Premières Nations, des Inuit et des Métis, enracinées dans les valeurs autochtones. La reconnaissance des Autochtones vivant en communauté et dans les régions urbaines, rurales et nordiques est nécessaire pour garantir que les systèmes reflètent les expériences de ces populations. Les ombudsmans doivent être en mesure de créer, s’il y a lieu, des cercles consultatifs thématiques dotés d’une expertise particulière se rapportant à des sujets précis, incluant des cercles consultatifs des jeunes.
  • Dès leur conception, la structure de gouvernance et les bureaux d’ombudsman doivent être non patriarcaux et non binaires de par leur nature, et inclure pleinement les personnes 2ELGBTQQIA+. C’est essentiel, car le rôle traditionnel des personnes 2ELGBTQQIA+ est d’apporter une diversité de points de vue et de favoriser l’atteinte d’un équilibre.
  • Les bureaux, les conseils et les cercles des ombudsmans doivent être composés de membres des Premières Nations, Inuits et Métis, y compris des familles et des survivantes, des femmes, des Autochtones vivant en milieu urbain, des personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones et des personnes en situation de handicap. Il faut assurer la parité des genres et l’inclusion dans la composition de l’ensemble du personnel et des membres des conseils et cercles associés.
  • Tous les membres des conseils et des cercles d’ombudsmans, ainsi que les organes de sélection, doivent s’engager à travailler de bonne foi et dans un esprit de collaboration et de consensus. Un processus de résolution des conflits sera établi afin d’assurer un environnement sûr et sain qui respecte le caractère sacré de la responsabilité. Un mécanisme doit être mis en place pour révoquer les membres des conseils et des cercles qui n’assistent pas régulièrement aux réunions, qui ne collaborent pas ou qui ne remplissent pas leur mandat.

Recommandation : Des ressources pour réussir

  • Les ombudsmans nationaux des droits des Autochtones et des droits de la personne et leurs bureaux doivent disposer de ressources appropriées et d’un financement suffisant et permanent, compte tenu de la discrimination systémique historique et continue en matière de financement et conformément aux appels à la justice 1.7 et 1.3. Par « permanent », on entend « de façon continue », « à perpétuité » et « non limité dans le temps ».
    • Le financement doit couvrir entièrement les besoins opérationnels essentiels au-delà des équipes juridiques, d’enquête et de recherche, des services financiers, des ressources humaines, y compris la formation et le développement professionnel, des communications et des technologies de l’information. Le financement des besoins essentiels doit comprendre les honoraires des membres des conseils et des cercles, des Aînés et des Gardiens du savoir, en plus du coût des médiateurs et des facilitateurs spécialisés et d’une équipe de soutien interne en santé, des mesures de soutien en matière de culture, notamment les remèdes et cérémonies, ainsi que des services de traduction et d’interprétation, de garde d’enfants et de transport local qui permettent aux personnes de déposer une plainte.
    • L’approvisionnement autochtone auprès d’entreprises authentifiées des Premières Nations, des Inuit et des Métis doit être pris en considération dans toutes les circonstances et tous les achats.
  • L'indépendance budgétaire vis-à-vis du pouvoir exécutif du gouvernement doit être assurée par les ombudsmans qui présenteront leur demande budgétaire à un comité parlementaire chaque automne pour l’exercice suivant. Le comité parlementaire publiera un rapport contenant le budget recommandé et le ministre des Finances prévoira ce montant dans son budget.
  • Les bureaux d’ombudsman doivent disposer des ressources nécessaires pour offrir des services accessibles en temps voulu, conformément aux délais de réponse des gouvernements inscrits dans la loi. Un financement de base durable permettra d’éviter les retards de certaines entités de responsabilisation.
    • Les bureaux doivent être dotés de ressources suffisantes pour être en mesure de fournir les services de médiateurs et de facilitateurs spécialisés, de soutenir les familles et les survivantes lorsqu’elles déposent une plainte et de les diriger vers des ressources dans la communauté. Cela reconnaît la nécessité d’affecter des ressources aux systèmes existants pour soutenir le travail des ombudsmans et la nécessité de nouer des partenariats avec les organismes existants pour soutenir les femmes des Premières Nations, des Inuit et des Métis, et leurs familles.
    • Les bureaux doivent être tenus de respecter des normes de service, y compris en matière d’assurance de la qualité.

« Si l’on ne dispose pas du soutien nécessaire pour mener à bien le processus, il arrive qu’on baisse tout simplement les bras. »

  • Le plein financement des bureaux nationaux et régionaux doit inclure des crédits de fonctionnement durables et suffisants ainsi qu’un financement pour les coûts de rénovation ou, au besoin, de construction des installations dédiées dans des locaux bien visibles. Cela évitera d’avoir à se battre pour obtenir des fonds ou un endroit dédié au sein des établissements et permettra de disposer d’un espace autochtone affirmé et accessible.
    • Les espaces et les salles de médiation doivent être conçus par les Premières Nations, les Inuit et les Métis et doivent honorer et respecter les pratiques culturelles autochtones, en tenant compte des cérémonies et des protocoles comme la purification, les prières et l’allumage du qulliq.
  • Le Bureau de l’ombudsman doit avoir le financement nécessaire pour acquérir des systèmes de données précis et de grande qualité qui lui permettent de mener des recherches, des analyses et des évaluations et, en fin de compte, de prendre des décisions fondées sur des données probantes et de mettre en œuvre des actions pertinentes et ciblées. Les données doivent être désagrégées et claires, faire l’objet de rapports périodiques et publics, et être accessibles afin d’attirer l’attention sur les violations des droits. Une base de données nationale est essentielle pour permettre au personnel et aux décideurs politiques d’examiner les tendances ou les caractéristiques des plaintes et d’en dresser un portrait pour l’ensemble du pays. Les données nationales doivent mettre en évidence les disparités régionales et, en fin de compte, permettre d’y remédier et de mesurer l’ampleur du changement transformateur.
    • Les ombudsmans doivent recueillir des données sur les FFADA2E+ et sur la traite de personnes, ainsi que d’autres ensembles de données ayant une incidence sur les femmes et les personnes 2ELGBTQQIA+ dans l’ensemble des territoires, et en faire le suivi. Ces données recueillies peuvent servir à établir une base de données nationale sur les FFADA2E+ au Bureau national des ombudsmans des droits des Autochtones et des droits de la personne. Elles peuvent comprendre des données fondées sur le genre concernant l’ampleur et la prévalence de la violence. Les données agrégées doivent être publiques pour assurer le suivi des progrès réalisés. Il s’agit d’un mécanisme de responsabilisation supplémentaire.
    • L'appel à la justice 1.10 peut être intégré au Bureau national des ombudsmans des droits des Autochtones et des droits de la personne, qui fera rapport chaque année au Parlement sur la mise en œuvre des appels à la justice de l’Enquête nationale.
    • À l’avenir, les rapports sur l’application de la LDNU pourraient également relever du Bureau national des ombudsmans des droits des Autochtones et des droits de la personne, qui ferait rapport chaque année au Parlement sur la mise en œuvre de la loi fédérale et du plan d’action.

Recommandation : Accueillir nos proches

« Il est important d’établir un lien amical et humain au moment de recevoir la plainte, afin que les gens soient traités comme des clients et non comme de jeunes enfants qui se font dire de se calmer. »

  • Les bureaux des ombudsmans doivent être accessibles, sans obstacle, et les services doivent être offerts en langues autochtones, y compris les documents écrits. Il doit être facile de communiquer avec les bureaux des ombudsmans, notamment par téléphone, par courriel, par texto et par d’autres technologies au fur et à mesure de leur développement. Le processus de réception des plaintes doit nécessiter un soutien pour toute formalité administrative. Les sites mobiles et ponctuels qui offrent des services doivent disposer de ressources égales.
  • La réception des plaintes doit se faire dans un environnement chaleureux et accueillant pour accompagner les personnes et les familles tout au long du processus, notamment en vulgarisant le langage technique. Puisque les traumatismes intergénérationnels ne sont pas bien compris, les services doivent être axés sur la personne et tenir compte des traumatismes afin d'éviter que ces personnes aient à se remémorer leurs traumatismes si ce n’est pas nécessaire. Il convient également d’apporter un soutien holistique par l’intermédiaire d’organisations autochtones qui doivent elles aussi disposer d’un financement suffisant, conformément aux appels à la justice 1.3, 1.8 et 2.3.
  • La portabilité des droits signifie que toute personne des Premières Nations, des Inuit ou des Métis peut s’adresser au Bureau de l’ombudsman dans la région où elle réside et recevoir les services dont elle a besoin. Les protocoles et les pratiques de chaque nation et de chaque personne autochtones doivent être respectés, quel que soit leur lieu de résidence.
  • Les bureaux d’ombudsman doivent disposer de mécanismes de signalement sûrs confidentiels et accessibles de manière anonyme, afin que les défenseurs des droits ne soient pas pris pour cible et ne subissent pas de représailles.
  • Les bureaux nationaux et régionaux doivent être ouverts plus longtemps en semaine ainsi que pendant la fin de semaine, afin de répondre aux besoins des citoyens des Premières Nations, des Inuit et des Métis.
  • Il ne doit pas y avoir de prescription pour le dépôt d’une plainte, sachant qu’il faut parfois plusieurs années pour surmonter un traumatisme et être en mesure d’en parler. Toutefois, il est entendu que les ombudsmans peuvent ne pas être en mesure d’enquêter sur une affaire trop ancienne pour faire l’objet d’une enquête raisonnable et fiable.

Recommandation : Recrutement et personnel

  • Les ombudsmans doivent être autochtones, respectés, dignes de confiance et intègres. Les candidats retenus doivent accorder une place importante à leur culture, tout en comprenant que les systèmes et structures coloniaux, comme les pensionnats et les externats, la « rafle des années 1960 » et le système de protection de l’enfance, ont privé des générations de Premières Nations, d’Inuit et de Métis de leurs cultures et de leurs connaissances traditionnelles.
  • Le processus d’embauche doit être transparent et fondé sur les antécédents professionnels et les réalisations, les compétences et les qualifications, y compris les antécédents en matière de création de changements systémiques et structurels. Bien qu’ils doivent posséder des connaissances sur les droits de la personne et les droits des Autochtones, les ombudsmans ne doivent pas nécessairement être des juristes. Tant les programmes d’études officiels que l’apprentissage informel doivent être respectés.
  • Outre l’expertise en matière de droits des Autochtones et de droits de la personne, les bureaux d’ombudsman doivent être composés de personnes dotées de compétences en matière d’équité et de justice naturelle, d’analyse et d’évaluation des programmes et des services, et ayant des connaissances dans des domaines clés comme la santé, le bien-être mental et les toxicomanies, les services de police et le système judiciaire, les services sociaux, y compris les services à l’enfance et à la famille, la violence conjugale et familiale et la violence sexuelle, le logement, l’éducation et les handicaps. L’expérience vécue et la maîtrise d’une langue autochtone constituent un atout à l’embauche.
  • Le Bureau national des ombudsmans doit représenter largement chaque région et veiller à ce que les femmes et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones soient bien représentées. En raison de l’importance de cette large représentation, il est nécessaire d’envisager le recours au travail à distance, dans la mesure du possible et en fonction des besoins opérationnels.
  • Les bureaux d’ombudsman doivent sélectionner, embaucher et former du personnel plutôt que de recevoir des services de soutien de la part du Service canadien d’appui aux tribunaux administratifs. La formation doit inclure des thèmes comme l’analyse fondée sur le genre propre aux Autochtones et le soutien au bien-être du personnel, y compris des stratégies visant à atténuer les traumatismes indirects. Un processus de résolution des conflits sera établi afin d’assurer un environnement de travail sûr et sain.
    • Avant l’embauche, il est nécessaire de procéder à des vérifications de sécurité, y compris la vérification d’antécédents de maltraitance envers des enfants et des personnes vulnérables. Les membres d’une profession réglementée doivent également être en règle.
    • L’identité autochtone sera confirmée au terme d’un processus de vérification rigoureux.

Recommandation : Transparence et rapports en soutien à la transformation

  • Les quatre ombudsmans nationaux doivent préparer un rapport annuel conjoint à l’intention des dirigeants, des organismes et des défenseurs des droits, du vérificateur général du Canada et du Parlement, avec un rapport pour chaque région. Le rapport annuel reflétera les principaux enjeux et les principales données et recommandations à l’échelle nationale et régionale, et fera le suivi des progrès réalisés depuis l’établissement des objectifs. Le rapport doit être disponible en langues autochtones. Le rapport annuel et tous les rapports spéciaux doivent, en vertu de la loi, être systématiquement renvoyés à un comité parlementaire en vue d’être examinés et soumis à des audiences.
  • L’ombudsman peut présenter un rapport spécial sur toute question urgente qui, à son avis, ne devrait pas être reportée au prochain rapport annuel.
    • Les rapports annuels et spéciaux doivent être transmis aux Nations Unies notamment au Rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, au Rapporteur spécial des Nations Unies sur la violence contre les femmes et les filles, au Rapporteur spécial des Nations Unies sur la traite des êtres humains et à l’expert indépendant des Nations Unies chargé de la question de la protection contre la violence et la discrimination liées à l’orientation sexuelle et l’identité de genre, ainsi qu’à d’autres organismes internationaux de défense des droits de la personne, comme l’Organisation des États américains et l’ambassadeur canadien en matière de relations autochtones.
  • Les quatre ombudsmans nationaux doivent produire un bulletin annuel en langage clair, indiquant les changements apportés et la personne ou l’entité qui en a été tenue responsable. Le bulletin doit être offert en langues autochtones et comporter un graphique informatif.
  • Les ombudsmans de chaque région doivent organiser un forum annuel sur la responsabilisation, semblable aux forums organisés par Yukon Advisory Committee, afin de faire part des progrès et fournir l’opportunité aux leaders de répondre directement aux questions des citoyens inuits, métis et des Premières Nations, Inuits et Métis et d’autres personnes.
  • La responsabilité systémique doit être intégrée à tous les processus des ombudsmans et de leurs bureaux pour veiller à ce que les questions intersectorielles qui ont une incidence sur la sécurité des femmes, des filles et des personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones soient traitées de manière significative, transparente et responsable.

Prochaines étapes: « Ça nous concerne tous »

En 2024, cela fera cinq ans que le rapport final et les appels à la justice de l’Enquête nationale ont été déposés, et neuf ans depuis que la Commission de vérité et réconciliation du Canada a demandé au moyen de l’appel à l’action 41 la tenue d’une enquête publique sur les causes de la victimisation disproportionnée des femmes et des filles autochtones, et sur les solutions à y apporter. L’appel à la justice 1.7 constitue une solution fondamentale. Pour honorer les familles et les survivantes, il faut le mettre en œuvre avant qu’une autre année ne s’écoule.

Dans le cadre de la mobilisation entourant l’appel à la justice 1.7, les participants des Premières Nations, Inuits et Métis ont insisté sur la nécessité d’une réponse systémique, car l’échec du Canada dans sa relation avec les Autochtones est de nature systémique. Pendant la mise en œuvre de l’appel à la justice 1.7, les travaux relatifs aux autres appels à la justice doivent progresser simultanément. La mise en œuvre des appels à la justice doit se faire parallèlement aux réponses fédérales, provinciales et territoriales à la récente pandémie, avec la même rigueur, la même rapidité et le même sentiment d’urgence.

Avancer sur la mise en œuvre

Pour aller de l’avant, le gouvernement du Canada a déjà prévu certains investissements budgétaires. Sans compter les dépenses effectuées en 2023-2024, les affectations engagées s’établissent à :

  • 1,6 million de dollars sur deux ans, à compter de 2023-2024, pour appuyer la représentante spéciale du ministre chargée de fournir des conseils et des recommandations sur la création d’un poste d’ombudsman des droits des Autochtones et des droits de la personne (appel à la justice 1.7).
  • 2,2 millions de dollars sur deux ans, à compter de 2023-2024, pour établir un mécanisme de surveillance afin de suivre les progrès de la mise en œuvre et d’en rendre compte (appel à la justice 1.10).
  • 2,5 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2023-2024, pour faciliter et coordonner le travail visant à faire progresser le Plan d’action national, en établissant une table permanente fédérale-provinciale-territoriale-autochtone sur les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQI+ autochtones disparues et assassinées. Cette table servira de tribune pour prendre des mesures dans les domaines où les rôles et les responsabilités sont partagés en ce qui concerne les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones disparues et assassinées, notamment en accordant la priorité à la façon de lancer une « alerte Robe rouge ».
  • 95,8 millions de dollars sur cinq ans, à compter de 2023-2024, et 20,4 millions de dollars par année par la suite seront accordés pour aider les familles autochtones à avoir accès à de l’information sur leurs proches disparus et assassinés, et pour améliorer les services aux victimes. Ce financement permettra de renouveler les programmes existants et de les élargir pour y inclure l’aide aux familles de victimes autochtones 2ELGBTQQIA+ de sexe masculin.
  • 2,2 milliards de dollars sur cinq ans, depuis 2021-2022, et 160,9 millions de dollars par la suite, annoncés dans le budget de 2021,Note de bas de page 29 pour accélérer les travaux du Plan d’action national en réponse aux appels à la justice de l’Enquête nationale et aux appels à l’action de la Commission de vérité et réconciliation.

Calendrier de mise en œuvre suggéré

D’ici le 31 mars 2024 :

  • RCAANC établira un Comité de mise en œuvre et commencera à élaborer un calendrier de communication avec le public au moyen d’une page Web dédiée et facile à trouver. Le Comité de mise en œuvre doit être composé de hauts fonctionnaires fédéraux provenant de ministères clés et de représentants d’organisations autochtones nationales élues, de familles de FFADAE2+, d’organisations de femmes autochtones, d’organisations de personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones et d’organisations nationales d’Autochtones vivant en milieu urbain.
    • Le Comité de mise en œuvre doit être coprésidé par un membre du comité autochtone et un haut fonctionnaire fédéral de RCAANC occupant un poste de sous-ministre adjoint ou une fonction supérieure.
    • Le Comité doit comprendre au moins trois membres des Premières Nations, trois membres inuits et trois membres métis, sans lien avec le gouvernement, considérés comme des décideurs de haut niveau au nom de l’organe qu’ils représentent.
  • Par l’entremise de tables rondes qui débuteront en mars, il devra élaborer conjointement des mesures législatives sur une période de trois mois, s’inspirant du cadre législatif provisoire, avec des représentants d’organisations et d’entités qui se sont déjà grandement investies. Il devra préparer la présentation du projet de loi à la Chambre des communes.
  • Respectant les processus, RCAANC partagera ce rapport à l’attention de l’Assemblée des Premières nations par l’entremise du mécanisme bilatéral permanent, de Inuit Tapiriit Kanatami par l’entremise du Comité de partenariat entre les Inuit et la Couronne, et au Ralliement national des Métis par l’entremise du mécanisme bilatéral permanent. De plus, il est recommandé que RCAANC partage ce rapport par l’entremise du Forum intergouvernemental des dirigeants pour discussion avec les Premières nations indépendantes.
  • Le Comité de mise en œuvre définira un budget en amont de sa présentation, en se basant sur les budgets des bureaux des ombudsmans provinciaux et territoriaux et des entités fédérales de responsabilisation, comme la Commission canadienne des droits de la personne.
  • Il faudra commencer la mobilisation sur la création d’un tribunal national des droits des Autochtones et des droits de la personne, en tenant compte de tout ce qui a été dit lors des séances de mobilisation sur l’appel à la justice 1.7.

D’ici le 30 juin 2024 :

  • Il faudra présenter le projet de loi à la Chambre des communes.
  • RCAANC formera le Comité national de sélection, qui pourra être composé de membres des Premières Nations, des Inuit et des Métis du Comité de mise en œuvre, et commencera à accepter les candidatures pour les quatre postes d’ombudsman nationaux avec le soutien de professionnels autochtones en recrutement de cadres.
  • Le Comité de mise en œuvre communiquera les progrès de son travail sur un site Web public.

D’ici le 31 décembre 2024 :

  • Le Comité national de sélection sélectionnera les quatre ombudsmans nationaux et recommandera au Parlement de les nommer.
  • Le Comité national de sélection et les ombudsmans nationaux créeront le Conseil national des ombudsmans qui sera nommé par le ministre de RCAANC. On s’attend à ce que certains membres du Comité national de sélection deviennent des membres du Conseil national des ombudsmans.
  • RCAANC établira 13 comités régionaux de sélection avec l’aide du Comité de sélection national et des ombudsmans nationaux.
  • Les ombudsmans nationaux commenceront à rédiger des politiques internes et à embaucher du personnel, en commençant par le recrutement d’un directeur général et de professionnels des ressources humaines pour accélérer l’embauche au sein des bureaux nationaux et régionaux.
  • Les ombudsmans nationaux, avec l’appui de RCAANC et du gouvernement fédéral, commenceront à chercher des bureaux dans la région de la capitale nationale et dans chaque province et territoire.

D’ici le 30 juin 2025 :

  • Les comités régionaux de sélection et les représentants des ombudsmans nationaux choisiront les 13 ombudsmans et travailleront avec ces derniers pour recommander au Parlement de les nommer.
  • Il faudra continuer d’embaucher du personnel à l’échelle nationale et former une unité dédiée à l’appel à la justice 1.10 pour suivre les progrès de l’Enquête nationale sur les appels à la justice, et éventuellement une unité dédiée à la LDNU. Il faudra commencer à embaucher du personnel en région.
  • Le Comité régional de sélection et les ombudsmans régionaux devront mettre sur pied des conseils régionaux des ombudsmans avec le soutien des ombudsmans nationaux.
  • Les ombudsmans nationaux devront créer un Cercle consultatif national des Aînés et des Gardiens du savoir, et les ombudsmans régionaux, avec l’aide de leurs homologues nationaux, devront créer des cercles consultatifs régionaux des Aînés et des Gardiens du savoir.

D’ici le 31 décembre 2025 :

  • Les bureaux nationaux et régionaux devront ouvrir et être dotés en personnel.
  • À la suite de la mise en œuvre réussie des bureaux d’ombudsman nationaux et régionaux relevant des domaines de compétence fédérale, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux seront encouragés à travailler ensemble conformément à l’objectif et à la philosophie de l’appel à la justice 1.7 afin de trouver des solutions adaptées à leur province ou territoire.

Conclusion

La création de postes d’ombudsman des droits des Autochtones et des droits de la personne est un premier pas pour mettre fin aux inégalités dans les programmes et les services gouvernementaux qui mènent à la violation des droits des Autochtones et des droits de la personne. Les principes de responsabilisation, d’égalité réelle, de changement systémique et de justice réparatrice doivent être intégrés au travail des ombudsmans qui est dirigé par les Autochtones, décolonisé, axé sur la sécurisation culturelle et qui tient compte des traumatismes.

L’appel à la justice 1.7 découle de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, des témoignages et des vérités des familles et des survivantes. Les femmes, les filles et les personnes 2ELGBTQQIA+ autochtones ont le droit de vivre en sécurité et en paix. Les peuples autochtones ont le droit de vivre dans un Canada plus juste. La création de postes d’ombudsman des droits des Autochtones et des droits de la personne est une étape nécessaire pour répondre à la crise nationale marquée par les manquements et les inégalités qui existent depuis la Confédération. La tâche est immense, et un calendrier ambitieux a été établi.

« L’appel à la justice 1.7 est extrêmement pertinent. »

« C’est une idée importante qui aurait dû être mise en œuvre il y a longtemps. »

Traditionnellement, les Haudenosaunee utilisaient des ceintures en wampum pour marquer les ententes et les rapports entre les peuples. Les ombudsmans des droits des Autochtones et des droits de la personne et leurs bureaux peuvent être un pont, un wampum à deux rangs, permettant de relier deux mondes et deux visions du monde. Le symbole de l’infini des Métis reflète également l’union de deux cultures. Le concept de l’ombudsman est l’occasion d’utiliser un moyen non autochtone pour créer une entité de responsabilisation non coloniale capable de réellement être efficace dans les deux mondes.

Les participants autochtones ont suggéré de commencer la mise en œuvre de l’appel à la justice 1.7 par une cérémonie visant à rétablir et à renouveler la relation actuelle du Canada avec les Premières Nations, les Inuit et les Métis. Une telle cérémonie ouvrirait une nouvelle voie pour le Canada, fondée sur les droits des Autochtones et les droits de la personne, où la justice et l’égalité réelle seraient à portée de tous.

Nous concluons ce rapport par les propos d’un participant aux séances de mobilisation qui nous rappelle la fragilité du lien de confiance et les attentes envers l’appel à la justice 1.7 :

« Il ne s’agit pas d’avoir une foi profonde, mais de nourrir de grands espoirs. »

L’année 2024 pourrait être celle où la foi est honorée et où les espoirs se concrétisent.

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