Rapport Mayer sur le transfert des responsabilités au Nunavut

auteur : Paul Mayer Fasken Martineau DuMoulin LLP
date : juin 2007

Les opinions et les points de vue exprimés dans ce rapport sont ceux de M. Paul Mayer, représentant supérieur du ministre dans le dossier du transfert des responsabilités au Nunavut. Ces opinions et points de vue ne sont pas nécessairement ceux du gouvernement du Canada.

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Table des matières

1. Le mandat

À la fin de novembre 2006, l'honorable Jim Prentice, ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien et interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits (le ministre) m'a nommé représentant supérieur du ministre pour le transfert des responsabilités au Nunavut.

En vertu de la Loi sur le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien, leministre assure l'administration, la régie et la gestion des terres, des forêts, des ressources en eau, en minerais, en pétrole et en gaz du territoire du Nunavut ainsi que la gestion des questions environnementales liées aux terres et aux ressources du territoire. Ces responsabilités sont généralement acquittées par les gouvernements provinciaux.

Depuis les années 1970, le gouvernement fédéral a progressivement transféré les pouvoirs décisionnels aux gouvernements territoriaux.Au fil des ans, le Canada a transféré des pouvoirs importants au gouvernement du Nunavut (le GN), notamment les pouvoirs concernant l'imposition, les services de soins de santé, l'éducation, les services sociaux, le logement, les aéroports ainsi que les questions civiles et linguistiques. Dans le cas du Yukon, la responsabilité de la gestion des terres et des ressources a été transférée au territoire en 2003. Des discussions se poursuivent depuis 2002 au sujet du transfert de la gestion des terres et des ressources des Territoires du Nord-Ouest (les T.N.-O.)

Comme l'a indiqué la vérificatrice générale du Canada (la vérificatrice générale) dans son rapport de 2003, le transfert de responsabilités aux gouvernements du Nord représente un changement important dans la gouvernance du Nord canadien, qui montre combien le Canada a évolué en tant que nation nordique : « Par les mesures qu'ils prennent, le gouvernement fédéral et les Canadiens reconnaissent que le Nord, plus qu'une simple terre lointaine, est aussi un territoire ancestral pour ceux qui y vivent.Note de bas de page 1 »"

Ce transfert de responsabilités a pour objectifs stratégiques de :

En décembre 2004, le gouvernement fédéral a annoncé qu'il entendait entreprendre les négociations sur le transfert des responsabilités avec le GN dans un avenir rapproché : « [...] conformément à son engagement de transmettre aux gouvernements du Nord des responsabilités de type provincial, le gouvernement du Canada entamera des négociations avec le Nunavut, dans l'année qui vient, sur le transfert des responsabilités. Le gouvernement du Canada et le gouvernement du Nunavut aimeraient conclure une entente sur le transfert des responsabilités le plus rapidement possible et se sont fixé le but de parvenir à une entente définitive d'ici décembre 2008 ».Des discussions exploratoires ont étémenées par les représentants du gouvernement fédéral, du GN et de Nunavut Tunngavik Incorporated (NTI) en 2005.

Compte tenu du changement de gouvernement de janvier 2006 et du temps passé depuis ces premières discussions, leministrem'a demandé d'examiner avec un regard nouveau et impartial cette question importante pour l'autodétermination politique et économique de ce jeune territoire. J'ai été chargé de fournir des avis objectifs auministre sur ces questions et de déterminer la probabilité d'entreprendre de négociations productives, constructives et efficaces sur le transfert des responsabilités entre le gouvernement fédéral, le GN et NTI. En outre, on espérait que je parvienne à établir et à promouvoir de bonnes relations avec le GN et NTI au sujet du transfert des responsabilités.

Compte tenu de ces objectifs :

Dans ce processus, je me suis efforcé d'établir les bases d'une bonne relation, qui sera nécessaire pour mener à bien les négociations sur le transfert des responsabilités. J'ai la conviction que l'information reçue était complète, compte tenu de l'objectif de mon mandat.

2. Le Nunavut d'aujourd'hui

Le Nunavut est un territoire de près de deux millions de kilomètres carrés, représentant environ 20 % de la masse continentale du Canada et englobant 70 % des lignes côtières canadiennes. Sa population de près de 30 000 personnes (85 % d'Inuits) est répartie dans 25 collectivités isolées les unes des autres. La capitale, Iqaluit, compte près de 7 000 habitants. Seules quelques autres collectivités ont une population de plus de 1 000 personnes.

La population du Nunavut est très jeune. Le taux de natalité y est le plus élevé au Canada. On estime que 40%des résidants du Nunavut ont moins de 16 ans et que 60 % de la population est âgée de moins de 25 ans. La population non inuite (15 %) est concentrée dans trois centres régionaux : Iqaluit, Rankin Inlet et Cambridge Bay.Dans bon nombre des petites collectivités, la population est composée d'Inuits à plus de 95 %. La moitié de la population vit dans la région de Baffin, 30 % dans la région de Kivalliq et 20 % dans celle de Kitikmeot. La population du Nunavut croît très rapidement et devrait compter près de 44 000 personnes d'ici 2020. L'inuktitut et l'inuinnaqtun, deux langues inuites, sont parlées par 70 % des Nunavummiut.

Le GN est un gouvernement populaire. Le Nunavut n'a pas de partis politiques au niveau territorial. Les résidants du territoire peuvent se porter candidats à une élection à titre personnel et non en tant que membre d'un parti. Le Nunavut a une Assemblée législative de 19 membres. À la suite d'une élection, les membres de l'Assemblée législative se réunissent pour choisir le premier ministre et former un Cabinet. Le premier ministre attribue les portefeuillesministériels. Le premierministre Paul Okalik en est à son deuxièmemandat.

Le gouvernement du Canada soutient financièrement le Nunavut par le biais de transferts en matière de santé et de services sociaux, la formule de financement des territories (FFT) et d'autres programmes. En 2006-2007, le gouvernement fédéral a fourni environ 877 millions des 976 millions de dollars du budget territorial (soit 29 000 dollars par personne). Les dépenses totales prévues du GN pour l'exercice 2007-2008 sont de 987, 1 millions de dollars. On prévoit que les dépenses fédérales au Nunavut atteindront 1,135 milliard de dollars en 2007-2008, soit 893 millions de la FFT, 24 millions du Transfert canadien en matière de santé, 11 millions du Transfert canadien en matière de programmes sociaux, 32 millions pour l'infrastructure, 2 millions de l'Éco-Fiducie, 23 millions pour renforcer les systèmes et les pratiques de gestion financière au Nunavut et environ 150 millions en dépenses d'AINC et d'autres ministères.

Dans son rapport de mai 2006, le Groupe d'experts sur la péréquation et la formule de financement des territoires (le rapport O'Brien) a proposé d'augmenter le FFT des territoires afin de répondre aux demandes pressantes des principaux secteurs de programmes et de tendre vers l'objectif d'autosuffisance et d'autonomie. De plus, le rapport proposait d'évaluer les besoins du Nunavut en matière de dépenses et de fournir des fonds additionnels au moyen de programmes ciblés autres que le FFT. Un exemple est l'engagement pris par le gouvernement fédéral enmai 2006 d'établir un fond de fiducie de 200millions de dollars pour le logement au Nunavut. Cet investissement mènera à la construction de 725 unités de logement.

Les Inuits, qui forment le seul groupe autochtone du Nunavut, ont conclu leur revendication territoriale. Signé en 1993, l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut (ARTN) amené à la création du Nunavut en 1999, faisant des Inuits du Nunavut les plus grands propriétaires fonciers du Canada, avec un territoire de 356 000 kilomètres carrés détenu en fief simple (fee simple) soit environ 18 % du Nunavut. Les droits sur la surface et le sous-sol sont détenus à l'égard de quelque 38 000 kilomètres carrés de cette région. Ce règlement de revendication territoriale clarifie considérablement la question de l'exploitation des ressources naturelles.

L'ARTN a mis en place un régime intégré de gestion des ressources au Nunavut par la création de conseils de cogestion des ressources appelés « institutions gouvernementales » (IG). L'Accord prévoyait un transfert de capital de 1,173 milliard de dollars à la Fiducie du Nunavut sur une période de 14 ans, le dernier paiement étant prévu pour 2007. Avec l'ARTN, le Nunavut a obtenu une part des redevances liées à l'exploitation des ressources, des droits de chasse ainsi qu'un rôle plus important dans la gestion des terres et la protection de l'environnement. NTI a été créé en 1993 pour veiller à lamise en oeuvre de l'ARTN pour les Inuits du Nunavut.

Aujourd'hui, le Nunavut est à la croisée des chemins. D'une part, il offre des possibilités inouïes, comme en font foi ses vastes ressourcesminières et naturelles. Lors de réunions avec des hauts fonctionnaires du GN et des chefs d'associations inuites du Nunavut, j'ai entendu bien des gens parler avec optimisme de l'avenir du Nunavut, exposant la vision d'un territoire autonome de moins en moins dépendant des transferts fédéraux et dont les résidants jouiraient d'une qualité de vie comparable à celles de leurs compatriotes du Sud. D'autre part, malgré cet optimisme, le territoire demeure aux prises avec des défis très difficiles. La réalité se décrirait plutôt comme une combinaison d'optimisme et de désespoir. Comme l'indiquait l'ancien juge Berger dans un rapport déposé en mars 2006 (le rapport Berger), le Nunavut « fait aujourd'hui face à des changements, à un moment de criseNote de bas de page 2 ».

C'est dans ce contexte où se mêlent grandes difficultés et vent d'optimisme que doit être abordée la question du transfert des responsabilités.

2.1 Défis

Le Nunavut est aux prises avec des difficultés opérationnelles, financières et sociales importantes, qui mettent sérieusement en cause la capacité du GN d'assumer des responsabilités additionnelles. Examinons ces difficultés plus en détail.

2.1.1 Géographie

Les conditions géographiques et climatiques du Nunavut posent d'immenses difficultés. Ses 25 collectivités éloignées et isolées ne sont pas reliées par un réseau routier. Le Nunavut ne possède pas d'installations ferroviaires ni portuaires.On ne peut accéder à ses ressources inexploitées que par les voies d'eau, les chemins d'hiver, la navigation en été ou par voie aérienne. La plus grande part du Nunavut est située au nord du cercle polaire, ce qui pose des difficultés techniques pour les projets d'exploitation des ressources naturelles. Les longs hivers créent aussi des problèmes opérationnels, tandis que la courte saison de construction et de transport cause des difficultés logistiques. Les transports dépendent toujours des conditions météorologiques. Les 25 collectivités isolées du Nunavut requièrent chacune un ensemble d'infrastructures distinct : écoles, établissements de soins de santé, systèmes d'égout et d'aqueduc, production d'électricité par génératrice diesel et aéroports.

Le diesel et d'autres carburants fossiles sont utilisés pour toutes les activités personnelles, publiques et privées au Nunavut. Vingt pour cent du budget du GN est consacré à l'énergie. Les hausses du coût du pétrole ont un effet direct sur le budget du territoire. En comparaison, 21 % des dépenses opérationnelles du GN vont à l'éducation et 26 % aux soins de santé.

Les difficultés géographiques font que tout est plus coûteux au Nunavut, y compris la prestation des services gouvernementaux. C'est au Nunavut que le coût de la vie est le plus élevé au Canada, pas moins de 64 % au-dessus de la moyenne nationale. Le coût du logement y est trois fois plus élevé qu'à Ottawa. Le coût de construction à Iqaluit est de 330 $ le pied carré, contre 103 $ à Ottawa. Le litre de lait coûte 3,65 $ à Iqaluit (avec l'aide du programme Aliments-poste) alors qu'il coûte 2 $ à Ottawa. Les deux petites tomates que j'ai achetées à Cambridge Bay pour faire une salade m'ont coûté 4,17 $.

2.1.2 Société

Le Nunavut est aux prises avec de graves problèmes sociaux qui, de l'avis du GN, atteignent des proportions de crise. L'alcoolisme et la toxicomanie sont des problèmes répandus. Les taux de criminalité, de violence familiale et de suicide y sont nettement supérieurs à lamoyenne nationale. Les incendies criminels y sont aussi un problème sérieux.

En juin 2003, selon la Stratégie de développement économique du Nunavut, le taux de chômage des Inuits, y compris les personnes qui avaient cessé de chercher du travail, était de 27 % au Nunavut. Dans certaines collectivités, ce taux dépassait 50 %Note de bas de page 3.

Le Nunavut Economic Outlook Update qui a suivi (2005) énonçait les difficultés du Nunavut en matière de compétences et de capital humainNote de bas de page 4. On y indiquait notamment qu'au Nunavut, en 2004, 26 % des familles étaient dirigées par un seul parent, ce taux étant de 16%pour l'ensemble du Canada. Le revenu familialmoyen du Nunavut est de 52 624 $, contre 66 160 $ au Canada.

Plus de 55%des Inuits reçoivent un supplément de revenu et de l'aide pour l'achat du carburant et des services.

En 2003, on a dénombré 7 943 crimes violents par tranche de 100 000 habitants au Nunavut, contre 963 pour le Canada. Ce chiffre représente une hausse de 50 % depuis 1993, alors qu'au cours de la même période, l'augmentation n'a été que de 0,50 % pour le reste du Canada. Le Nunavut a affiché un taux de 7 231 infractions contre les biens par tranche de 100 000 habitants, alors que ce taux était de 4 121 pour le Canada. Cela représente une hausse de 65 % de 1999 à 2003 au Nunavut alors que le reste du Canada a affiché une réduction de 4 %.

Le taux de suicide est incroyablement élevé au Nunavut. Vingt-neuf personnes se sont enlevé la vie dans le territoire au cours de l'année 2006, qui vient au second rang parmi les pires années à ce chapitre. Les jeunes hommes de 15 à 24 ans du Nunavut sont 40 fois plus à risque de se suicider que la moyenne canadienne pour lemême groupe d'âge. Selon JackHicks, chercheur à l'International Network for CircumpolarHealth Research, le suicide est un problème « tragique et effroyable » au Nunavut. Ce phénomène relativement récent n'est pas simple à expliquer, d'autant plus qu'il ne se manifeste pas de façon isolée. Le taux élevé de suicide est révélateur dumalaise social actuel du Nunavut, lequel est causé notamment par un changement social rapide, un taux de décrochage élevé, la pauvreté, le chômage et les familles perturbées. Jack Hicks indique qu'en l'absence d'efforts adéquats et concertés, il est tout à fait possible que le taux de suicide demeure au niveau actuel au Nunavut dans un avenir prévisibleNote de bas de page 5 Le GN n'a pas encore honoré l'engagement, pris en 2004, de mettre en oeuvre une stratégie de prévention du suicide.

Le Nunavut connaît une importante pénurie de logement. Près de la moitié de la population – soit plus de 14 000 Inuits – vit dans des logements sociaux. Plus de 1 000 familles sont inscrites à une liste d'attente. On estime que 54 % des résidents du Nunavut vivent dans des logements surpeuplés. Ces conditions créent des problèmes de santé et d'apprentissage. Selon le rapport Berger, « les enfants inuits vivent dans les logements les plus surpeuplés et surchauffés du Canada où entre le tiers et la moitié des enfants, appartenant à une race qui est exceptionnellement prédisposée à l'otite moyenne chronique, souffrent de troubles de l'ouïe (les enseignants auNunavut doivent se servir demicrophones dans les salles de classe) et du retard du développement de la parole. » M. Berger ajoute :

« Imaginez les difficultés auxquelles font face les étudiants qui tentent de faire leurs devoirs scolaires lorsque 12 ou 13 autres personnes sont dans la maison (en moyenne la moitié d'entre eux étant des enfants), et que peut-être 2, 3 ou 4 personnes dorment dans chaque pièce. Le climat au Nunavut impose que ces minuscules maisons soient gardées étanches pendant environ huit mois de l'année; on trouve dans presque toutes ces maisons au moins un fumeur et souvent plus d'un; le chauffage au mazout peut produire dumonoxyde de carbone et d'autres substances polluantes. Le fait quemême un quart des enfants inuits obtiennent un diplôme du secondaire est, dans de telles circonstances, un témoignage de la ténacité de ces étudiants, de leurs parents et de leurs communautésNote de bas de page 6.

L'état de santé des Nunavummiut présente aussi un écart important. Malgré des dépenses par personne sensiblement supérieures au Nunavut en comparaison du reste du CanadaNote de bas de page 7, l'espérance de vie y est moindre et le taux de mortalité infantile et de décès causés par le cancer du poumon y est plus élevé. Par exemple, au Nunavut :

  • l'espérance de vie est inférieure de 10 %;
  • le taux de mortalité infantile est trois fois supérieur;
  • 38 % des enfants ont une insuffisance de poids à la naissance;
  • le taux de tuberculose est 18 fois plus élevé;
  • le taux de tabagisme est trois fois supérieur chez les jeunes et deux fois chez les adultes.

Le faible niveau d'éducation et le manque connexe de compétences utiles à l'emploi dans la population inuite du Nunavut forment l'un des problèmes les plus pressants du territoire. Un système d'éducation adéquat est une condition essentielle au succès du Nunavut. Celui qui est actuellement en place est voué à l'échec. Cela signifie qu'une génération entière de jeunes Nunavummiut est laissée pour compte et sera privée des occasions à venir. Seulement 24% des enfants inuits obtiennent leur diplôme d'études secondaires.Une séance d'information du ministère de l'Éducation du Nunavut a montré un lien clair entre les faibles niveaux d'alphabétisation, d'éducation et de formation et les problèmes sociaux que connaît le Nunavut. Une enquête internationale sur l'alphabétisation et les compétences des adultes,menée en 2005, révèle que plus de 70% des répondants du Nunavut ont atteint les niveaux les plus faibles en matière d'alphabétisation, soit 1 et 2. Les experts estiment que le niveau 3 est le niveau minimal requis pour la plupart des emplois, alors que des niveaux nettement supérieurs sont nécessaires pour les emplois professionnels et techniquesNote de bas de page 8

Dans un document conjoint présenté à la Table ronde nationale sur les enjeux autochtones en octobre 2004, le GN et NTI ont énoncé les difficultés et les obstacles qui se posent au GN dans la prestation de services d'éducation aux InuitsNote de bas de page 9. Un rapport publié par l'administration scolaire d'Iqaluit en novembre 2005 révèle un écart important en matière d'éducation entre le Nunavut et le reste du Canada, écart qui pourrait bien aller grandissantNote de bas de page 10. Le rapport montre que malgré les sommes considérables investies en éducation par le GN, le taux de réussite scolaire dans les écoles publiques du Nunavut représente le tiers de la moyenne nationale. Ces difficultés ont été évoquées plus récemment dans le rapport Berger.M. Berger souligne que des mesures doivent être prises pour que les Inuits aient la possibilité de recevoir une éducation qui les aidera à obtenir un emploi dans l'économie moderne

Ces problèmes d'éducation et de compétences se font aussi sentir dans le secteur des mines et de l'exploration au Nunavut. Un cadre d'une société d'exploration a déclaré : « Nous manquons de travailleurs qualifiés. On demande à notre secteur d'embaucher des Inuits,mais il est difficile de recruter des employés qualifiés. »

La pénurie de travailleurs inuits qualifiés et formés est illustrée par les difficultés de recrutement qu'a connues la seule mine en activité au Nunavut, le projet de mine de diamants Jericho. Tahera Diamond Corporation a signé avec l'Association inuite du Kitikmeot une entente sur les répercussions et les avantages selon laquelle le personnel de Jericho doit être composé, dans un délai de cinq ans, de 60 % d'Inuits. Actuellement, le personnel inuit compte pour 30 % de l'effectif de Jericho. Récemment, Tahera a annoncé qu'elle recherchait des gens qualifiés pour son programme d'apprentissage, qui requiert une dixième année. La société n'a reçu qu'un seul curriculum vitae d'un Inuit, qui sollicitait un emploi de cuisinier.

2.1.3 Gouvernance

Le GN a aussi un défi considérable à relever au chapitre de la gouvernance. Le gouvernement du Nunavut éprouve des difficultés à assumer ses responsabilités actuelles et doit composer avec un taux de roulement et de postes vacants très élevé. On m'a indiqué que « le grand problème » du Nunavut « est le manque de ressources humaines compétentes et qualifiées. Le taux de roulement est tellement élevé. Le gouvernement devrait en faire moins,mais le faire mieux. »

Ce problème est exacerbé par la difficulté d'attirer et de conserver des professionnels et des spécialistes dans le secteur privé, les IG et tous les ordres de gouvernement. Ce problème, qui est déjà colossal, ne pourra qu'empirer dans le secteur de la gestion des terres et des ressourcesNote de bas de page 11.

La main-d'oeuvre du Nunavut est largement transitoire, composée de jeunes inexpérimentés à la recherche d'une première expérience de travail. Cela signifie que les postes clés peuvent se trouver vacants à des moments critiques, à mesure que les travailleurs trouvent un meilleur emploi. Le problème se pose non seulement aux gouvernements fédéral et territorial, mais aussi au secteur privé du Nunavut. Par exemple, la durée moyenne d'un emploi au bureau régional du Nunavut (BRN) est de 18 mois, pour un taux de postes vacants actuel d'environ 22%. Le gouvernement fédéral a la chance de pouvoir compter sur le bureau régional des T.N.-O. ou les administrations centrales d'Ottawa pour obtenir de l'aide en cas de crise. Le GN n'a pas cet avantage.

Dans un document préparé en vue des discussions sur le transfert des responsabilités, le GN a indiqué que le processus de dotation « n'a pas été sans difficultés et qui continuent de perturber le gouvernement ». Le document révèle que des directions du gouvernement, des organismes inuits et le secteur privé « se pigent » mutuellement des employés « dans le but de combler leurs besoins opérationnels et de maintenir leur niveau de personnel inuitNote de bas de page 12 ».

Ces problèmes de ressources humaines ont été signalés dans les rapports de la vérificatrice générale de 2002 et de 2005 sur la gestion financière du GN. Notamment, le rapport de 2005 indiquait que la gestion financière du GN était actuellement « faible et fragile. [...] Le gouvernement n'a pas réduit suffisamment le risque d'erreurs, de mauvaises décisions ou de fraude. Dans certains cas, quand une personne compétente quitte ses fonctions, une partie des fonctions financières du gouvernement sont presque arrêtées jusqu'à ce que l'on trouve une autre personne, quelquefois des mois plus tard.Note de bas de page 13 »

Le rapport de 2005 a établi que, malgré une amélioration de la gestion financière, ces efforts « ne se sont pas traduits jusqu'à maintenant par des améliorations durables à long terme ». Lors des séances d'information tenues à Iqaluit en décembre 2006, le GN a insisté sur le fait qu'il prenait ce rapport très au sérieux et que des mesures « musclées » étaient prises pour régler les problèmes signalés par la vérificatrice générale, comme en faisait foi la somme de 2,5 millions de dollars réservée à cette fin.

À la suite des recommandations de la vérificatrice générale, le GN a instauré la méthode de comptabilité d'exercice dans son budget de 2007-2008. Le budget intègre aussi des estimations pour les sociétés et les établissements publics du territoire, le rendant ainsi plus transparent et ouvert. Dans son budget de 2007-2008, le gouvernement fédéral accorde 23 millions de dollars au Nunavut pour renforcer les systèmes et les pratiques de gestion financières.

Le GN applique un modèle de gouvernance décentralisé. Ce choix est facile à comprendre. Au Nunavut, l'économie basée sur les salaires dépend largement des emplois du gouvernement. Le GN a décentralisé son administration pour faire en sorte de répartir les possibilités d'emploie dans l'ensemble du territoire. Bon nombre de ministères sont situés à l'extérieur d'Iqaluit. Dans le cadre de la stratégie de décentralisation du GN, 459 emplois ont été déplacés vers des petites collectivités. Quelque 27 % de ces postes demeurent vacants et seulement 41% des postes comblés sont occupés par des Inuits. À ce jour, le GN estime à 32,3 millions de dollars le coût en ressources humaines de son programme de décentralisation.Note de bas de page 14

Malheureusement, cette politique n'a fait qu'empirer le problème de ressources humaines.Un rapport intitulé Building Nunavut Through Decentralization, daté de février 2002, a souligné les inconvénients importants du modèle décentraliséNote de bas de page 15. Les problèmes occasionnés par ce système sont énoncés dans les rapports de la vérificatrice générale de 2002 et de 2005. Le rapport de 2005 indique que « le personnel comptable est réparti en petits groupes décentralisés sur le territoire du Nunavut. Les grands organismes ont besoin de comptables professionnels pour assurer une direction financière. À l'heure actuelle, votre gouvernement ne compte pas suffisamment de comptables professionnels pour permettre un tel environnement décentralisé, et certainement pas assez pour s'occuper de tous les problèmes qui doivent être réglésNote de bas de page 16. » À la suite du rapport, le GN a annoncé récemment qu'il centralisera certaines fonctions comptables de deux ministères, le ministère de l'Exécutif et des Affaires intergouvernementales et celui des Services de santé et des Services sociaux, au ministère des Finances, à Iqaluit.

D'autres exemples récents illustrent les difficultés du GN à assumer ses responsabilités actuelles :

  • En janvier 2006, l'Hôpital régional de Baffin, à Iqaluit, a échoué à un examen d'agrément, pour n'avoir pas respecté certaines normes de service minimales.
  • En mars 2006, le rapport d'un expert-conseil déposé à l'Assemblée législative indiquait que le GN avait mal géré les transports maritimes annuels en période estivale depuis 2000, année où le gouvernement fédéral avait transféré la responsabilité de ce service au GN.
  • En février 2007, un article de journal a indiqué que selon le rapport d'un expert-conseil, le bureau régional d'immatriculation automobile d'Iqaluit,mal pourvu en personnel et en ressources par le GN, était en plein désarroi administratif. L'article faisait état d'une formation déficiente du personnel et d'un manque de politiques et de méthodes adéquatesNote de bas de page 17.

Lors demes visites au Nunavut, j'ai pu constater plusieurs autres problèmes auxquels fait face le territoire, soit en personne ou à la lecture de différents documents. Les journaux du Nunavut peuvent être plutôt déprimants, ne serait-ce qu'en raison de l'ampleur même des problèmes sociaux qui se posent au jeune gouvernement. Quelques semaines avantmon arrivée à Iqaluit, un article intitulé: Life on Iqaluit'sMean Streets: The Consequences of Homelessness in Nunavut are Truly Dreadful figurait en première page de l'édition du 10 novembre 2000 du journal Nunatsiaq News. L'article décrivait l'existence de jeunes filles de 13 ans qui accordaient des faveurs sexuelles en échange d'un refuge ou de mères seules dormant avec leur bébé à côté des guichets automatiques. L'article mentionnait aussi un rapport préparé par Ressources humaines et Développement social Canada, intitulé Homelessness in the Territorial North.

Plus concrètement encore, la semaine précédantmon arrivée à Cambridge Bay, au début de janvier 2007, trois personnes ont été abattues dans la ville et deux autres, blessées, ont été menées à l'hôpital. Ces événements se sont produits la même semaine où deux jeunes mères se sont enlevé la vie à Iqaluit. Quel triste départ pour la nouvelle année. J'ai exprimé mes sympathies et mes condoléances à mes hôtes de Cambridge Bay de la seule façon quim'a semblé possible, en évoquant les possibilités et l'espoir d'une viemeilleure que pourrait procurer le transfert de responsabilités à cette petite collectivité très unie de 1 300 personnes en cette période difficile. Ces événements tragiques semblent confirmer ce que j'ai entendu dire au sujet des problèmes sociaux profonds du Nunavut : « Il semble que le désespoir soit contagieux ici. »

Ces événements tragiques semblent confirmer ce que j'ai entendu dire au sujet des problèmes sociaux profonds du Nunavut : « Il semble que le désespoir soit contagieux ici. »

2.2 Optimisme

Malgré ces statistiques sociales sinistres et des défis considérables, le Nunavut est aussi un territoire offrant un potentiel et des possibilités incroyables. Tous ceux avec qui j'ai pu discuter dans le territoire ont dit croire en un meilleur avenir pour le Nunavut.

La signature de l'ARTN, en 1993, et la création du Nunavut, en 1999, ont été des étapes importantes pour les Inuits du Nunavut. Le jeune GN n'existe que depuis huit ans, « une seconde dans l'histoire des Inuits »Note de bas de page 18. Le GN a accompli beaucoup de travail en si peu de temps. Entre juin 1999 et juin 2006, la taille du GN a plus que doublé, son effectif passant de 1 200 à 2 900 personnes. Pour atténuer ses difficultés en matière de ressources humaines, leNunavut continue de recruter du personnel à l'extérieur du territoire, notamment dans les secteurs professionnels et paraprofessionnels.

Bien que le niveau d'obtention du diplôme d'études secondaires soit nettement inférieur à la moyenne nationale, le nombre de diplômés augmente légèrement chaque année, ce qui témoigne d'une amélioration graduelle du système d'éducation. Le GN estime qu'aumoins 900 personnes obtiendront leur diplôme d'études secondaires entre 2007 et 2012Note de bas de page 19. On a aussi noté une augmentation du nombre d'Inuits inscrits dans les universités canadiennes et d'autres établissements de niveau postsecondaire au cours des dernières années.

Pour pouvoir progresser, il importe de pouvoir analyser les difficultés et de cerner les solutions. Un haut fonctionnaire du BRN a déclaré que le GN doit être félicité pour avoir su quantifier l'ampleur des problèmes et adopter une approche très ciblée dans la recherche de solutions.

Le GN et NTI ont publié leur première Stratégie de développement économique en juin 2003Note de bas de page 20. Le rapport reflétait un vaste consensus quant aux orientations devant être données au développement économique du Nunavut et aux perspectives de croissance économique. Le Nunavut Economic Outlook — Final ReportNote de bas de page 21 publié en 2005 signalait également les problèmes propres au Nunavut et mettait à jour les stratégies visantà établir une économie mixte.

La Stratégie de développement économique 2003 révélait la nécessité de produire, notamment, un plan de développement économique et social pour le « capital humain » du Nunavut. Dans le contexte de la Stratégie, le GN a pris l'engagement demettre en place une grande variété de programmes de formation. En 2006, le GN et NTI ont publié leur Stratégie d'apprentissage pour les adultes du NunavutNote de bas de page 22, un programme de 20 ans s'attaquant à un bon nombre des problèmes de capacités du Nunavut. Le programme fixe les grands objectifs et lesmesures pour les atteindre et établit un processus demise en oeuvre détaillé visant à améliorer l'exécution des activités d'apprentissage des adultes au Nunavut.

Dans le cadre de la Stratégie de développement économique, le GN et NTI ont adopté plusieurs politiques sectorielles visant à soutenir et à planifier le futur développement économique du territoire. Ces politiques comprennent l'analyse des besoins du territoire en matière de logement (2005)Note de bas de page 23 , la Stratégie des pêches du Nunavut (2005)Note de bas de page 24, la Stratégie des arts et métiers du Nunavut (2006)Note de bas de page 25 et la Stratégie d'exploration et d'exploitation minières du Nunavut (2007)Note de bas de page 26. Compte tenu du coût élevé de l'énergie, le GN a annoncé récemment qu'il allait élaborer une stratégie de l'énergie, qui proposera des mesures d'économie et de conservation ainsi que des sources d'énergie non conventionnellesNote de bas de page 27.

Une autre source d'optimisme — et une réussite importante du Nunavut — est la façon dont le secteur des terres et des ressources de NTI et les associations inuites régionales (AIR) s'acquittent de leur responsabilité de gérer les terres inuites et les droitsminiers au regard desquels les Inuits possèdent des titres sur le sous-sol. Les dix employés du secteur des terres de NTI gèrent les titres relatifs à 38 000 kilomètres carrés de droits tréfonciers au Nunavut. Ils font la promotion de leurs droits miniers à l'occasion de salons commerciaux du secteurminier, dont l'événement Exploration Round-Up tenu àVancouver et auquel j'ai assisté en janvier 2007. Entre 20 et 25 employés des AIR gèrent la tenure d'accès aux terres dont les Inuits possèdent les titres sur la surface.

NTI a actuellement en main 64 ententes d'exploration conclues avec des prospecteurs et des sociétés minières pour une superficie de 6 000 kilomètres carrés. En 2006, NTI a perçu environ un million de dollars en droits et en redevances de location en vertu de ces ententesNote de bas de page 28. En 1997, NTI a adopté une politique minièreNote de bas de page 29. James Eetoolook, premier vice-président de NTI, dont le portefeuille comprend le secteur des terres et des ressources de NTI, m'a dit à Cambridge Bay qu'autrefois « les Inuits regardaient le secteur minier de l'extérieur ».

La signature de l'ARTN a tout changé. « Aujourd'hui, pour diverses raisons, nous estimons faire partie du secteur minier. Nous ne sommes plus de simples observateurs. »

Durantmon séjour à Cambridge Bay, j'ai été réconforté par la fierté et l'éloquence avec lesquelles les employés du secteur des terres décrivaient leurs réalisations dans la gestion et la promotion de leurs propriétés.

Cependant, les opinions sur leur gestion varient à l'extérieur de leur departement. Un cadre de l'industrie minière m'a indiqué que le secteur des terres de NTI avait embauché de bons administrateurs pour mettre en place le système d'administration des terres et que les employés faisaient du bon travail. Toutefois, un autre gestionnaire de l'industrie a rappelé certains problèmes que son entreprise a connus dans ses liens avec le secteur des terres de NTI.

En janvier 2007, j'ai eu le plaisir de visiter le Nunavut Sivuniksavut (NS) à Ottawa. Ce programme de formation de huitmois offre aux Inuits du Nunavut des cours crédités pour l'obtention d'un diplôme postsecondaire, en collaboration avec le Collège Algonquin. Le rapport Berger souligne la valeur de ce programme et le cite comme l'une des véritables réussites du secteur de l'éducation du Nunavut. L'objectif est d'inviter des détenteurs d'un diplôme d'études secondaires du Nunavut à Ottawa et de leur donner une formation sur les questions relatives à leur identité inuite. Le programme fait le pont entre leur vie au Nunavut et la possibilité de perfectionner leur formation dans le sud du Canada. Il sert aussi à faire le passage entre leur vie d'adolescents dans leurs collectivités et la vie dans le milieu du travail, tant sur le plan privé que public. M. Berger estime que NS affiche des résultats remarquables. Récemment, 180 des 230 diplômés du programme ont été interrogés dans le cadre d'un sondage. De ce nombre, 40 % travaillent pour le gouvernement, 15 % pour des organismes inuits, 19 % oeuvraient dans le secteur privé et 19 % poursuivaient leurs études postsecondaires. Seulement quatre étaient sans emploi. Au cours des 10 dernières années, entre 80% et 85%des étudiants de NS ont obtenu leur diplôme à l'issue du programme, ce qui représente un taux de réussite remarquable, compte tenu de la distance géographique et de la différence culturelle qui les séparent du Nunavut. La réussite du programme constitue un véritable phare pour le secteur de l'éducation au Nunavut. NS a récemment entrepris un projet pilote visant à offrir une deuxième année de cours en collaboration avec l'Université Carleton, l'Université d'Ottawa, l'Université de l'Arctique et le Collège Algonquin. Selon M. Berger, ce programme nécessite une aide supplémentaireNote de bas de page 30.

Bon nombre des dirigeants inuits sont des anciens de la bataille pour le règlement de la revendication territoriale du Nunavut et la création du GN. Ces réalisations formidables ont demandé 20 ans de travail aux Inuits du Nunavut. Derrière cette avant-garde politique, une jeune génération de dirigeants gravit les échelons du gouvernement et des associations inuites et acquière les compétences nécessaires à une bonne gouvernance. J'ai été impressionné par ces groupes. J'ai eu l'honneur de rencontrer ces représentants du territoire lors des séances d'information et des réunions que j'ai eues au Nunavut. Ce sont ces gens qui nourrissent mon optimisme pour l'avenir du Nunavut.

Cet optimisme est aussi soutenu par la hausse du prix des produits de base et les possibilités fabuleuses qui s'offrent aux citoyens du Nunavut qui acquièrent l'éducation et les compétences nécessaires pour en bénéficier. Le principal potentiel de croissance économique du Nunavut réside dans ses ressources minérales et naturelles encore inexploitées. Les diamants, l'or, l'uranium et les métaux de base sont actuellement les principales pistes d'exploration. Le premier ministre Okalik aurait déclaré que si le Nunavut est dépourvu d'herbe et d'arbres, il possède des minerais, du pétrole et du gaz.

Les investissements en exploration minière au Nunavut ont atteint un sommet de près de 200 millions de dollars en 2006. On estime qu'environ 20 % de ces dépenses vont directement au Nunavut sous forme de salaires, de contrats et d'achats. On prévoit qu'au moins cinq mines seront inaugurées au cours des dix prochaines années et créeront quelque 1 700 emplois.On espère que la construction de deux projets aurifères, Meadowbank et Doris North, pourra débuter au cours de l'été. De plus, le fond marin des îles arctiques du Nunavut renferme de vastes réserves de pétrole et de gaz. Ces ressources ne seront pas exploitées avant des années; toutefois, on estime que le Nunavut renferme au moins 10 % des réserves totales de pétrole et plus de 20 % des réserves de gaz naturel du pays.

Le GN a fait connaître sa Stratégie d'exploration et d'exploitationminières plus tôt cette année. La stratégie vise à créer les conditions propices à une industrieminière forte et durable qui contribuera à hausser et àmaintenir la qualité de vie de tous les Nunavummiut.

3. L'importance du transfert des
responsabilités pour le GN et NTI

Lors des séances d'information auxquelles j'ai assisté, j'ai été impressionné par l'importance extrême que revêt l'objectif d'obtenir le transfert des responsabilités pour le GN et NTI.

Comme l'a expliqué un fonctionnaire supérieur fédéral : « Le transfert des responsabilités est un objectif des Nunavummiut depuis le début. Dans les autres territoires, le désir d'assumer la responsabilité de la gestion des terres et des ressources est venu progressivement. Au Nunavut, le transfert des responsabilités a été souhaité dès les premiers instants. »

Àmon séjour à Cambridge Bay, j'ai eu l'honneur de rencontrer John Amagoalik, considéré par plusieurs comme l'estimé « père du Nunavut », en raison du leadership dont il a fait preuve dans les négociations de l'ARTN qui ontmené à la création du Nunavut. Le « Sir John A. » du Nunavut aurait déclaré : « Si l'ARTN a créé le Nunavut I, puisse le transfert des responsabilités mener au Nunavut II. »

Ce souhait peut s'expliquer en partie par le fait que la culture inuite est intrinsèquement liée à la terre.D'ailleurs, le mot « Nunavut » est un mot composite Innuktitut, qui signifie « notre terre ».

Selon Jose Kusugak, dirigeant inuit qui a aussi participé à la création du Nunavut :

« La place accordée au mot "Nunavut" dans les conversations quotidiennes de générations d'Inuits reflète les anciennes réalités démographiques et culturelles de l'Arctique. Les Inuits ont été les Autochtones du Nunavut et le sont encore aujourd'hui. Nous vivons au Nunavut depuis des milliers d'années. L'Arctique nous a nourris et façonnés. Nous faisons partie du paysage terrestre et marin de l'Arctique tout autant que ce paysage fait partie de nous. Une interprétation plus subtile, mais non moins juste du mot "Nunavut" serait "notre maison", pas seulement "notre terre"Note de bas de page 31. »

3.1 Importance du transfert des responsabilités pour le GN

Le souhait des Inuits d'assumer le contrôle de leur terre et de leurs ressources se reflète dans le discours politique du Nunavut. Le transfert des responsabilités est une priorité pour le GN et le premier ministre Okalik depuis la création du gouvernement territorial. M. Okalik a déclaré que son but et son souhait étaient de conclure une entente de transfert de responsabilités au cours de son mandat actuel. Le transfert a été l'une des grandes priorités du premier plan quinquennal du gouvernement, le Mandat de Bathurst. L'amorce des négociations sur le transfert avec le gouvernement du Canada a aussi été l'un des principaux objectifs de la deuxième Assemblée législative du NunavutNote de bas de page 32.

À l'ouverture de la quatrième session de l'Assemblée législative du Nunavut, le 6 mars 2007, la commissaire a consacré une partie complète de son allocution à la question du transfert des responsabilités. Elle a pressé Ottawa de répondre aux besoins financiers du GN, notamment en apportant des changements au FFT et en transférant le contrôle des ressources naturelles. « [Avec le transfert de responsabilités,] le Nunavut sera alors moins dépendant des paiements de transfert du gouvernement fédéral et les Nunavummiut pourront accéder à un niveau de vie comparable à celui des autres CanadiensNote de bas de page 33. »

Le transfert de responsabilités est vu comme la solution aux problèmes économiques du Nunavut, la clé qui lui permettra de régler ses nombreux problèmes sociaux. La Stratégie de développement économique du Nunavut de 2003 cite le transfert du contrôle des ressources comme moyen de percevoir des revenus des ressources qui « permettront aux Nunavummiut de saisir les avantages économiques qui pourront se présenterNote de bas de page 34. » Dans une allocution prononcée lors du Séminaire sur la transformation économique au nord du 60° parallèle, tenu à Ottawa en décembre 2006 sous les auspices du Forum des politiques publiques, le premier ministre Okalik a parlé du transfert de responsabilités et de son importance pour le Nunavut. Il a déclaré que, pour le Nunavut, « assumer le contrôle de ses ressources est une étape cruciale vers une plus grande autonomieNote de bas de page 35 ». M.Okalik a fait des déclarations semblables dans des allocutions prononcées à l'occasion de la conférence Mineral Round Up de Vancouver, en janvier 2007, et au symposium sur le gaz de l'Arctique de Calgary, au mois de mars 2007Note de bas de page 36.

Le GN estime que le transfert de responsabilités éliminera toute une série de contraintes réglementaires. Comme l'a indiqué le premier ministre Okalik : « Ce que nous voulons, c'est un système simplifié de gestion des ressources au Nunavut. Nous voulons que les entreprises traitent directement avec nous plutôt que de passer par différents niveaux de la bureaucratie fédérale. C'est pourquoi mon gouvernement a réduit les tracasseries administratives au Nunavut. Nous nous employons, avec les organismes de réglementation créés en vertu de la revendication territoriale, à clarifier et à rationaliser le processus d'approbation des projets d'aménagementNote de bas de page 37. » Le GN estime que le transfert du contrôle fédéral sur les ressources naturelles du Nunavut simplifierait le processus d'exploitation.

Lors d'une réunion d'information du ministère des Finances du Nunavut, tenue en décembre 2006 à Iqaluit, le GN a déclaré que les aspects financiers du transfert de responsabilités devaient être envisagés avec une compréhension et une appréciation globales de la situation financière du GN.On y a indiqué que,même si les réformes à apporter au FFT étaient adoptées, cettemesure ne ferait que « réduiremais non éliminer lemanque de ressources financières du GN ». La seule solution à long terme concevable qui puisse combler le manqueà gagner du GN est de permettre au gouvernement de bénéficier de ses propres sources de revenus sous forme de redevances d'exploitation minière, pétrolière et gazière. En d'autres termes, la seule façon dont le GN peut réduire sa dépendance à l'égard des transferts fédéraux est le transfert des responsabilités de gestion des terres et des ressources.

En décembre 2004, dans le contexte d'une déclaration conjointe fédérale-territoriale annonçant le début de consultations sur le « Cadre d'une stratégie pour le Nord », le gouvernement fédéral s'est engagé à entreprendre les négociations sur le transfert de responsabilités au Nunavut avant décembre 2005 et a fixé comme objectif de parvenir à une entente à ce sujet d'ici décembre 2008. Compte tenu de cet engagement, le GN a créé et pourvu en personnel un bureau du transfert de responsabilités relevant du ministère de l'Exécutif et des Affaires intergouvernementales. Tony Penikett a été nommé négociateur en chef du GN pour les questions relatives au transfert de responsabilités, en janvier 2006Note de bas de page 38. Les préparatifs des négociations sur le transfert se déroulent depuis maintenant plus de deux ans. Il apparaît clairement, en vu de l'information que j'ai reçu du GN, que le gouvernement nourrit des attentes élevées et que ses questions et ses intérêts sont bien articulés et bien développés.

3.2 Importance du transfert des responsabilités pour NTI

NTI est aussi enmesure d'entreprendre les négociations sur le transfert de responsabilités. Son rapport annuel de 2006 indique qu'elle s'emploie activement à préparer les négociationsNote de bas de page 39. À ce jour, NTI participe comme partie aux discussions préalables aux négociations.

Charlie Evalik, négociateur en chef de NTI sur le transfert, a indiqué que, comme bien d'autres Inuits de sa génération, il est né sur ce territoire et que « la terre occupe une place importante dansma vie ».Dirigeant inuit et président de l'Association inuite du Kitikmeot de 1993 à 2005, il est associé étroitement aux décisions relatives à l'exploitation des ressources dans sa région durant cette période. « Les Inuits sont vivement intéressés par l'aménagement des terres et des ressources du Nunavut, car la terre façonne notre identité et notre culture et nous la connaissons bien. »

Selon NTI, le transfert de responsabilités représente une occasion importante « de faire progresser le Nunavut sur le plan constitutionnel vers l'objectif de l'autonomie territoriale ». NTI estime que l'exploitation des ressources territoriales offre des possibilités extraordinaires d'emploi et de revenu au Nunavut. Pour NTI, « il n'est que justice que le gouvernement qui assume la responsabilité première de gérer les effets sociaux et économiques du développement reçoive sa part des recettes générées par l'exploitation des ressources. » NTI appuie le transfert des responsabilités de gérer les terres et les ressources au GN, car elle estime souhaitable que ces responsabilités soient assumées par ceux qui sont directement concernés par le développement.

4. Questions de fond

Je résumerai maintenant l'essentiel des questions, des intérêts, des priorités et des attentes que le GN et NTI ont exprimés, au cours des derniers mois, au sujet du transfert de pouvoirs au Nunavut.

4.1 Quels sont les pouvoirs transférés ?

4.1.1 Point de vue du GN

Selon le GN, il faut d'abord et avant tout que celui-ci définisse le concept de transfert de pouvoirs. Pour le GN, il s'agit du transfert de pouvoirs « de type provincial » relatifs à la gestion des terres et aux ressources naturelles du territoire. Ces pouvoirs conféreraient à l'Assemblée législative du GN les mêmes compétences législatives que celles dont jouissent les provinces à l'égard des ressources naturelles. Il s'agit d'une approche dite de transfert de « champs de compétence », par opposition au simple transfert de programmes d'AINC existants.

2006, le GN a demandé à HiramBeaubier, un ancien fonctionnaire fédéral respecté ayant travaillé pendant 40 ans au Programme des affaires du Nord, d'examiner l'éventail complet des activités et des responsabilités qu'assumera le GN après que les pouvoirs relatifs aux terres et aux ressources lui auront été transférés. Selon le rapport (« rapport Beaubier »), l'objectif du transfert est « la création d'un gouvernement fort, pleinement en mesure d'assumer de nouveaux champs de compétence ».Note de bas de page 40

Dans son rapport, M. Beaubier établit une distinction entre le « transfert de champs de compétence » et le « transfert de programmes ». Le « transfert de champs de compétence » comporte la responsabilité entière de toutes les activités pour chaque secteur de ressources, y compris le droit d'apporter des changements législatifs et d'adopter des politiques publiques. Le « transfert de programmes » suppose le transfert de la structure de programmes existante. Le rapport Beaubier définit aussi les budgets qui seraient nécessaires au transfert de champs de compétence.

M. Beaubier indique clairement qu'il n'a pas évalué les programmes actuels d'AINC pour la détermination des besoins futurs.Dans son rapport, il soutient que les programmes de gestion des ressources naturelles dans le Nord « n'ont pas été considérés comme un élément essentiel d'intérêt pour le gouvernement fédéral, et ce, pendant des années ». Il considère ces programmes comme des secteurs de responsabilité encadrés dans le temps ou détenus en fiducie en vue de stimuler le développement du Nord. Selon lui, les restrictions imposées aux programmes, les mandats distincts (fédéral et territorial), les politiques gouvernementales concurrentes et l'absence d'une présence politique territoriale directe assurant la gestion des ressources ont freiné les efforts déployés pour concevoir et mettre en place un cadre cohérent visant à orienter la gestion des ressources au Nunavut. SelonM. Beaubier, le transfert de pouvoirs résoudra lamajorité de ces problèmes, tout en contribuant à combler les lacunes actuelles.

Selon le rapport Beaubier :

  • Le Programme des affaires du Nord fait l'objet de pressions considérables depuis un certain nombre d'années.
  • Le défi de l'exercice de transfert consistera à éviter le transfert des problèmes financiers internes d'AINC.
  • La négociation du transfert devrait s'appuyer sur le budget nécessaire pour assumer pleinement les nouvelles obligations, et non pas sur l'administration actuelle du programme par AINC.

Selon le rapport Beaubier, il faudra environ 200 équivalents temps plein (ETP) pour que le GN puisse assumer ses nouvelles responsabilités à l'égard des terres, de l'environnement et des ressources en eau, en minerais, en pétrole et en gaz dès quelles relèveront de sa compétence.

4.1.2 Point de vue de NTI

NTI appuie la position du GN selon laquelle la cession des pouvoirs constitue le transfert de responsabilités conférant à l'Assemblée législative du Nunavut des compétences législatives semblables à celles dont jouissent les autres assemblées législatives provinciales en matière de ressources naturelles, et ce, dans le cadre de la Constitution.

NTI émet toutefois une mise en garde : le transfert doit se faire de manière « à ne pas abroger aucun des droits des Inuits ou des droits conférés en vertu de l'ARTN et à ne pas y porter atteinte ». NTI prévient qu'il faudra avoir l'assurance que lesmesures nécessaires ont été prises pourmettre enoeuvre toutes les responsabilités de l'ARTN relatives aux questions examinées aux fins du transfert. NTI voudra que desmesures concrètes soient prises et que des échéanciers soient établis afin d'assurer la mise en oeuvre intégrale de l'ARTN.

4.1.3 Point de vue du gouvernement fédéral

Des cadres supérieurs du BRN et de l'administration centrale d'AINC ont reconnu que la gestion des terres et des ressources du Nunavut fait l'objet de contraintes de financement, et ils ont sollicité un appui soutenu de l'administration centrale du Ministère au chapitre des politiques et demandé une allocation annuelle additionnelle pour coordonner les mesures du gouvernement fédéral à la suite de l'examen de grands projets.

Le BRN a été créé en 1999 et inspiré du modèle des services partagés, avec l'appui du bureau régional des T.N.-O. Cet appui n'a pas été maintenu, compte tenu de l'intensification des activités de développement dans les T.N.-O. Des fonctionnaires fédéraux ont indiqué qu'en 2005-2006, le BRN comptait au total 105 postes approuvés et disposait d'un budget de 21,71 millions de dollars pour assumer des responsabilités de type provincial (terres, eaux, minerais, sites contaminés) en plus de ses autres responsabilités de type fédéral (développement économique et relations avec les Inuits). On a estimé le taux de postes vacants actuelà environ 22 %. À l'administration centrale d'Ottawa, le soutien du BRN est assuré par environ 13 ETP.

Des fonctionnaires fédéraux ont admis qu'il serait difficile et vain de contester le principe fondamental du rapport Beaubier voulant que les responsabilités cédées soient appuyées par des ressources financières raisonnables et suffisantes. Cela dit, ils ont relevé des domaines dans lesquels l'organisation proposée dans le rapport Beaubier est nettement plus vaste que l'actuel Programme des affaires du Nord et ne tient pas compte des différences significatives entre les compétences provinciales moyennes et la situation du Nunavut. Ils ont aussi soulevé des questions au sujet du concept organisationnel proposé dans le rapport et ont formulé des observations précises sur certains aspects du modèle.

De toute évidence, il faudra beaucoup de temps et d'efforts durant les négociations sur le transfert pour examiner ces aspects attentivement et en venir à une entente satisfaisante pour toutes les parties.

4.2 Services votés

Comme nous l'avons dit, le GN a déclaré qu'un de ses objectifs était la mise en place d'un gouvernement fort, pleinement en mesure de gérer ses nouveaux champs de compétence. Par conséquent, il a proposé que le transfert des services votés (ou le budget initial permettant au GN d'assumer ses nouvelles responsabilités) soit basé sur ce dont un gouvernement prudent devrait avoir besoin pour gérer les terres et les ressources du Nunavut de façon responsable.Dans lemême ordre d'idées, le GN a fait valoir que le transfert ne peut être basé sur ce qui est actuellement en place à AINC, pour des motifs discutés en détail dans le rapport Beaubier.

Le GN reconnaît que de la détermination de la quantité définitive de ressources humaines et financières nécessaire pour assumer efficacement ses responsabilités « obligera les parties à discuter et à réaliser des études approfondies ». Le GN souligne aussi que l'entente de transfert devra prévoir des fonds permanents pour la réalisation des programmes et des fonds ponctuels de transition pour permettre au GN d'assumer efficacement les responsabilités qui lui seront cédées.

Selon le GN, des services votés adéquats lui permettant d'honorer les responsabilités qui lui seront confiées doivent couvrir deux catégories de coût : i) ressources humaines et ii) biens matériels.

Au chapitre des biensmatériels, le GN a précisé qu'il aura besoin d'édifices pour accueillir les équipes chargées de la prestation des programmes transférés, de l'appui en TI et des dossiers de propriété intellectuelle. À son avis, le cas du Nunavut pourra être assez différent de celui du Yukon et des T.N.-O. quant à certaines questions rattachées aux services votés et qui nécessiteront des ressources de transition. Les espaces à bureaux et les services de connectivité de TI, notamment, sont plus coûteux et plus difficiles à obtenir au Nunavut.

4.3 Ressources humaines

Pour que les négociations sur le transfert portent fruit, le plus grand défi consistera à veiller à ce que le GN dispose des ressources humaines dont il aura besoin pour être prêt et apte à honorer ses nouvelles responsabilités lorsque se fera le transfert. En clair, si cette question n'est pas réglée de façon satisfaisante, les conditions ne seront pas favorables au transfert des responsabilités fédérales.

Actuellement,malgré les nombreux défis qu'il doit relever, AINC mène un programme de gestion des terres et des ressources répondant à des normes de service exigeantes dans un contexte où les attentes de l'industrie sont élevées. L'industrie veut un système efficace, transparent, stable et fiable, doté d'échéanciers et de lignes directrices. Des sources de l'industrie ont confirmé qu'AINC réussit à bien gérer les titres miniers et les droits de surface sur les terres publiques. Il importe que les processus soient bien établis pour la délivrance et la gestion de différents types de titres miniers. Pour que le transfert porte fruit, il est crucial que le climat d'investissement au Nunavut ne soit pas indûment influencé oumis en péril par une perturbation des niveaux de service ou un cadre de réglementation inefficace. On estime qu'une diminution des investissements dans l'exploration et l'exploitationminières aurait une influence négative sur le produit intérieur brut du Nunavut.

Compte tenu des difficultés qu'a connues le GN pour assumer ses responsabilités actuelles et régler ses problèmes croissants, certains estimeront que le gouvernement n'est pas prêt à assumer des responsabilités additionnelles. J'ai exprimé poliment un certain scepticisme, ce qui fait que le GN et NTI ont pris le temps d'analyser et d'examiner cette question cruciale, mais délicate au cours de l'exercice d'établissement de la portée.

Les inquiétudes quant aux capacités du Nunavut enmatière de ressources humaines sont véritables et fondées. Au cours de nos discussions, le GN lui-même a reconnu que le transfert posera des difficultés considérablesà cet égard, et que ces difficultés ne pourront être résolues qu'au moyen d'une collaboration étroite entre les parties.Note de bas de page 41

Le transfert pose deux défis quant aux capacités en matière de ressources humaines :

  • veiller à conserver et à transférer le plus grand nombre possible d'employés d'AINC au moment du transfert;
  • établir les capacités de ressources humaines permettant de créer les services publics nécessaires pour assumer les responsabilités qui seront cédées.

4.3.1 Rétention du personnel

Le GN a reconnu l'expérience, les connaissances et les compétences précieuses des employés d'AINC actuellement en poste à Iqaluit. Le GN estime qu'il importe que le plus grand nombre possible accepte un poste au GN après le transfert. À cette fin, le gouvernement du Nunavut travaille en étroite collaboration avec AINC. Le GN a indiqué à ce sujet qu'il faudra adopter une approche fondée sur la collaboration et la planification et être à l'écoute des personnes qui seront touchées. Le GN adopte une approche réaliste des questions de ressources humaines. Il observe notamment ce qui suit :

L'actuel Programme des affaires du Nord d'AINC emploie de nombreux employés possédant une longue expérience et apportant des connaissances et des compétences particulières à leur travail. Bon nombre d'entre eux, qu'ils soient inuits ou non, vivent dans le Nord depuis longtemps, sinon depuis toujours. Le GN espère qu'un bon nombre d'entre eux se joindront au gouvernement territorial au moment du transfert. Ces personnes possèdent des connaissances et des compétences dans la gestion gouvernementale dont le GN aura besoin pour assumer ses nouvelles responsabilités. La conservation du personnel du Programme des affaires du Nord doit être à la base de la stratégie des ressources humaines appliquée au transfert.

Selon le GN, desmesures de conservation du personnel devront être prises dès qu'une entente sera conclue au début des négociations sur le transfert. Le GN propose de faire profiter le personnel d'un ensemble d'avantages sociaux et de programmes de perfectionnement professionnel et de formuler un plan de communication positif. Le GN croit aussi que les détachements peuvent constituer de précieux outils pour répondre aux besoins en recrutement liés au transfert et propose que des fonctionnaires fédéraux soient détachés au GN avant le transfert afin de renforcer les capacités dans des secteurs clés. Le GN estime que cette formule pourrait se révéler positive pour les employés d'AINC et d'autres ministères qui aimeraient poursuivre leur travail au Nunavut, sans perdre leur statut de fonctionnaires fédéraux. De même, des employés du GN désireux d'occuper des postes découlant du transfert pourraient être détachés à AINC pour acquérir des connaissances et une expérience pratique durant la période de transition.

Le rapport Beaubier a révélé qu'un des grands défis que comporte le transfert des responsabilités a trait aux personnes qui en seront affectées. Des questions comme les stratégies dumaintien du personnel, l'équité dans la transition, les cheminements de carrière et les avantages sociaux nécessiteront un examen attentif. Le rapport établit que les questions relatives au maintien du personnel sont fondamentales et qu'elles devraient faire l'objet d'une attention soutenue, à toutes les étapes des discussions sur le transfert, car « les budgets ne peuvent mener à des résultats si on ne peut s'assurer des services d'un personnel compétent et motivé pour la mise en oeuvre des programmes ».Note de bas de page 42

Hiram Beaubier a également un rapport sur les « leçons » tirées du transfert de pouvoirs au Yukon, en 2004 (le rapport du Yukon).Note de bas de page 43 L'objectif du rapport était de faciliter l'apprentissage au sein des institutions sur l'expérience du transfert au Yukon. Le rapport révèle qu'un des grands défis du transfert de pouvoirs au Yukon a été la gestion des ressources humaines et que ce problème pourrait se répéter dans le cadre de prochains transferts. Les ressources humaines constituant une question si importante et délicate, le rapport recommandait d'inviter un expert des RH à se joindre à l'équipe de négociation, pour aider à préparer l'information et à communiquer avec le personnel touché.

Dans le cas du Nunavut, en raison de différents facteurs, la question du maintien du personnel pourrait être encore plus problématique que dans le cas du Yukon ou du transfert prochains de responsabilités aux T.N.-O.

4.3.2 Renforcement des capacités

Comme nous l'avons vu,malgré lesmeilleurs efforts, une stratégie de conservation du personnel ne pourra suffire à assurer le succès du transfert. Il faudra que le gouvernement fédéral, le GN et NTI adoptent une approche de collaboration pour relever les défis en matière de formation et d'éducation au Nunavut.

4.3.2.1 Point de vue du GN

Le GN soutient qu'il faut « faire preuve de réalisme » face à cette question et insiste sur le fait que l'entente de transfert devra prévoir des stratégies et des programmes de formation efficaces et tenir compte de la réalité du marché du travail et des objectifs du chapitre 23 de l'ARTN. À cette fin, le GN veut négocier avec le Canada pour établir des programmes de formation ciblés dès que les négociations sur le transfert seront entreprises, compte tenu du délai nécessaire pour former les employés dans les secteur professionnels qui permettront au transfert de se concrétiser.

4.3.2.2 Point de vue de NTI

NTI a examiné attentivement le « défi considérable » que représente la mise en place d'un effectif formé et représentatif, apte à assumer les nouvelles responsabilités.Note de bas de page 44

NTI veut s'assurer que les dispositions du chapitre 23 de l'ARTN sont respectées « intégralement » et que l'effectif qui assumera les responsabilités après le transfert constituera une fonction publique représentative formée à 85 % d'Inuits. NTI reconnaît que, puisque la majorité des postes à combler dans le cadre du transfert seront généralement des postes professionnels ou paraprofessionnels, la tâche de former et de recruter des Inuits pour occuper ces emplois constituera un « défi considérable ». Selon NTI, cette tâche nécessitera une stratégie soigneusement planifiée et exécutée. Plus précisément, il sera fondamental d'adopter une approche globale fondée sur la coopération et le partenariat. NTI a fourni trois exemples de stratégies efficaces et « culturellement adaptées » utilisées par le passé et qui peuvent contribuer à ce que la main-d'oeuvre du Nunavut soit prête et apte à gérer les responsabilités qui lui seront cédées.Ces programmes de renforcement des capacités sont (i) la Stratégie unifiée de développement des ressources humaines du Nunavut, qui a préparé les Inuits à travailler dans le nouveau gouvernement du Nunavut (1996-1999); (ii) le programme de l'Akitsiraq Law School (2001-2005) et (iii) la Municipal Training Organization (2004-2007).

Selon NTI, « une des priorités claires est de concevoir un programme adapté à un calendrier établi, visantà former demanière satisfaisante des Inuits pour qu'ils occupent les postes à combler aux fins du transfert ».Certaines recommandations précises faites à ce sujet par NTI devront être examinées après que les négociations sur le transfert auront débuté.

4.4 Chapitre 23 de l'ARTN

On ne peut envisager le transfert sans aborder la délicate question du chapitre 23 de l'ARTN, qui a pour objectif déclaré « d'accroître, à un niveau représentatif, le nombre d'Inuits qui occupent un emploi au gouvernement» au Nunavut. Cet objectif s'applique « à tous les groupes de professions et niveaux scolaires » au sein du gouvernement. Le Canada et le GN se sont efforcés de respecter le niveau d'emploi représentatif de 85 % d'Inuits. Au moment de la rédaction du présent rapport, la représentation inuite était de 27 % au bureau du Nunavut d'AINC, de 45 % au GN et de 78 % à NTI.

Le rapport Berger reconnaît que le GN a déployé « d'incroyables efforts » pour « offrir des possibilités à presque tous les Inuits qualifiés ». On peut également y lire ceci :

Le problème est que le bassin d'Inuits qualifiés est pleinement exploité. Seulement 25 % des enfants inuits obtiennent leur diplôme d'études secondaires et ce ne sont pas tous les diplômés qui poursuivent ensuite leurs études. Le genre d'emplois où la participation inuite est la plus souhaitable, par exemple dans le domaine de la direction, de la gestion et des emplois professionnels, comporte des exigences en matière d'éducation qui ne peuvent être contournées.Note de bas de page 45

Le transfert procurera de nouvelles possibilités d'emploi aux Inuits du Nunavut. Cependant, il s'agira surtout d'emplois de nature technique et scientifique, pour lesquels peu d'Inuits seront qualifiés. Il est clair que s'il faut attendre que les buts et les objectifs de la représentation inuite dans la fonction publique soient atteints, le transfert ne pourra se faire avant des années.

NTI soutient que pour parvenir à une entente de transfert, il faudra régler la question des capacités de la façon la plus conforme et favorable aux buts visés par l'ARTN. NTI a indiqué que les Inuits chérissent la valeur sociétale de « Piliariqatigiiniq—Ikajukatigiinniq »—tendre ensemble vers un objectif commun ». NTI estime devoir collaborer avec le gouvernement fédéral et le GN pour établir des processus et des programmes de renforcement des capacités en vue de former un effectif capable d'assumer les responsabilités qui découleront du transfert.

4.5 Ressources des fonds marins

La question de savoir si les ressources des fonds marins seront visées par les négociations sur le transfert est devenue la question politique la plus délicate, dans le cadre des négociations sur le transfert, que devra régler le ministre dans le prochain mandat du gouvernement fédéral.

Le premier ministre du Nunavut a largement publicisé cette question.Note de bas de page 46 Le transfert des ressources des fonds marins est l'une des priorités du GN énoncées par la commissaire dans son discours de mars 2007 : « Le [gouvernement du Nunavut] demande avec instance au gouvernement fédéral de fixer un cadre de transfert de responsabilités comprenant les eaux intérieures afin que nous puissions progresser rapidement vers la résolution de cet important dossier.»Note de bas de page 47

4.5.1 Point de vue du GN – Eaux intérieures

Le GN a dit vouloir obtenir une entente de transfert établissant le transfert du pouvoir et des revenus relatifs aux ressources non renouvelables provenant des terres et du fond marin des eaux intérieures du Nunavut, c'est-à-dire les eaux contenues à l'intérieur de la ligne de base des îles arctiques du Canada.

Le GN a insisté sur cette question en termes non équivoques. Le gouvernement a même affirmé qu'il est « essentiel » que les eaux intérieures soient incluses dans le mandat fédéral. Dans une lettre datée du 20 février 2007, le négociateur en chef du GN, Tony Penikett, a indiqué que la question des eaux intérieures « doit être négociée. Je ne peux trop insister sur ce point. » Il a souligné « la grande importance » que le GN accorde à cette question, en insistant sur le fait qu'à son avis, « il est impératif » que les parties conviennent que les ressources non renouvelables du sous-sol des eaux intérieures doivent faire partie des points de négociation.

L'insistance du GN à ce sujet s'appuie sur quatre arguments principaux :

  • intérêt national;
  • importance culturelle pour les Inuits;
  • efficacité de la réglementation;
  • cohérence avec la revendication territoriale et le droit canadien.

Argumentation détaillée :

Intérêt national

Tout d'abord, nous croyons que l'inclusion des eaux intérieures dans le transfert est dans l'intérêt de l'ensemble du Canada. L'Arctique, et en particulier l'archipel Arctique—qui se trouve principalement dans le territoire du Nunavut — revêt une grande signification pour les Canadiens et l'identité nationale du Canada, ce qui doit être reconnu, valorisé et préservé. C'est ce qu'a fait le gouvernement Mulroney en concluant l'ARTN. Cet accord a été un geste d'édification de la nation qui a fait la fierté des Canadiens. La revendication territoriale à l'origine du Nunavut reconnaissait le territoire dans son intégralité, pour des motifs de cohérence géographique, d'intégrité culturelle et, peut-être avant tout, d'affirmation de la souveraineté. Cet événement constituait aussi une étape importante de l'évolution politique du Canada, car il a fait progresser le processus de décolonisation. Pour le gouvernement fédéral d'aujourd'hui, l'analyse du transfert — prochaine étape du processus de développement politique—pour tout motif de moindre importance que l'intérêt national signifierait un recul important tant pour le Nunavut que pour l'ensemble du Canada.

Le gouvernement du Canada ne nous a pas soumis d'argument impérieux s'appuyant sur l'intérêt national. Il semble que la réticence démontrée à ce sujet repose sur une question de commodité administrative pour les ministères fédéraux. Il est possible que la préférence pour un régime pan-nordique relatif aux ressources en mer, exprimée maintes fois les fonctionnaires, serve à préserver des structures organisationnelles chères à AINC. Cependant, cette préférence montre combien Ottawa ne saisit pas vraiment la réalité nordique, y compris les particularités géographiques importantes et les besoins économiques différents des trois territoires.

Enfin, nous estimons que le transfert du pouvoir relatif aux ressources des fonds marins de l'archipel améliorerait de manière concrète la position internationale du Canada, qui déploie des efforts pour affirmer sa souveraineté dans l'Arctique. Sans aucun doute, l'inclusion des eaux intérieures du Nunavut dans le transfert serait conforme à l'affirmation des droits du Canada, en vertu du droit international, d'établir des lignes de base droites autour de l'archipel Arctique. À l'inverse, sur le plan politique sinon en termes strictement juridiques, la position internationale du Canada pourrait être affaiblie par la communication de signaux contradictoires entre nos prétentions au niveau international et nos pratiques internes. Les risques politiques en jeu ne doivent pas être rejetés aussi facilement que certains fonctionnaires semblent prêts à le faire.

Importance culturelle pour les Inuits

Un deuxième argument, tout aussi important, concerne les engagements pris par la Couronne dans l'ARTN et l'attachement culturel des Inuits aux eaux intérieures du Nunavut. Cette question a été très bien exposée par NTI lors des réunions de Vancouver. Les Inuits forment un peuple côtier qui, aujourd'hui comme toujours, dépend d'une économie marine. Ce fait est reconnu par l'ARTN, qui s'applique très clairement aux secteurs tant marins que terrestres du Nunavut. D'ailleurs, une partie importante de l'ARTN est consacrée aux droits des Inuits sur les eaux intérieures du territoire, notamment l'article 15.1.1 de l'Accord.De plus, 14 des 42 chapitres se rapportent aux eaux intérieures. Un exemple qui concerne tout particulièrement le transfert est le fait que l'exploitation des eaux intérieures du Nunavut est un champ de compétence qui échoie aux IG.

Enfin, à cet égard, il convient de signaler que le fait, pour le gouvernement du Canada, d'établir une distinction entre les élémentsmarins et terrestres du Nunavut pour ce qui est des droits des Inuits serait considéré par eux comme un geste politique très significatif, qui pourrait bien saper le soutien de la population du Nunavut à l'égard du transfert. J'estime qu'il faut donner à cette question politique la place qui lui revient, car il semble qu'AINC fonde sa réflexion sur des considérations administratives dans ce dossier.

Efficacité de la réglementation

Troisièmement, l'établissement d'un double régime de compétence au Nunavut — le GN ayant compétence dans les îles arctiques, et le Canada, sur les fonds marins — perpétuerait « la toile d'araignée de la confusion réglementaire » dans le Nord, pour reprendre l'expression du ministre Prentice. Avant de s'engager dans un environnement à risque élevé comme celui du Nunavut, les sociétés d'exploitation veulent que soit implanté un régime de gestion des ressources qui soit efficace, respectueux de la volonté des gens du Nord et des droits ancestraux et qui permette l'application de normes et de pratiques uniformes et efficientes en matière de réglementation. La composition géographique, climatique et géologique de l'archipel du Nunavut est marquée par une absence de « contrôle » entre la terre ferme et les espaces recouverts d'eau, qui sont souvent indifférenciables en raison de la banquise côtière et de la présence de la couverture de neige durant une grande partie de l'année. L'existence de régimes de réglementation distincts pour les activités d'exploitation des terres et des espaces recouverts d'eau contribuerait très probablement à décourager les compagnies plutôt qu'à les atttirer. Les fonctionnaires peuvent argumenter tant qu'ils le veulent sur « l'harmonisation » des deux régimes, il reste que la situation serait beaucoup plus complexe que nécessaire, tant pour les entreprises que les organismes de réglementation.

À l'inverse, placer une structure unique d'administration des terres et des eaux intérieures du Nunavut sous la gouverne du GN apporterait plus de clarté et d'uniformité dans la réglementation, réduirait les chevauchements et la complexité relativement aux champs de compétence et inspirerait une plus grande confiance aux investisseurs.

Les fonctionnaires d'AINC ont régulièrement rappelé la complexité technique de la gestion des ressources pétrolières et gazières dans un milieu marin comme motif pour exclure les eaux intérieures. Pourtant, dès le début, le GN a répété qu'il était prêt à examiner les options à ce sujet, y compris celle de confier à l'ONE les obligations découlant de la Loi sur les opérations pétrolières au Canada.

Conformité à la revendication territoriale et au droit canadien

Enfin, tel que soutenu dans le sommaire qui vous a été remis, l'inclusion des eaux intérieures dans le transfert trouve de solides appuis dans le droit canadien. À l'inverse, les arguments juridiques parfois avancés pour exclure les eaux intérieures du transfert ne tiennent pas lorsqu'on les examine de plus près. Le point de départ de notre argumentation est que le transfert a été abordé par les autres territoires comme un processus visant à conférer le plus possible au gouvernement territorial une fonction de gouvernement provincial en lui confiant des pouvoirs « de type provincial ». La compétence légale des provinces liée à leurs eaux intérieures et aux ressources du sous-sol des fonds marins a été clairement reconnue par la Cour suprême du Canada. Les eaux séparant les îles de l'archipel Arctique font partie du Canada et, compte tenu du libellé clair et du sens de la Loi sur le Nunavut et d'autres lois pertinentes, ces eaux font aussi partie du Nunavut.

Le fait que ces eaux couvrent une étendue géographique supérieure dans le cas du Nunavut que dans celui de toute autre province n'a pas plus de poids juridique que le fait que la Colombie-Britannique possède des eaux marines intérieures, contrairement à l'Alberta ou à la Saskatchewan, ou que le fait que la Saskatchewan puisse faire valoir davantage ses droits législatifs enmatière d'agriculture en vertu de l'article 95 de la Loi constitutionnelle de 1867 que ne le ferait le Nunavut s'il détenait des droits similaires. Le but est d'atteindre l'égalité juridique, non l'homogénéité géographique. Bien que nous reconnaissions que le Canada n'a pas l'obligation juridique d'inclure les eaux intérieures dans le transfert, nous estimons qu'il est juste d'affirmer que les arguments juridiques soulevés par les fonctionnaires fédéraux pour exclure les eaux intérieures ne sont pas fondés en droit et devraient être écartés.Note de bas de page 48

4.5.2 Point de vue de NTI – Zones marines

La position de NTI est que les zones extracôtières forment les « zones marines » du Nunavut au sens de l'ARTN. L'Accord envisage les zonesmarines selon une perspective axée sur la revendication territoriale, ce qui explique qu'elles constituent un thème essentiel des négociations sur le transfert.

Selon NTI, l'ARTN reconnaît les droits juridiques des Inuits à l'égard des zones marines et de leur gestion en fonction de leur utilisation actuelle et traditionnelle. Le préambule de l'Accord énonce clairement que les Inuits revendiquent un titre ancestral sur la région du Nunavut « fondé sur leur utilisation, exploitation et occupation – traditionnelles et actuelles – des terres, des eaux et de la banquise côtière qui s'y trouvent, selon leurs us et coutumes ».

Une partie appréciable de l'ARTN est consacrée aux droits, aux responsabilités et à la compétence relatives aux ressources marines. De plus, 14 des 42 chapitres de l'Accord concernent directement les questions marines. Signalons notamment que les responsabilités des IG couvrent les terres et les eaux du Nunavut.

4.5.3 Point de vue du gouvernement fédéral

Le gouvernement fédéral est en désaccord avec l'argument du GN selon lequel le transfert des droits relatifs aux ressources extracôtières améliorerait la situation juridique du Canada à l'échelle internationale en ce qui concerne sa souveraineté dans l'Arctique. Le gouvernement fédéral soutient qu'à l'heure actuelle, aucun pays, pas même les États-Unis, ne conteste la propriété du Canada sur les terres, les îles et les eaux de l'archipel arctique canadien englobant le territoire du Nunavut, y compris la souveraineté du Canada sur les ressources présentes dans les eaux et le sous-sol et sur les fonds marins.

Les eaux de l'archipel arctique canadien, y compris le passage du Nord-Ouest, sont des eaux « intérieures» canadiennes historiques. Cela confère au Canada l'autorité inconditionnelle en matière de législation et de règlementation de l'usage de ces eaux et de l'accès à celles-ci. La ligne de base précisant la zone exacte des eaux « intérieures » a été publiée en 1985. Les États-Unis ne reconnaissent pas cette ligne de base. Leur gouvernement maintient que lamajeure partie des eaux de l'archipel arctique canadien sont « territoriales », c'est-à-dire qu'il s'agit des eaux qui, à partir du point marquant le niveau de basse mer du littoral des îles et des terres ou encore de la ligne de base, s'étendent à 12 milles marins. Selon le droit international coutumier et tel qu'il est codifié dans la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, tous les navires étrangers ont un « droit de passage inoffensif » dans les eaux territoriales. Les États-Unis affirment également que les diverses voies navigables qui traversent l'archipel arctique canadien constituent un « détroit international » et que le droit du Canada de réglementer ces eaux est assujetti à des restrictions précises.

Dans le mandat actuel de transfert de responsabilités aux Territoires du Nord-Ouest, le gouvernement du Canada a restreint le transfert aux terres côtières. Il est à noter que si le gouvernement du Canada adopte une position semblable pour le Nunavut, le GN et NTI pourraient refuser de participer à la négociation de l'entente de transfert. Toutefois, lors de l'une de ses premières séances d'information, le GN a indiqué qu'il était disposé à explorer une approche par étapes pour la négociation de l'entente de transfert en ce qui concerne les eaux intérieures,mais que le mandat fédéral devait garantir que les intérêts extracôtiers du Nunavut seront pris en considération.

4.6 Avantage financier net

L'approche adoptée par le gouvernement fédéral à l'égard du transfert de responsabilités au Yukon et aux T.N.-O. a été de demander au ministre des Finances de négocier des arrangements sur le partage des recettes tirées de l'exploitation des ressources avec les gouvernements territoriaux afin de s'assurer que les territoires conservent un avantage financier net (AFN). L'AFN est un concept selon lequel les territoires n'ont pasà déduire toutes les recettes tirées de l'exploitation des ressources des paiements de la formule de financement territorial (FFT).

4.6.1 Point de vue du GN

Le GN souhaite que l'entente de transfert prévoie un AFN contenant les éléments suivants :

  • Entente sur les recettes tirées de l'exploitation des ressources accordant au Nunavut la totalité des recettes (sans réduction correspondante de la FFT) durant une période convenue. Cette entente peut comprendre des « éléments déclencheurs » du partage des recettes avec le Canada, après que le Nunavut aura atteint un niveau de développement donné.
  • Un fonds d'exploitation des ressources non renouvelables qui aiderait le Nunavut à gérer la question des ressources « inexploitées », y compris des fonds consacrés aux géosciences.

Dans le discours prononcé par la commissaire en mars 2007, le GN se plaint du fait que le Nunavut perd « des centaines de millions de dollars chaque année » en redevances et en avantages fiscaux parce que le gouvernement fédéral conserve la propriété et le contrôle de « nos » ressources non renouvelables.Note de bas de page 49 This amount does not appear to be borne out by reality. A federal official estimates the royalty and income taxes that Canada will collect from resource development in 2007 at around $33 million.

4.6.2 Point de vue de NTI

NTI a déclaré que les redevances perçues par le Canada pour les ressources extraites des terres de la Couronne au Nunavut ont été relativement modestes. Selon NTI, il est crucial pour l'avenir de l'économie du Nunavut que le territoire conserve les redevances tirées de l'exploitation des ressources enminerais, en pétrole et en gaz. NTI propose aussi que les déductions correspondantes de la FFT soient abandonnées.

NTI a aussi indiqué que les recettes obtenues de l'exploitation des ressources en vertu du chapitre 25 de l'ARTN ne devraient pas subir de « conséquences négatives » du transfert, notamment en ce qui concerne « le pouvoir d'adopter de nouveaux modèles de redevances par voie législative ».

4.6.3 Pas de récupération applicable aux recettes tirées de l'exploitation des ressources

Le budget fédéral de 2006 prévoyait le renouvellement et le renforcement du programme de la FFT. Le budget fédéral de 2007-2008 applique les recommandations du rapport O'Brien et ramène la FFT à un système de formule qui respecte les principes d'équité et de prévisibilité et reflète l'engagement du gouvernement à assurer le développement continu du Nord.

Le rapport O'Brien proposait que les gouvernements territoriaux reçoivent des avantages directs de l'exploitation des ressources dans leur territoire. Il recommandait d'exclure les recettes issues de l'exploitation des ressources du calcul des revenus aux fins de la FFT et estimait qu'en principe, l'avantage financier net devait être semblable pour tous les territoires.

Lors des réunions que j'ai eues avec des fonctionnaires supérieurs fédéraux, ceux-ci ont insisté sur le fait que quelle que soit l'approche appliquée à l'AFN pour le transfert de pouvoirs au Nunavut, le gouvernement du Canada devra adopter une position « généralement uniforme » et cohérente avec les autres gouvernements du Nord.

4.6.4 Fonds de mise en valeur des ressources non renouvelables

Lors de mes réunions avec le GN, on a distribué une étude sur les prévisions des redevances dans le secteur minier, préparée par Watts, Griffis etMcOuat. Ces prévisions montrent que l'entente que souhaite conclure le Nunavut, selon laquelle ce dernier obtiendrait la totalité des redevances découlant des éventuelles recettes tirées de l'exploitation des ressources, et ce, sans récupération à partir de la FFT, laisserait le GN sans AFN durant 10 ans ou plus.

Pour cette raison, le GN avait demandé au Canada de songer à élargir son mandat de transfert pour y inclure la possibilité d'explorer d'autres options pouvant procurer un AFN. C'est dans cette optique que le GN a proposé au Canada de créer un fonds demise en valeur des ressources non renouvelables, compte tenu du fait que les ressources du Nunavut demeurent « inexploitées » par manque d'infrastructures de base (p. ex., routes, ports, installations de production d'énergie).

Le GN reconnaît que les grands travaux associés aux projets d'infrastructure sont généralement réalisés par les entreprises privées responsables de projets miniers au Nunavut. Toutefois, il soutient que le Canada doit reconnaître que d'autres types d'infrastructure « sont généralement du ressort du gouvernement ». Selon le GN, cette question mérite une « réflexion collective et créatrice ».

Le GN a notamment suggéré que le Canada effectue d'importants investissements dans les géosciences au Nunavut. Le GN a souligné que 53 % du territoire du Nunavut n'a pas été cartographié et estime que si les investissements en géoscience demeurent au niveau actuel, la cartographie géologique du Nunavut ne sera pas achevée avant 80 ans. Le gouvernement fédéral a créé le Bureau géoscientifique Canada-Nunavut, qui résulte d'un partenariat entre la Commission géologique du Canada, Affaires indiennes et du Nord Canada et le ministère du Développement économique et du Transport du GN. Le Canada investit environ 1,5 million de dollars par année dans des activités de cartographie du Bureau. Ce dernier a pour mandat de fournir de l'information et des connaissances spécialisées en géoscience au Nunavut pour promouvoir l'éducation, fournir des possibilités de formation, favoriser l'exploitation responsable des ressources minérales et énergétiques et aider à combler les besoins des systèmes d'information géoscientifique des partenaires établis au Nunavut.

Des fonctionnaires fédéraux m'ont appris que les investissements dans les programmes de géoscience avaient mené à la découverte de nouvelles ressources non renouvelables. En particulier, les fonctionnaires ont soutenu que la divulgation de données cartographiques au Nunavut en 2002 avait immédiatement décuplé le nombre de jalonnements de terrains miniers et mené à des découvertes de gisements d'or en 2003. On estime qu'un investissement de 1 million de dollars en géoscience suscite des dépenses correspondantes de 5 millions de dollars du secteur privé et génère des réserves de ressources minérales d'une valeur de 125 millions de dollars.

4.7 Institutions gouvernementales (IG)

Aux termes de l'ARTN, le gouvernement fédéral devait créer et financer cinq IG ou conseils de cogestion par voie de législation fédérale.

4.7.1 Comment les responsabilités fédérales liées aux IG seront-elles cédées ?

Aux termes de la disposition 2.10.2 de l'ARTN, le gouvernement du Canada peut confier au GN, par voie de cession ou de transfert, les pouvoirs ou les champs de compétence des IG, à la condition que la cession ou le transfert n'ait pas pour effet d'abroger aucun des droits des Inuits en vertu de l'Accord ni d'y porter atteinte.

Le GN estime que les responsabilités ministérielles à l'égard des IG devraient être cédées au GN dans le cadre du transfert. NTI ne s'objecte pas à cette proposition, mais souligne que cette question devra être examinée beaucoup plus attentivement à mesure que progresseront les négociations sur le transfert. NTI a déclaré que les compétences législatives relatives aux IG ne pouvaient pas être « transférées toutes en même temps ».Note de bas de page 50

Le GN reconnaît les préoccupations soulevées par NTI à ce sujet, en particulier la nécessité d'assurer un financement permanent des conseils de cogestion selon une formule transparente et responsable. Lors des réunions tenues avec la CNER et la CAN à Cambrige Bay en janvier 2007, les deux conseils ont exprimé des préoccupations quant au transfert des responsabilités des IG au GN.

4.7.2 Le cadre de réglementation des IG est-il efficace ?

La question du transfert du cadre de réglementation des IG ne peut être envisagée de façon isolée. Il importe de connaître les sérieuses difficultés associées au cadre de réglementation actuel du Nunavut, en particulier les problèmes qu'éprouve le secteur privé avec les IG.

J'ai eu plusieurs discussions avec des cadres supérieurs du secteur de l'exploitationminière et de la prospection, qui ont exposé quelques-uns des problèmes de réglementation au Nunavut. Ils estiment que le Nunavut offre un potentiel énorme,mais que le territoire a besoin de l'aide du secteur privé pour l'exploiter et que tout doit être fait pour accroître les investissements dans le territoire. Toutefois, des membres de l'industrie m'ont aussi dit que bien des choses ne fonctionnement pas au Nunavut, entre autres :

  • Il est « presque impossible de composer avec le processus réglementaire ».
  • Sur Bay Street, le Nunavut a la réputation d'être « un endroit bien difficile pour y faire des affaires ».
  • « Le processus réglementaire est long et coûteux. »
  • Le processus de réglementation fait intervenir de trop nombreux groupes.
  • On constate un dédoublement des tâches, « que personne ne veut reconnaître ».
  • Le processus ne s'accompagne pas des échéanciers, de la certitude et de la transparence recherchés par l'industrie.
  • La Loi canadienne sur l'évaluation environnementale est encore appliquée à tous les projets, et l'aval de différents ministères fédéraux doit être obtenu : « une démarche compliquée et inutile ».
  • Redondance généralisée de l'information à fournir à AINC, aux AIR et aux IG.
  • Absence de seuils pour l'utilisation de l'eau et l'élimination des déchets.
  • Manque fondamental d'uniformité dans les normes appliquées par les conseillers techniques.
  • Manque de constance dans le délai nécessaire pour faire approuver une demande et délivrer un permis.
  • La délivrance des permis est retardée parce que le quorum n'est pas atteint.

Le dénominateur commun de toutes ces observations du secteur privé est que le système de réglementation actuel au Nunavut ne crée pas un climat favorable aux investissements. Les représentants du secteur privé « craignent » les répercussions du transfert, car ils connaissent les nombreuses difficultés que le GN n'a pu régler depuis la création du territoire et ne voient pas comment il pourrait assumer davantage de responsabilités. Un cadre de l'industriem'a dit reconnaître que le service des terres de NTI avait un bon programme et des gens « qui savent travailler ensemble » et que c'était probablement attribuable au fait que le système de gestion des terres a été établi en collaboration avec des administrateurs d'expérience.

Compte tenu des défis sociaux et économiques que doit relever le Nunavut, le secteur privé estime que l'exploitation des ressources minérales du territoire est cruciale et que « c'est pourquoi il est si important d'améliorer le processus de réglementation ». Le cadre d'une compagnie de prospection a comparé le cadre de réglementation du Nunavut à un orchestre :

« Les musiciens sont là – AINC, NTI, la CNER, l'OEN, le GN, les AIR, les CBC [les comités de bénéficiaires communautaires] –, mais il n'y a pas de chef pour les mener ensemble vers un objectif commun. »

On m'a aussi dit que les offices de cogestion manquaient de personnel et n'avaient pas les capacités de gérer le processus de réglementation, ne disposaient pas d'un mandat clair et ne semblaient pas pouvoir circonscrire leur champ de compétence. On nemanquera pas de remarquer des similitudes entre les problèmes rencontrés par le secteur privé au Nunavut et les difficultés décrites par la vérificatrice générale dans son rapport d'avril 2005 sur la mise en valeur des ressources dans les T.N.-O.Note de bas de page 51 La vérificatrice générale avait signalé que les investissements dans les T.N.-O. étaient en péril en raison d'un système de réglementation incertain, instable et inefficace dans des domaines clés. Elle a aussi observé que les offices établis pour réglementer l'utilisation des terres et des eaux manquaient « de direction et d'orientation » et qu'ils ne répondaient pas de manière satisfaisante aux besoins du secteur privé.

Il n'existe pas de solution à court terme à ce problème. Le Canada et les parties à l'ARTN vont devoir effectuer un investissement à long terme pour résoudre les problèmes fondamentaux relatifs aux capacités des IG et chercher ensemble un moyen de les améliorer.

4.7.3 Financement des IG

Un nombre des personnes consultées au cours dumandat ont convenu que le financement des IG du Nunavut était insuffisant, au moment où l'intérêt actuel pour l'exploitation des ressources du territoire alourdit leur charge de travail. Le Comité de mise en oeuvre du Nunavut (CMN) a amorcé des négociations en juillet 2002 en vue d'adapter les niveaux de financement pour la seconde période de mise en oeuvre et de planification (2003-2013). En mai 2004, les parties n'ont pu s'entendre sur la façon dont la mise en oeuvre de l'ARTN devait se poursuivre. En juin 2005, les parties à l'ARTN ont accepté d'entreprendre un processus de conciliation pour régler l'impasse. C'est ainsi que M. Berger a été nommé et chargé d'examiner la question du niveau de financement adéquat des IG.Note de bas de page 52

À la suite de l'intervention de M. Berger, le Comité de mise en oeuvre du Nunavut a recommandé, en janvier 2006, une hausse de 2,2 millions de dollars du financement de base annuel des IG. Le gouvernement fédéral n'a pas encore fourni ces fonds additionnels.

4.7.4 Le groupe de travail de la Loi sur la gestion des ressources du Nunavut

Le gouvernement fédéral s'est employé, en collaboration avec NTI, le GN et les IG, à achever l'élaboration de la législation fédérale sur les IG du Nunavut. Il devrait en résulter la simplification du processus de réglementation et la clarification du rôle de la Loi canadienne de l'évaluation environnemental (LCEE) dans le processus d'évaluation environnementale du Nunavut. Le GN soutient qu'il veut réduire les lourdeurs administratives au Nunavut ainsi que clarifier et simplifier le processus d'approbation des projets de développement.Note de bas de page 53

Pourmaintenir un climat favorable aux investissements au Nunavut, il est essentiel que ce processus soitmené à bien. Il reste toutefois d'autre travaux à accomplir. Plus précisément, les recommandations de la vérificatrice générale au sujet du processus de réglementation et des conseils de gestion des T.N.-O. doivent être mises en oeuvre, car elles s'appliquent aussi à la situation du Nunavut.

4.8 Ressources pétrolières et gazières

L'inclusion des ressources pétrolières et gazières dans les négociations sur le transfert s'apparente étroitement à la question des ressources des fonds marins, abordée à la section 4.5.

4.8.1 Point de vue du GN

Lors d'une réunion, le GN a dit estimer qu'une grande partie des redevances des projets miniers du Nunavut devant être entrepris au cours des 10 prochaines années ne profitera qu'à NTI, puisque les cinq prochaines mines potentielles seront situées sur des terres inuites.Note de bas de page 54 C'est pourquoi il est essentiel, pour le GN, d'avoir les compétences voulues pour gérer les réserves pétrolières et gazières que l'on retrouve dans le sous-sol des eaux intérieures du Nunavut.

Comme nous l'avons indiqué à la section 4.5 ci-dessus, le GN a affirmé que l'entente de transfert devrait comprendre la cession de la compétence de réglementer les activités d'exploitation terrestre et extracôtière de pétrole et de gaz, y compris la délivrance des droits d'exploitation du pétrole et du gaz, l'établissement d'une méthode de tenure et les redevances. Pour remédier à ses problèmes de capacité, le GN pourrait envisager de conclure une entente avec l'Office national de l'énergie sur la prestation de services de soutien technique durant une période convenue.

Lors des réunions, le GN s'est dit convaincu que le transfert des ressources des fonds marins permettrait d'accéder immédiatement à son riche potentiel. Lors des réunions sur ce qui était alors l'ébauche de la Stratégie d'exploration et d'exploitation minières du Nunavut, le directeur général de la Division des ressources minérales et pétrolières du GN a expliqué que le champ gazier de Drake Point, sur la pointe nord de l'île Melville, dans le bassin de Sverdrup, avait une structure de propriété compliquée. Il existe, selon le GN, 18 détenteurs d'un intérêt économique direct, avec 343 sections séparées dans l'espace et 341 sections stratigraphiques. Il existe aussi de nombreux intérêts « passifs » importants qui demeurent inconnus. Ceux-ci sont régis par les attestations de découverte importante (ADI) en vertu de la réglementation fédérale.

Cette réglementation prévoit que des titulaires d'une licence peuvent conserver leur licence indéfiniment et gratuitement ce qui, selon le GN, empêche l'exploitation des secteurs en cause. Le ministre a le pouvoir de délivrer des ordonnances de forage aux titulaires de ces licences, ce qui, selon le GN, devrait susciter une consolidation du marché. La Stratégie de développement économique du Nunavut (2003) fixe comme objectif pour le GN la délivrance d'ordonnances de forage pour toutes les attestations de découverte importante d'ici 2013, afin de permettre la reprise des activités d'exploration et d'exploitation des ressources pétrolières et gazières au Nunavut.Note de bas de page 55

4.8.2 Point de vue du gouvernement fédéral

Des fonctionnaires d'AINC ont exprimé des inquiétudes quant à la proposition du GN de délivrer des ordonnances de forage, craignant que cettemesure ne crée des litiges.À leur avis, les vastes ressources pétrolières et gazières du Nunavut demeurent inexploitées en raison de diverses difficultés, dont le problème de nature géographique que pose l'exploitation de ressources en mer dans l'Arctique et les coûts d'investissement faramineux qui en découlent. Il existe apparemment, ailleurs dans le monde, d'autres projets qui nécessitent d'importants capitaux,mais qui offrent des rendements plus immédiats. Par exemple, au large de la Norvège, on retrouve des réserves sensiblement plus importantes et qui sont plus près desmarchés que les îles arctiques du Canada. Des fonctionnaires fédéraux ont indiqué que, depuis quelques années, l'industrie n'a pas profité d'aucune des offres annuelles d'explorer le bassin Sverdrup. Ils estiment que, malgré le coût élevé du pétrole, ils ne s'attendent pas que des travaux importants d'exploration et d'exploitation soient effectués dans les prochaines dix ans.

La position du gouvernement fédéral est qu'il devrait conserver sa compétence relative aux ressources extracôtières. Le Canada reconnaît que les territoires ont des intérêts dans les ressources extracôtières de pétrole et de gaz semblables à ceux des provinces côtières, et il s'est engagé auprès du gouvernement du Yukon à discuter d'une formule de gestion partagée de ces ressources. Selon les fonctionnaires fédéraux, avant toute discussion officielle, le Canada doit adopter une orientation et des principes nationaux devant guider les pourparlers. Lors de discussions antérieures sur le transfert, le Canada a accepté de discuter d'une formule de gestion partagée des ressources extracôtières de pétrole et de gaz dans le cadre de négociations distinctes, après la conclusion d'une entente sur la gestion des terres et des ressources terrestres. Dans les accords sur les ressources extracôtières de la côte Est, la question de la compétence a été écartée en faveur d'ententes de gestion partagée avec les offices des hydrocarbures extracôtiers concernés.

4.9 Sites contaminés et décharges

La gestion des sites contaminés est un autre sujet de négociation sur le transfert. L'entente de transfert du Yukon consacre un chapitre entier à cette question. On estime que le Nunavut abrite de 300 à 400 sites contaminés et décharges du gouvernement fédéral où ont eu lieu des travaux d'exploitation minière, de prospection minérale et des activités militaires (comme le réseau d'alerte avancé (DEW). AINC a dénombré environ 330 sites contaminés dont il a la responsabilitéNote de bas de page 56: lieux jonchés de débris métalliques et de barils vides ou contenant des huiles usées, et lieux fortement contaminés comme l'île Resolution, contaminée aux BPC.

4.9.1 Point de vue du GN

Le GN soutient que l'entente de transfert doit prévoir le maintien de la responsabilité du Canada à l'égard des sites contaminés et des décharges, y compris les lieux non découverts, jusqu'à ce qu'ils aient été assainis. Le GN propose que l'administration et le contrôle des lieux contaminés lui soient confiés, sous réserve que le Canada accepte de restaurer les lieux dont il a la charge, conformément à un calendrier établi et à des normes convenues. Après que les lieux auront été assainis et soumis à une surveillance durant une période donnée, le GN dégagera le Canada de sa responsabilité.Note de bas de page 57

4.9.2 Point de vue de NTI

NTI convient que le nettoyage des sites contaminés du Nunavut est un aspect important du processus de transfert. NTI voit dans la restauration de ces sites une possibilité de développement économique. Un document de travail fourni par NTI indique que le nettoyage des sites offre une occasion importante de renforcer les capacités de la main-d'oeuvre et des entreprises inuites. « Il est donc essentiel que les répercussions et les avantages des grands travaux d'assainissement soient optimisés pour les Inuits et l'ensemble de l'économie du Nunavut. »Note de bas de page 58

Un exemple cité à ce sujet est l'assainissement de l'île Resolution achevé en 2005 en vertu d'accords de contribution conclus entre AINC et la Qikiqtaaluk Corporation. Ces travaux ont procuré de l'emploi aux résidants des collectivités les plus proches (Iqaluit, Kimmirut et Pangnirtung), et 85% des employés étaient des Inuits. Plus du quart du temps passé sur place a été consacré à la formation. Bon nombre des compétences acquises au cours de ces travaux étaient transférables à d'autres secteurs. Ces travaux de nettoyage ont généré plus de 12 millions de dollars en occasions d'affaires au Nunavut. Neuf millions de dollars ont été dépensés en salaires, et plus d'un million est allé à la formation. NTI a noté que malgré le succès du projet de l'île de Resolution, le MAINC ne suit pas lemême processus pour les futur projets. AINC utilise les services de Travaux publics et Services gouvernementaux Canada (TPSGC), qui agit comme agent contractuel. TPSGC sollicite les services d'entrepreneurs pour le nettoyage des sites au moyen d'un processus de demande de propositions. Les propositions sont évaluées aumoyen d'un système de points complexe visant à sélectionner « la proposition la plus avantageuse pour le Canada ».

Les projets de nettoyage des postes abandonnés de la ligne DEW, financés par le ministère de la Défense nationale (MDN), est un autre exemple cité. Ces projets ont donné des emplois et des occasions de formation à plus d'une centaine d'Inuits au cours des trois dernières années. NTI a demandé à AINC de conclure une entente similaire à celle qu'il avait avec le MDN pour décontaminer les postes de la ligne DEW au Nunavut. Cette entente est vue comme un exemple éloquent de ce qu'il est possible d'accomplir lorsque les parties travaillent ensemble.

4.10 Participation de NTI aux négociations sur le transfert

NTI exerce un mélange unique de pouvoirs politiques et économiques au Nunavut et représente la très vaste majorité de la population du territoire. En tant que propriétaire foncier important (et unique) du Nunavut, NTI s'intéresse de façon particulière à la question en cause..

Par le passé, le gouvernement fédéral a adopté comme pratique d'inclure des organismes autochtones territoriaux aux négociations sur le transfert et de leur procurer les ressources financières leur permettant d'y participer efficacement. En 2005, NTI a participé aux discussions exploratoires sur le transfert du Nunavut ainsi qu'au présent exercice.

NTI s'attend à participer aux négociations en tant que partie à part entière. NTI est l'organe reconnu représentant les intérêts des Inuits tels qu'ils ont été négociés en vertu de l'ARTN, qui est protégé par l'article 35 de la Constitution. Le préambule de l'ARTN énonce l'un des objectifs de l'Accord, celui de déterminer « le droit des Inuits de participer à la prise de décisions concernant l'utilisation, l'exploitation, la gestion et la conservation des terres, des eaux et des ressources, notamment au large des côtes ». Selon NTI, ces termes laissent entrevoir le maintien d'une obligation en common law de consulter les Inuits et de leur permettre de « participer » aux prises de décision relatives à l'utilisation des terres et des ressources. De plus, la disposition 2.10.2 de l'ARTN stipule que le Canada a le droit de confier, par voie de cession ou de transfert, des pouvoirs ou des champs de compétence au GN, à la condition que la cession ou le transfert n'ait pas pour effet d'abroger aucun des droits des Inuits en vertu de l'Accord ni d'y porter atteinte. Par conséquent, NTI estime que le Canada a l'obligation de consulter les Inuits sur toute question susceptible d'influer sur leurs droits.

Selon NTI, le Canada a créé un précédent « juridique » au sujet de la consultation des groupes autochtones lors des négociations antérieures sur le transfert. NTI souhaite être une partie égale et à part entière dans le cadre des négociations sur le transfert. Pour être en mesure d'assumer ce rôle de manière efficace, NTI espère conclure une entente rapidement sur le niveau de financement nécessaire à cette fin.

Aucune estimation n'a été fournie depuis que j'ai été nommé représentant supérieur du ministre. Il est probable, toutefois, que NTI reverra sa proposition après que la portée du mandat de la négociation aura été clairement établie. Dans le cadre des négociations sur le transfert de responsabilités au Yukon et aux T.N.-O., le coût de la participation autochtone a été partagé par les gouvernements fédéral et territoriaux. Le gouvernement fédéral n'a pas communiqué avec le GN pour parler du partage du coût de la participation de NTI.

4.10.1 La consultation n'est pas un droit de veto

NTI a indiqué devoir obtenir l'assurance, pour que les négociations sur le transfert portent fruit, « que des mesures ont été prises pour que soient mises en oeuvre « intégralement » les responsabilités de l'ARTN relatives aux questions examinées aux fins du transfert ».Note de bas de page 59

C'est pourquoi il pourra être nécessaire que le Canada clarifie que NTI sera partie aux négociations sur le transfert, mais ne pourra pas exercer un droit de veto; il faudra également établir clairement que le gouvernement fédéral et le GN pourront conclure une entente bilatérale entre eux.

4.11 Négociation d'un protocole et d'un processus

4.11.1 Une seule table

Le GN et NTI reconnaissent qu'AINC et le ministère fédéral des Finances ont leurs intérêts et rôles respectifs à l'égard du transfert de pouvoirs au Nunavut. Le GN a demandé que les discussions sur le transfert soient menées à une seule table afin de garantir que les dispositions finales forment un ensemble « cohérent et équilibré ». Le GN a aussi indiqué que, si une formule à deux tables était adoptée, il faudra convenir qu'elles devront être « coordonnées efficacement » pour mener à une entente. Le GN « appuie fermement » l'idée que le mandat du négociateur en chef du Canada englobe les aspects financiers (AFN et partage des redevances tirées de l'exploitation des ressources) en plus des autres questions.

De son côté, NTI estime que le mandat du négociateur fédéral devrait comprendre le pouvoir de négocier les questions financières, y compris les relations entre les redevances et les autres revenus que touchera le GN par suite du transfert et dans le cadre de la FFT.

Les mandats sur le transfert de responsabilités au Yukon et aux T.N.-O. stipulaient que le négociateur en chef du Canada avait le pouvoir de négocier toutes les dispositions du transfert, sauf les dispositions sur le partage des redevances tirées de l'exploitation des ressources et sur la FFT.

4.11.2 Protocole de négociation

Au cours des négociations sur le transfert de pouvoirs au Yukon et aux T.N.-O., beaucoup de temps a été consacré à discuter du processus de négociation. Un fonctionnaire fédéral a indiqué que l'Entente cadre relative au transfert des responsabilités des terres et des ressources du T.N.-O. a semblé très utile pour guider les négociations, ses modalités ayant été discutées et négociées de manière si approfondie que l'entente finale reflétait tous les points de vue des parties.

Le GN et NTI ont convenu d'un protocole de négociation provisoire, conçu « à des fins prévisionnelles » et pour servir de guide lorsque les négociations auront commencé. Le libellé du protocole proposé est largement de l'Entente cadre relative au transfert des responsabilités des terres et des ressources des T.N.-O. Après qu'on aura convenu dumoment où les négociations sur le transfert devraient commencer, le GN et NTI présenteront officiellement le protocole provisoire au négociateur en chef du Canada.

4.11.3 Échéancier

Le GN a déjà indiqué qu'il souhaite conclure une entente de transfert d'ici décembre 2008. Le protocole provisoire fixe au 31 décembre 2007 la date cible pour la conclusion d'une entente de principe (EP). Il prévoit aussi qu'une fois l'EP approuvée, les parties devront négocier de bonne foi et s'efforcer le plus possible de conclure une entente finale avant le 30 juin 2010. La date cible d'entrée en vigueur de l'entente est le 1er avril 2011.

Les dates ciblées constituent des prévisions très optimistes, compte tenu du temps requis pour former les employés dans les secteurs professionnels qui seront nécessaires dans le cadre du transfert. Toutefois, il convient de remarquer que le rapport préparé par le GN sur l'analyse des besoins en ressources humaines en vue du transfert fixe à 2012 l'entrée en vigueur du transfert.Note de bas de page 60

4.11.4 Négociations axées sur les intérêts

Le GN et NTI ont proposé que les négociations soient réalisées selon une formule de collaboration axée sur les intérêts, et ce, pour traiter des questions présentant un intérêt commun pour le Canada, le GN et NTI. Dans cette optique, le GN a proposé que les parties commencent par faire l'exploration raisonnée des aspects juridiques du transfert avant de prendre position sur les questions des ressources humaines et les aspects financiers.

NTI ne voit aucun motif fondamental de ne pas employer une formule de négociation axée sur les intérêts pour toutes les questions, y compris les ressources humaines et les aspects financiers. NTI estime qu'une bonne discussion raisonnée sur ces aspects pourrait permettre d'éviter des impasses si les parties devaient adopter des positions difficiles à la table des négociations.

5. Besoin d'appliquer les « leçons tirées » du transfert des responsabilités au Yukon

Dans un rapport publié en 2003, la vérificatrice générale a recommandé qu'AINC fasse le point sur sa gestion du transfert des responsabilités au Yukon et qu'il applique les leçons tirées à cette occasion à son prochain exercice de transfert des responsabilités.Note de bas de page 61 Elle a recommandé plus particulièrement que le gouvernement adopte un cadre de gestion pour identifier les projets, préciser les délais et les étapes importantes, et, en général, cerner et réduire les risques lors de la mise en vigueur d'une entente de transfert des responsabilités.

Le rapport sur le Yukon, mentionné précédemment, constitue une référence utile pour le transfert des responsabilités au Nunavut. Il met en lumière certains aspects des processus de négociation, de transition et de mise en oeuvre de l'entente de transfert qui ont bien fonctionné, et d'autres qui pourraient être améliorés. De plus, le rapport sur le Yukon souligne l'importance d'évaluer correctement les enjeux avant le début des négociations, aussi bien pour établir un climat de confiance entre les parties que pour bien comprendre les perceptions et les attentes de chacune. L'exercice devraient contribuer à l'atteinte de ces deux objectifs et aider le ministre à doter l'équipe fédérale de négociation d'une vision claire et d'objectifs précis.

5.1 Négociation de l'entente

Certains des éléments relevés dans le rapport sur le Yukon ont bien fonctionné et devraient être appliqués au processus de négociation du transfert au Nunavut :

  • le déroulement des négociations au Yukon a permis, entre les séances de pourparlers, de bien organiser le travail exigé, lequel dépend en grande partie de la contribution du personnel régional;
  • le fait de confier les dispositions financières au ministère des Finances plutôt qu'aux parties présentes à la table de négociation principale s'est avéré une bonne décision.

Les suggestions suivantes pourraient permettre d'améliorer le déroulement de futures négociations sur le transfert des responsabilités :

  • fournir des ressources suffisantes;
  • améliorer la collecte de renseignements sur le terrain;
  • élaborer et mettre en oeuvre une stratégie de maintien des effectifs actuels.

5.2 Transition et mise en oeuvre

Le rapport sur le Yukon présente aussi des suggestions sur les processus de transition et de mise en oeuvre qui devraient être suivis après la signature de l'entente sur le transfert des responsabilités. En outre, la vérificatrice générale a qualifié d'« inadéquatNote de bas de page 62 » le cadre de gestion utilisé pour guider les tâches principales de la mise en oeuvre de l'entente de transfert des responsabilités au Yukon. Selon la vérificatrice générale, un cadre de gestion détaillé permettrait d'accomplir cet exercice de façon plus ordonnée et moins stressante pour les personnes concernées.

6. Conclusions et recommandations

Le mandat qui m'a été confié comprenait, entre autres, les tâches suivantes :

6.1 Bonnes relations

En ce qui concerne le premier objectif de mon mandat, je crois que le processus de consultation que nous avons mené pour dégager les questions liées au transfert des responsabilités a permis de tisser des liens interpersonnels positifs avec les négociateurs en chef de NTI et du GN. À long terme, le processus de négociation ne pourra qu'en bénéficier.

6.2 Les conditions nécessaires sont-elles en place ?

La grande question pour laquelle on m'a demandé conseil est toutefois la suivante : les conditions nécessaires à la réussite des négociations sur le transfert des responsabilités au Nunavut sont-elles en place?

Compte tenu des grandes difficultés que le GN doit surmonter afin d'assumer ses responsabilités actuelles, difficultés que j'ai décrites dans le présent rapport, la réponse évidente serait négative.

Mais une réponse simple n'est pas acceptable dans le contexte actuel. En fait, le train du transfert des responsabilités est en marche depuis décembre 2004. Le gouvernement du Canada s'est prononcé à maintes reprises en faveur du transfert des responsabilités. N'oublions pas, non plus, que le transfert des responsabilités aux territoires du Nord est un objectif de longue date du gouvernement.

Le GN et NTI, attentifs aux engagements du gouvernement du Canada, se préparent aux négociations sur le transfert. Les attentes sont très élevées du point de vue politique. Comme je l'ai expliqué dans le rapport, le transfert des responsabilités forme maintenant un objectif politique important pour le GN et NTI. De fait, de nombreuses conditions sont en place pour le lancement de négociations à ce sujet :

  • les discussions portent sur une seule entente de règlement des revendications territoriales, un seul peuple autochtone et une seule région visée par le règlement;
  • le GN et NTI ont démontré qu'ils ont bien analysé les questions qui seront abordées lors des négociations.

6.3 Recommandations

Voici des recommandations qui decoulent de ce rapport.

  • On ne saurait trop insister sur l'efficacité des approches graduelles. Je suggère au GN et au gouvernement fédéral de procéder au transfert des responsabilités étape par étape. Compte tenu des difficultés énormes que le GN doit surmonter afin d'assumer ses responsabilités actuelles, une approche progressive s'impose.
  • L'AFN dont il sera convenu devra être « généralement uniforme et cohérent » avec ce qui prévaut dans les autres gouvernements du Nord.
  • Comme il a été indiqué précédemment, si la question de la capacité des ressources humaines n'est pas réglée de façon satisfaisante, les conditions ne seront pas favorables au transfert des responsabilités fédérales. Le Canada devra collaborer avec le GN et NTI afin de cibler les nouveaux programmes et les programmes déjà existants qui permettront aux Inuits d'acquérir les capacités et les compétences requises pour occuper les postes techniques, scientifiques et professionnels transférés. Il sera aussi essentiel d'accorder des fonds pour la formation préalable à l'emploi visant les postes nécessaires à la gestion des ressources après le transfert des responsabilités. À cet égard, il faudra s'entendre sur un échéancier et des points de référence.
  • Le régime de réglementation compliqué et coûteux doit absolument être amélioré et les fonds nécessaires doivent être versés pour les IG de façon à promouvoir un environnement propice aux investissements au Nunavut.
  • NTI devrait être un participant à part entière à la table des négociations et recevoir des fonds suffisants pour lui permettre de jouer ce rôle. Les négociations devraient être bilatérales autant que possible, et multipartites au besoin seulement.
  • Il faudra se pencher sérieusement sur une stratégie de maintien des effectifs actuels d'AINC.
  • Le gouvernement fédéral devrait envisager d'inclure le financement d'un projet de géoscience avancée au mandat de négociation sur le transfert des responsabilités. En dehors du contexte des négociations, il serait bon d'examiner, au cas par cas, la possibilité de verser au GN des fonds pour des projets d'infrastructure ciblés afin de remédier au problème de l'accès aux ressources isolées du Nunavut.
  • Il faudra adopter un plan de communication efficace visant i) les employés d'AINC concernés, pour convaincre le plus grand nombre possible d'accepter un transfert au GN; et ii) l'industrie, pour l'inciter à continuer de faire des affaires au Nunavut. Il sera très important de maintenir la confiance des investisseurs à mesure que les négociations progresseront pour faire en sorte qu'ils gardent leur intérêt dans le développement économique du Nunavut.
  • Plusieurs des « leçons tirées » décrites dans le rapport sur le Yukon et le rapport de 2003 de la vérificatrice générale sur le transfert des responsabilités au Yukon devraient s'appliquer aux processus de négociation, de transition et de mise en oeuvre du transfert des responsabilités au Nunavut. Le Canada devrait également voir à la mise en place d'un cadre de gestion adéquat après l'exécution de l'entente sur le transfert des responsabilités afin d'identifier les projets, de préciser les délais et les étapes importantes, et, en général, de cerner et de réduire les risques lors de la mise en vigueur de l'entente.

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