Évaluation du Programme pour la prévention de la violence familiale

Rapport final
Mai 2017
Numéro de projet : 1570-7/10024

Format PDF (462 Ko, 66 pages)

 

Table des matières

Liste des acronymes

AANC

Affaires autochtones et du Nord Canada

CNAVF

Cercle national autochtone contre la violence familiale

GRC

Gendarmerie royale du Canada

PPVF

Programme de prévention de la violence familiale

SCHL

Société canadienne d’hypothèques et de logement

SEF

Services à l’enfance et à la famille

 

 

Sommaire

Évaluation du Programme pour la prévention de la violence familiale

Le sommaire suivant donne un aperçu des principaux éléments du rapport d'évaluation du Programme pour la prévention de la violence familiale (PPVF). Le lecteur est prié de se référer à la table des matières pour consulter un sujet particulier abordé dans le rapport.

Affaires autochtones et du Nord Canada (AANC) finance des refuges pour les femmes autochtones depuis la fin des années 1970. Ce soutien était offert sous la forme de remboursements versés aux femmes autochtones qui utilisaient les services de refuges provinciaux. Le PPVF a été créé en 1988 dans le cadre d'un partenariat pangouvernemental, soit l'Initiative de lutte contre la violence familiale. La présente évaluation réalisée par la Direction générale de l'évaluation, de la mesure du rendement et de l'examen (DGEMRE) d'AANC a révélé que les travaux visant à renforcer le réseau de 41 refuges (qualité des services fournis) constituent une priorité importante depuis la dernière évaluation. Toutefois, l'on pourrait accroître l'efficacité des programmes de prévention en assurant une collaboration et en mettant l'accent systématiquement sur l'apprentissage ainsi qu'en élargissant la portée des approches de prévention, principalement à petite échelle, qui étaient appuyées par le PPVF jusqu'à maintenant.

Le PPVF est…

l'un des cinq programmes sociaux qu'AANC appuie pour faire en sorte que les femmes, les hommes et les enfants autochtones participent activement au développement social de leur communauté.

Cet objectif ultime s'appuie sur un résultat à moyen terme – propre aux Services à l'enfance et à la famille (SEF) et au PPVF – qui consiste principalement à assurer la sécurité des hommes, des femmes et des enfants dans les réserves.

Les responsables du PPVF se considèrent comme des agents de financement des besoins des collectivités et ils ne participent pas à la prise de décisions concernant le fonctionnement quotidien des refuges ainsi que la conception et la mise en œuvre de programmes de prévention. Le personnel du PPVF, principalement dans les bureaux régionaux d'AANC, joue un rôle important en examinant les dizaines de demandes de financement de projets de prévention reçues chaque année.

Le présent rapport fait état des constatations d'une évaluation menée par la DGEMRE d'AANC. Cette évaluation porte sur la pertinence du PPVF, les liens avec les partenaires fédéraux, les nouvelles considérations et la capacité des refuges et du personnel. Il est également question des besoins des clients ainsi que de la conception et de l'exécution des programmes de prévention. Finalement, le rapport fait état des liens possibles avec d'autres évaluations d'AANC.

Le programme assure le financement et la direction :

  1. de l'exploitation des refuges – les coûts de dotation, d'infrastructure et de fonctionnement quotidiens liés à l'exploitation de 41 refuges pour femmes ou maisons d'hébergement situés dans des collectivités de Premières Nations ou à proximité de celles-ci;
  2. des programmes de prévention – les régions lancent un appel de propositions annuel pour des activités dans les réserves, tandis que l'administration centrale d'AANC lance un appel de propositions national annuel hors des réserves; les coûts comprennent les dépenses liées aux activités ainsi que les honoraires des formateurs et des conseillers;
  3. de la mobilisation et du dialogue politique – avec les responsables de l'Initiative de lutte contre la violence familiale, des groupes d'intérêt fédéraux, provinciaux et territoriaux, des homologues provinciaux et des responsables des programmes d'AANC.

L'évaluation repose sur les sources de données suivantes :

  • analyse documentaire;
  • examen des documents du programme;
  • analyse des données administratives et financières;
  • sondage en ligne mené auprès des directeurs, des employés et des clients de refuges;
  • entrevues d'informateurs clés; et
  • visites dans quatre collectivités (Akwesasne, Mishkeegogamang [Ontario, Québec], Fort Qu'Appelle [Saskatchewan], Samson et Sucker Creek [Alberta]).

Résultats et pertinence

Le programme demeure pertinent dans la foulée du lancement de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (2016), de la publication des résultats de la Commission de vérité et réconciliation (2015) et de l'incidence de plus en plus grande – dans les réserves – de la violence familiale au sein des collectivités de Premières Nations. Depuis la dernière évaluation (2012), AANC a réalisé d'importants progrès sur le plan de la consolidation de l'aide financière fournie à 41 refuges pour les femmes partout au pays ainsi que de l'offre de séances de formation additionnelles aux directeurs et au personnel (grâce aux investissements annoncés dans le budget de 2016). Le budget de 2016 permettra également la construction de cinq nouveaux refuges sur trois ans.

Les travaux d'AANC sont indépendants de l'exploitation des refuges, de sorte que les conseils de bandes et les directeurs de refuges sont responsables des principales décisions opérationnelles relatives à la dotation, à la rémunération et aux normes de services pour les clients.

Capacité d'hébergement et utilisation des refuges

L’évaluation a révélé que les clients – en particulier dans les collectivités éloignées – ayant des problèmes de dépendance ou des troubles de santé mentale ainsi que des besoins particuliers en matière d'hébergement ont souvent recours aux services des refuges plus longtemps. Les hommes aussi peuvent être victimes d'actes de violence de leur partenaire, même si leur gravité n'est pas comparable à celle dont les femmes sont victimes. Selon un sondage en ligne mené auprès de clients de refuges, trois utilisateurs sur quatre ont déjà eu recours aux refuges d'AANC au moins une fois.

L'évaluation a révélé que de nombreuses femmes se rendent dans de grands centres urbains hors des réserves pour recevoir des services financés par le gouvernement provincial. Cela remet en question l'interaction entre le réseau de refuges d'AANC et divers fournisseurs de services et il faudra déterminer si une approche d'élargissement de la couverture géographique pourrait être la solution.

L'évaluation a aussi révélé, d'après le continuum de services de prévention de la violence familiale, que la majorité des services du PPVF font partie de la catégorie des services d'intervention d'urgence. a grande majorité des clients, des employés et des directeurs de refuges ainsi que des fournisseurs de services de santé ont indiqué qu'il est nécessaire d'offrir davantage de refuges de transition ou de deuxième étape aux personnes en situation de crise ainsi que de programmes de prévention et de traitement pour les hommes et les garçons.

Conception et exécution d'un programme de prévention

Il sera difficile d'ajouter des tâches de prévention aux responsabilités des directeurs et des employés parce qu'ils consacrent déjà beaucoup de temps aux clients qui ont besoin d'un refuge ou d'aide en situation de crise. Par conséquent, l'évaluation indique qu'il faudra mettre davantage l'accent sur la dotation et le soutien pour l'ensemble des activités de prévention du programme et redéfinir la structure de financement générale pour appuyer davantage la prévention et la mobilisation dans la communauté.

Le PPVF a grandement contribué à la mobilisation des intervenants communautaires dans le cadre de son processus d'appel de propositions, mais il demeure inefficace en ce qui concerne le nombre de propositions examinées puisque les fonds mis à la disposition des collectivités sont très limités. Il incombe aux bureaux régionaux d'AANC de prendre des décisions concernant la prévention. L'évaluation a permis de constater qu'il existe une panoplie de mécanismes de prestation de services de prévention, mais que les modèles globaux, en particulier ceux qui sont utilisés par les conseils de prévention de l'Alberta et du Manitoba, favorisent davantage l'acquisition de connaissances et de compétences chez les agents de prévention.

Les efforts déployés pour favoriser la participation d'organisations hors réserve au moyen d'un appel de propositions distinct sont considérés comme une approche positive. Il existe très peu de données sur les effets des programmes de prévention dans les collectivités parce que la majorité des initiatives ont une portée limitée et que l'on dispose de peu de données comparables recueillies à la source.

Recommandations issues de l'évaluation

  1. Renforcer les activités de prévention, plus précisément :
    1. dresser un inventaire des modèles existants d'exécution de programmes de prévention (p. ex. direction par une collectivité de Première Nation, un conseil tribal ou d'autres organisations de la société civile, modèle global pour un thème donné) pour favoriser l'adoption de pratiques exemplaires dans chaque région;
    2. mettre l'accent, d'après l'inventaire, sur l'expertise existante pour établir des modèles globaux, semblables à ceux qui sont utilisés en Alberta et au Manitoba, lorsque cela est approprié; et
    3. fournir aux collectivités autochtones et à leurs représentants les outils qui leur permettront de renforcer leur capacité de planification, de mise en œuvre et de supervision pour faire en sorte que les activités de prévention soient efficaces.
  2. Réorienter le PPVF afin qu'il favorise une meilleure l'accessibilité des hébergements de transition dans des régions stratégiques, plus précisément :
    1. accroître les exigences relatives à la reddition de comptes et à la collecte de données pour avoir une meilleure compréhension des niveaux de capacité au sein du réseau de refuges financés par le PPVF; et
    2. envisager la conversion de certains centres de services d'urgence pour qu'ils offrent un hébergement de transition lorsque de nouvelles données sur la capacité des refuges seront disponibles.
  3. Déployer des efforts plus structurés afin de favoriser le mentorat et l'échange de connaissances au sein du réseau appuyé par AANC pour ainsi renforcer la capacité du personnel des refuges de répondre aux différents besoins des membres de la communauté.
  4. Favoriser l'accès des clients autochtones à l'ensemble des services offerts, plus précisément :
    1. miser sur les efforts d'échange d'information existants pour coordonner l'harmonisation des programmes financés par le gouvernement fédéral; et
    2. participer à la mise en correspondance stratégique des services provinciaux et territoriaux.
  5. Évaluer les besoins et élaborer une stratégie de prévention complète pour rejoindre davantage d'hommes et de jeunes hommes au moyen de programmes de prévention adaptés sur le plan culturel.
 

 

Réponse et plan d’action de la direction

Titre du projet : Évaluation du Programme pour la prévention de la violence familiale

Numéro du projet : 1570-7/10024

1. Réponse de la direction

La présente Réponse et plan d'action de la direction pour le Programme pour la prévention de la violence familiale (PPVF) a été élaborée dans le contexte de la réforme des Services à l'enfance et à la famille des Premières Nations (SEFPN). Bien que le PPVF et les SEFPN soient des activités de programmation distinctes à Services aux Autochtones Canada (SAC), il est important de noter que la planification et les engagements pris dans la présente Réponse et plan d'action de la direction ont été élaborés tout en tenant compte de l'évolution continue des SEFPN.

De plus, l'élaboration de la présente Réponse et plan d'action de la direction a été éclairée par l'approche de SAC en matière de planification et d'établissement de rapports, comme en témoignent, par exemple, le Cadre ministériel des résultats et le Profil d'information sur le rendement du PPVF. Plus précisément, la Réponse et plan d'action de la direction ainsi que le modèle logique du programme et la mesure du rendement connexe (p. ex. les indicateurs) sont étroitement liés. La surveillance future du rendement et de l'évolution du programme se fera dans la perspective des mises à jour régulières de la Réponse et plan d'action de la direction au Comité d'évaluation, de mesure du rendement et d'examen du Ministère et dans celle de la mesure du rendement du programme.

2. Plan d'action

Recommandations Mesures Gestionnaire responsable
(titre et secteur)
Dates de début et
de fin prévues

1. Renforcer les activités de prévention, plus précisément :

a) dresser un inventaire des modèles existants d'exécution de programmes de prévention (p. ex. direction par une collectivité de Première Nation, un conseil tribal ou d'autres organisations de la société civile, modèle global pour un thème donné) pour favoriser l'adoption de pratiques exemplaires dans chaque région;

Nous sommes d’accord.

a) Le PPVF de SAC collaborera avec des partenaires comme les collectivités des Premières Nations, les organisations de la société civile, les provinces et territoires ainsi que d’autres programmes fédéraux, pour documenter les pratiques exemplaires en matière de prévention de la violence familiale.

Sous-ministre adjoint

Programmes et partenariats en matière d’éducation et de développement social

 

a) Date de début :
septembre 2018

Achèvement :
septembre 2019

b) mettre l’accent, d’après l’inventaire, sur l’expertise existante pour établir des modèles globaux, semblables à ceux qui sont utilisés en Alberta et au Manitoba, lorsque cela est approprié; et b) Dans le cadre de la documentation des pratiques exemplaires en matière de prévention de la violence familiale (voir le point A ci-dessus), le PPVF recommandera aux intervenants d’explorer la possibilité d’établir des modèles globaux propres aux régions pour les activités de prévention.

b) Date de début :
septembre 2019

Achèvement :
s.o. / continuNote de bas de page 1

c) fournir aux collectivités autochtones et à leurs représentants les outils qui leur permettront de renforcer leur capacité de planification, de mise en œuvre et de supervision pour faire en sorte que les activités de prévention soient efficaces.

c) Travailler avec les organisations soutenues par SAC et les organisations mandatées pour améliorer la capacité du personnel des refuges soutenus par le PPVF dans leurs efforts visant à :

  1. élaborer des outils et des soutiens améliorés ou supplémentaires pour la capacité de planifier, de mettre en œuvre et de superviser des activités de prévention efficaces (en se servant de la documentation des pratiques exemplaires mentionnée au point A ci-dessus).
  2. examiner les collectes de données du programme (c.-à-d. les rapports des bénéficiaires) afin de mettre en évidence les liens entre la planification et la mise en œuvre du programme.

c) i) Date de début :
octobre 2019

Achèvement :
Les dates d’achèvement varient selon les plans de travail des organisations financées par le PPVF.

Le projet du Cercle national autochtone contre la violence familiale (CNACVF), qui vise à améliorer ses outils disponibles en ligne, est un exemple clé dont la date d’achèvement est le 31 mars 2019. Par l’entremise du site Web du CNACVF et des médias sociaux, des forums et des groupes de discussion en ligne nationaux, des outils de recherche tels que des échelles et des indices, des ressources propres aux régions (p. ex. de l’information sur les lois provinciales et les organisations régionales) seront élaborés.

ii Date de début et achèvement :
Chaque année, les données recueillies dans le cadre du programme sont examinées et révisées dans le cadre du cycle d’élaboration du Guide de présentation des rapports du Ministère. L’examen le plus récent a eu lieu à l’été 2018. Il sera terminé en septembre 2018.

2. Réorienter le PPVF afin qu’il favorise une meilleure l’accessibilité des hébergements de transition dans des régions stratégiques, plus précisément :

a) accroître les exigences relatives à la reddition de comptes et à la collecte de données pour avoir une meilleure compréhension des niveaux de capacité au sein du réseau de refuges financés par le PPVF; et

Nous sommes d’accord.

a) Afin de mieux comprendre les niveaux actuels de capacité dans l’ensemble du réseau de refuges financés par le PPVF, le programme met à jour chaque année ses instruments de collecte de données pour mettre en évidence les domaines liés aux niveaux de capacité. Par exemple, le programme recueille de l’information sur les niveaux de capacité (p. ex. les demandes de services d’hébergement et les refus). De tels renseignements contribuent à l’utilisation des pratiques exemplaires et à la documentation des besoins en matière d’hébergement.

Sous-ministre adjoint

Programmes et partenariats en matière d’éducation et de développement social

 
a) Date de début et achèvement : Chaque année, les données recueillies dans le cadre du programme sont examinées et révisées dans le cadre du cycle d’élaboration du Guide de présentation des rapports du Ministère. L’examen le plus récent a eu lieu à l’été 2018. Il sera terminé en septembre 2018.
b) envisager la conversion de certains centres de services d’urgence pour qu’ils offrent un hébergement de transition lorsque de nouvelles données sur la capacité des refuges seront disponibles. b) Le programme collaborera avec les refuges financés par SAC et les organisations associées (p. ex. les Premières Nations) afin d’établir une stratégie pour réaménager des parties des installations d’urgence actuelles lorsque cela est approprié et faisable compte tenu des facteurs contextuels et des ressources actuelles.

b) Date de début :
décembre 2018

Achèvement :
décembere2019

3. Déployer des efforts plus structurés afin de favoriser le mentorat et l’échange de connaissances au sein du réseau appuyé par AANC pour ainsi renforcer la capacité du personnel des refuges de répondre aux différents besoins des membres de la communauté.

Nous sommes d’accord.

Afin d’appuyer l’amélioration continue du mentorat et de l’échange de connaissances parmi le personnel des refuges financés par SAC, le programme utilisera les pratiques exemplaires mentionnées au point 1a ci-dessus afin d’élaborer une approche stratégique qui favoriserait le mentorat et l’échange de connaissances parmi le réseau de refuges soutenus par SAC.

 
 

Date de début :
septembre 2018

Achèvement :
mars 2020

4. Favoriser l’accès des clients autochtones à l’ensemble des services offerts, plus précisément :

a) miser sur les efforts d’échange d’information existants pour coordonner l’harmonisation des programmes financés par le gouvernement fédéral; et

Nous sommes d’accord.

Le PPVF de SAC vise à :

a) i) travailler en étroite collaboration avec Condition féminine Canada (CFC) pour veiller à ce que la Stratégie nationale pour prévenir et combattre la violence fondée sur le sexe tienne compte des perspectives autochtones, car il s’agit d’un groupe cible de la Stratégie. Le premier produit livrable à être appuyé par SAC est le Centre de connaissances (responsabilité de CFC).

ii) assurer une forte représentation de SAC au sein du Groupe de travail fédéral-provincial-territorial sur l’Initiative de lutte contre la violence familiale.

Sous-ministre adjoint

Programmes et partenariats en matière d’éducation et de développement social

 

a) i) Date de début :
La Stratégie a été annoncée en juin 2017.

Achèvement :
automne 2018 (dirigé par CFC)

ii) Les dates de début et d’achèvement ne s’appliquent pas puisque l’Initiative de lutte contre la violence familiale (dirigée par l’ASPC) est en cours.

b) participer à la mise en correspondance stratégique des services provinciaux et territoriaux. b) chercher des occasions de collaborer avec les provinces et les territoires afin d’élaborer un rapport « instantané » documentant les services offerts en matière de protection et de prévention de la violence familiale, qu’ils soient provinciaux, territoriaux ou fédéraux, et leur disponibilité ou proximité pour les clients autochtones. Cet effort appuiera les initiatives visant à améliorer l’accès à ces services.

b) Date de début :
octobre 2018

Achèvement :
octobre 2019

5. Évaluer les besoins et élaborer une stratégie de prévention complète pour rejoindre davantage d’hommes et de jeunes hommes au moyen de programmes de prévention adaptés sur le plan culturel.

Nous sommes d’accord.

Le programme collaborera avec les Premières Nations, d’autres ministères fédéraux et des organisations régionales et nationales qui soutiennent les Autochtones aux prises avec des problèmes de violence familiale afin d’élaborer et de mettre en œuvre une stratégie visant à répondre aux besoins des hommes et des garçons autochtones, qu’ils soient victimes ou auteurs de violence familiale.

Sous-ministre adjoint

Programmes et partenariats en matière d’éducation et de développement social

Date de début :
novembre 2018

Achèvement :
mai 2019

 

 

1. Introduction

1.1 Aperçu

Le présent document est le rapport final de l'évaluation du Programme pour la prévention de la violence familiale (PPVF) d'Affaires autochtones et du Nord Canada (AANC). Cette évaluation a été menée dans le cadre du Plan quinquennal des stratégies d'évaluation et de mesure du rendement (2015) approuvé du Ministère et en conformité avec la Politique sur les résultats de 2016 du Conseil du Trésor. En plus d'orienter la politique, le principal objectif de l'évaluation consiste à déterminer la pertinence et la performance de l'autorisation de programme suivante : Contributions pour le financement, à l'intention des femmes, des familles et des enfants indiens vivant dans les réserves, de services de refuges et de prévention contre la violence familiale adaptés sur le plan culturel.

Le rapport présente des constatations faites au cours des exercices 2012-2013 à 2015-2016. L'évaluation a été réalisée afin de fournir une appréciation crédible, fiable et à jour du PPVF.

Structure du rapport

Le présent rapport comporte six sections. La section 1 présente un résumé de l'approche du gouvernement fédéral en matière de prévention de la violence familiale dans les réserves, ainsi qu'un aperçu du PPVF. La section 2 décrit la méthodologie utilisée pour réaliser l'évaluation. Les sections 3 à 5 présentent les constatations de l'évaluation et la section 6 fait état des recommandations et des conclusions de l'évaluation.

1.2 Contexte fédéral et profil du programme

La violence familiale est un vaste concept qui englobe les mauvais traitements aux enfants, aux jeunes, aux partenaires intimes et aux aînés. Elle couvre l'agression physique, l'intimidation, la violence psychologique et morale, la violence sexuelle, la négligence, les privations et l'exploitation financière. Il s'agit d'un problème social complexe qui a de graves conséquences pour les personnes, les familles et la sociétéNote de bas de page 2.

1.2.1 Contexte fédéral

Les femmes autochtones comptent pour 16 % de toutes les femmes tuées au pays (entre 1980 et 2012) et pour 12 % de toutes les femmes disparues dans les registres officiels; pourtant, elles ne représentent que quatre pour cent de la population canadienneNote de bas de page 3. Le 4 août 2016, le gouvernement du Canada a lancé l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, une enquête indépendante du gouvernement fédéral. La Commission d'enquête doit « se pencher sur les causes systémiques de toutes les formes de violence à l'égard des femmes et des filles autochtones, et faire rapport à cet égard »Note de bas de page 4. Le lancement de l'enquête est une étape importante pour la reconnaissance nationale du cycle de violence et de préjudices que subissent depuis longtemps les femmes et les filles autochtones du Canada, un problème social qui touche les collectivités autochtones dans l'ensemble du pays.

Le 28 juin 2016, Statistique Canada a publié une étude intitulée La victimisation chez les Autochtones au Canada, 2014. Cette étude, dans laquelle l'on conclut que la prévention de la violence familiale dans les collectivités autochtones demeure pertinente, porte principalement sur la prévalence de divers types de victimisation ainsi que sur les caractéristiques des victimes, notamment le sexe, l'âge et d'autres facteurs de risque. L'étude souligne également que le taux global de victimes de violence est 2,2 fois plus élevé chez les femmes autochtones que chez les femmes non autochtones (c.-à-d. 163 incidents par rapport à 74 incidents sur 1 000 personnes). Cette situation est illustrée dans le graphique 1Note de bas de page 5. L'étude souligne qu'avant l'âge de 15 ans, les femmes autochtones sont près de trois fois plus susceptibles que les hommes autochtones de subir des mauvais traitements physiques ou des abus sexuels, soit 14 % par rapport à cinq pour centNote de bas de page 6.

Graphique 1 : Incidents de victimisation déclarés par les Autochtones et les non-Autochtones, selon le type d'infraction, provinces et territoires (taux par 1 000 personnes âgées de 15 ans et plus)

Graphique 1 : Incidents de victimisation déclarés par les Autochtones et les non-Autochtones,  selon le type d'infraction, provinces et territoires (taux par 1 000 personnes âgées de 15 ans et plus)

Remarque : Tous les écarts entre les Autochtones et les non-Autochtones sont significatifs sur le plan statistique, sauf dans le cas des vols qualifiés.
Source : La victimisation chez les Autochtones au Canada, 2014. Étude de Statistique Canada.

Équivalent textuel de la graphique 1 - Incidents de victimisation déclarés par les Autochtones et les non-Autochtones, selon le type d'infraction, provinces et territoires (taux par 1 000 personnes âgées de 15 ans et plus)

Le graphique 1 illustre les incidents de victimisation violents signalés par des Autochtones et des non-Autochtones selon le type d'infraction, par province et territoires (taux par 1000 habitants âgés de 15 ans et plus). En ce qui concerne le nombre « total » d'incidents violents signalés, on compte 163 incidents pour les « Autochtones » et 74 pour les « non-Autochtones ». Pour les « agressions sexuelles », 58 incidents ont été signalés pour les « Autochtones » et 20 pour les « non‑Autochtones ». En ce qui a trait aux « vols qualifiés », 15 incidents ont été signalés pour les « Autochtones » et 6 pour les « non-Autochtones ». Et finalement, pour les « agressions physiques », 90 incidents ont été signalés pour les « Autochtones » et 47 pour les « non-Autochtones ».

 

L'étude révèle également que les femmes autochtones sont au moins deux fois plus susceptibles d'avoir subi ce qu'on peut considérer comme les formes les plus graves de violence conjugale. En effet, plus de 48 % ont déclaré avoir été agressées sexuellement, battues, étranglées ou menacées avec une arme à feu ou un couteauNote de bas de page 7. En outre, dans un rapport d'Amnistie Internationale publié en 2014, l'on souligne que les femmes autochtones du Canada continuent d'être victimes de violence de manière disproportionnéeNote de bas de page 8. Une enquête gouvernementale menée dans les dix provinces en 2009 a révélé que les femmes autochtones sont près de trois fois plus nombreuses que les femmes non autochtones à déclarer avoir été victimes de crimes avec violenceNote de bas de page 9.

Intervention du gouvernement du Canada

D'un point de vue général, le gouvernement contribue à la prévention de la violence familiale dans les collectivités autochtones depuis près de 40 ans. Le tableau 10 de l'annexe B présente un aperçu complet de l'intervention du gouvernement fédéral. Voici certains jalons importants :

  • 1978 : AANC commence à prendre part aux programmes de prévention de la violence familiale en remboursant le coût des refuges de certains gouvernements provinciaux et du gouvernement territorial du YukonNote de bas de page 10.
  • 1988 : lancement de l'Initiative de lutte contre la violence familiale et d'un réseau de soutien de 13 ministères fédéraux.
  • 1998 : Statistique Canada publie sa première étude La violence familiale au Canada.
  • 2016 : de nouveaux fonds sont consacrés à la prévention de la violence familiale dans le budget fédéral :
    • 10,4 millions de dollars sur trois ans pour appuyer la rénovation et la construction de nouveaux refuges pour les victimes de violence familiale dans les collectivités des Premières Nations; et
    • 33,6 millions de dollars sur cinq ans et jusqu'à 8,3 millions par la suite, en fonds supplémentaires destinés à mieux soutenir les refuges pour les victimes de violence familiale vivant dans les collectivités des Premières Nations, y compris des initiatives de formation.

La contribution du gouvernement fédéral à la prévention de la violence familiale, orientée et coordonnée par l'Initiative de lutte contre la violence familiale de l'Agence de la santé publique du Canada, a évoluéNote de bas de page 11. Le tableau 1 présente l'Initiative de lutte contre la violence familiale ainsi que les organismes et les ministères partenaires.

Tableau 1 : Partenariats de l'Initiative de lutte contre la violence familiale

Initiative de lutte contre la violence familiale

  • Prévenir la violence familiale et y répondre :
    • Modifier et adopter des lois pour aider les femmes victimes de violence (ministère de la Justice).
    • Appliquer les lois (Gendarmerie royale du Canada, Sécurité publique).
    • Concevoir des initiatives ciblant les causes fondamentales de la violence familiale, y compris les dépendances, les troubles de santé mentale et les abus intergénérationnels qui touchent les populations autochtones du Canada (Agence de la santé publique du Canada, Santé Canada).
    • Établir et soutenir un réseau de refuges dans les réserves (Programme d'amélioration des maisons d'hébergement de la Société canadienne d'hypothèques et de logement et PPVF d'AANC).
    • Tenir compte de divers facteurs relatifs au sexe et à la culture dans les programmes de sensibilisation communautaires et divers autres outils (Patrimoine canadien, AANC et Condition féminine Canada).

Ministères et organismes partenaires

  • Affaires autochtones et du Nord Canada
  • Condition féminine Canada
  • Société canadienne d'hypothèques et de logement
  • Gendarmerie royale du Canada
  • Santé Canada
  • Ministère de la Justice
  • Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada
  • Emploi et Développement social Canada
  • Sécurité publique
  • Statistique Canada
  • Service Canada
  • Agence de la santé publique du Canada
 

Au fil des ans, le PPVF a évolué pour mieux s'attaquer aux problèmes complexes qui ont une incidence sur la santé et le bien-être des Autochtones. Au cours de la période visée par l'évaluation, le lancement du Plan d'action pour contrer la violence familiale et les crimes violents à l'endroit des femmes et des filles autochtones en 2014 a permis d'accroître le financement du PPVFNote de bas de page 12, faisant passer les affectations budgétaires annuelles à près de 33 millions de dollars par année. Ces fonds additionnels ont contribué à élargir la portée du programme pour ainsi appuyer des initiatives de prévention de la violence familiale hors des réserves (consulter le tableau 10 à l'annexe B).

1.2.2 Objectifs et résultats attendus

Les résultats attendus du PPVF sont établis dans la Stratégie de mesure du rendement – Développement social, sous le résultat stratégique relatif aux personnes. Cette stratégie englobe cinq programmes, y compris le PPVFNote de bas de page 13. La présente évaluation porte principalement sur les résultats immédiats directement liés au PPVF.

Résultats immédiats
  • Les hommes, les femmes et les enfants qui ont des besoins ou qui sont à risque ont accès à des soutiens et à des services de prévention et de protection, et ils les utilisent.
  • L'efficacité des projets de prévention en cours est optimisée.
  • La capacité actuelle d'accueil des maisons d'hébergement est suffisante pour l'atteinte des objectifs du PPVF.
  • L'efficacité des partenariats et de la coordination est optimisée.

La portée de l'évaluation a été élargie de façon à examiner les liens avec les Services d'aide à l'enfance et à la famille pour le résultat intermédiaire : Les hommes, les femmes et les enfants sont en sécuritéNote de bas de page 14.

1.2.3 Gouvernance du programme, bénéficiaires et intervenants clés externes

Le PPVF est géré par le Secteur des programmes et des partenariats en matière d'éducation et de développement social de la Direction générale de l'enfance et de la famille. AANC finance les refuges des Premières Nations dans chaque province et au Yukon. Ces fonds servent à soutenir le fonctionnement des refuges qui fournissent principalement des services aux femmes et aux enfants autochtones dans les réserves.

Depuis 1992, en vertu de l'entente relative au financement et à l'administration des services sociaux conclue avec la province de l'Alberta, AANC peut rembourser les coûts liés aux services fournis par des refuges hors réserve financés par le gouvernement provincial à des résidents de réserves, tandis que le gouvernement provincial assume les frais quotidiens d'hébergement de toutes les femmes qui fréquentent un refuge situé dans une réserve sans être résidentes de cette réserve.

Au Yukon, comme il n'y a pas de réserves, le PPVF rembourse au gouvernement territorial les dépenses liées aux services de refuges. Dans ce territoire, l'on considère que tous les clients autochtones résident habituellement dans une réserve et ils ont accès à tous les refuges et aux services qu'ils offrent.

Principaux intervenants externes

Voici certains intervenants externes d'AANC.

  • Partenaires de l'Initiative de lutte contre la violence familiale du gouvernement fédéral (tableau 1) : des consultations sont en cours avec la Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL) concernant les propositions de financement de refuges; avec Santé Canada et l'Assemblée des Premières Nations concernant le cadre du continuum du mieux-être mental des Premières Nations et avec Condition féminine Canada concernant la stratégie contre la violence fondée sur le sexe.
  • Bénéficiaires admissibles aux fonds du PPVF : les Premières Nations, les conseils tribaux, d'autres regroupements de Premières Nations approuvés par le chef et le conseil ou encore une autorité, un conseil, un comité ou une entité autorisé à agir pour le compte des bénéficiaires initiaux afin d'offrir des services de protection contre la violence familiale et de prévention de cette violence.
  • Cercle national autochtone contre la violence familiale (CNAVF) : un organisme national autochtone auquel le PPVF fournit un financement de fonctionnement et de projet. Son mandat consiste à fournir un soutien aux directeurs et au personnel de première ligne des maisons d'hébergement financées par AANC.
Bénéficiaires
  • Les hommes, les femmes et les enfants autochtones victimes de violence familiale qui vivent dans une réserve ou hors réserve.

1.2.4 Ressources du programme

Le PPVF comporte deux volets importants (protection et prévention) auxquels des fonds sont consacrés.

  • Protection (approximativement 75 % du budget) : financement des activités courantes d'un réseau de refuges offrant des services aux femmes et aux enfants vivant dans les réserves des provinces et au Yukon. L'enveloppe de financement pour la protection comprend les salaires des employés et des directeurs de refuges qui assurent le fonctionnement du réseau d'installations d'AANC et dont les tâches régulières consistent notamment à fournir divers niveaux de services de prévention dans un refuge ou dans la collectivitéNote de bas de page 15.
  • Prévention (approximativement 25 % du budget) : financement destiné aux projets annuels ou pluriannuels de prévention pour les collectivités, tels que les campagnes de sensibilisation du public, les conférences, les ateliers, les séminaires sur la gestion du stress et de la colère, les groupes de soutien et l'évaluation des besoins des collectivités à l'intérieur et à l'extérieur des réserves.

Le rapport sur les plans et les priorités d'AANC pour 2016-2017 indique qu'il y a 12 ressources humaines (équivalents temps plein). Toutefois, comme cela est indiqué dans l'évaluation de 2012 d'AANC, il n'y a pas d'équivalents temps plein se consacrant uniquement au PPVF dans les régions puisqu'ils sont responsables d'autres programmes , par exemple, les Services à l'enfance et à la famille (SEF) des Premières Nations.

Le tableau 2 fait état des différentes ressources.

Tableau 2 : Coûts et sources de financement du Programme pour la prévention de la violence familialeNote de bas de page 16 Note de bas de page 17
  2012-2013 2013-2014 2014-2015 2015-2016 2016-2017 Totaux
Crédit Réels Prévus
Crédit 1 – fonds du personnel, fonctionnement et entretien 121 044 995 955 963 890 1 007 245 1 764 099 4 852 234
Crédit 10 – Subventions et contributions 33 969 978 31 428 789 31 036 124 32 007 889 35 705 393 164 148 173
Dépenses non budgétaires 12 767 146 246 144 451 143 877 281 010 728 352
Totaux 134 103 789 32 570 991 32 144 466 33 159 012 37 750 502 169 728 761
 

Graphique 2 : Allocations totales du PPVF pour 2016-2017 (36,5 M$)

Graphique 2 : Allocations totales  du PPVF pour 2016-2017 (36,5 M$)
 
Équivalent textuel de la graphique 2 - Allocations totales du PPVF pour 2016-2017 (36,5 M$)

Le diagramme circulaire illustre les allocations dans le cadre du Programme pour la prévention de la violence familiale pour les divers secteurs du programme. Pour le « Fonctionnement des refuges », l'allocation est de 22,6 millions de dollars; pour la « Prévention », l'allocation est de 7 millions de dollars; pour les « Factures de refuge P/T », l'allocation est de 4,15 millions de dollars; pour les « Transferts pour la prévention (dans les réserves/hors réserves), l'allocation est de 1,34 million de dollars; et, finalement, pour le « Fonctionnement et exploitation/salaires », l'allocation est de 0,8 million de dollars.

 

Les fonds du PPVF sont surtout gérés à l'échelle régionale ou communautaire, par les responsables régionaux d'AANC :

  • Le financement de fonctionnement des maisons d'hébergement est fondé sur une formule de financement nationale axée sur des propositions, élaborée en 2006 et conçue pour établir des affectations régionales et des budgets de fonctionnement des maisons d'hébergement équitables et uniformes dans tout le Canada. L'affectation consentie à une maison d'hébergement tient compte de sa taille, de la province où elle se trouve, de son emplacement géographique et, s'il y a lieu, des coûts associés à son éloignement et aux besoins urgents.
  • Les activités de prévention de la violence familiale sont financées dans le cadre de projets dans la plupart des régions et certaines régions d'AANC sélectionnent les projets en fonction des partenariats et de l'optimisation de la portéeNote de bas de page 18.
 

 

2. Méthode d’évaluation

2.1 Portée et calendrier de l'évaluation

L'évaluation a permis d'examiner les activités du PPVF exécutées entre 2012-2013 et 2015-2016. Le cadre de référenceNote de bas de page 19 a été approuvé par le Comité de l'évaluation, de la mesure du rendement et de l'examen d'AANC le 22 juin 2016. Les travaux sur le terrain se sont déroulés entre novembre 2016 et janvier 2017.

2.2 Questions d'évaluation

La pertinence, la conception, l'exécution et le rendement ont été abordés dans le cadre de l'évaluation au moyen des questions suivantes :

  1. Le PPVF est-il approprié pour prévenir la violence familiale dans les collectivités autochtones?
  2. Quels sont les principaux éléments que le PPVF doit prendre en considération afin d'atteindre ses objectifs et de remplir ses engagements en réponse aux recommandations de l'évaluation de 2012 d'AANC?
  3. Conception et exécution : les refuges répondent-ils aux besoins des clients, notamment en ce qui a trait à l'accès et aux services offerts?
  4. Rendement : les programmes de prévention sont-ils efficaces? Quelles sont les possibilités d'amélioration?
  5. La structure de financement actuelle du PPVF contribue-t-elle à l'exécution efficace du programme?
  6. Dans quelle mesure le PPVF atteint-il les résultats escomptés (bienfaits pour les personnes touchées)?

2.3 Méthode d'évaluation et sources de données

Les constatations et les observations issues de l'évaluation sont fondées sur l'analyse des renseignements recueillis au moyen d'examens de la documentation spécialisée et de la couverture médiatique; d'examens de documents, de données et de dossiers; d'entrevues menées auprès d'informateurs clés, de visites et d'un sondage en ligne mené auprès des clients, des employés et des directeurs de refuges. Les examens effectués à l'appui de l'évaluation portaient sur un échantillon représentatif de documents rédigés par des professionnels et des universitaires canadiens et étrangers (consulter la bibliographie à l'annexe A). Au total, 91 personnes ont été interrogées par l'équipe d'évaluation (les groupes sont présentés au tableau 3).

Tableau 3 : Nombre de personnes interrogées par type d'organisation
Type d’organisation Nombre de
personnes interrogées
Organisations autochtones nationales 7
Administration centrale d’AANC 7
Régions d’AANC 11
Autres ministères fédéraux 7
Gouvernements provinciaux 5
Entrevues lors de visites (quatre collectivités au total) 47
Représentants d’organisations communautaires autochtones (entrevues téléphoniques) 7
Total: 91
 

Quatre visites ont été effectuées (deux en Ontario, une en Saskatchewan et une en Alberta). Les visites ont été planifiées en collaboration avec des représentants d'AANC responsables du PPVF dans le but d'examiner les activités du PPVF en cours dans les collectivités autochtones ou à proximité de celles-ci ainsi que les rôles et l'expérience des intervenants du PPVF dans chaque refuge (consulter le tableau 4). Les visites comprenaient des séances de discussion avec des fournisseurs de services du PPVF, des entrevues de représentants des gouvernements provinciaux et d'organisations autochtones, des fournisseurs de services communautaires et des clients.

Tableau 4 : Refuges visités lors de l'évaluation du Programme pour la prévention de la violence familiale
Refuge Justification de la sélection des quatre refuges
Ontario (Mohawks d'Akwesasne) Iethinisten:ha Women's Shelter Ouvert en 1993. Considéré par de nombreux observateurs comme un refuge modèle sur le plan de la capacité et des pratiques exemplaires. Ce refuge bénéficie d'un excellent soutien de la collectivité et il est unique dans la mesure où il dessert plusieurs territoires (Ontario, Québec et États-Unis).
Nord de l'Ontario (Première Nation de Mishkeegogamang) Mishkeegogamang Safe House Rouvert récemment (2016) après une période d'inactivité attribuable à des problèmes de gestion. Ce refuge est accessible par une route, mais il est relativement isolé. Il a été sélectionné pour rendre compte des défis liés à la prestation de services de soutien dans une région isolée.
Saskatchewan (Conseil tribal File Hills Qu'Appelle) Fort Qu'Appelle Safe Haven Ouvert en 1995. Ce refuge a permis de cerner les nouveaux enjeux et besoins dans la région. Il est reconnu pour avoir élaboré et mis en œuvre un modèle de prévention fondé sur les valeurs familiales culturelles et traditionnelles.
Alberta (Three Eagles Wellness Society) Premières Nations de Samson et Sucker Creek Fondé en 1991. La Three Eagles Wellness Society reçoit un financement du PPVF et elle agit comme un intermédiaire avec les intervenants des trois zones de traités de l'Alberta. Il s'agit d'un exemple de « conseil de prévention » qui contribue à la détermination des besoins et à l'exécution de programmes de prévention de la violence familiale dans ces collectivitésNote de bas de page 20
 

Au total, 75 personnes (clients, employés et directeurs de refuges) ont répondu aux sondages en ligne et imprimés (consulter le tableau 5).

Tableau 5 : Nombre de répondants au sondage du PPVF, par type de répondant
Sondage en ligne Nombre de répondants Taux de réponse
Directeurs de refuge 24/41Note de bas de page 21 59%
Clients de refuge 23 S.O.
Employés de refuge 28/41Note de bas de page 22 68%
Total 75 S.O.
 

Des hyperliens vers les 3 sondages personnalisés ont été envoyés aux 41 refuges financés par AANC. L'on a demandé aux employés, ce qui exclut les directeurs, de remplir un sondage par refuge en équipeNote de bas de page 23. Les directeurs ont distribué des copies imprimées du questionnaire aux clients qui fréquentaient leur refuge et ils leur ont demandé de donner leur consentement pour participer.Note de bas de page 24

2.3.1 Considérations, points forts et limites

Considérations

L'on a formé un groupe de travail composé de représentants de ministères clés participant à l'Initiative de lutte contre la violence familiale avec lesquels AANC entretient des relations régulièresNote de bas de page 25. Ce groupe de travail compte également parmi ses membres un représentant d'une organisation de défense des intérêts externeNote de bas de page 26. Les membres du groupe ont examiné les constatations, les conclusions et les recommandations des évaluations et ils ont formulé des commentaires. Il y a eu deux réunions de ce groupe de travailNote de bas de page 27.

Points forts

Une plate-forme Web simple a permis de rejoindre les 41 refuges du réseau d'AANC pour le sondage en ligne. Des copies imprimées ont également été fournies aux refuges sur demande. L'utilisation d'un sondage en ligne s'est avérée une approche efficace puisqu'elle a permis de recueillir de l'information directement auprès des directeurs, des employés et des clients de refuges. La rétroaction des clients des refuges était particulièrement importante parce que ce groupe n'avait pas été interrogé lors des évaluations précédentes. En outre, les responsables du PPVF ont mené une enquête (2016) dans le cadre des efforts de collecte de données pour l'ensemble du programme. Les résultats de cette enquête ont été utilisés lors de la triangulation des données puisqu'ils comprenaient des détails sur les besoins des refuges ainsi que sur le rôle que doit jouer le CNAVF pour soutenir davantage les collectivités autochtones et leur offrir une meilleure formation.

Limites

Données : Manque d'uniformité dans la production de rapports sur l'utilisation des refuges; manque d'information sur le pourcentage de lits utilisés lors de situations d'urgence ou aux fins de transition, ainsi que sur la durée des séjours des clientsFootnote 28.

Nombre de visites : Compte tenu du temps disponible pour la collecte de données, seulement quatre refuges ont été visités (tableau 4). Un échantillon plus vaste de refuges et d'activités de prévention aurait permis de faire une meilleure comparaison, en particulier de leurs liens avec les réseaux provinciaux et de leur capacité de mobiliser la communauté.

Sélection des refuges : Les refuges n'ont pas été sélectionnés au hasard. L'on a sélectionné des communautés avec des approches de prévention différentes pour compenser le nombre limité de visites.

2.4 Rôles, responsabilités et assurance de la qualité

La Direction générale de l'évaluation, de la mesure du rendement et de l'examen (DGEMRE) a mené l'étude d'évaluation. Pour compléter ses activités, la DGEMRE a retenu les services d'Auguste Solutions and Associates Inc., une société privée de consultation autochtone ayant une vaste expérience de l'évaluation de programmes de même que des programmes sociaux d'AANC. L'assurance de la qualité a été effectuée au moyen d'un processus d'examen interne de la DGEMRE, de l'orientation et d'un examen rigoureux d'un groupe de travail ainsi que d'un processus d'approbation et d'un examen ministériel interne.

 

 

3. Constatations de l’évaluation : pertinence du rôle d’AANC dans la prévention de la violence familiale

La présente section porte sur la pertinence du programme. Il s'agit de déterminer si le PPVF est approprié pour prévenir la violence familiale dans les collectivités autochtones. Il est également question des principaux enjeux que le PPVF doit aborder pour atteindre ses objectifs d'après les recommandations de l'évaluation du PPVF de 2012.

3.1 Réponse d'AANC à la violence familiale

Constatation 1 : Il est essentiel qu'AANC – ainsi que les autres partenaires du gouvernement fédéral – continue de s'attaquer au problème de la violence familiale. Le PPVF a recours à son réseau et à l'expérience cumulative des différents intervenants pour réduire les taux de violence familiale beaucoup plus élevés que l'on observe dans les collectivités de Premières Nations.

L'évaluation a révélé que le PPVF demeure essentiel (p. ex. financement des services d'hébergement d'urgence pour les Autochtones victimes de violence familiale et nouvelles possibilités de dialogue sur la prévention). En outre, de nombreuses activités de prévention demeurent nécessaires. Depuis la dernière évaluation du PPVF (2012), les représentants ont effectué 36 visites de refuges. Des plans de travail pour des projets de prévention ou de refuges ont également été élaborés dans le cadre du PPVF afin d'évaluer la capacité des refuges et les besoins en cette matière.

La pertinence des programmes financés par AANC pourrait être optimisée par une connaissance plus approfondie des causes systémiques de la violence familiale et un renforcement des liens avec d'autres programmes et services fédéraux, provinciaux et territoriaux destinés aux femmes, aux hommes et aux enfants autochtones. Les entrevues menées auprès des responsables d'AANC et d'autres ministères révèlent que diverses approches de prévention multisectorielles ont été adoptées pour prévenir la violence familiale et s'attaquer à ce problème.

L'évaluation indique également que les fonds versés par le programme pour financer le fonctionnement des refuges (24 millions de dollars par année en moyenne) représentent près de 75 % de l'ensemble du financement du PPVF. Par ailleurs, les fonds disponibles pour répondre à des besoins précis en matière de prévention s'élèvent à 8 millions de dollars par année (en moyenne, ce qui correspond à 25 % de l'ensemble du financement du PPVF). Voici les points pour lesquels l'on a constaté un consensus parmi les personnes interrogées lors de l'évaluation :

  • Les interventions en situation de crise des refuges sont essentielles et l'importance des refuges a été confirmée par l'annonce d'un financement pour la construction de cinq nouveaux refuges dans le budget fédéral de 2016Note de bas de page 29, ce qui fera passer de 41 à 46 le nombre de refuges au cours des trois prochaines années.
  • La prévention est considérée comme la seule solution à long terme viable pour réduire la violence.
  • Les données sur les répercussions des programmes de prévention financés par le PPVF sont limitées et il est donc difficile de déterminer quelles sont les approches financées les plus efficaces pour obtenir des résultats à long termeNote de bas de page 30.

Les responsables d'AANC sont sensibles à la proportionnalité actuelle du financement (protection et prévention), toutefois, les personnes interrogées suggèrent que leur rôle consiste à favoriser la disponibilité des services de refuges et, à titre de pourvoyeurs de fonds, de répondre aux besoins définis par les collectivités. Bien qu'il y ait souvent un certain chevauchement de la prévention et de la protection, il est clair que la majeure partie de l'enveloppe de financement annuelle du PPVF est consacrée au fonctionnement des refuges. En fait, le PPVF demeure pertinent en raison de la nature de la protection, laquelle est une condition sine qua non pour réduire la violence familiale : il faut assurer la sécurité des victimes de violence en leur procurant un hébergement et de la protection. Par conséquent, il est évident que les fonds du programme doivent être d'abord consacrés à la protection puisque la violence en situation réelle requiert, de par sa nature, une intervention immédiate pour éviter d'autres préjudices.

L'évaluation a révélé que les refuges bonifient les services de prévention en utilisant les ressources d'autres intervenants, y compris les activités de prévention communautaires, dont l'objectif consiste à réduire l'incidence de la violence familiale. Le PPVF est d'autant plus pertinent qu'il semble que l'on mette moins l'accent sur la prévention parce que les fonds sont limités et que les collectivités n'ont pas toutes les mêmes capacités pour planifier et mettre en œuvre de tels programmes. Du point de vue de la planification, il est plus difficile d'assurer un suivi à long terme des résultats liés aux programmes de prévention d'une façon efficace et uniforme pour l'ensemble des collectivités des Premières Nations qui ont recours, dans la majorité des cas, à une panoplie de méthodes disparates et très ciblées. Toutefois, malgré le fait que la prévention puisse donner de meilleurs résultats, il est également établi que la détection précoce de la violence familiale peut donner lieu à des mesures et à des interventions qui permettent d'éviter d'autres préjudices en rendant les agresseurs responsables de leurs actes et en atténuant les répercussions de la violence familiale.

Les niveaux de financement du PPVF consacrés à la prévention sont stables depuis 1991 (7 millions de dollars par année), ce qui témoigne de sa pertinence. Le coût d'exécution de ces programmes n'a pas suivi le taux d'inflation de l'indice des prix à la consommation (36 %) depuis le lancement du programme. Cela indique que les enveloppes budgétaires ne semblent pas refléter la forte croissance démographique des communautés autochtonesNote de bas de page 31.

3.1.1 Facteurs contribuant à la violence familiale dans les collectivités autochtones

Comme il est mentionné dans l'introduction (1.1.2 Contexte fédéral), les Autochtones du Canada sont confrontés à un taux de violence beaucoup plus élevé que les Canadiens non autochtones dans leur quotidien et au cours de leur vie quotidienne. Les causes de la violence familiale sont complexes et cela est particulièrement vrai au sein des communautés autochtones. Les documents examinés lors de l'évaluation définissent les secteurs ayant une influence sur l'incidence de la violence familiale et ils font aussi état des déterminants sociaux de la santé, des conditions sociales et économiques ainsi que de leur répartition au sein de la population autochtone.

Divers facteurs peuvent être regroupés au sein de deux secteurs clés, soit les répercussions sociales et culturelles. Il s'agit notamment des conditions socioéconomiques défavorables, des taux élevés d'alcoolisme et de toxicomanie et des logements inférieurs aux normes. L'examen des documents a révélé que l'expérience commune la plus répandue chez les Premières Nations du Canada est le traumatisme des pensionnats indiens (Anderson, 2010), lequel a généré des cycles de violence intergénérationnelleNote de bas de page 32. Le racisme, la colonisation et les pensionnats ont également eu des répercussions à long terme, y compris la perte des liens avec la terre et la culture ainsi que l'incidence des traumatismes intergénérationnels sur les relations socialesNote de bas de page 33.

En règle générale, le manque de logements adéquats semble être un facteur qui contribue à la violence familiale. Les logements surpeuplés aggravent les problèmes de santé et de violence auxquels les autochtones sont confrontés. Un logement sûr doit être abordable et assez spacieux pour accueillir toute la famille.

3.1.2 Base de données statistiques

Constatation 2 : Il est difficile d’obtenir des statistiques fiables sur l’incidence de la violence familiale parce que de nombreux cas ne sont pas déclarés. Cela est d’autant plus difficile dans les collectivités autochtones où il y a de nombreux obstacles à franchir pour accéder aux services. Ce manque d’information nuit à la pleine compréhension des facteurs et des attitudes changeants à l’égard de la violence.

L'examen des documents a révélé qu'il y a peu ou pas de données sur la violence subie par les personnes qui vivent dans les réserves. Cela est confirmé par diverses études comme l'Enquête sur les maisons d'hébergementNote de bas de page 34 et d'autres sondages de vaste portée menés auprès des Canadiens, y compris les Autochtones qui vivent hors des réservesNote de bas de page 35.

Les sources de données actuelles de Statistique Canada sont les statistiques fournies par les services de police et les données autodéclarées sur la victimisation. Il est important de prendre note que la violence familiale est souvent sous-déclarée ou non déclarée pour diverses raisons, y compris la stigmatisation des victimes, l’influence perçue des autorités ou la méfiance envers celles-ci (SEF ou services de police) ainsi que la manipulation des jeunes victimes par agresseurs.

L'évaluation a établi qu'en raison de la proportion d'autochtones et de femmes autochtones victimes de violence familiale, la pertinence du PPVF est compromise par un obstacle fondamental à son exécution : l'absence de statistiques fiables qui semble limiter la capacité d'ajustement du PPVF à différents facteurs et situations qui émergent à l'échelle nationale, régionale et communautaire.

3.1.3 Limites administratives des services d'aide aux victimes de violence familiale

Constatation 3 : Les femmes autochtones ont tendance à demander de l'aide aux fournisseurs de services hors des réserves.

Selon l'examen des documents, il y a 627 refuges pour femmes au Canada (incluant les refuges financés par les gouvernements provinciaux et territoriaux). Ce réseau de refuges à l'intérieur et à l'extérieur des réserves comprend des centres d'intervention d'urgence, des refuges de deuxième étape (transition) et divers établissements qui fournissent des services aux femmes fuyant une situation de violence familiale et à leurs enfants. Dans la majorité des provinces et des territoires, des services sont fournis aux femmes et aux enfants autochtones tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des réserves. Les données de l'Enquête sur les maisons d'hébergement de 2014 indiquent qu'environ huit pour cent des refuges (49 refuges) desservent principalement des résidents dans les réserves, trois pour cent (17 refuges) desservent exclusivement des clients dans les réserves, cinq pour cent (32 refuges) sont situés dans une réserve et certains desservent des femmes hors des réserves. En outre, 22 % (169 refuges) qui fournissent principalement des services hors des réserves desservent également des résidents dans les réserves.

Les employés de refuges financés par AANC qui ont répondu au sondage en ligne mené dans le cadre de l'évaluation ont indiqué que de nombreuses femmes vont chercher de l'aide ailleurs (hors de leur communauté autochtone), et ce, pour diverses raisonsNote de bas de page 36.

Pour valider cette information, les évaluateurs ont visité des refuges dans des collectivités portails offrant un accès à des régions éloignées de l'Ontario dans le but de déterminer pourquoi et comment les femmes autochtones résidant dans des collectivités éloignées du Nord ont recours aux services de refuges situés au Sud et qu'il s'agit souvent de refuges qui ne sont pas financés par AANC. Les renseignements recueillis dans ces collectivités révèlent que la clientèle des refuges provient presque exclusivement de collectivités de Premières Nations dans le nord de l'Ontario parce que les services d'urgence peuvent ne pas être accessibles ou que les femmes choisissent de partir, ce qui correspond aux raisons évoquées dans l'enquête menée auprès du personnel d'AANC. Voici le commentaire d'un directeur de refuge à ce sujet :

« Nous desservons 26 collectivités, dont 19 ne sont accessibles que par avion. Si sa collectivité est accessible par la route, nous offrons le transport par taxi au client Nous savons où se trouvent les refuges fédéraux, mais certaines femmes veulent sortir de leur communauté pour des raisons de sécurité. » [traduction]

Directeur d'un refuge provincial
 

3.1.4 Mécanisme et modèle adaptés

Constatation 4 : Il n'y a pas d'inventaire ou de carte des services accessibles hors des réserves qui permettrait d'éclairer les décisions stratégiques des programmes, notamment en ce qui a trait à la construction de nouveaux refuges ou l'offre de services de protection.

Depuis la dernière évaluation, les responsables du programme ont appuyé le développement de son réseau de refuges en se fiant à une analyse des proximitésNote de bas de page 37 pour assurer la plus vaste couverture possible des collectivités des Premières Nations desservies par les refuges existants financés par AANC. Toutefois, compte tenu du fait que de nombreuses femmes souhaitent sortir de leur communauté pour obtenir différents services sociaux hors réserve, le financement stratégique des refuges ne devrait pas être orienté uniquement en fonction de la couverture des Premières Nations, mais également des services existants fournis par d'autres administrations hors des réserves, puisque cela permettra d'offrir des services complémentaires et de réduire les coûts. Ainsi, une partie du financement actuel pourrait être consacré à la prévention. Un rééquilibrage ou une réorientation n'est possible que dans les cas où un refuge d'urgence hors réserve est plus près d'une Première Nation ou que des services de transport sont offerts pour permettre aux femmes d'accéder aux services de refuges disponibles à proximité.

Au total, il y a 617 collectivités des Premières Nations où il est souvent difficile d'avoir accès à ces réseaux de refuges. AANC estime que 87 % des membres inscrits des Premières Nations sont couverts par son réseau de refuges (ce qui signifie que 528 bandes ont accès à un refuge dans la réserve ou peuvent se rendre à un refuge financé par AANC par la route (consulter le tableau 9 à l'annexe B pour obtenir de plus amples renseignements).

Dans le cadre de sa collaboration avec la SCHL, le Ministère estime qu'il est toujours prioritaire de donner suite aux propositions des communautés de construire des refuges dans leurs collectivités et le réseau de refuges du PPVF sera élargi grâce aux fonds prévus dans le budget fédéral de 2016Note de bas de page 38. Souvent, les représentants d'une collectivité de Première Nation peuvent indiquer que la construction d'un refuge est une mesure concrète et nécessaire pour répondre aux besoins de sécurité immédiats des victimes. Toutefois, il semble qu'ils ne tiennent pas toujours compte des autres options de services offerts à proximité. Le rôle actuel d'AANC consiste à aider ces collectivités à donner suite à leurs priorités Il n'assure aucune vérification, mais le recours à une éventuelle mise en correspondance des services d'autres fournisseurs de services à proximité permettrait de consacrer une partie des fonds à d'autres mesures de prévention de la violence familiale tout aussi efficaces faisant partie du continuum de la violence familialeNote de bas de page 39.

À une époque caractérisée par de nombreuses avancées dans les domaines des communications, des technologies et des transports, une Première Nation qui souhaite construire un nouveau refuge sur son territoire profite d'une excellente occasion, non seulement de remédier à l'éloignement d'autres Premières Nations non desservies, mais également de dresser un inventaire des services d'aide offerts dans les collectivités avoisinantes, tout en tenant compte des services de transport nécessaires.

3.2 Relations de travail avec d'autres ministères fédéraux

En réponse à une recommandation formulée dans l'évaluation du PPVF d'AANC en 2012 concernant le renforcement des liens avec d'autres ministères pour faire en sorte que les projets soient menés de façon coordonnée pour améliorer l'accès, il a été clairement démontré que les responsables du PPVF se sont efforcés d'optimiser leurs occasions de partenariats avec l'Initiative de lutte contre la violence familiale. Par exemple, AANC est responsable du soutien les refuges pour femmes dans les réserves et de programmes de prévention pour diverses activités à l'intérieur et à l'extérieur des réserves.

3.2.1 Échange d'information horizontal

Constatation 5 : AANC participe à l'Initiative de lutte contre la violence familiale du gouvernement fédéral, ce qui constitue principalement une plate-forme d'échange d'information. L'on a constaté que d'autres ministères participent au programme, mais que leur collaboration est ponctuelle.

Les responsables d'AANC rencontrent chaque trimestre les représentants des autres ministères qui collaborent à l'Initiative de lutte contre la violence familiale et ses réunions sont convoquées par l'Agence de santé publique du CanadaNote de bas de page 40. Selon les participants, la principale fonction de l'Initiative de lutte contre la violence familiale est l'échange d'information, ce qui s'est avéré utile jusqu'à maintenant.

Les évaluateurs ont fait certaines constatations qui indiquent que le forum de l'Initiative de lutte contre la violence familialeNote de bas de page 41 a permis de renforcer la collaboration sur le programme au cours de la période visée par l'évaluation. Voici certains exemples de collaboration :

  • L'on a élaboré une trousse d'information juridique pour les femmes qui fréquentent les refuges. AANC a financé les consultations et Condition féminine Canada a financé la préparation de la trousse. Le ministère de la Justice a financé la formation sur place du personnel de 41 refuges (2014).
  • Sécurité publique Canada a travaillé avec Santé Canada et la Gendarmerie royale du Canada (GRC) pour désigner les collectivités de Premières Nations susceptibles de bénéficier de l'initiative de planification de la sécurité communautaire (2015).
  • Santé Canada et l'Assemblée des PremièresNations ont collaboré à la mise en œuvre d'un Cadre du continuum du mieux-être mental des PremièresNations. AANC participe aux travaux de l'équipe de mise en œuvre et il y a eu des échanges entre les partenaires de l'Initiative de lutte contre la violence familiale (2015).
  • AANC et la SCHL examinent les propositions relatives à la sélection d'emplacements pour la construction de refuges et à la rénovation de refuges existants (en cours).

La collaboration relative à l'Initiative de lutte contre la violence familiale a eu lieu principalement dans la région de la capitale nationale. L'évaluation ne visait pas à déterminer s'il y a une collaboration entre les homologues fédéraux dans les régions. Cet enjeu a été mentionné par de nombreux informateurs clés lors des entrevues.

« Il faut établir un mécanisme permanent pour que tous les ministères fédéraux responsables de la violence familiale collaborent, que les fonds soient bien dépensés et que nous puissions partager lorsque c'est possible. » [traduction]

Représentant d'un autre ministère fédéral
 

3.2.2 Relations entre les ministères fédéraux responsables de la violence familiale

Constatation 6 : Les partenaires clés souhaitent améliorer l'harmonisation de l'ensemble des programmes financés par le gouvernement fédéral pour lutter contre la violence familiale dans les collectivités autochtones.

Le premier ministre a fait de la réconciliation avec les peuples autochtones du Canada l'un des grands thèmes de l'approche de son gouvernement et il a fait valoir aux membres du Cabinet l'importance de donner suite aux recommandations de la Commission de vérité et réconciliationNote de bas de page 42 Note de bas de page 43. Les appels à l'action de la Commission font état de plusieurs recommandations liées à la violence familiale, y compris des demandes pour combler les lacunes relatives aux services de santé mentale, réduire le nombre d'Autochtones en détention et fonder des centres de guérison adaptés à la culture.

Une autre occasion qui s'est présentée aux ministères fédéraux pour renforcer leur relation est le Plan d'action pour contrer la violence familiale et les crimes violents à l'endroit des femmes et des filles autochtones (Plan d'action économique de 2014), un plan quinquennal sous la direction de Condition féminine Canada. Les ministères fédéraux collaborent au soutien et à la coordination des efforts ainsi qu'à l'échange d'information et de pratiques exemplaires. Les trois piliers du Plan d'action (prévenir la violence, soutenir les victimes autochtones et protéger les femmes et les filles autochtones) témoignent de la volonté du gouvernement du Canada de prévenir la violence dont sont victimes les femmes et les filles autochtones. En vertu de ce plan d'action, Patrimoine canadien a transféré à AANC la responsabilité des propositions de prévention de la violence familiale hors réserve ainsi que leur financement dans le but de mieux coordonner les efforts (2014)Note de bas de page 44.

Les entrevues menées auprès d'autres partenaires du gouvernement fédéral ont révélé que les fonctionnaires au niveau opérationnel sont prêts à partager leurs connaissances et leurs pratiques exemplaires, cependant, l'on est rarement allé au-delà d'ententes de partage des coûts pour des programmes à petite échelle ou l'échange d'information sur les programmes et les statistiques sur la violence familiale. Cela est attribuable aux lignes directrices ministérielles et aux modalités approuvées par le Conseil du Trésor.

La majorité des personnes interrogées préconisent une redéfinition majeure de l'approche du gouvernement en cette matière ce qui permettrait de réduire davantage l'incidence de la violence familiale dans les collectivités autochtones. L'approche privilégiée repose sur une meilleure harmonisation et une mobilisation horizontale plus stratégique qui utilise les éléments suivants :

  • le cadre du continuum du mieux-être mental des Premières Nations pour favoriser la rationalisation des programmes et des politiques afin de contribuer au mieux-être mental, à la réconciliation, à la guérison et au changement général du système;
  • une stratégie de lutte contre la violence fondée sur le sexe proposée pour orienter les approches du programme;
  • une charte d'égalité des sexesNote de bas de page 45 à l'appui d'une approche horizontale plus stratégique pour les analyses comparatives entre les sexes et les programmes connexes qui sera adoptée par les fonctionnaires fédéraux.

« Nous devons sortir des silos administratifs et trouver un moyen de travailler ensemble sur ce problème majeur. Je crois que la stratégie de lutte contre la violence fondée sur le sexe du gouvernement est un excellent moyen pour inciter les différents intervenants à mettre fin au cloisonnement. » [traduction]

Cadre supérieur du gouvernement
 

3.3 Apprentissage d'autres programmes d'AANC

Les évaluateurs ont relevé divers événements ainsi que des rapports d'évaluation d'AANC qui sont utiles pour le PPVF, notamment une décision du Tribunal canadien des droits de la personneNote de bas de page 46 sur les SEFNote de bas de page 47 à laquelle AANC a donné suite, par exemple, en confiant à un représentant ministériel la direction d'un processus de mobilisation et de consultation de vaste portée pour réformer les SEF des Premières Nations.

Lors des entrevues menées auprès des responsables des secteurs de programmes sociaux d'AANC et d'autres ministères, les personnes interrogées ont indiqué que la décision du Tribunal canadien des droits de la personne pourrait influencer la conception des programmes et le financement d'un ensemble élargi de programmes fédéraux qui ont, jusqu'à maintenant, été exécuté conformément aux paramètres propres aux différents programmes, et ce, sans que l'on exploite les synergies possibles entre eux.

« La réforme du programme des services à l'enfance et à la famille pourrait favoriser des changements plus importants. La façon de travailler à AANC est assez rigide. Il y a 20 personnes qui œuvrent auprès des Premières Nations et qui préparent 20 propositions pour différents programmes de financement. C'est comme cela qu'ils travaillent en silos dans leurs collectivités. » [traduction]

Gestionnaire d'AANC
 

Les constatations suivantes de l'évaluation d'AANC de 2012 peuvent aussi être prises en considération aux fins de l'apprentissage horizontal :

  • Évaluation des logements dans les réserves (24 janvier 2017) – Dans l'examen des documents effectué pour cette évaluation, l'on a mentionné que de nombreux facteurs et circonstances peuvent mettre une famille dans une situation de vulnérabilité, y compris la pauvreté, la toxicomanie, la violence familiale, une maladie mentale ou physique ainsi qu'un logement inadéquatNote de bas de page 48.
  • Évaluation des mesures de soutien à la mise en œuvre des foyers familiaux situés dans les réserves et des biens immobiliers matrimoniaux ainsi que des mesures d'application de la loi connexes (24 janvier 2017) – La recherche et les constatations préliminaires indiquent que de nombreux Autochtones ignorent qu'ils ont toujours des droits à l'égard du foyer familial après la rupture du mariage et que l'on n'offre pas de soutien approprié dans les systèmes judiciaires provinciaux pour les aider à accéder aux outils législatifs dont ils disposent à cette fin.
  • Évaluation de la Stratégie pour les Autochtones vivant en milieu urbain (24 janvier 2017) – Cette évaluation a révélé qu'il est primordial d'assurer le financement pluriannuel d'initiatives et de mesures de soutien, ce qui a également été mentionné par les directeurs de refuges lors des visites effectuées dans le cadre du PPVF. En outre, l'on a indiqué qu'il sera nécessaire de créer une plate-forme de récits de réussites pour favoriser l'échange d'information entre les collectivités.

Observation générale 1 : Investir dans la recherche statistique pertinenteNote de bas de page 49 sur la violence familiale au sein des communautés vivant dans une réserve est essentiel pour mieux orienter et adapter les approches du PPVF. Bien que d'autres acteurs fédéraux aient un rôle à jouer dans la collecte de données à l'échelle nationale (Statistique Canada, Condition féminine Canada), renforcer la capacité du PPVF pour améliorer la collecte de données du programme en passant du papier à un système électronique permettrait d'avoir un mécanisme de production de rapports plus précis et plus soupleNote de bas de page 50.Cela contribuerait également à une meilleure harmonisation des programmes d'AANC et au renforcement de ses relations avec d'autres ministères fédéraux.

 

 

4. Constatations de l’évaluation : Capacité des refuges et rendement (efficacité et succès)

La présente section examine si les refuges répondent aux besoins des clients en ce qui concerne l'accès et le service (Q3), si les structures de financement contribuent à l'exécution efficace des programmes (Q5), ainsi que les répercussions globales des investissements sur les résultats (Q6).

L'un des objectifs principaux du volet de protection du PPVF est la consolidation du réseau de refuges au sein des collectivités dans les réserves en ajoutant cinq refuges (dont le nombre est passé de 36 à 41 depuis l'évaluation d'AANC de 2012) et tel qu'il est annoncé dans le budget de 2016, en ajoutant cinq autres installations pour un total de 46. De plus, au nombre des principales réalisations figurent la rénovation de l'infrastructure et l'amélioration des mesures de sécurité, ainsi que l'augmentation des possibilités de formation à l'intention du personnel des refugesNote de bas de page 51. En tant que réponse aux recommandations de l'évaluation d'AANC de 2012, les responsables du Programme ont établi un calendrier périodique de visites sur place partout au pays afin de déterminer les nouvelles questions dans l'ensemble du réseau de refuges et de faire de ces visites une technique de mesure du rendement courante. Les visites se sont traduites par des mesures de suivi et des mesures correctives visant à répondre aux besoins en matière de gestion budgétaire, de gouvernance des refuges et d'infrastructure. En outre, l'étude et l'enquête réalisées en 2016 par les responsables du PPVF auprès des directeurs de refuge ont contribué à brosser un tableau de synthèse des exigences relatives aux refuges, telles que la formation et l'infrastructure.

Les évaluateurs ont constaté que, de plus en plus, les responsables du PPVF consacrent plus de temps de réflexion et d'efforts à la collecte de données (enquête de 2016, rapports sur les visites sur place) à l'échelle du réseau de refuges afin de mieux comprendre les points forts et les points faibles dans leur ensemble, et non pas simplement ceux de chacun des refuges. Toutefois, une importante restriction relative au suivi des tendances (p. ex. utilisation des refuges) est le manque de données électroniques uniformes générées par les refuges, ce qui se traduit par un nombre limité de données aux fins de la planification stratégique par l'administration centrale et les bureaux régionaux.

4.1 Refuges – Programmes et services

Les réponses des clients des refugesNote de bas de page 52 corroborent les déclarations positives au sujet des services offerts par les refuges et du soutien général de la part du personnel des refuges. Les clients ont souligné que la valeur inhérente du personnel s'étend bien au-delà de leur mandat de fournir un refuge et une protection. Les clients ont mentionné que les membres du personnel sont allés bien au-delà des fonctions qui leur sont attribuées pour accompagner leurs clients au-delà de la phase de crise.

Au nombre des thèmes récurrents qui se sont dégagés tout au long de l'évaluation figurait la nécessité d'accorder une attention particulière aux maisons de transition et aux maisons d'hébergement transitoire, aux programmes de sensibilisation et de prévention à l'intention des jeunes mères, aux programmes à l'intention des hommes et des adolescents, au counseling spécialisé pour les enfants qui sont témoins de violence, ainsi qu'à la sensibilisation aux mauvais traitements envers les aînés. En outre, on a relevé un besoin en matière de formation du personnel, y compris le soutien à l'intention du personnel et l'autogestion de la santé.Le besoin en matière de locaux supplémentaires pour offrir ces programmes ou soutenir les clients ayant des diagnostics concomitants était souvent cité comme un besoin urgent. Les thèmes récurrents représentent un défi pour le réseau de 41 refuges financés par AANC qui répond en grande partie aux besoins en matière de refuges d'urgence. À titre d'exemple, 18 de ces établissements satisfont aux besoins relatifs à la transition en consacrant des lits aux personnes en transition ou en hébergement transitoire, ou encore en ayant un mandat précis à cet égard. Voir le tableau 6, qui présente le type de services offerts et le nombre de lits disponibles.

Tableau 6 : Profil du réseau de refugesNote de bas de page 53
Type des services offerts Nombre total
de refuges (%)
Lits
Refuges d’urgence seulement 16 (47,1 %) 217 (43,8 %)
Maisons de transition ou d’hébergement transitoire seulement 6 (17,6 %) 81 (16,3 %)
Refuges d’urgence et maisons de transition ou d’hébergement transitoire combinés 12 (35,3 %) 197 (39,8 %)
Total: 34 Note de bas de page 54 495
 

Les budgets de fonctionnement annuels des refuges varient entre 118 321 $ (Première Nation de Ross River [Yukon]) et 934 000 $ (Six Nations [Ontario]) pour les grandes installations. Environ 20 % des refuges financés par AANC reçoivent régulièrement un supplément des autorités provinciales pour les dépenses de fonctionnement, du personnel à temps plein ou à temps partiel ou l'exécution de programmes spécialisés.

Les entrevues et les visites sur place confirment que les refuges financés par le PPVF viennent en aide aux femmes et aux enfants qui fuient la violence familiale et lorsqu'il y a de la place, servent de logements d'urgence pour ces mêmes femmes et d'autres personnes de collectivités dans les réserves. Toutefois, selon la région ou la province, un refuge ou, dans certains cas, un logement d'urgence peut être offert aux femmes autochtones vivant hors réserve à divers endroits et à diverses distances. À titre d'exemple, certaines femmes font plusieurs heures de route pour avoir accès à des refuges en raison de l'absence de refuges dans leur collectivité. Les obstacles à l'accès, y compris le transport, seront traités à la section qui suit (4.1.1).

Selon les recherches relatives à l'évaluation, la politique de nombreux refuges dans les réserves et hors réserve est de ne pas refuser quiconque demande de l'aide. Les services offerts comprennent des services de counseling, d'aiguillage, de transport et de soutien, d'éducation et d'acquisition d'aptitudes à la vie quotidienne, ainsi que des enseignements culturels et traditionnels, et des activités récréatives et de conditionnement physique. D'autres offrent des programmes en vue d'aider les enfants qui, en raison du fait qu'ils ont été témoins de violence, sont également considérés comme des victimes de traumatismes.

Il ne semble pas y avoir une approche commune quant au nombre et au type précis de services offerts. Toutefois, une tendance s'est dégagée dans le cadre de l'évaluation, soit que les grands refuges, dotés de logements de transition comme ceux à Akwesasne ou aux Six Nations (qui sont à proximité de grandes villes où l'accès aux ressources et aux programmes est meilleur), tendent à compter plus de personnel hautement qualifié et de techniques de santé et de mieux-être que ceux situés dans des régions éloignées et isolées. Tel qu'il est mentionné précédemment, 20 % des refuges touchent des fonds supplémentaires provenant d'autres sources, ce qui leur permet d'augmenter le nombre d'employés et de diversifier les types de programmes offertsNote de bas de page 55.

Les petits refuges offrent souvent des services à de petites populations dans des régions plus éloignées et ont tendance à offrir une gamme limitée de services, soit en raison de restrictions budgétaires ou de restrictions sur le plan de la capacité du personnel. Cependant, pour compenser ces restrictions, certains directeurs de refuge cherchent des solutions créatives et économiques pour aiguiller les femmes ayant besoin d'autres services vers des établissements hors réserve où ces services peuvent être offerts.

4.1.1 Utilisation des refuges et obstacles à l'accès

Constatation 7 : Les données sur l'utilisation de refuges sont contradictoires et recueillies manuellement à l'échelle du réseau de refuges financés par AANC. Cela crée d'importantes restrictions pour les programmeurs sur le plan de la prise de décisions stratégiques concernant l'utilisation des refuges et la capacité de ces derniers, ainsi que pour ce qui est de répondre aux appels en matière d'augmentation du nombre logements de transition.

Tendances en matière d'utilisation

La demande en matière d'augmentation du nombre de logements de transition était un message communiqué de façon constante aux évaluateurs lors des entrevues et des visites sur place. Les refuges financés par le PPVF offrent des services d'urgence essentiels aux victimes de violence familiale, mais les clients des refuges se trouvent dans une situation vulnérable lorsqu'ils quittent le refuge et doivent trouver un logement ailleurs. Pour ces personnes, il demeure un risque de violence continue si la solution de rechange est de retourner vivre avec les auteurs.

Étant donné le besoin manifeste en matière de logements de transition, il vaut la peine de déterminer si les refuges d'urgence préexistants peuvent être aménagés en maisons d'hébergement transitoire ou servir de telles maisons. Dans le sondage des évaluateurs, 50 % des directeurs de refuge qui y ont répondu ont indiqué que leurs refuges n'atteignaient la pleine capacité d'utilisation que deux fois par annéeNote de bas de page 56. Lorsque les refuges atteignaient leur pleine capacité, la plupart des directeurs et des membres du personnel ont déclaré qu'ils communiquaient avec le refuge le plus près pour prévoir un emplacement de rechange pour les victimes ayant besoin de services d'urgence. Si la coordination entre les fournisseurs de services pouvait être améliorée davantage (tel qu'il est mentionné à la section 3.1.4), cela signifierait que certains lits désignés pour les situations d'urgence pourraient être convertis pour les besoins des logements de transition, permettant ainsi aux refuges de transférer des clients en période de capacité élevée. Ces considérations sont essentielles à l'amélioration de la conception des services offerts par les refuges dans le cadre du PPVF, puisque cela reconnaît que la question de la violence familiale est un problème séquentiel.

Un obstacle important à la prise de décisions de cette nature, relevé par les évaluateurs et les programmeurs du PPVF, est le système actuel de collecte de données d'AANC sur les refuges. Dans le but de réduire le fardeau en matière de production de rapports imposé aux collectivités des Premières Nations, on a déployé des efforts pour abréger les modèles de rapports, réduire les champs d'information qualitative et réduire au minimum la fréquence de la production de rapports. En général, le système actuel génère des données contradictoires à l'échelle des installations et la majorité des refuges recueillent des données manuellement seulement. Ce processus augmente le risque d'erreur et d'erreur de calcul. À titre d'exemple, les chiffres actuels analysés chaque année par les programmeurs du PPVF relativement à l'utilisation ne font pas état des visites multiples d'une même personne ou n'indiquent pas la durée du séjour comme indicateurs importants.

Ces lacunes en matière de données des refuges financés par AANC nuisent à la réalisation d'une analyse et d'un examen complets de la fréquence d'utilisation et des tendances globales jusqu'à ce que des données quantitatives solides puissent être générées de façon constante et sur une longue période. Les programmeurs étudient la meilleure façon de collaborer avec Statistique Canada pour recueillir des données auprès des refuges financés par AANC dans le cadre d'une transition vers une approche plus stratégique à l'égard de l'analytique des programmes.

En outre, les programmeurs du PPVF ont fait mention du système Women In Safe Housing (W.I.S.H.) de l'Ontario comme modèle qui pourrait servir à l'amélioration de la collecte de données sur l'utilisation des refuges. Au moyen du système W.I.S.H, le gouvernement provincial a lié tous les refuges de la province (y compris les établissements financés par AANC) à un système de collecte de données en ligne. Le personnel des refuges reçoit une formation sur l'utilisation du système et doit entrer le profil de tous les clients dans le système. Les personnes interrogées lors des visites sur place ont indiqué que le système permet aux différents refuges d'assurer le suivi de leurs clients dans le cadre du continuum de soins de ces derniers avec d'autres fournisseurs de services de santé et de services sociaux.

L'utilisation du système W.I.S.H. (ou d'un système semblable) par les refuges permettrait d'améliorer la collecte de données pour les Premières Nations et la planification stratégique du PPVF. Cela favoriserait la réalisation d'évaluations du système de production de rapports actuel chez les refuges des Premières Nations et contribuerait à déterminer si des données appropriées sont recueillies, disponibles et accessibles dans les dossiers du programme, et le moment auquel elles le sont, à définir la nature des résultats améliorés pour les victimes ou les familles, ainsi qu'à promouvoir l'apport de changements en fonction de recherches solides. En outre, lorsque des données appropriées ne sont pas accessibles, les fournisseurs de services qui souhaitent participer ou collaborer ne seront peut-être pas en mesure de fournir ou d'obtenir les renseignements de base nécessaires pour répondre à leurs besoins et à d'autres fins. Toutefois, grâce à la collecte et à la tenue à jour des données appropriées, des cheminements peuvent être examinés dans des secteurs où il n'est peut-être pas facile d'obtenir des résultats à long terme.

Obstacles à l'accès aux services

L'accès aux programmes et aux services de refuges peut être problématique, comme en témoignent les visites sur place, les séances de groupes de discussion, les entrevues avec les informateurs clés ainsi que les sondages réalisés dans le cadre de l'évaluation; ceux-ci ont confirmé que même si certains refuges existants consignent, dans une certaine mesure, l'information sur leurs nouveaux clients, ils offrent également des services à d'autres collectivités, qui sont situées à des distances considérables de ces refuges, y compris les collectivités éloignées et isolées du Nord.

Bien que les refuges offrent une vaste gamme de services, de nombreux membres du personnel des refuges indiquent que les clients n'y ont pas accès en raison d'un manque général de connaissance quant à la nature de l'aide qui pourrait leur être offerte. D'autres obstacles viennent aggraver cette situation, notamment un nombre limité d'options de transport, un sentiment d'isolement ou de honte, l'itinérance, le chômage, la dépendance aux substances illégales, le dysfonctionnement familial, les problèmes de santé mentale, la pauvreté, le manque de services dans les réserves et hors réserve (p. ex. services de garde d'enfants), ainsi qu'une certaine « normalisation » de la violence au sein de la collectivité, ce qui ne fait que réduire la motivation d'une personne à demander de l'aide. Certains refuges permettent aux clients de rester plus longtemps, au-delà de la période de crise reconnue de deux à troissemaines pour des motifs tels que la pénurie de maisons de transition ou le besoin en matière de services de santé mentale et traitement des dépendances.

Transport

Constatation 8 : Le transport (et le manque d'argent) est un grave problème dans les collectivités autochtones, puisqu'il nuit à la capacité des victimes d'avoir accès à des refuges et de payer pour des services de garde, tandis que les clients qui ne résident pas dans le refuge reçoivent du soutien.

Les représentants d'AANC sont au courant des obstacles auxquels font face les collectivités éloignées en ce qui a trait à l'accessibilité et au transport. Cela a été reconnu en 2011 à la suite des tentatives visant à évaluer l'analyse et la couverture géographiques du réseau de refuges (voir la section 3.1.4). En raison de l'emplacement géographique des collectivités autochtones rurales, le transport est un coût nécessaire. En Alberta, par exemple, les refuges ont dû trouver des moyens de transporter les victimes de violence familiale sur de courtes distances (à l'échelle locale), ainsi que depuis des régions éloignées et des réserves isolées.

La situation est tout particulièrement difficile pour les refuges situés dans des collectivités rurales, éloignées et isolées où les possibilités de partenariats et de services d'aiguillage sont plus limitées. Dans les collectivités où la plupart des membres ne possèdent pas de véhicule, le transport en commun est souvent inexistant et les services sont difficiles à obtenir, les refuges ont besoin de moyens de transport locaux pour veiller à ce que leurs clients soient en mesure d'avoir accès aux organismes d'autres collectivités pour obtenir des services de santé et autres servicesNote de bas de page 57. La Première Nation de Mishkeegogamang dans le nord-ouest de l'Ontario est répartie sur deux principaux sites communautaires à quelque 25 km de distance, ce qui exerce une pression sur le conseil de bande pour qu'il réponde aux besoins en matière de transport communautaire; toutefois, il semble y avoir un manque de fonds pour une solution imminenteNote de bas de page 58. Même si un service de transport était offert, de nombreux membres de la collectivité interrogés ont affirmé que le manque de services de garde d'enfants constitue également un obstacle à la participation aux programmes parrainés par les refuges.

Qualité des installations

L'examen des documents révèle l'existence d'une certaine divergence sur le plan du caractère adéquat des installations des refuges. Dans le sondage en ligne auprès du personnel, certains répondants ont cité un certain nombre de problèmes liés à la sécurité (c.-à-d. l'éclairage et les alarmes), au manque d'aires de jeu pour les enfants et de rampes pour fauteuils roulants, ainsi qu'à l'entretien (c.-à-d. la toiture et la plomberie). Cependant, ces problèmes semblent plus isolés que systémiques; la majorité des évaluations données aux refuges dans le cadre du sondage susmentionné variaient entre « raisonnable » et « bon » pour ce qui est de l'état de l'immeuble.

Services adaptés sur le plan culturel

Bien que de nombreux refuges offrent à divers degrés des services adaptés sur le plan culturel, il demeure un besoin en matière de formation du personnel sur la sensibilisation aux particularités culturelles, comme le révèle l'examen des documents. En outre, la langue est considérée comme un obstacle à l'accès des clients aux services des refugesNote de bas de page 59. De même, certains clients bénéficieraient d'un plus grand nombre de programmes offerts dans leur langue autochtone. Dans un refuge financé par AANC en Saskatchewan, plusieurs programmes sont conçus en collaboration avec les aînés de sorte que les langues autochtones soient intégrées à la formation : selon certaines des personnes interrogées, la langue est l'esprit de la culture et si la langue disparaît, les valeurs culturelles ont du mal à survivre.

Peur de la stigmatisation

L'examen des documents a également mis en lumière la crainte particulière qu'ont les clients de se présenter aux refuges et d'accéder aux services qui y sont offerts en raison de questions de confidentialité. Les collectivités où se trouvent les refuges ou les maisons de transition sont souvent petites et tout le monde se connaît. Les membres du personnel des refuges font ce qu'ils peuvent pour protéger les clients, mais peu importe le nombre de mesures de sécurité mises en place, « cela fait jaser ».

Observation générale 2 : Afin d'améliorer la collecte de données dans les collectivités des Premières Nations, il serait profitable pour les responsables du PPVF d'examiner, de concert avec leurs homologues provinciaux et territoriaux, les systèmes de gestion de l'information existants (services de santé et services sociaux) disponibles dans chaque province ou territoire.

4.2 Activités des refuges

Constatation 9 : Les membres du personnel des refuges ont une capacité limitée d'offrir des programmes de prévention dans la collectivité, car ils se consacrent entièrement aux activités de protection, y compris le soutien à la clientèle des refuges.

Pour ce qui est des activités des refuges, l'évaluation a révélé quatre principales difficultés auxquelles fait face le personnel des refuges : une pénurie de personnel, une rémunération insuffisante, l'emplacement du refuge et le besoin en matière de formation. Chacune de ces difficultés est abordée brièvement ci-dessous, suivie de renseignements supplémentaires sur la formation.

  1. Pénuries de personnel : Le soir et la fin de semaine, les refuges comptent habituellement un seul employé, ce qui peut limiter la capacité du refuge d'assurer la sécurité des clients et du personnel. Il s'agit de l'une des principales préoccupations soulevées par le personnel des refuges lors des entrevues et dans le sondage. Certains changements ont été apportés pour améliorer les obstacles physiques, l'infrastructure et la sécurité des refuges; cependant, la pénurie de personnel était l'une des principales préoccupations. Dans le sondage en ligne mené auprès du personnel dans le cadre de l'évaluation, on a indiqué que le manque d'espace pour les lits et l'état de l'infrastructure des refuges elle-même constituent des préoccupations clés du personnel. Lors des visites sur place, la plupart des directeurs et des membres du personnel des refuges ont déclaré qu'il n'y avait pas suffisamment d'argent pour entretenir les refuges et procéder à d'importants travaux de rénovationNote de bas de page 60.
  2. Rémunération insuffisante : La question de la rémunération insuffisante a été soulevée à plusieurs reprises. Les employés des refuges et les personnes participant aux projets de prévention sont des ressources essentielles à la réussite. Leurs compétences, leur engagement et leurs capacités sont essentiels au maintien de la prestation de services aux clients autochtones qui ont été victimes de violence familiale. Selon les personnes interrogées et les visites sur place, sans augmentations de salaire annuelles, il est difficile d'assurer le maintien en poste de personnel qualifié. De plus, le roulement du personnel compromet la capacité d'offrir des services et des soins de façon uniforme.
  3. Emplacement du refuge : L'emplacement d'un refuge est lié à la difficulté précédente. Le transfert des connaissances et les possibilités de renforcer la capacité de personnel (surtout dans les collectivités éloignées) ont tendance à en souffrir en raison des niveaux de formation plus faibles et du manque de personnel expérimenté dans les refuges. En raison de la capacité limitée en matière de ressources humaines, ces refuges ont tendance à offrir une petite gamme de services. Inversement, l'évaluation a révélé que lorsque les refuges sont situés plus près de régions urbaines, la tendance observée est que le personnel bien formé peut demeurer en poste, mais souvent, pas pour longtemps dans les refuges financés par AANC, car ils peuvent trouver un emploi mieux rémunéré dans un refuge provincial ou une autre installation.
  4. Formation : La formation offerte comprend l'enseignement aux employés de nouvelles approches dont ils peuvent se servir dans le cadre de leur travail auprès des clients et le fait de veiller à ce que les employés prennent soin de leur santé et de leur bien-être pour éviter l'épuisement professionnel. Selon les observations tirées des visites sur place et les réponses au sondage, il semble y avoir une forte demande relative aux services de soutien communautaire (counseling en santé mentale, soutien en matière de traitement des dépendances, compétences parentales et capacité d'adaptation, compétences améliorant l'employabilité, soins tenant compte des traumatismes). Toutefois, il n'y a pas suffisamment de personnel qualifié ou de points d'entrée dans la collectivité pour ce genre de formation, surtout dans les collectivités des Premières Nations plus éloignées. Le personnel des refuges a déclaré qu'une nette majorité des clients qui se présentent ont un trouble de santé mentale ou un problème de dépendance qui doit également être traité en plus du besoin en matière de soutien après avoir subi de la violence familiale. Une formation constante est nécessaire à cet égard.

Renseignements supplémentaires sur les approches actuelles en matière de formation

Approche nationale à l'égard de la formation du personnel des refuges : Le personnel des refuges financés par AANC semble se consacrer entièrement aux activités des refuges et avoir peu de temps à consacrer aux stratégies communautaires globales. Les membres du personnel ont indiqué qu'ils sont ouverts à l'exécution d'un plus grand nombre de programmes de prévention; cependant, ils ont besoin d'une formation plus spécialisée pour appuyer les femmes en situation de crise ainsi que les stratégies globales de prévention dans les collectivités. Le manque de formation spécialisée est également lié à l'indisponibilité de services pour les hommes. Lors des visites sur place et des entrevues, ainsi que dans le sondage d'évaluation en ligne, le personnel et les directeurs des refuges ont souligné qu'on demandait souvent des services pour les hommes, mais qu'il est difficile d'offrir ces services en raison du manque de locaux et du besoin en matière d'espace supplémentaire et de formation, y compris le renforcement de la sécurité lorsqu'il est question de traiter avec des hommes auteurs d'actes de violence.

Constatation 10 : Le modèle de financement de base utilisé avec le CNACVF renforce la capacité institutionnelle.

Au cours de la période visée par l'évaluation, AANC a accordé un financement de base au CNACVF à l'appui de la formation des directeurs et du personnel des refuges sur les activités de prévention adaptées sur le plan culturel, les techniques de counseling et l'autogestion de la santé pour le personnel des refugesNote de bas de page 61. La relation à long terme a permis au CNACVF d'établir un plan de formation quinquennal pour chaque refuge et d'examiner son processus de suivi auprès des gestionnaires des refuges. Le CNACVF satisfait à une exigence importante en matière de mentorat et de formation, selon les résultats du sondage auprès des refuges et les entrevues avec les informateurs clés. Dans l'ensemble, les participants des refuges ont fourni une rétroaction positive sur la participation du CNACVF.

Approche en matière de formation et de mentorat adoptée par les régions : L'évaluation a également révélé que les membres du personnel chevronnés des refuges et des organismes déployaient des efforts de façon officieuse pour former les employés ayant moins d'expérience. Dans certains cas, les bureaux régionaux d'AANC recevant des fonds dans le cadre du PPVF jouent un rôle dans les efforts visant à combler ces écarts de connaissances.

Une innovationNote de bas de page 62 mise en œuvre avec le soutien d'AANC (Ontario) permet le transfert des connaissances entre les refuges dans le sud de l'Ontario et les refuges plus éloignés dans le nord l'Ontario (sectio 5.3.2). La Première Nation d'Akwesasne est jumelée à la Mishkeegogamang Safe HouseNote de bas de page 63 pour échanger des connaissances et des modules de formation en vue d'offrir de la formation dans la collectivité plus éloignée du Nord. La maison d'hébergement s'attend à donner de la formation sur la prévention et à l'intention du personnel des refuges, sous la direction du personnel d'Akwesasne, dans un certain nombre de nouveaux domaines, dont la prévention du suicide et les modèles de paternité positifsNote de bas de page 64. Pour en savoir plus sur les histoires des collectivités, voir l'annexe BNote de bas de page 65.

Voici d'autres exemples d'activités de formation et de mentorat à l'intention du personnel appuyées par le PPVF :

  • Ontario : Webinaire Formation des formateurs et application de sécurité – Webinaire de formation de 15 heures favorisant l'apprentissage à distance du personnel des refuges en région éloignée. L'application permettra au personnel d'aider les clients à élaborer leurs propres plans de sécurité, une fois qu'ils auront quitté le refuge.
  • Saskatchewan : Programme Walk the Good Road – Programme de formation sur la prévention à Fort Qu'Appelle, en Saskatchewan, permettant aux adultes et aux jeunes de devenir des facilitateurs locaux relativement aux programmes de prévention de la violence, en y intégrant des croyances et des histoires culturelles.
  • Alberta : Rassemblement annuel des jeunes – Programme d'éducation par les pairs pour les jeunes des Premières Nations de l'Alberta. Des volontaires des Premières Nations en Alberta sont parrainés pour assister à une formation de trois jours sur divers sujets. À la suite du rassemblement, les facilitateurs sont ensuite invités à retourner dans leur collectivité et à transmettre l'information dans le cadre de programmes offerts le soir ou la fin de semaine à d'autres jeunes, où ils agissent à titre de mentors et soutiennent les jeunes pour les amener à assumer le rôle principal de facilitateur.

4.2.1 Soins de transition – Transition d'une situation de crise aux activités de prévention

Les soins de transition supposent la coordination et la continuité des soins du client lors de sa transition du refuge d'urgence à un autre milieu, notamment une maison. Parfois, il peut être nécessaire que les clients acquièrent de nouvelles compétences pour faire face aux nouveaux défis associés à un nouveau départ. Les membres du personnel des refuges ont décrit leurs tâches comme suit : gérer la crise immédiate dans le refuge d'urgence, appuyer les clients dans l'intégration d'un logement de transition sécuritaire et enfin, les aider à réintégrer leur collectivité ou à faire la transition vers une autre collectivité, s'ils le choisissent. Il s'agit de l'approche tripartite, ou la prestation de services, qui met l'accent sur la prévention primaire, secondaire et tertiaire.

Comme l'ont constaté les évaluateurs, peu de refuges sont en mesure d'offrir des maisons d'hébergement transitoire étant donné le manque de financement et de ressources. Afin d'améliorer les résultats à long terme pour les clients des refuges, il faut mettre davantage l'accent sur les logements de transition et les soins de suivi (tel qu'il est indiqué à la section 4.1.1). Lors d'une visite sur place, on a indiqué qu'il y a un manque de programmes à long terme pour les femmes, car la priorité semble être accordée à la protection à court terme alors qu'il faudrait en faire plus relativement à la prévention et de la protection à long terme.

Lors d'une autre visite sur place, les intervenants ont discuté du fait de prendre l'initiative de créer un programme de prévention pour les collectivités avoisinantes, ce qui souligne la fonction des refuges en tant qu'institutions uniques de la société civile pouvant contribuer à l'élaboration d'initiatives locales et au renforcement des capacités locales (voir la section 5.2.1 sur la prévention). Comme le donne à penser l'analyse documentaire, les refuges, en plus de fournir une protection aux victimes de violence familiale, font également office de lieux de formation (p. ex. utiliser une approche culturelle, élargir les connaissances et la compréhension à l'égard des questions, accroître la sensibilisation) pour les femmes autochtones.

Dans tous les secteurs de la violence familiale, il semble que les services après coup prédominent sur les interventions préventives et pourtant, il y a un manque de soins de suivi, ce qui représente un problème important pour les refuges et leurs clients. Les évaluateurs ont constaté que le personnel s'assure de demander aux clients s'ils souhaitent qu'un intervenant assure un suivi auprès d'eux après leur départ, mais la plupart du temps, les clients refusentNote de bas de page 66 (voir la section 4.1.1).

Dans l'ensemble, les personnes interrogées ont fréquemment exprimé les préoccupations suivantes : le manque de logements de transition et de programmes de soutien après un séjour dans un refuge, le manque de moyens de transport et de services de garde d'enfants, ainsi que la capacité limitée des membres du personnel des refuges d'offrir des programmes de prévention dans la collectivité, puisqu'ils se consacrent entièrement aux activités de protection.

Observation générale 3 : Il sera utile aux responsables du PPVF d'examiner la meilleure façon de mettre davantage l'accent sur le suivi auprès des clients après une situation de crise et sur les soins de transition. En raison des problèmes de financement et de la nécessité d'intervenir dans les situations immédiates et urgentes, la priorité est actuellement accordée à la première étape (phase de crise).

 

 

5. Constatations de l’évaluation – Programmes de prévention : Conception et mise en œuvre

La présente section examine la structure de financement principale du PPVF et si cette dernière contribue à l'efficacité de l'exécution des programmes. Elle examine également la mesure dans laquelle le PPVF atteint ses résultats escomptés (répercussions sur les personnes touchées). Certaines de ces constatations ont été soulignées aux sections précédentes du présent rapport.

5.1 Approche en matière de financement à l'égard des projets de prévention

Une formule de financement est en place pour répartir le financement annuel du Programme en fonction de la population de collectivités dans les réserves. La formule est utilisée pour déterminer les affectations par refugeNote de bas de page 67. Les montants déterminés en tant qu'affectation ou budget régional visent à aider les régions d'AANC à déterminer les initiatives de préventionNote de bas de page 68. La formule de financement ne tient pas compte des nouveaux services et des nouvelles initiatives à l'échelle fédérale, provinciale, territoriale et municipale.

Les initiatives de préventionNote de bas de page 69 sont financées au moyen de deux approches principales. La première approche est dans le cadre d'un appel de propositions annuel dans les réserves, examiné par les bureaux régionaux d'AANC, et le financement est ensuite accordé à une bande ou à un conseil tribal désigné. La deuxième formule, un modèle hors réserve, a été établie en 2016 pour tenir compte du réseau grandissant d'organismes hors réserve s'intéressant aux programmes de prévention de la violence familiale. Cet appel de propositions est géré à partir de l'administration centrale d'AANCNote de bas de page 70.

La formule est utilisée pour déterminer le montant du financement versé aux bénéficiaires du PPVF et les instruments de collecte de données sont la principale source de données administratives et de données sur le rendement, en fonction des services des refuges et des services de prévention. L'évaluation a révélé que même si les instruments de collecte de données fournissent des descriptions des activités de prévention et de l'information sur les taux de fréquentation, les rapports ne produisent pas de données sur les taux de violence familiale ni sur l'incidence des activités à cet égard. Toutefois, les responsables du PPVF ont mis à jour les instruments de collecte de données pour consigner la ventilation détaillée des coûts opérationnels des refuges et des projets de prévention. Les bénéficiaires de financement doivent également indiquer si la collectivité a recours à un plan de sécurité. Dans le cadre du PPVF, on a également établi des plans de travail liés aux refuges et à la prévention pour faciliter le suivi des prévisions budgétaires relatives aux services. Ces progrès réalisés sur le plan des mécanismes de production de rapports s'inscrivent dans le cadre d'un effort continu visant à améliorer la compréhension des responsables du PPVF à l'égard des coûts engagés par les refuges, ce qui souligne l'importance du système de gestion W.I.S.H., mentionné précédemment, de même que du rôle qu'il pourrait jouer en ce qui a trait à la collecte de données appropriées et à l'accessibilité de ces données.

5.1.1 Difficultés relatives à l'exécution des programmes

Constatation 11 : Le modèle global (qui fait référence à la pratique de l'établissement d'un conseil représentant les besoins de différents groupes régionaux de collectivités autochtones) a la capacité de surmonter certains des obstacles liés à l'exécution des programmes de prévention dans les collectivités à faible capacité.

L'examen des documents et les données d'entrevue révèlent qu'en dépit d'un besoin manifeste en matière d'activités de prévention, des facteurs tels que les suivants nuisent à la conception et à l'exécution réussies des projets de prévention :

  • Harmonisation des besoins avec les niveaux de financement appropriés : Les entrevues menées auprès des membres de la collectivité et des représentants gouvernementaux donnent à penser que le niveau de besoins en matière de santé et de besoins sociaux coexistant avec la violence familiale est élevé (santé mentale, soutien au traitement des dépendances, compétences parentales). Ce problème est accentué dans les collectivités plus éloignées qui n'ont pas aussi facilement accès aux programmes hors réserve de collectivités avoisinantes.
  • Participation limitée : Les membres de la collectivité qui souhaitent participer aux activités de prévention ne sont souvent pas en mesure d'y prendre part en raison de questions logistiques telles que le transport, l'incertitude quant à la communication de renseignements personnels à autrui et les préoccupations relatives au personnel participant aux activités.
  • Fardeau en matière de production de rapports : Bon nombre des participants aux entrevues avec les informateurs clés ont mentionné la difficulté associée à la rédaction de propositions et à la communication des données financières correspondantes. Il se peut que les collectivités qui ne soumettent pas de rapport de fin d'année ne soient pas forcément prises en considération pour recevoir du financement pour des projets de prévention l'année suivante.
  • Manque de capacité (planification communautaire) : En dépit d'un intérêt à l'égard des programmes, les Premières Nations font face à certaines limites en ce qui a trait aux capacités d'organisation et de planification. Il existe une occasion, par l'intermédiaire du plan de sécurité communautaire de Sécurité publique Canada (un volet de son Programme de contribution à l'amélioration de la sécurité des collectivités autochtones), de solidifier l'appui des dirigeants communautaires et la planification des initiatives de prévention au moyen d'une méthode participative de rédaction de ces plans, avec le soutien d'un facilitateur qualifié. En faisant mieux connaître cette initiative aux Premières Nations, le nombre d'entre elles qui y ont recours augmenteraNote de bas de page 71.
  • Manque de connaissances : Il y a un manque de connaissances en ce qui concerne les pratiques prometteuses ou ce qui fonctionne le mieux pour prévenir la violence familiale.

Le modèle global sert à faciliter le processus de demande et d'exécution des projets de prévention, ainsi qu'à atténuer certains des problèmes susmentionnés (p. ex. production de rapports). Les modèles globaux sont des organismes-cadres qui répondent aux besoins de groupes de collectivités des Premières Nations dans une région donnée.

Ces pratiques organisationnelles présentent deux avantages : les modèles globaux permettent aux collectivités à faible capacité de rédiger des propositions de financement d'activités de prévention de la violence familiale. De même, le modèle global renforce la capacité au sein des collectivités autochtones tout en allégeant une partie du fardeau administratif supplémentaire auquel font face les représentants d'AANC dans les régions. Cependant, il est reconnu que les administrations ne sont pas toutes en mesure d'appuyer de tels modèles, surtout si les conseils de prévention ne sont pas bien appuyés au sein de ces administrations.

Les responsables du PPVF ont reconnu la Three Eagle Wellness Society en Alberta comme un exemple d'un organisme prospère faisant partie d'un modèle global. La Three Eagle Wellness Society répond aux besoins de 45 collectivités des Premières Nations dans les régions visées par un traité 6, 7 et 8. En 2015-2016, l'organisme avait aidé 27 des 34 collectivités des Premières Nations qui avaient présenté une demande visant des projets de prévention à recevoir du financement. En aidant les collectivités à satisfaire aux exigences des propositions de projet et à fournir les données financières correspondantes, l'organisme a observé une réduction du nombre de collectivités de l'Alberta s'abstenant de demander du financement pour des projets de préventionNote de bas de page 72. De même, le financement du PPVF accordé aux projets peut s'avérer insuffisant pour couvrir tous les aspects du projet, mais la Three Eagle Wellness Society aide les collectivités à recourir à d'autres programmes pour terminer leur projet.

Dans la région de la Saskatchewan, le Programme verse du financement à 7 bénéficiaires en vue de la réalisation d'activités de prévention de la violence familiale, y compris les 4 refuges financés par AANC; les décisions en ce sens sont prises en fonction de l'emplacement et de la couverture des services dans la province. Au total, 5 des 7 modèles globaux offrent des programmes pour les hommes. Le Conseil tribal File Hills Qu'Appelle relève des 11 collectivités des Premières Nations à proximité de Fort Qu'Appelle (ainsi que de toute Première Nation qui demande des services). Parmi ses autres responsabilités, le Conseil tribal File Hills Qu'Appelle contribue à l'élaboration de projets de prévention communautaires de concert avec les collectivités des Premières Nations. L'octroi de financement à 7 bénéficiaires pour des programmes de prévention s'écarte de la période précédant la dernière évaluation, où l'agent régional de la Saskatchewan d'AANC traitait les propositions de quelque 74 collectivités différentes visant l'obtention de fonds pour des programmes de prévention (à l'exclusion des multiples propositions d'une même collectivité). La nouvelle approche en matière de financement de la région de la Saskatchewan prévoit un processus d'examen moins ardu pour le personnel et l'octroi de financement aux bénéficiaires qui possèdent la capacité et l'expertise nécessaires pour offrir des programmes de prévention efficacesNote de bas de page 73.

Bien que ces modèles globaux permettent à un grand nombre de collectivités des Premières Nations de faire approuver leurs propositions de projets de prévention, un petit nombre de collectivités ne présentent pas de propositions. Au nombre des raisons qui l'expliquent figurent le roulement du personnel, le nouveau personnel ou un nouveau chef et conseil ou encore le fait de ne pas être disposé à travailler sur une proposition en raison de son faible niveau de financement perçu. Ces raisons illustrent que malgré le succès relatif des modèles globaux, certaines collectivités des Premières Nations ne se prévalent toujours pas du financement destiné à la prévention de la violence familiale.

5.1.2 Harmonisation des projets de prévention avec les priorités établies par les collectivités

Constatation 12 : Il existe un besoin manifeste en matière de programmes de prévention adaptés aux hommes et aux garçons, et ce, tant pour les victimes que pour les auteurs.

« Les programmes de guérison pour les femmes aident les victimes à surmonter des expériences traumatisantes, mais ils n'empêchent pas les auteurs de commettre des actes de violence envers d'autres partenaires. » [traduction]

Directeur de refuge
 

Les visites sur place, les entrevues avec les informateurs clés et les intervenants, ainsi que les résultats du sondage ont tous souligné l'urgent besoin en matière d'accès à certaines initiatives de sensibilisation, comme des services pour les hommes (les auteurs comme les victimes), des services de counseling et une formation en maîtrise de la colère. L'opinion dominante exprimée à l'égard de ces secteurs d'intérêt était que, en l'absence de services pour les hommes et les garçons, les causes profondes des actes de violence qui sont commis au sein des familles ne seraient pas traitées et par conséquent, le cycle de la violence se poursuivrait.

Pour améliorer les conditions de vie dans les collectivités des Premières Nations, les hommes et les garçons ont besoin de services qui leur sont destinés. Une façon de régler cette question consisterait à lancer un projet pilote qui permettrait, par exemple, d'étudier la faisabilité de l'aménagement d'un établissement de protection existant disponible, ou autre type d'installation, en un centre de prévention pour les auteurs d'actes de violence de sexe masculin. Au moment de la rédaction du présent rapport, il y avait des exemples de programmes en place destinés aux hommes (voir le tableau 7 ci-dessous). Toutefois, le nombre de ces types de programmes demeure relativement faibleNote de bas de page 74. Étant donné que les projets de prévention sont conçus par les collectivités elles-mêmes et que les hommes sont presque toujours les auteurs dans les cas de violence familiale, il existe une occasion pour les responsables du PPVF d'examiner la façon dont le Programme peut aider les collectivités des Premières Nations à mieux faire connaître les activités de prévention visant à traiter les membres de la collectivité de sexe masculin; cela pourrait contribuer à réduire la fréquence de la violence familiale dans l'avenir.

Tableau 7 : Exemples de programmes pour les garçons et les hommes
CatégorieNote de bas de page 75 Activité
Jeunes hommes Three Eagles Wellness Society (Alberta) – Sons of Traditions :
Offre un cadre de formation du caractère qui permettra aux jeunes âgés de 13 à 17 ans de se créer une identité saine en tant que jeunes hommes autochtones.
Akwesasne (Ontario) – Ohelogo :
Destiné aux élèves de 10e année, ce programme prévoit une éducation distincte pour les garçons et les filles, et porte sur les différents changements dans leur vie et changements corporels qu'ils subissent à l'adolescence. Les participants acquièrent des aptitudes à la vie quotidienne en prenant part à des activités en plein air et à des activités de sensibilisation à la santé de la reproduction.
Fort Qu'Appelle (Saskatchewan) – Leading Thunderbird Lodge :
Programme à l'intention des jeunes hommes (12 à 18 ans) qui ont été accusés d'un crime, des jeunes délinquants ou de ceux qui ont d'autres problèmes à la maison. Le pavillon compte 15 lits et offre des activités culturelles axées sur le rôle des hommes dans la société (ce qu'est leur but dans la vie).
Hommes adultes Akwesasne (Ontario) – Akwesasne Family Wellness Program :
Un volet de ce programme est l'intervention auprès des partenaires violents, qui vise à aider les auteurs de sexe masculin à transformer leurs comportements violents en choix de vie sains et plus positifs. Le programme est appuyé par le Procureur général de l'Ontario.
Mishkeegogamang (Ontario) – « Kizhaay Anishinaabe Niin - Je suis un homme bon » :
Le programme initial était financé par le gouvernement de l'OntarioNote de bas de page 76. Son objectif global consiste à encourager les hommes de la collectivité à s'élever contre toutes les formes de violence envers les femmes autochtones.
 

Constatation 13 : Les partenariats avec d'autres organismes communautaires et hors réserve sont essentiels à l'exécution de programmes de prévention de qualité.

L'évaluation a révélé qu'étant donné le niveau de financement actuellement disponible pour le volet de prévention réel du PPVF, il est possible d'engendrer des répercussions perceptibles à l'échelle communautaire en accordant une attention particulière au réseau de fournisseurs de services qui travaillent, en coordination et en collaboration, avec les responsables du PPVF d'AANC et d'autres personnes. La plupart des personnes interrogées (personnel des refuges et fonctionnaires) ont mentionné que les programmes offerts par les refuges et les programmes de prévention sont renforcés lorsqu'il existe des partenariats solides avec d'autres groupes et organismes.

5.2.1 Fournisseurs de services financés par le gouvernement fédéral œuvrant à l'échelle communautaire

Tel qu'il est indiqué dans le rapport, il y a un échange des renseignements dans une grande mesure au sein de la région de la capitale nationale, parmi les ministères fédéraux voués aux questions de protection et de prévention de la violence familialeNote de bas de page 77. L'une des principales difficultés consiste à déterminer comment l'échange de renseignements et la collaboration pourraient être transférés plus efficacement aux collectivités elles-mêmes. Lors des visites sur place régionales, les évaluateurs ont constaté que le lien entre les fournisseurs de services financés par le gouvernement fédéral qui travaillent sur des questions relatives à la violence familiale semble également être axé sur l'aiguillage des clients entre les organismes.

Dans le Nord de l'Ontario (Première Nation de Mishkeegogamang), le PPVF et les programmes financés par Santé Canada étaient étroitement liés. Les fournisseurs de services financés par le gouvernement fédéral au sein de la Mishkeegogamang Safe House et du Mishkeegogamang Health Centre connaissaient et comprenaient bien les services de chacun et aiguillaient sans heurts les clients vers les services nécessaires. Les services communautaires prévus au mandat de Santé Canada comprennent l'exploitation du Health Centre, la prestation de services de counseling en santé mentale (offerts par du personnel de soutien externe deux fois par mois), du soutien après le traitement d'une dépendance, des mesures de prévention du suicide chez les adules et les jeunes, des mesures de soutien relatives au syndrome d'alcoolisation fœtale, du soutien en matière de garde de nourrissons et d'enfants, ainsi que des services d'acquisition de certaines compétences parentales. Hors de la collectivité, un établissement de santé ultramoderne, le Meno Ya Win Health Centre à Sioux Lookout, en OntarioNote de bas de page 78, offre des programmes et des services de soutien médicaux pour les patients hospitalisés et les patients externes. Des fourgonnettes médicales assurent le lien entre la Première Nation de Mishkeegogamang et les services offerts à Sioux Lookout.

La préoccupation exprimée le plus souvent par les fournisseurs de services de santé et de services sociaux dans la collectivité concernait l'accès urgent et élargi aux services de santé mentale et de toxicomanie dans la collectivité, et la façon d'augmenter ou d'élargir les services communautaires, le cas échéant. L'un des exemples est le Programme national de lutte contre l'abus de l'alcool et des drogues chez les AutochtonesNote de bas de page 79, où il n'y a qu'un seul travailleur à l'heure actuelle pour une collectivité de 1 100 habitants, ayant un volume de travail de quelque 40 à 60 clients par mois. La plus grande difficulté associée au Programme national de lutte contre l'abus de l'alcool et des drogues chez les Autochtones semble être le manque d'espace pour tenir ou organiser des activités de groupe et le manque de travailleurs qualifiésNote de bas de page 80.

Au refuge de la Nation mohawk d'Akwesasne, le personnel a réussi à établir les partenariats dans l'ensemble de la collectivitéNote de bas de page 81. En voici des exemples :

  • Collaboration avec les fournisseurs de services financés par le gouvernement fédéral (à savoir Santé Canada) en ce qui touche les compétences parentales et les aptitudes à la vie quotidienne, ainsi que le counseling en santé mentale et en matière de toxicomanie, afin qu'ils intègrent des éléments de la prévention de la violence familiale dans le cadre de leurs activités relatives aux programmes.
  • Intégration d'une combinaison équilibrée de compétences et de connaissances cliniques aux valeurs familiales et communautaires faisant partie des traditions et de la culture mohawks, soit une composante clé pour obtenir l'acceptation et l'engagement de la collectivité.
  • Établissement de plus de 20 partenariats ayant permis la réalisation de plus de 50 activités de prévention distinctes à des gens de nombreux groupes d'âge et d'intérêt différents.

De façon semblable au Nord de l'Ontario, en Saskatchewan, des relations réciproques ont été établies entre les représentants de la santé, les SEF, les Services sociaux et le refuge. L'échange de renseignements entre ces organismes avait lieu au niveau fondamental.

En Alberta, la Three Eagles Wellness Society compte un administrateur qui collabore avec l'ensemble des Premières Nations de l'Alberta afin de préparer des propositions de projet, donne une formation aux coordonnateurs des Premières Nations, recueille les rapports que doivent produire les Premières Nations qui ont reçu des fonds pour projet et travaille de concert avec les vérificateurs afin d'élaborer la présentation annuelle de la vérification à l'intention d'AANC. En 2008-2009, la société a formé un partenariat avec la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits de Santé Canada dans le cadre de l'initiative en matière de pathogènes à diffusion hématogène. Cette initiative fait partie des ateliers pour les coordonnateurs des Premières Nations lors du Rassemblement annuel des jeunes.

Comme par le passé, tous les fonds qui n'ont pas été affectés par la société sont consacrés à des fonctions qui permettront la réalisation de projets de sensibilisation, de prévention et d'éducation qui seront profitables à toutes les collectivités de la région de l'Alberta. Grâce à ces fonds, des projets comme la formation des coordonnateurs, des rassemblements des jeunes et des campagnes de sensibilisation peuvent être mis en œuvre. Certains des événements ont été organisés en partenariat avec l'Alberta et le programme de prévention des pathogènes à diffusion hématogène et des infections transmissibles sexuellement de la Direction générale de la santé des Premières Nations et des Inuits :

  • formation à l'intention des facilitateurs dans le cadre du Rassemblement annuel des jeunes de 2015;
  • 12e Rassemblement annuel des jeunes des Premières Nations de l'Alberta;
  • formation annuelle des coordonnateurs communautaires;
  • méditation de pleine conscience.

5.2.2 Partenariats provinciaux et communautaires en matière de violence familiale

Constatation 14 : Les provinces cherchent à accroître la collaboration avec AANC pour combler les lacunes relevées quant aux services liés aux mesures de soutien en matière de violence familiale.

L'évaluation a révélé que la lutte contre la violence familiale au moyen de la prévention et de la protection est un processus complexe qui exige une approche à la fois coordonnée et exhaustive; cette approche suppose la participation, par exemple, des provinces, des territoires et des organismes. Le processus est encore plus complexe, plus particulièrement dans le cas des femmes autochtones vivant dans les réserves qui souhaitent obtenir des services de soutien à l'extérieur de leur collectivité de résidence, et des femmes vivant hors réserve, dont la collectivité est à proximité des services financés par le gouvernement provincial ou la société civile. L'évaluation a également révélé que certaines de ces administrations (gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux) ont des politiques et des stratégies portant sur la violence familiale chez les Autochtones. La Table fédérale-provinciale-territoriale sur la violence familiale, qui est présidée par l'Agence de la santé publique du Canada, a abordé certaines des complexités du processus de prévention et de protection.

Les autorités provinciales ont déterminé certains domaines clés de collaboration avec AANC en ce qui touche la prévention de la violence familiale et les mesures de soutien connexes. Dans les trois administrations visitées, les homologues provinciaux ont déterminé les domaines suivants où ils pourraient collaborer de façon plus stratégique avec les intervenants fédéraux : les programmes à l'intention des enfants visant à traiter les traumatismes, les programmes à l'intention des hommes, les services de suivi et de sensibilisation, ainsi que les services dans le Nord et d'autres régions éloignées.

Chaque province est régie par ses propres cadres législatifs et stratégiques, qui appuient généralement les collectivités autochtones. L'évaluation a révélé qu'il incombe essentiellement aux représentants d'AANC au sein des bureaux régionaux d'adapter les modèles de programme aux circonstances provinciales. Le niveau de participation est également lié à la capacité individuelle du personnel des bureaux régionaux d'entreprendre cette tâche. Certaines autorités provinciales communiquent plus souvent avec les bureaux régionaux d'AANC (Ontario, Alberta) relativement aux questions à long terme; d'autres provinces mettent l'accent sur des questions précises relatives au cofinancement provenant de refuges donnés (Saskatchewan); dans certains cas (Québec), rien ne semble indiquer qu'on communique régulièrement.

Alberta

Le gouvernement de l'Alberta a conclu l'une des premières ententes de financement avec le gouvernement fédéral, qui reconnaît le statut transitoire des résidents des réserves qui peuvent souhaiter obtenir des services sociaux hors réserve, y compris tout séjour dans un refuge d'urgence ou une maison de transition pour les femmes vulnérables. L'Entente sur le financement et l'administration des services sociaux de 1991 régit le remboursement par le gouvernement fédéral des services aux femmes autochtones de l'Alberta qui vivent normalement dans les réserves et souhaitent obtenir des services offerts par les refuges ou du soutien en cas de crise hors réserve.

Lors des entrevues avec les représentants du gouvernement de l'Alberta, on a souligné qu'en ce qui a trait à la violence familiale, le gouvernement provincial adopte une approche commune pour tous les Albertains, et ce, tant les Autochtones que les non-Autochtones. En outre, les personnes interrogées ont cerné le besoin d'établir un niveau de partenariat plus élevé avec AANC qui va au-delà des bureaux régionaux. Selon le représentant, le gouvernement provincial a des choses à apprendre quant à la façon d'améliorer son intervention en matière de violence familiale chez les Autochtones :

« Étant donné le nombre élevé de femmes autochtones qui ont recours aux refuges hors réserve à l'heure actuelle (en Alberta), ces refuges n'emploient pas d'approches culturelles et traditionnelles des Premières Nations » [traduction].

Ontario

Il existe un niveau élevé d'engagement en matière de politiques en ce qui touche les questions autochtones pertinentes soulignées dans les documents, notamment la Stratégie de ressourcement pour le mieux-être des Autochtones multisectorielle, lancée en 1994 et mise à jour en 2010. La Stratégie et l'approche correspondante en matière d'exécution de programmes sont surveillées par le ministère des Services sociaux et communautaires. Le site Web de ce ministère précise ce qui suit : Combinant les programmes et services traditionnels et généraux, la Stratégie de ressourcement pour le mieux-être des Autochtones vise à améliorer la santé des Autochtones et à réduire la violence familiale. Ces programmes et services communautaires sont offerts aux Autochtones qui vivent dans des réserves tout comme à ceux qui vivent dans des collectivités urbaines et ruralesNote de bas de page 82.

La gamme de services offerts comprend des maisons d'hébergement et des maisons de transition pour les femmes qui fuient la violence familiale et des programmes communautaires de mieux-être globaux. Les représentants du gouvernement de l'Ontario ont manifesté leur intérêt pour ce qui est d'accroître la collaboration avec AANC en vue d'examiner la prestation des services sociaux aux femmes et aux enfants autochtones vulnérables, plus particulièrement ceux qui vivent dans les collectivités nordiques éloignées et géographiquement isolées où les populations sont clairseméesNote de bas de page 83.

« Les recommandations de la Commission de vérité et réconciliation sont une indication importante que nous, en tant que gouvernements, devons améliorer notre processus de collaboration. Nous devons mieux coordonner la façon dont les gouvernements financent les programmes et les modèles que nous utilisons. » [traduction]

Représentant du gouvernement de l'Ontario
 

Sur le plan historique, AANC a une entente de financement avec le gouvernement de l'Ontario, appelée entente sur les programmes d'aide sociale pour les Indiens (entente de 1965), qui permet le financement conjoint des programmes sociaux à l'intention des clients vivant dans les réserves en Ontario et a permis le versement de fonds supplémentaires à certains refuges financés par le PPVF dans les réserves. Un exemple précis de contribution provinciale, qui suppose également une incidence immédiate sur les femmes vulnérables dans les régions éloignées, est une ligne téléphonique d'assistance immédiate 24 heures sur 24 qui permet d'entrer en contact avec un travailleur à l'intervention d'urgence à Thunder Bay, en Ontario. La ligne téléphonique d'assistance immédiate permet d'évaluer le niveau de sécurité de la personne et le refuge accessible le plus près. Elle est financée par le gouvernement de l'Ontario et appuyée par le refuge pour femmes Beendigen, à Thunder Bay. La liste des refuges financés par le gouvernement fédéral figure sur la liste du travailleur à l'intervention d'urgence; ainsi, ces refuges font partie de ce que le gouvernement de l'Ontario considère comme son réseau de points de service pour les femmes en situation de crise. Dans l'ensemble, les autorités provinciales étaient satisfaites des activités de communication et de sensibilisation; le bureau régional y a souvent recours dans le cadre des efforts de collaboration.

Saskatchewan

Le gouvernement de la Saskatchewan surveille et réglemente son réseau de maisons d'hébergement et de maisons de transition financées par le gouvernement provincial par l'intermédiaire de sa « Residential Services Act »Note de bas de page 84.

Comme l'ont mentionné les représentants provinciaux du ministère de la Justice, la relation avec AANC en ce qui a trait à la violence interpersonnelle a tendance à être ad hoc, car il n'existe aucune stratégie coordonnée particulière du gouvernement provincial pour intervenir en cas de violence familiale dans les réserves. Pour ce qui est de la planification stratégique globale, le contact officiel avec AANC est limité; toutefois, et le cas échéant, il existe une surveillance entre les deux autorités en ce qui touche les refuges qui sont cofinancés par AANC et le gouvernement provincial. Il s'agit du cas pour le refuge Piwapan à La Ronge, où le gouvernement provincial verse du financement à l'appui des salaires des intervenants en matière de prévention.

L'approche de cofinancement est considérée à la fois comme avantageuse et problématique par les autorités provinciales et fédérales. Elle est avantageuse parce que le cofinancement permet de mettre des types nouveaux et différents de soutien sous forme de programmes de prévention à la disposition des collectivités autochtones; en revanche, elle est problématique parce que des règles différentes régissent la communication et la surveillance des résultats ainsi que la collecte de données.

Pour ce qui est du financement, les refuges financés par AANC ont été en mesure d'avoir accès à une aide provinciale et aux fonds provinciaux, principalement dans le cadre de l'Interpersonal Violence and Abuse Program (programme de lutte contre la violence interpersonnelle), qui est supervisé par la Division de la justice communautaire (ministère de la Justice) du gouvernement provincial. Cette occasion s'est présentée en raison de facteurs tels que l'emplacement hors réserve du refuge (p. ex. La Ronge [Saskatchewan]) ou de la réception de paiements provinciaux pour l'admission d'Autochtones (ou de non-Autochtones) vivant hors réserve. Le refuge Piwapan, qui est hors réserve, reçoit un financement provincial. Son programme de sensibilisation fournit de l'aide aux hommes et aux femmes âgés de plus de 16 ans qui ont besoin de soutien, de services de défense des intérêts, de services d'aiguillage et de programmes éducatifs. En outre, le refuge a une ligne téléphonique d'assistance immédiate, qui, grâce à des services d'aiguillage, de soutien et d'échange de renseignements, offre de l'aide aux hommes et aux femmes autochtones en situation de crise.

Sur le plan opérationnel, l'Association provinciale des maisons de transition de la Saskatchewan est un réseau clé mettant en contact les entités financées par le gouvernement fédéral et par le gouvernement provincial en Saskatchewan. L'Association offre des ateliers, assure la mise en commun des ressources et des idées et tient des réunions périodiques où les représentants des refuges ont la possibilité d'apprendre les uns des autres.

Québec

L'évaluation a révélé très peu de communication entre le bureau régional du Québec et les autorités provinciales en ce qui concerne la mise en œuvre du PPVF. Le Secrétariat aux affaires autochtones du gouvernement provincial précise sur son site Web que les résidents autochtones du Québec ont les mêmes droits et le même accès aux services que les résidents non autochtones du Québec. Il indique également le gouvernement du Québec joue un rôle important dans le soutien des collectivités autochtones, qui résident sur son territoire, à l'appui de leur développement sur les plans social, économique, communautaire et de l'éducation.

L'Association des femmes autochtones du Québec, une organisation de la société civile active, est financée par AANC et est l'un des principaux porte-parole des femmes autochtones et des refuges de la province. Il y a six refuges financés par AANC dans la province; toutefois, aucun ne reçoit du financement du gouvernement du Québec. Le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec a un programme destiné aux clients autochtones, mais les refuges qui assurent la prestation de services aux clients autochtones ne semblent pas avoir accès aux fonds disponibles. Les associations non autochtones ont accès aux fonds afin de pouvoir offrir des services aux Autochtones qui en ont besoin. Les tentatives de communication avec les représentants du Québec pour mener des entrevues ont échoué.

Observation générale 4 : Il est évident qu'il existe plusieurs niveaux de programmes et de politiques stratégiques provinciaux et territoriaux répondant aux besoins des collectivités autochtones qui font face à des difficultés en matière de violence familiale. Il est dans l'intérêt d'offrir des services à ces collectivités que les responsables du PPVF devraient envisager de collaborer plus étroitement avec les partenaires provinciaux et territoriaux sur ces thèmes communs.

5.2.3 Partenariats communautaires

Les partenariats communautaires sont un facteur important pour déterminer la réussite des projets de prévention. Étant donné que la violence familiale est un problème à multiples facettes, pour traiter les causes de ce problème, le personnel d'application de la loi, les représentants des soins de santé et les travailleurs sociaux doivent échanger des renseignements. En Alberta, une tribune pour l'échange de renseignements est la tenue de réunions hebdomadaires « centralisées ». Ces réunions permettent aux partenaires de se rencontrer afin de discuter de cas précis de violence dans la collectivité et de l'intervention appropriée. Un certain nombre d'organismes de bande clés prennent part à ces réunions centralisées, dont des représentants de secteurs tels que la santé et le mieux-être, le logement, les SEF, de même que le personnel des refuges et les aînés de la collectivité. L'expérience des réunions centralisées en Alberta est encouragée puisqu'elle améliore l'échange d'expertise sur la résolution du problème de violence familiale.

Le programme des plans de sécurité communautaire de Sécurité publique Canada constitue un autre exemple d'une initiative visant à encourager les Premières Nations à former des partenariats communautaires pour atteindre des résultats établis en matière de sécurité. Au début du programme en 2010, Sécurité publique Canada a travaillé de concert avec la GRC et d'autres organismes partenaires pour créer une liste de 50 collectivités vulnérables à qui l'on offrirait le plan de sécurité communautaire. Au départ, seules 13 collectivités participaient au programme, mais depuis, ce nombre est passé à 26. Les responsables du programme attribuent la diffusion du plan de sécurité communautaire au bouche-à-oreille. De même, les résultats en matière de sécurité déterminés par la collectivité exigent souvent l'établissement de partenariats. Ainsi, la communication entre les collectivités et les responsables des différents programmes est essentielle à la conception du plan de sécurité communautaire.

5.2.4 Mise à contribution des ressources d'autres secteurs de programme

Les projets de prévention couronnés de succès supposent habituellement l'établissement de solides partenariats et la mise à contribution des ressources d'autres secteurs de programme. Un certain nombre d'informateurs clés ont signalé le besoin d'une approche « de guichet unique » à l'égard du financement des programmes de prévention, car celle-ci aiderait les ministères à mettre l'accent sur les objectifs clés, ce qui se traduirait par de plus grandes répercussions sur les Premières Nations à l'échelle du pays. On a mentionné qu'étant donné que les mandats de Santé Canada et d'AANC relativement aux Premières Nations sont étroitement liés, il faudrait déployer des efforts accrus à cet égard en premier lieu, en mettant en commun le financement destiné à la prévention. Selon des données probantes, ce serait déjà le cas. À titre d'exemple, étant donné le financement limité du PPVF destiné aux activités de prévention, certaines collectivités des Premières Nations ont eu recours au financement du programme Grandir ensembleNote de bas de page 85 de Santé Canada pour tirer parti de ses ressources afin d'obtenir un financement suffisant en matière de prévention de la violence familialeNote de bas de page 86. Le programme Grandir ensemble englobe un large éventail d'activités donnant suite aux priorités établies par la collectivité et est bien conçu à cette fin. Étant donné que chaque collectivité reçoit du financement dans le cadre du programme, il est possible que les ressources soient affectées aux programmes de prévention de la violence familiale.

La Thunderbird Partnership Foundation dans le Sud de l'Ontario est un organisme qui facilite la mise à contribution des ressources. L'un des informateurs clés a indiqué que la fondation était un bon modèle à l'appui des approches horizontales en matière de financement des activités de prévention. Tout en accordant la priorité à l'accès de l'ensemble des Premières Nations à un continuum de soins, la fondation met l'accent sur le renforcement de la capacité des collectivités de faire face aux problèmes liés à la consommation de drogues et aux toxicomaniesNote de bas de page 87. La Fondation emploie du personnel possédant une expertise relative à la mise en commun des ressources pour les initiatives globales en matière de soins de santé. Cette approche tient compte d'un financement augmenté pour les activités de prévention.

Même s'il existe des exemples de la mise à contribution des ressources, les constatations de l'évaluation donnent à penser qu'on pourrait en faire plus dans le cadre de ces initiatives horizontales à l'appui des projets de prévention du PPVF. Plusieurs informateurs clés ont indiqué que les partenaires de l'Initiative de lutte contre la violence familiale travaillent de façon cloisonnée, ce qui mine les rapports significatifs. On a affirmé que la collaboration n'a pas beaucoup progressé au-delà de l'« échange de renseignements ». Les personnes interrogées ont donc proposé un « guichet unique » pour le financement des activités de prévention de la violence familiale pour contribuer à éviter tout chevauchement inattendu ou possible de services.

5.3 Répercussions des programmes de prévention

5.3.1 Participation et rétroaction communautaire

La détermination des niveaux de réussite des programmes de prévention demeure un défi. Des données de référence sur la violence familiale dans les réserves ne sont pas disponibles. L'évaluation de la baisse des taux de violence familiale attribuable aux initiatives de prévention (c.-à-d. l'affectation) va au-delà des capacités des refuges et des collectivités. L'examen des documents a révélé que d'autres pays ayant d'importantes populations autochtones ont trouvé difficile de déterminer si les activités de prévention ont entraîné une hausse ou une baisse des taux de violence familiale au cours des dernières années. Les recherches ont révélé que de nombreux programmes de prévention à l'intention des Autochtones sont adaptés aux jeunes dans le but de rompre les cycles intergénérationnels de comportements violents. Comme le confirme l'examen des documents, on n'est susceptible d'observer les résultats de ces efforts de prévention, en assurant une surveillance soutenue, que sur une longue période. En dépit des difficultés concernant la collecte de données sur la violence familiale, plusieurs sources de données illustrent le fait que les activités de prévention reçoivent généralement un accueil favorable de la part des collectivités. Le fait que ces activités sont surtout conçues par les collectivités elles-mêmes a favorisé un taux élevé de participation dans bien des cas.

La détermination de l'incidence de la prévention est principalement empirique et étayée par les cas de collectivités participant aux activités de prévention au cours d'une période soutenue. Dans l'ensemble, l'évaluation de l'efficacité des projets de prévention et la détermination de l'affectation peuvent être difficiles. Il s'agit tout particulièrement du cas lorsque plusieurs facteurs comme les montants de financement ou le cofinancement sont pris en considération. Les projets de prévention dans les collectivités visitées révèlent que certains de ces projets ont tiré parti du cofinancement d'autres initiatives. En outre, l'information recueillie donne à penser que de nombreux facteurs qui transcendent le PPVF exercent une influence sur le comportement des résidents de la collectivité. À titre d'exemple, les activités de prévention se déroulent habituellement à long terme et par conséquent, leur réussite ne peut être évaluée qu'au fil du temps. Toutefois, d'autres moyens comme les évaluations à court terme ou les enquêtes, menées par les responsables du PPVF, facilitent la détection anticipée de certains indicateurs d'efficacité.

Les récits des quatre visites sur place de l'équipe d'évaluation sont présentés à l'annexe B. Ces récits soulignent certaines des réalisations liées aux programmes de prévention du PPVF. Au sein de la Première Nation de Mishkeegogamang, le personnel des refuges a employé des approches novatrices pour mettre en œuvre des processus de mise en commun des connaissances relatives aux services de prévention disponibles, malgré l'emplacement éloigné de la collectivité. Fort Qu'Appelle a lancé un certain nombre de programmes de guérison à l'intention des hommes adaptés sur le plan culturel, dont le Leading Thunderbird Lodge et le programme « Walk the Good Road ». Enfin, Akwesasne et la Three Eagles Wellness Society ont été en mesure d'étendre la portée des programmes de prévention à un grand nombre de collectivités des Premières Nations dans leurs provinces respectives.

Observation générale 5 : Il est nécessaire d'améliorer l'exécution des programmes en examinant les approches holistiques qui tiennent compte des valeurs culturelles et en mettant davantage l'accent sur celles-ci, en facilitant l'accès au financement pour les activités de prévention des collectivités ayant une capacité limitée de présenter des demandes de financement, en augmentant le nombre de partenariats en matière d'exécution de programmes, en augmentant le nombre de programmes de prévention à l'intention des hommes et des jeunes, ainsi qu'en recueillant des données statistiques améliorées à l'appui des modifications et des améliorations à apporter aux programmes.

 

 

6. Conclusions et recommandations

L'évaluation a porté sur six questions d'évaluation. Les réponses à chacune de ces questions sont présentées ci-après en tant que conclusions du présent rapport.

1. Le PPVF est-il approprié pour prévenir la violence familiale dans les collectivités autochtones?

Le PPVF d'AANC est approprié pour prévenir la violence familiale dans les réserves. Il finance les refuges et les services de protection contre la violence familiale, ainsi que les services et les activités de prévention à l'intention des femmes, des enfants et des familles vivant ordinairement dans les réserves. L'évaluation a aussi révélé que le nombre de personnes qui ont besoin de services de protection et de prévention dépasse considérablement la capacité du Programme; en outre, il faut accorder une attention accrue à la prestation d'un plus grand nombre de logements de transition aux victimes de violence ainsi qu'à l'augmentation du nombre de programmes de prévention et de traitement destinés aux hommes et aux garçons.

2. Quels sont les principaux éléments que le PPVF doit prendre en considération afin d'atteindre ses objectifs en réponse aux recommandations de l'évaluation de 2012?

Les responsables du PPVF ont réalisé d'importants progrès en réponse aux recommandations de l'évaluation de 2012 d'AANC, notamment renforcer les relations avec les autres ministères fédéraux, améliorer la production de rapports sur les services des refuges et les services de prévention, élaborer des données améliorées sur les dossiers et l'information de gestion et les mettre à jour, ainsi que travailler en étroite collaboration avec les organismes autochtones pour élaborer et offrir une formation spécialisée à l'intention des employés des refuges et des agents de prévention.

3. Conception et exécution : les refuges répondent-ils aux besoins des clients, notamment en ce qui a trait à l'accès et aux services offerts?

Selon leurs capacités et les programmes offerts, les refuges répondent, avec plus ou moins de succès, aux besoins des clients en ce qui a trait à l'accès, aux services de protection et au soutien. Toutefois, il demeure des obstacles pour bon nombre de femmes autochtones ayant besoin de services de protection et de prévention, dont le manque de services de garde d'enfants et de transport pour avoir accès aux services externes du refuge, l'éloignement et l'isolement des réserves par rapport à l'emplacement des refuges, ainsi que le manque de services et de soutien en matière de programmes une fois qu'elles ont quitté le refuge.

4. Exécution et rendement : les programmes de prévention sont-ils efficaces? Quelles sont les possibilités d'amélioration de leur incidence?

L'efficacité globale des initiatives de prévention n'est pas claire. Les intervenants ont convenu à une écrasante majorité que les activités de prévention permettront de réduire la violence familiale à moyen et à long terme. Toutefois, en raison du manque d'information fondée sur des données probantes, il est impossible de déterminer la mesure dans laquelle les activités de prévention permettent de réduire la violence familiale, les types d'activités de prévention ayant la plus grande incidence et si les refuges ou d'autres organismes communautaires tels que les centres de santé et de mieux-être offrent des activités de prévention de manière plus efficace.

Le consensus parmi tous les intervenants est que la prestation de services de protection immédiats aux femmes et aux enfants en situation de crise doit avoir la préséance sur la prévention, ce qui est reflété dans le budget du PPVF où environ 75 % des fonds sont affectés à la protection et 25 % des fonds sont affectés à la prévention. Bien que le financement pluriannuelNote de bas de page 88 ait été mis en place en 2014 pour les programmes de prévention, de nombreux groupes interrogés dans le cadre de cette évaluation indiquent qu'ils ne savaient pas qu'ils pouvaient établir des plans de plus d'un an. Le financement limité accordé aux projets de prévention et un manque de connaissance probable de la possibilité de financement pluriannuel se sont traduits par la croyance selon laquelle les projets de prévention sont des solutions à court terme aux problèmes à long terme.

5. La structure de financement actuelle du PPVF contribue-t-elle à l'exécution efficace du Programme?

L'approche axée sur les projets annuels qui est employée par la majorité des régions d'AANC nuit à l'efficacité, car les coûts que doivent engager les Premières Nations et les efforts qu'elles doivent déployer pour produire des demandes annuelles visant des projets de prévention peuvent dépasser le montant du financement reçu de la part d'AANC, les projets d'un an empêchent les Premières Nations de prévoir des activités de prévention à moyen et à long terme, l'accès incertain au financement continu rend difficiles le recrutement et le maintien en poste de personnel qualifié, et les petites collectivités éloignées font face à des obstacles plus importants et n'ont souvent pas la capacité nécessaire au sein de leurs collectivités d'élaborer et de présenter des demandes qui seront acceptées; elles ne sont donc pas retenues pour recevoir du financement destiné aux activités de prévention.

Les modèles globaux dans certaines régions ont permis de corriger certains de ces aspects inefficaces en aidant les collectivités à tirer parti des ressources destinées aux programmes de prévention et en orientant les refuges et les organismes dans le cadre du processus de demande. L'inconvénient de cette approche est qu'environ 15 % du budget de prévention de la région est utilisé pour financer ce processus administratif plutôt que des projets de prévention.

6. Dans quelle mesure le PPVF atteint-il les résultats escomptés (répercussions sur les personnes touchées)?

La capacité des projets de prévention d'atteindre le résultat escompté de la réduction de la violence dépend, au bout du compte, du financement relativement minimal affecté à ce volet du PPVF. Depuis 1991, le budget est demeuré stable à environ 7 millions de dollars, ce qui n'a pas permis de suivre le rythme de l'inflation de 36 % enregistrée au cours de cette périodeNote de bas de page 89. Pour atteindre les résultats du Programme, il existe un besoin continu de maintenir et de renforcer les partenariats entre les autres ministères fédéraux, les régions et d'autres intervenants.

La détermination du succès des activités de prévention du PPVF est et demeurera un défi en raison d'un manque de méthodes statistiques et fondées sur des données probantes pour évaluer les résultats. Ce problème est d'autant plus complexe que l'approche du PPVF dans de nombreuses régions consiste à financer des projets de prévention nouveaux et différents plutôt que de mettre l'accent sur une stratégie et une approche à long terme.

6.1 Recommandations

Il est recommandé qu'AANC prenne les mesures suivantes :

  1. Renforcer les activités de prévention, plus précisément :
    1. dresser un inventaire des modèles existants d'exécution de programmes de prévention (p. ex. direction par une collectivité de Première Nation, un conseil tribal ou d'autres organisations de la société civile, modèle global pour un thème donné) pour favoriser l'adoption de pratiques exemplaires dans chaque région;
    2. mettre l'accent, d'après l'inventaire, sur l'expertise existante pour établir des modèles globaux, semblables à ceux qui sont utilisés en Alberta et au Manitoba, lorsque cela est approprié; et
    3. fournir aux collectivités autochtones et à leurs représentants les outils qui leur permettront de renforcer leur capacité de planification, de mise en œuvre et de supervision pour faire en sorte que les activités de prévention soient efficaces.
  2. Réorienter le PPVF afin qu'il favorise une meilleure accessibilité ou disponibilité des logements de transition dans des régions stratégiques, plus précisément :
    1. accroître les exigences relatives à la reddition de comptes et à la collecte de données pour avoir une meilleure compréhension des niveaux de capacité existants au sein du réseau de refuges financés par le PPVF; et
    2. envisager la conversion de certains centres de services d'urgence pour qu'ils offrent un logement de transition lorsque de nouvelles données sur la capacité des refuges seront disponibles.
  3. Déployer des efforts plus structurés afin de favoriser le mentorat et l'échange de connaissances au sein du réseau de refuges financés par AANC pour ainsi renforcer la capacité du personnel des refuges de répondre aux différents besoins des membres de la collectivité.
  4. Favoriser l'accès des clients autochtones à l'ensemble des services offerts, plus précisément :
    1. miser sur les efforts d'échange d'information existants pour coordonner l'harmonisation des programmes financés par le gouvernement fédéral; et
    2. participer à la mise en correspondance stratégique des services provinciaux et territoriaux.
  5. Évaluer les besoins et élaborer une stratégie de prévention complète pour joindre davantage d'hommes et de jeunes hommes au moyen de programmes de prévention communautaires adaptés sur le plan culturel.
 

 

Annexe A – Bibliographie

AANC. Carte interactive des profils des Premières Nations

Affaires autochtones et du Nord Canada. Audit of Family Violence Prevention Program, Affaires autochtones et du Nord Canada, 2009. Mandat.

Affaires autochtones et du Nord Canada. Évaluation du Programme pour la prévention de la violence familiale, Affaires autochtones et du Nord Canada, 2016. Mandat.

Affaires autochtones et du Nord Canada. Performance Measurement Strategy - 2.2 Social Development, sector of Education and Social Development Programs and Partnerships, Stratégie de mesure du rendement, 2014.

Agence de la santé publique du Canada (ASPC).

Agence de la santé publique du Canada. Qu'est-ce que la violence familiale?

Amnistie internationale. Violence Against Indigenous Women and Girls in Canada: A Summary of Amnesty International's Concerns and Call to Action, 2014. (pas disponible en français).

Brennan, Shannon. La victimisation avec violence chez les femmes autochtones dans les provinces canadiennes, 2009, Statistique Canada.

Commission de vérité et réconciliation du Canada. Commission de vérité et réconciliation du Canada : Appels à l'action, numéros 1; 19; 20; 22; 30; 33 à 36; 37 à 40; 55.

Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (Enquête nationale FFADA), 2017.

Gendarmerie royale du Canada. Les femmes autochtones disparues et assassinées : un aperçu opérationnel national, 2013.

Gouvernement du Canada. Programme national de lutte contre l'abus de l'alcool et des drogues chez les Autochtones (PNLAADA) Examen général 1998, Rapport fina.

Justin Trudeau, premier ministre du Canada. Le premier ministre annonce le Groupe de travail de ministres chargé d'examiner les lois et les politiques liées aux autochtones Déclaration du premier ministre, 2016.

L'Assemblée des Premières Nations (APN). Lamontagne, Manon. Violence Against Aboriginal Women, Analyse et rapport, Fondation canadienne des femmes, 2011.

Ontario. Ministère des Affaires municipales, ministère du Logement. Logements pour les familles autochtones hors réserve.

Ontario. Ministère des Services sociaux et communautaires. Programmes destinés aux Autochtones : Stratégie de ressourcement pour le mieux-être des Autochtones.

Preventing Violence Across the Lifespan Research Network (preVAIL). Identifying and Responding to Intimate Partner Violence, Document de recherche, 2016.

Programme pour la prévention de la violence familiale, Dossier de présentation, octobre 2015.

Shaw, Candice. « The Contours of Family Violence in Indigenous Communities: The Prevalence and Effectiveness of Initiatives Implemented to Address Indigenous Family-Based Violence », Aboriginal Policy Study Papers, Institute for the Study of International Development, McGill University, Montréal, 2013.

Statistique Canada. La victimisation chez les Autochtones au Canada, 2014.

The Representative for Children and Youth. Fragile Lives, Fragmented Systems: Strengthening Support for Vulnerable Infants, 2011.

Thunderbird Partnership Foundation. 2017.

Tribunal canadien des droits de la personne.

Willier, Marilyn G. 3 Eagle Wellness Society: Annual Report 2015-2016.

 

 

Annexe B – Documents

Tableau 8 : Analyse de la proximité des refuges
Province ou
région
Nombre de
refuges
Nombre de
collectivités desservies**
Moins de
150 km
Plus de
150 km
Nombre de femmes
et d’enfants servis
en 2012-2013
Yukon 1 6 1 15 50
Colombie-Britannique 6 167 92 75 425
Alberta 6 44 31 13 2 185
Saskatchewan 4 105 41 25 605
Manitoba 4 33 24 20 1 894
Ontario 9 105 56 49 1 408
Québec 6 33 14 19 518
Atlantique 5 34 29 5 126
Totals: 41 509 288 221 7 211

*L’analyse des proximités effectuée pour l’évaluation du PPVF de 2012 ne faisait pas état du nombre total de Premières Nations au Canada (617). Les responsables du programme examinent actuellement le nombre total de collectivités desservies pour rendre compte de cet écart. Les raisons de l’écart comprennent l’exclusion des collectivités de Premières Nations des Territoires du Nord-Ouest et de certaines bandes sans assise territoriale ainsi que la définition du terme « collectivité » qui ne correspond pas à celle de « bande » d’une Première Nation (pouvant comprendre plus d’une collectivité).
**Toute personne peut recevoir des services d’un refuge, et ce, quel que soit son lieu de résidence ou son statut.

 
Tableau 9 : Profils des refuges établis lors des visites
Lieu Fonds de fonctionnement (2014-2015) Fonds provinciaux (2014-2015) Fonds de fonctionnement (2013-2014) Fonds provinciaux (2013-2014) Nombre d’employés (y compris les employés permanents et à temps partiel ainsi que les directeurs) Nombre de lits
Lieu 1 : Akwesasne (Ontario) 1 375 004 532 947 832 959 S.O. 7 18
Lieu 2 : Mishkeegogamang (Ontario) 454 535 S.O. 494 170 S.O. 5 10
Lieu 3 : Fort Qu’Appelle (Saskatchewan) 1 797 935 639 740 1 438 601 638 740 10 17
Lieu 4 : Sucker Creek (Alberta) 643 617 S.O. 774 683 98 365 13 21 (7 chambres, mais AANC ne finance que 4 chambres)
 

Tableau 10 : Initiatives fédérales de lutte contre la violence familiale

Le gouvernement fédéral a travaillé à plusieurs niveaux pour s'attaquer au problème de la violence envers les femmes y compris le taux élevé de violence faite aux femmes et aux filles autochtones. Voici un aperçu de certaines initiatives fédérales.

  • 1978 : AANC commence à prendre part à la prévention de la violence familiale en remboursant le coût de maisons d'hébergement à certains gouvernements provinciaux et au gouvernement territorial du YukonNote de bas de page 90.
  • 1988 : Lancement de l'Initiative de lutte contre la violence familiale et d'un réseau de soutien de 13 ministères fédéraux.
  • 1991 : Le gouvernement du Canada finance la création de 5 centres de recherche sur la violence familiale et la violence faite aux femmes.
  • 1993 : Lancement de l'Enquête sur la violence envers les femmes, la première de ce type au Canada.
  • 1996 : Publication du Rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones, dont l'une des sections porte sur la violence familiale dans les collectivités autochtones.
  • 1997 : Le gouvernement du Canada crée un fonds de guérison pour s'attaquer aux effets intergénérationnels et aux séquelles laissées par les pensionnats.
  • 1998 : Première publication de La violence familiale au Canada par Statistique Canada.
  • 2004 : Une aide est fournie à l'initiative Sœurs par l'esprit de l'Association des femmes autochtones du Canada.
  • 2014 : Lancement du Plan d'action pour contrer la violence familiale et les crimes violents à l'endroit des femmes et des filles autochtones du Canada.
  • 2015 : Publication des Appels à l'action de la Commission de vérité et de réconciliation.
  • 2016 : Lancement de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées.
  • 2016 : Annonce d'un financement additionnel dans le budget :
    • 10,4 millions de dollars sur trois ans pour appuyer la rénovation et la construction de nouveaux refuges pour les victimes de violence familiale dans les collectivités des Premières Nations;
    • 33,6 millions de dollars sur cinq ans, plus un montant permanent pouvant atteindre 8,3 millions de dollars, pour mieux soutenir les refuges qui aident les victimes de violence familiale dans les collectivités des Premières Nations.
  • 2017 : Engagement concernant l'élaboration d'une stratégie fédérale de lutte contre la violence fondée sur le sexe (en cours).
 

Rapports de visites

Récit 1 : Mishkeegogamang Safe House (Ontario) [nord-ouest]

Mentorat du personnel des refuges du nord de l'Ontario

Le PPVF a adopté une approche novatrice dans la région de l'Ontario pour former le personnel des refuges de collectivités éloignées dans le nord de la province avec la participation d'employés de refuges du sud de l'Ontario. Le personnel et les directeurs de l'Akwesasne's Iethinisten:ha Women's Shelter ont contribué à l'élargissement du portefeuille de programmes offerts dans la Première Nation Mishkeegogamang avec leur expertise des programmes de prévention. Grâce à un investissement de 70 000 $ sur trois mois Note de bas de page 91, les employés de refuges de collectivités du sud ont formé et aidé le personnel de Mishkeegogamang à offrir trois nouveaux programmes concernant la formation des formateurs sur la prévention du suicide, la paternité ainsi que la perte et le deuil.

Les séries de crisesNote de bas de page 92 observées dans la collectivité révèlent qu'il est important de regrouper les services de consultation et de prévention que le refuge peut fournir. Les employés du refuge ont indiqué qu'ils ne se sentaient pas prêts à composer avec la pression d'une gestion de crise continue. Le cycle de pertes dans la communauté, ce qui a également une incidence sur le personnel du refuge, témoigne des difficultés que peuvent rencontrer les membres d'une communauté qui souffrent de dépendance, de troubles de santé mentale ou d'autres problèmes familiaux. Des représentants d'AANC en Ontario sont donc intervenus pour établir des liens avec leurs collègues d' Akwesasne et renforcer les capacités du personnel.

 

Récit 2 : Fort Qu'Appelle (conseil tribal File Hills Qu'Appelle) [Saskatchewan]

Programmes culturels pour favoriser la guérison

Le Leading Thunderbird Lodge est un centre pour les jeunes hommes âgés de 12 à 18 ans qui sont de jeunes délinquants accusés d'une infraction ou qui vivent différents problèmes à la maison. L'approche du Leading Thunderbird Lodge consiste à favoriser la guérison et le changement de comportement par des activités et des compétences culturelles. Ces compétences comprennent notamment le camping, le tannage des peaux, les cérémonies de purification, les sueries, la menuiserie et l'équitation. Le Leading Thunderbird Lodge est membre de la Thunderbird Partnership Foundation, qui conçoit et appuie des approches de guérison holistiques pour les Premières Nations. L'approche générale du centre reflète l'orientation du document Honoring Our Strengths Renewal Framework et du cadre du continuum du mieux-être mental des Premières Nations de Santé Canada et de l'Assemblée des Premières Nations. Le Leading Thunderbird Lodge est financé par Santé Canada.

Les instructeurs ont indiqué qu'il est important que les clients passent du temps dans la nature et qu'ils en apprennent plus sur les rôles masculins traditionnels au sein des communautés autochtones.

Par ailleurs, un autre programme prometteur, le Walk the Good Road Program, a recours à une approche fondée sur la tradition culturelle et l'analyse des causes fondamentales des comportements violents. Les sept enseignements ancestraux communs à de nombreuses populations autochtones du Canada sont au cœur de ce programme. Le cours peut être adapté en fonction de l'histoire et des traditions de chaque collectivité où il est offert. Le programme est destiné aux adultes, aux jeunes et aux animateurs. Les participants ont indiqué que les références culturelles ont favorisé leur guérison ainsi que celle de leur communauté parce qu'ils ont pu attribuer certaines causes fondamentales de la violence à leurs pertes culturelles.

 

Récit 3 : Première Nation Akwesasne, près de Cornwall (Ontario); Saint-Régis (Québec)

Rejoindre les membres d'une grande réserve située principalement en région rurale par un réseautage stratégique

L'Akwesasne Iethinisten:ha Women's Shelter fournit des services du PPVF à une très grande populationNote de bas de page 93. En effet, des membres de la bande vivent en Ontario, au Québec et aux États-Unis et le refuge est situé en Ontario. Pour fournir les services du PPVF dans la communauté, les employés du refuge d'Akwesasne doivent tenir compte du fait que la population est dispersée, ce qui requiert une approche à multiples facettes et une collaboration avec divers groupes communautaires.

L'on a décidé d'établir un partenariat avec le plus grand nombre possible d'organisations de la bande qui travaillent sur divers programmes et projets pour la communauté. Au total, 50 partenariats ont été conclus. Ces partenariats bénéficient d'un financement relativement modeste, soit de 250 à 1 500 $ pour soutenir les activités en cours. En échange, les partenaires doivent diffuser un message de prévention de la violence. Cet effort de prévention est grandement facilité par une coalition communautaire de lutte contre la violence qui travaille avec des représentants des trois territoires, y compris les services de police, le personnel des écoles et les fournisseurs de soins de santé. Voici des exemples de projets faisant l'objet d'un partenariat avec le refuge :

  • un camp jeunesse où de jeunes hommes et femmes sont sensibilisés à la dignité et au respect mutuel;
  • un programme d'artisanat où les participants ont discuté du bien-être familial et des compétences parentales;
  • des activités récréatives, sportives et éducatives qui font la promotion d'approches non violentes de résolution des conflits.

Les responsables utilisent à bon escient les sommes importantes que leur verse le gouvernement de l'Ontario pour le fonctionnement du refuge ainsi que pour l'élargissement de son offre de programmes de prévention adaptés sur le plan culturel.

 

Récit 4 : High Prairie (Alberta)

Approche de prévention pour améliorer la couverture des collectivités de Premières Nations

L'Alberta est l'une des deux provinces canadiennes qui ont recours à un modèle global ou à un conseil de prévention pour fournir la majorité des programmes de prévention soutenus par le PPVF.

La Three Eagles Wellness Society a droit à la majeure partie du budget de prévention, soit 610 000 $. Les principaux avantages de cette approche sont que la Three Eagles Wellness Society travaille en étroite collaboration avec de petites collectivités qui peuvent ne pas avoir les capacités requises pour concevoir un programme de prévention et que le nombre d'employés d'AANC requis pour gérer le PPVF est réduit. Par contre, la déduction du budget du programme qui correspond à 15 % des coûts administratifs de la Three Eagles Wellness Society (91 000 $) est le principal inconvénient.

La Première Nation de Samson est l'un des bénéficiaires du financement du PPVF. Elle a ajouté à ses projets un volet relatif au bien-être des jeunes et des enfants puisqu'ils sont également victimes de traumatismes lorsqu'il y a de la violence chez eux. La Première Nation a recours à une approche de réseautage et elle tient des réunions hebdomadaires avec toutes les organisations clés de la bande (santé et bien-être, logements, refuges, services à l'enfance et à la famille, aînés, etc.) ainsi que des agents de probation et des représentants de la GRC pour aborder des cas de violence précis ou le problème plus général de la violence dans la communauté. L'on s'accorde généralement sur le fait que cette approche est très productive.

 
 

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