Archivée - Examen du rendement du Programme d'aide à la gestion des urgences lors des inondations de 2011-2012 au Manitoba

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Ébauche finale : Juin 2012
Rapport sommaire final : Janvier 2013
Numéro du projet : 1570-7/12001

Format PDF (514 Ko, 52 pages)

 

 

Table des matières

 

 

Liste des sigles et acronymes

AADNC

Affaires autochtones et Développement du Nord Canada

AC

Administration centrale

AAFCC

Accords d'aide financière en cas de catastrophe

AFCC

Aide financière en cas de catastrophe

APAM

Association des pompiers autochtones du Manitoba

DGEMRE

Direction générale de l'évaluation, de la mesure du rendement et de l'examen

DGIC

Direction générale des infrastructures communautaires

DGUE

Direction de la gestion des urgences et des enjeux

PAGU

Programme d'aide à la gestion des urgences

 

 

Résumé

Nous présentons dans ce rapport les résultats de l'Examen du rendement du Programme d'aide à la gestion des urgences (PAGU) lors des inondations de 2011-2012 au Manitoba. Tout au long de 2011, le Manitoba a connu une inondation d'une ampleur telle qu'il ne s'en voit que tous les trois cents ans. Une bonne partie du Sud de la province était sous l'eau, notamment, 27 collectivités des Premières Nations. L'examen a pour but d'évaluer les activités de gestion des urgences d'Affaires autochtones et Développement du Nord Canada (AADNC) lancées pour assurer l'atténuation des inondations de 2011-2012 au Manitoba ainsi que la préparation, l'intervention et le rétablissement, de manière à tirer les leçons de la situation et à faciliter l'amélioration des programmes futurs de gestion des urgences.

Le PAGU est conçu pour protéger la santé et la sécurité des membres de Premières Nations aux prises avec des catastrophes naturelles, et avec des dommages ou la destruction de l'infrastructure et des maisons communautaires en conséquence d'une telle catastrophe ou d'un accident; aider à réparer les infrastructures essentielles et les maisons au moyen d'une évaluation opportune des besoins d'urgence et à faciliter une intervention appropriée par d'autres secteurs du Ministère; appuyer les collectivités, pour des raisons humanitaires, par la poursuite des activités de recherche et de sauvetage des personnes disparues.

La Direction de la gestion des urgences et des enjeux d'AADNC est responsable de la gestion d'ensemble du PAGU, tandis que les bureaux régionaux d'AADNC doivent donner le Programme en collaboration directe avec les intervenants. Les dépenses totales en vue de l'inondation au Manitoba sont 78 751 088 $ (soit 3 242 035 $ en 2010-2011 et 75 509 053 $ en 2011-2012).

La gestion des urgences dans les réserves des Premières Nations se fait habituellement en collaboration avec les gouvernements provinciaux, par l'intermédiaire des organismes provinciaux d'intervention d'urgence et de leurs processus de coordination des interventions dans les collectivités des Premières Nations. Cette collaboration est le fruit d'un accord entre AADNC et la plupart des provinces.  La situation au Manitoba diffère de celle dans la plupart des autres régions d'AADNC, étant donné que le Ministère et la province du Manitoba n'ont pas une entente en place. Le bureau régional du Manitoba doit donc travailler directement avec les collectivités des Premières Nations pour coordonner une intervention en cas d'urgence et conclure une entente de financement avec les Premières Nations individuelles.

Les Premières Nations dans le Sud du Manitoba sont généralement exposées à un grave risque d'inondation et présentent des caractéristiques qui les rendent plus susceptibles encore aux dommages. Le besoin d'aide découle notamment de la propension à l'inondation dans le Sud du Manitoba, d'une mauvaise planification communautaire, d'une infrastructure de contrôle des inondations réduite ou faible, du manque de ressources financières et d'expertise technique, de même que le manque de clarté des systèmes, processus et mécanismes pour les situations d'urgence. Parce que les collectivités des Premières Nations au Sud du Manitoba sont trop exposées, alliées à une très faible capacité, les Premières Nations ont eu besoin, et continueront d'avoir besoin, d'une aide considérable quand une urgence survient.

Lors des inondations de 2011-2012 au Manitoba, le PAGU a aidé 27 collectivités des Premières Nations à lutter contre les eaux et l'évacuation de 12 collectivités. Il est clair que le PAGU a réussi à protéger la santé et la sécurité immédiates des collectivités des Premières Nations. Cependant, la réussite de la protection de l'infrastructure communautaire, et de la santé et sécurité à long terme (comme dans le cas de la moisissure qui a envahi les maisons inondées), est beaucoup plus difficile à évaluer étant donné les circonstances et le contexte spécifique de cette inondation remarquable.

Bien que commencé en 2005, le PAGU est toujours en évolution. L'évaluation du PAGU réalisée en 2010 recommandait que AADNC définisse sa relation avec tous les intervenants externes, et mette en place des structures de gouvernance et des ententes conçues pour garantir l'exécution de ses responsabilités. La recommandation mettait l'accent sur les mécanismes et la structure de prestation du programme en lien avec les quatre piliers de la gestion des urgences : atténuation, préparation, intervention et rétablissement. L'examen confirme que le PAGU n'a pas encore abordé entièrement cet aspect. En particulier, la structure de gouvernance demeure floue et les mécanismes de prestation de programmes n'ont pas été établis pour mener des évaluations du risque, élaborer des stratégies d'atténuation, préparer et tester les plans de gestion des urgences, ou réagir aux événements.

Il est devenu manifeste que les limites de la capacité du système de gestion des urgences étaient atteintes et le PAGU n'a pas réussi à trouver la capacité « d'intensification » supplémentaire nécessaire pour traiter efficacement la situation. Enfin, l'absence d'une structure de gouvernance bien définie au sein du Programme a affecté la coopération avec les intervenants, élément nécessaire d'un système efficace de gestion des urgences chez les Premières Nations au Manitoba.

Ce que la situation au Manitoba démontre clairement, c'est que le PAGU est forcé à réagir et limite sa capacité d'aborder les problèmes à long terme et systémiques que connaissent les Premières Nations qui sont aux prises avec des catastrophes naturelles.

Les recommandations suivantes visent à répondre à ces problèmes :

  1. Le PAGU devrait établir de meilleurs liens avec d'autres programmes d'AADNC, de manière à créer un système efficace d'appui à des solutions à long terme pour les dangers liés à la gestion des urgences et à la résilience des collectivités.
  2. La Direction de la gestion des urgences et des enjeux (DGUE) devrait établir des lignes directrices, pour les plans de gestion des urgences des Premières Nations, contenant des protocoles d'accès à l'aide pour une Première Nation dont les ressources internes sont dépassées. Une fois ces lignes directrices en place, le bureau régional du Manitoba d'AADNC devrait collaborer avec les Premières Nations à risque élevé pour mettre à jour leurs plans et conserver des exemplaires des plans pour la base du travail de coordination à venir.
  3. La DGUE et le bureau régional du Manitoba devraient étudier des moyens de calibrer les rôles et responsabilités en matière de gestion des urgences en fonction de l'ampleur et de la gravité de l'urgence, y compris le moment où l'administration centrale doit participer à la prise de décisions au cours d'une intervention et la façon de le faire.
  4. Le bureau régional du Manitoba devrait acquérir la capacité d'appliquer le système de gestion des incidents au complet lors des urgences futures, comme l'indique le plan de gestion des urgences du bureau régional du Manitoba.
  5. En consultation avec les bureaux régionaux d'AADNC, la DGUE devrait établir des procédures, protocoles ou lignes directrices clairs pour les évaluations du risque et le soutien aux interventions d'urgence (y compris des activités comme la lutte contre les inondations et les évacuations).
  6. Une fois la structure et les processus de gouvernance clarifiés, la DGUE et le bureau régional du Manitoba devraient établir les partenariats nécessaires pour créer un système de gestion des urgences efficace.
 

 

Réponse de la direction et plan d'action

Titre du projet : Examen du rendement du Programme d'aide à la gestion des urgences lors des inondations de 2011-2012 au Manitoba

Projet n° RCN-A 1570-7/12001

Recommandation Mesure Gestionnaire responsable
(Titre et secteur)
Date prévue de mise en œuvre et d'achèvement
1) Le PAGU devrait établir de meilleurs liens avec d'autres programmes d'AADNC, de manière à créer un système efficace d'appui des solutions à long terme pour les dangers liés à la gestion des urgences et à la résilience des collectivités. Depuis les inondations de 2011 au Manitoba, le PAGU a fusionné avec la Direction générale des infrastructures communautaires (DGIC) et a déjà commencé à établir des liens importants avec d'autres programmes du Ministère, notamment en ce qui a trait aux piliers de l'atténuation et du rétablissement.

Le PAGU mettra davantage à contribution le Programme d'immobilisations et d'entretien existant pour renforcer les systèmes d'évaluation des risques, d'atténuation et de reddition de comptes et pour favoriser des investissements stratégiques dans l'infrastructure (aménagement communautaire, emplacement des nouvelles infrastructures, etc.).

À l'heure actuelle, le PAGU travaille étroitement avec le Programme d'immobilisations et d'entretien à l'élaboration d'options visant à renforcer les activités d'atténuation des situations d'urgence dans les collectivités des Premières Nations résidant dans des réserves. AADNC mettra aussi à profit les activités en cours à Sécurité publique Canada.
Directeur général de la DGIC En permanence
2) La DGUE devrait établir des lignes directrices, pour les plans de gestion des urgences des Premières Nations, contenant des protocoles d'accès à l'aide pour une Première Nation dont les ressources internes sont dépassées. Une fois ces lignes directrices en place, le bureau régional d'AADNC au Manitoba devrait collaborer avec les Premières Nations à risque élevé pour mettre à jour leurs plans et conserver des exemplaires des plans pour la base du travail de coordination à venir. Le PAGU concevra un manuel national de gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations qui établira les protocoles, les normes de service et les lignes directrices que les bureaux régionaux d'AADNC doivent respecter lorsqu'ils interviennent auprès des Premières Nations, des provinces et d'autres organismes, en plus de préciser les rôles et les responsabilités de chaque intervenant.

En outre, le PAGU ajoutera des lignes directrices sur la déclaration de l'état d'urgence et sur la détermination de la fin de l'état d'urgence chez les Premières Nations, qui contribueront à clarifier les rôles et les responsabilités, ainsi qu'à accroître l'efficacité du PAGU.

Le bureau régional d'AADNC au Manitoba et l'Association des pompiers autochtones du Manitoba (APAM) travailleront en collaboration pour renforcer les plans de gestion des urgences des Premières Nations en élaborant un modèle visant à aider ces dernières à établir un tel plan.

Le bureau régional d'AADNC au Manitoba incitera l'APAM à mettre en œuvre une stratégie visant à actualiser régulièrement  les plans de gestion des urgences des collectivités, ainsi qu'à préparer une copie du plan définitif pour les dossiers d'AADNC. Le bureau régional d'AADNC au Manitoba se chargera de la supervision de ces travaux.
Manuel national de gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations : 
Directeur général de la DGIC et directeur de la DGUE 

Modèle de plan de gestion des urgences à l'intention des Premières Nations : Directeur général régional associé du bureau régional d'AADNC au Manitoba

Établissement d'un nouveau processus de déclaration de l'état d'urgence :  
Directeur général de la DGIC 

Supervision de la mise en œuvre de la stratégie d'actualisation régulière des plans de gestion des urgences des collectivités des Premières Nations 
Directeur général régional associé du bureau régional d'AADNC au Manitoba
Manuel national de gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations : 4e trimestre de l'exercice 2012­2013

Modèle de plan de gestion des urgences à l'intention des Premières Nations :
4e trimestre de l'exercice 2012­2013

Mise en œuvre de la stratégie d'actualisation régulière des plans de gestion des urgences des collectivités des Premières Nations :
À déterminer
3) La DGUE et le bureau régional du Manitoba devraient étudier des moyens de calibrer les rôles et responsabilités en matière de gestion des urgences en fonction de l'ampleur et de la gravité de l'urgence, y compris le moment où l'administration centrale doit participer à la prise de décisions au cours d'une intervention et la façon dont elle doit procéder. Le bureau régional d'AADNC au Manitoba et la DGIC concevront une structure formelle qui établira a) les divers seuils d'urgence selon l'ampleur de l'incident, et b) l'étendue des rôles et des responsabilités en matière de gestion des urgences en fonction de chaque seuil. La structure clarifiera le rôle de l'administration centrale dans le processus décisionnel à la suite d'un incident.

Les plans de gestion des urgences des bureaux régionaux d'AADNC seront modifiés en conséquence.
Directeur général régional associé du bureau régional d'AADNC au Manitoba et directeur général de la DGIC À déterminer
4) Le bureau régional du Manitoba devrait acquérir la capacité d'appliquer le système intégral de gestion des incidents lors des urgences futures. Le bureau régional d'AADNC au Manitoba se dotera d'une capacité régionale de pointe qui s'harmonisera avec le système de gestion des incidents, offrant ainsi une façon de coordonner les efforts des organismes et des ressources qui collaborent à la prise en charge, au contrôle et à l'atténuation des situations d'urgence de façon sécuritaire.

Afin de se doter d'une capacité de pointe, le bureau régional d'AADNC au Manitoba se penchera sur les pratiques exemplaires et sur les modèles des autres bureaux régionaux pour mettre sur pied une équipe de capacité de pointe qui sera à la fois efficace et efficiente et qui répondra aux besoins des collectivités des Premières Nations du Manitoba.   
Directeur général régional associé du bureau régional d'AADNC au Manitoba À déterminer
5) En consultation avec les bureaux régionaux d'AADNC, la DGUE devrait établir des procédures, protocoles ou lignes directrices clairs pour les évaluations du risque et le soutien aux interventions d'urgence (y compris des activités comme la lutte contre les inondations et des exercices d'évacuation). AADNC se servira des renseignements détenus sur les collectivités des Premières Nations, dont les plans de gestion des urgences des Premières Nations, l'expertise régionale, l'évaluation générale d'AADNC et les rapports d'inspection des infrastructures, pour élaborer un modèle axé sur le risque qui aidera le Ministère et les Premières Nations à mettre en œuvre les activités d'atténuation appropriées.

Il incombe aux Premières Nations de mener des évaluations des risques à l'échelle de la collectivité, une activité faisant partie intégrante des plans de gestion des urgences. AADNC doit aider les Premières Nations à mener ces évaluations et, dans le cas du Manitoba, le bureau régional d'AADNC mobilisera l'APAM pour fournir cette aide.
Méthodologie d'évaluation des risques :
Directeur de la DGUE

Aider les Premières Nations à solliciter les autorités appropriées : 
Directeur général régional associé du bureau régional d'AADNC au Manitoba
 
6) Une fois la structure et les processus de gouvernance clarifiés, la DGUE et le bureau régional du Manitoba devraient établir les partenariats nécessaires pour créer un système de gestion des urgences efficace pour les collectivités des Premières Nations du Manitoba. AADNC élaborera des options pour mettre en œuvre un système de gestion des urgences efficaces pour les Premières Nations du Manitoba.

AADNC continuera de prendre part aux négociations bilatérales avec la Province du Manitoba et l'APAM sur les ententes de services relatives à la gestion des urgences à l'appui des collectivités autochtones du Manitoba, ainsi qu'avec Sécurité publique Canada au sujet du programme des Accords d'aide financière en cas de catastrophe.
Élaboration d'options 
Directeur de la DGUE

Négociations bilatérales 
Directeur de la DGUE
et directeur général régional associé du bureau régional d'AADNC au Manitoba
À déterminer
 

J'approuve la réponse de la direction et le plan d'action présentés ci-dessus.

 

Original signé par :

Ron Hallman
Sous-ministre adjoint principal

 

La réponse de la direction et le plan d'action concernant l'examen du rendement du Programme d'aide à la gestion des urgences (PAGU) lors des inondations de 2011-2012 au Manitoba ont été approuvés par le Comité de l'évaluation, de la mesure du rendement et de l'examen le 22 juin 2012.

 

 

1 Introduction

1.1 Aperçu

Nous présentons dans ce rapport les résultats de l'Examen du rendement du Programme d'aide à la gestion des urgences (PAGU) lors des inondations de 2011-2012 au Manitoba. L'examen a pour but d'évaluer les activités de gestion des urgences lancées en vue d'assurer l'atténuation des inondations de 2011-2012 au Manitoba, ainsi que la préparation, l'intervention et le rétablissement, de manière à tirer les leçons de la situation et à faciliter l'amélioration des programmes futurs de gestion des urgences.

Voici la structure du rapport : l'introduction (section un) présente un profil du PAGU; la section deux sert à décrire la méthode d'examen, tandis que la section trois donne un aperçu des inondations de 2011-2012 au Manitoba; les sections quatre et cinq présentent les constatations concernant la pertinence et le rendement; enfin, la section six contient les conclusions et recommandations. L'annexe A donne la liste des inondations historiques et l'annexe B explique le processus de financement du PAGU.

1.2 Profil du Programme

Cette section fait un court survol du PAGU, avec ses objectifs, sa gestion et ses ressources.

1.2.1 Contexte et description

Le terme « urgence » sert normalement à désigner une situation où une collectivité est dépassée par des événements imprévus ou extraordinaires qu'elle n'est plus en mesure de gérer au moyen de ses ressources et de ses capacités normales. Une urgence peut être déclenchée par un phénomène naturel comme un incendie de forêt ou une inondation, ou par l'activité humaine, comme les troubles civils, les déraillements ou des épidémies de maladies transmissibles.

Au Canada, les rôles et activités relatifs à la gestion des urgences sont correctement acquittés à tous les niveaux de la société. Les responsabilités sont partagées entre les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux et leurs partenaires, y compris des citoyens chargés de se préparer aux situations de catastrophe et de contribuer à la résilience de leur collectivitéNote de bas de page 1. Ce cadre repose sur l'hypothèse selon laquelle il appartient à chacun de traiter des urgences jusqu'à ce que ses capacités soient dépassées. À ce stade, chaque ordre successif du gouvernement est engagé, puisque l'ordre inférieur se voit dépassé. Selon Affaires autochtones et Développement du Nord Canada (AADNC), les membres de la collectivité de la Première Nation doivent prendre en charge l'atténuation, la préparation, l'intervention et le rétablissement en cas d'urgence au sein de leur foyer ou visant leurs familles et personnes à charge. Les Premières Nations sont responsables de gérer les urgences dans leur collectivité, de se doter d'un plan de gestion des urgences qui attribue les rôles et responsabilités en matière de gestion des urgences, et de demander de l'aide si leurs ressources sont dépasséesNote de bas de page 2.

AADNC prend part de longue date – depuis les années 1960 – à la gestion, dans une certaine mesure, des urgences qui surviennent dans les réserves des Premières Nations. Au cours des 20 dernières années, le rôle particulier du Ministère relativement à la gestion des urgences dans ces collectivités est devenu de plus en plus défini. L'adoption de la Loi sur la protection civile en 1988 a rendu chaque ministre responsable devant le Parlement de la détermination des « risques de situation de crise propres ou liés [au] secteur de responsabilité [du ministre responsable] » et d'élaborer un plan pour les mesures d'urgence civiles.

La Loi a eu pour conséquence de mieux définir les rôles et responsabilités d'AADNC. Le gouvernement fédéral a doté AADNC du pouvoir et des ressources nécessaires pour venir en aide aux services d'extinction des incendies lorsque des incendies de forêt (ou des accidents semblables) frappent les réserves des Premières Nations, et il a aussi permis au Ministère d'apporter un soutien financier aux Premières Nations afin de poursuivre les activités de recherche et de sauvetage des personnes disparues, pour des raisons humanitaires, après que les autorités locales ont mis fin à ces activités.

Le gouvernement fédéral a établi la deuxième composante de base du Programme en 2004, lorsqu'il a élargi l'autorisation ministérielle de 1988 aux activités et services liés de façon plus générale à la gestion des urgences. Le Ministère y a gagné le pouvoir d'appuyer un éventail d'activités d'atténuation, de préparation, d'intervention et de rétablissement, mais il n'a pas pour autant obtenu de financement supplémentaire permanent (services votés) à l'appui de son mandat élargi. En fait, le gouvernement fédéral a versé le financement selon les besoins du moment, par une demande de fonds supplémentaires par le truchement de la réserve de gestion du Conseil du Trésor, selon le principe du recouvrement des coûts.

L'adoption de la Loi sur la gestion des urgences fédérale en 2007 a clarifié encore davantage les rôles et responsabilités de tous les ministres fédéraux. En premier lieu, cette nouvelle Loi donne une définition de la gestion des urgences, qui comprend « les activités en matière de prévention, d'atténuation, de préparation, d'intervention et de rétablissement » en cas d'urgence. Elle oblige aussi chaque ministre devant rendre des comptes au Parlement à déterminer les risques « qui sont propres à son secteur de responsabilité ou qui y sont liés », et de là à préparer, tenir et mettre à l'essai les plans de gestion des urgences.

À l'heure actuelle, le PAGU fonctionne en vertu des conditions de gestion des Contributions pour l'aide à la gestion des urgences pour les activités dans les réserves.

1.2.2 Objectifs et résultats escomptés

Voici les objectifs des activités d'aide à la gestion des urgences, à la lumière des conditions du PAGU :

  • Protéger la santé et la sécurité des membres des Premières Nations en cas de catastrophes naturelles et de dommages ou de destruction de l'infrastructure et des maisons de la collectivité, provoqués par une catastrophe naturelle ou un accident;
  • Aider à réparer les infrastructures essentielles et les maisons au moyen d'une évaluation opportune des besoins d'urgence et de la facilitation d'une intervention utile par d'autres secteurs du Ministère; et
  • Appuyer les collectivités, pour des raisons humanitaires, en permettant de poursuivre les recherches et le sauvetage de personnes portées disparues.

Dans l'immédiat, ces activités se traduisent par une amélioration des préparatifs d'urgence chez les Premières Nations et par l'élargissement de leur capacité de dresser des plans de gestion des urgences. Les résultats à moyen terme sont la réduction du délai d'intervention pour atténuer les catastrophes; la facilitation et la réduction des coûts des interventions et de rétablissement en cas d'urgence; et une capacité accrue des Premières Nations de donner suite aux urgences. À long terme, les résultats sont une garantie de la santé et sécurité des membres et des collectivités des Premières Nations, et une amélioration concomitante de la capacité des Premières Nations de gérer les urgences.

Le PAGU contribue actuellement à l'activité de programme Gestion fédérale des terres de réserve sous le résultat stratégique Les terres et l'économie de l'architecture des activités de programme d'AADNCNote de bas de page 3. Une Stratégie de mesure du rendement est en cours de préparation pour aider à surveiller les progrès par rapport aux objectifs et énoncés indiqués, mais comme elle n'était pas en place lors des inondations de 2011-2012 au Manitoba, elle ne peut figurer dans cet examen.

1.2.3 Gestion du Programme, intervenants clés et bénéficiaires

La Direction de la gestion des urgences et des enjeux (DGUE) doit répondre de la gestion globale du PAGU. Elle fournit un soutien tant stratégique qu'opérationnel pour la mise en œuvre et la gestion continues du Programme. Les bureaux régionaux d'AADNC occupent aussi un rôle prépondérant dans la gestion du Programme, sous forme d'une collaboration directe avec les intervenants clés (c.-à-d. les organisations de gestion des urgences, les organisations autochtones et les conseils de bande).

La gestion des urgences dans les réserves des Premières Nations se fait habituellement en collaboration avec les gouvernements provinciaux, par l'intermédiaire des organismes provinciaux d'intervention d'urgence et de leurs processus de coordination des interventions dans les collectivités des Premières Nations. Cette collaboration est le fruit d'un accord entre AADNC et la plupart des provinces. Toutefois, la situation au Manitoba diffère de celle dans la plupart des autres régions d'AADNC, étant donné que le Ministère et la province du Manitoba n'ont pas une entente en place. Le bureau régional du Manitoba doit donc travailler directement avec les collectivités des Premières Nations pour coordonner une intervention en cas d'urgence et conclure une entente de financement avec les Premières Nations individuelles.

Dans ce contexte, le coordonnateur de la gestion des urgences au bureau régional d'AADNC au Manitoba se charge de recueillir l'information et de diriger les opérations régionales du Manitoba pour AADNC en supervisant le personnel supplémentaire de gestion des urgences au bureau régional, en communiquant avec les Premières Nations, en coordonnant les activités des  intervenants qui soutiennent les Premières Nations et en appuyant de manière générale les activités de gestion des urgences des Premières Nations. Le directeur de Logement et infrastructure est chargé d'autoriser les dépenses d'urgence, tandis que le directeur général régional associé doit maintenir le contact avec ses homologues au gouvernement provincial et transmettre les demandes d'aide émanant d'autres ministères fédéraux à l'Administration centrale (AC) d'AADNC. Il appartient au directeur général régional de représenter AADNC au groupe de travail de gestion des urgences du conseil fédéral du Manitoba, ainsi que de coordonner les activités avec les autres ministères fédérauxNote de bas de page 4.

La Province du Manitoba peut offrir toute l'aide possible aux Premières Nations à la suite d'une demande d'aide d'AADNC. Dans le dossier des inondations de 2011-2012, la province a procédé au remboursement des dépenses admissibles des Premières Nations dans le cadre du Programme d'aide financière en cas de catastrophe (AFCC), qui était soutenu par le programme des Accords d'aide financière en cas de catastrophe (AAFCC) de Sécurité publique Canada, qui offre quant à lui une aide financière aux provinces et aux territoires touchés par des catastrophes naturelles de grande ampleur.

Fournisseur de services pour AADNC, l'Association des pompiers autochtones du Manitoba a la responsabilité d'apporter un soutien aux Premières Nations sur les services sociaux nécessaires lors d'une évacuation, de même que de les aider à préparer des plans communautaires de gestion des urgences.

Les Premières Nations doivent répondre de la gestion des urgences dans leurs collectivités, se doter d'un plan de gestion des urgences et demander de l'aide à AADNC si leurs ressources sont épuisées. Les membres de la collectivité de la Première Nation sont au bout du compte les bénéficiaires du PAGU, mais, sous l'angle administratif, le Programme ne finance pas directement les individus et les familles. Les fonds sont plutôt versés soit à la Première Nation, soit à l'Association des pompiers autochtones du Manitoba, qui assure les services de gestion des urgences aux membres de la collectivité (comme indiqué ci-dessus).

Figure 1 ci-dessous illustre la structure de financement entre les divers intervenants et les activités de gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations.

Figure 1 ci-dessous illustre la structure de financement entre les divers intervenants et les activités de gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations.
Description de la figure 1 : Structure de financement de la gestion des urgences/Premières Nations du Manitoba

La figure 1 illustre la relation de financement entre les divers intervenants et les activités de gestion des urgences dans les collectivités des Premières Nations.  Le PAGU accorde une avance comptable à l'Association des pompiers autochtones du Manitoba (MANFF) et aux Premières Nations, qui financent les efforts de lutte contre les inondations et fournissent des services d'évacuation aux collectivités. La MANFF et les Premières Nations présentent une demande de remboursement des dépenses dans le cadre du programme des Accords d'aide financière en cas de catastrophe du Manitoba, et le Manitoba soumet quant à lui une demande de remboursement des dépenses dans le cadre du programme des Accords d'aide financière en cas de catastrophe de Sécurité publique Canada.

 

1.2.4 Ressources du Programme

Le gouvernement fédéral assure un financement continu au PAGU (services votés) à raison de 18 936 670 $ par année (pour l'exercice 2011-2012), ce qui comprend 16 536 000 $ en paiements de transfert (contributions) destinés aux activités d'extinction des incendies. Un autre 2 400 670 $ est affecté aux activités de gestion des urgences ministérielles, y compris 22 équivalents temps plein et les frais de fonctionnement connexes. Le Ministère réaffecte les ressources actuelles attribuées à d'autres programmes (comme les projets d'immobilisations) en vue de majorer les ressources financières nécessaires aux activités du PAGU. Lorsque le Ministère cesse de pouvoir assumer le fardeau financier, il demande des fonds supplémentaires à partir de la réserve de gestion du Conseil du Trésor.

Durant l'exercice 2011-2012, AADNC a soumis au Conseil du Trésor des propositions de demande de fonds supplémentaires en vue des activités de gestion des urgences dans les réserves dans l'ensemble du pays. Les dépenses totales en vue de l'inondation au Manitoba sont 78 751 088 $ (soit 3 242 035 $ en 2010-2011 et 75 509 053 $ en 2011-2012).

 

 

2 Méthode d'examen

2.1 Objet et portée

L'examen a pour but d'évaluer les pratiques de gestion des urgences appliquées durant les inondations de 2011-2012 au Manitoba, en vue de déterminer les leçons apprises et de faciliter les améliorations des programmes de gestion des urgences à l'avenir.

L'examen a porté sur les activités de gestion des urgences entreprises en vue d'atténuer les inondations de 2011-2012 au Manitoba, et d'assurer la préparation, l'intervention et le rétablissement. Cela comprend les politiques et procédures d'AADNC touchant le financement du PAGU, de même que les pratiques de gestion connexes d'AADNC, de l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba et des conseils de bande dans les collectivités touchées.

2.2 Questions examinées

Conformément au cadre de référence, l'examen a porté sur ce qui suit :

  1. Les facteurs qui contribuent au besoin constant d'aide à la gestion des urgences dans le dossier des inondations au Manitoba.

  2. La performance du PAGU lors des inondations de 2011-2012 au Manitoba.

    1. L'efficacité relative de la gestion des urgences (c.-à-d. atténuation, préparation, intervention et rétablissement par rapport aux inondations) pour protéger les collectivités des Premières Nations contre les inondations au Manitoba.

    2. La mesure dans laquelle la structure de gouvernance contribue à l'efficacité et à l'utilité de la gestion des urgences au Manitoba.

2.3 Méthodes

Les constatations et conclusions de l'examen reposent sur l'analyse et la validation des sources de données suivantes :

Analyse documentaire : L'examen s'est penché sur la littérature didactique et la documentation traitant des causes des inondations au Manitoba et des tendances attendues à l'avenir, de même que sur les modèles et approches de gestion des urgences dans le contexte de l'inondation et des concepts ayant une grande pertinence pour les Premières Nations (comme les points vulnérables).

Étude des documents et des dossiers : Cette étude a porté sur les documents fondamentaux, la documentation de mise en œuvre, les rapports annuels, les données financières (prévues aussi bien que réelles) et les autres données et renseignements administratifs, ce qui englobe aussi bien les rapports sur la situation, les rapports de notification, les rapports récapitulatifs et les rapports sur les leçons apprises que les comptes rendus post-action relatifs aux inondations au Manitoba. Parmi les sources des documents figurent l'administration centrale d'AADNC, la région du Manitoba et les documents provinciaux que le public peut consulter sur les sites Web du Manitoba. Un échantillon de trois plans de gestion des urgences de Premières Nations a également été examiné selon cette méthode.

On s'est aussi penché sur les examens, évaluations et vérifications antérieurs, y compris l'Évaluation du Programme d'aide à la gestion des urgences de 2010 et l'Examen du PAGU réalisé par le Programme en 2007.

Entrevues avec les intervenants clés : 31 entrevues ont été menées avec du personnel de l'administration centrale du PAGU, le personnel de la région du Manitoba d'AADNC, l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba et les membres d'une collectivité des Premières Nations, et des représentants de Sécurité publique Canada. Ces entrevues visaient à parvenir à une meilleure compréhension de l'efficacité et de l'utilité des politiques et procédures du PAGU au cours des inondations de 2011-2012 au Manitoba.

Limitations
Comme décrit à la partie qui suit, l'examen a été réalisé dans un délai relativement court vers la fin de l'exercice, ce qui a empêché l'équipe d'examen d'atteindre tous les intéressés (ainsi, les représentants de l'Association des pompiers autochtones du Manitoba et de l'Assemblée des chefs du Manitoba n'étaient pas disponibles pour donner leur apport). De plus, l'équipe d'examen n'a pu se rendre que dans une seule collectivité des Premières Nations, bien que d'autres collectivités aient participé à des entrevues.

Stratégie d'atténuation des limitations
En raison du faible apport des Premières Nations et de leurs organisations, l'équipe d'examen a mené une analyse de 103 articles publiés par des journaux provinciaux et nationaux. Ces articles ont été repérés par une recherche dans les archives d'InfoMedia d'AADNC, en fonction des mots « Manitoba » et « inondation » entre janvier 2011 et février 2012, et leur contenu a été analysé sous l'angle de l'ampleur de l'inondation et de ses incidences sur les collectivités des Premières Nations. Cette source de données supplémentaire a clairement comblé une lacune dans l'information, mais elle concernait uniquement le contenu des journaux, et ne permettait donc pas une analyse approfondie de chaque question du point de vue des Premières Nations (c.-à-d. qu'elle ne surmontait que partiellement la limitation).

2.4 Rôles, responsabilités et calendrier

Le Cadre de référence de l'examen a été rédigé avec l'apport du bureau régional du Manitoba d'AADNC, de la direction du PAGU, de Sécurité publique Canada et de l'organisation des mesures d'urgence provinciale. Le 16 février 2012, il a reçu l'approbation de la dirigeante principale de la vérification et de l'évaluation d'AADNC avant d'être présenté au Comité de l'évaluation, de la mesure du rendement et de l'examen le 20 février 2012, pour information et examen.

La Direction générale de l'évaluation, de la mesure du rendement et de l'examen (DGEMRE) a été le chargé de projet pour cette étude et a réalisé l'ensemble de la recherche, avec l'apport de la Direction générale des services d'évaluation et d'enquête et de l'équipe chargée de la gestion du risque. Menée en février et mars, cette recherche a consisté en deux visites de collecte de données au Manitoba. Les constatations préliminaires ont été présentées à la fin de mars et au début d'avril au bureau régional du Manitoba d'AADNC et à la direction du PAGU, de même qu'aux représentants de Sécurité publique Canada et de l'organisation des mesures d'urgence provinciale, qui les ont validées.

 

 

3 Les inondations de 2011-2012 au Manitoba : Chronologie tirée des médias

Le 23 décembre 2011, Environnement Canada a annoncé que l'inondation historique des Prairies était la « manchette météorologique » de l'année : [Traduction] « Nous employons l'expression « inondation du siècle », mais nous aurions tout aussi bien pu dire l'inondation du millénaire ».

Neuf mois plus tôt, au début de mars, le gouvernement du Manitoba avait annoncé que l'inondation de cette année pourrait avoir l'ampleur de celle de 2009, en raison de risques accrus le long de la rivière Assiniboine. L'inondation de 2009 avait causé beaucoup de dégâts, que la province aussi bien que le gouvernement fédéral s'occupent encore de régler. Ainsi, le Canada venait d'apporter une contribution de 14 millions de dollars à un fonds de 57 millions de dollars destiné à aider les propriétaires riverains touchés le long de la rivière Rouge, tandis que le gouvernement du Manitoba préconisait un fonds d'atténuation spécial pour alléger les pressions financières à la suite de la catastrophe. Ottawa était prêt à discuter de différentes options.

À la mi-avril, l'inondation de 2011 dépassait les projections et était qualifiée de seconde en importance en 150 ans, entraînant deux décès. L'état d'urgence était déclaré dans trente localités, et toutes les municipalités sauf trois dans la région interlac avaient proclamé l'état d'urgence ou publié des ordonnances de prévention. Il a fallu fermer 52 routes provinciales et 650 voies municipales, et évacuer 1 100 personnes, dont 900 membres de Premières Nations. Le premier ministre du Manitoba réclamait au Canada la création d'une stratégie d'inondation nationale à l'appui des Premières Nations de Peguis et autres constamment frappées par des inondations.

À la fin d'avril, il était admis que l'inondation de 2011 était la pire de mémoire d'homme. On projetait encore une forte inondation de surface dans l'interlac, secteur soumis à une inondation chronique depuis quelques années. À Winnipeg, le débit d'eau surpassait ceux de 1950Note de bas de page 5, 1979 et 1996, et le grand nombre d'évacués commençait à susciter la préoccupation. Le 26 avril, 1 954 personnes étaient évacuées, en grande majorité des membres des Premières Nations de Peguis et de Roseau River. Il était prévu que ceux provenant de Roseau River pourraient revenir chez eux après quelques jours, mais que la majorité de ceux de Peguis attendraient des semaines avant de pouvoir retourner chez eux.

Le dernier jour d'avril, les résidants des Premières Nations de Peguis, de Roseau River et de Lake St. Martin ont défilé devant le bureau d'AADNC à Winnipeg pour protester contre l'inondation chronique et le mode d'intervention du gouvernement. Peu après, des représentants de la Première Nation de Lake St. Martin ont fait savoir que celle-ci souhaitait quitter définitivement les lieux, parce que des décennies d'inondation avaient laissé une kyrielle de problèmes de santé, la plupart liés à la moisissure dans les maisons. Des rapports ultérieurs font état de la construction de digues autour de cette collectivité, de même que des Premières Nations de Little Saskatchewan, de Lake Manitoba et de Sandy Bay, elles aussi gravement touchées par les crues.

Par ailleurs, les agriculteurs du Manitoba ont été prévenus qu'ils seraient sans doute gravement frappés, et que les fonds d'inondation pour les propriétaires et les villes ne seraient pas plafonnés. Les journaux déclaraient que la situation aurait pu être bien pire sans les trois grandes structures d'atténuation de l'inondation dans la province : le barrage et le réservoir de Shellmouth, le canal Portage et le canal de dérivation de la rivière Rouge.

Au début de mai, toutefois, il a été signalé que les fortes tempêtes et les grands vents du printemps menaçaient les défenses du Manitoba contre l'inondation. En même temps, le premier ministre s'engageait à parler d'atténuation au cours de sa tournée du Manitoba; il a été découvert qu'une jauge défectueuse sur la rivière Qu'Appelle au Saskatchewan avait entraîné une sous-estimation des débits d'eau vers le Manitoba; et 1 800 soldats commençaient à arriver pour ce qui devait se révéler une mission de 18 jours d'aide à la lutte contre l'inondation. En dernier lieu, le Manitoba décidait de pratiquer une trouée, dans la digue de l'Assiniboine, qui provoquerait l'inondation de certaines terres mais réduirait le risque de dégâts plus graves.

À la mi-mai, plus de 3 600 personnes avaient été évacuées, la plupart des membres de collectivités des Premières Nations (dont la Première Nation de Lake St. Martin), surtout à titre de précaution contre les eaux qui submergent les routes d'accès. Le Manitoba a publié son Flood 2011 Building and Recovery Action Plan (plan d'action pour la construction et le rétablissement après l'inondation de 2011), qui devait acheminer 70 millions de dollars dès que possible vers les secteurs touchés par la trouée de l'Assiniboine. Le 31 mai, l'évacuation de résidants établis autour du lac Manitoba a été décrétée, les évacués étant informés qu'ils risquaient de ne pouvoir revenir avant l'automne. Les propriétaires, y compris les Premières Nations, ont manifesté devant la législature du Manitoba, exigeant que des mesures soient prises et remettant en question les mesures prises à ce jour.

Le premier ministre du Manitoba a répliqué que le Manitoba mettait tout en œuvre, dans le contexte de l'une des pires tempêtes survenues en 350 ans. À la mi-juillet, les résidants de la rivière Dauphin ont organisé un rallye à la législature provinciale, et le gouvernement du Manitoba a présenté une série d'options de drainage d'urgence faisant appel à la construction d'un canal d'écoulement de 8 km, au coût de 100 millions de dollars, et d'un canal de dérivation autour de Lake St. Martin, au coût de 60 millions de dollars. En août, le Manitoba a commencé les travaux sur le canal de 100 millions de dollars – sans doute l'un des plus gros travaux publics d'urgence jamais lancés par la province. Les travaux ont débuté parmi des débats, avec les Premières Nations et d'autres, concernant la faisabilité et la nécessité du canal, la rapidité du lancement, les retombées possibles et leur frustration à l'égard du processus de consultation qui venait de se dérouler. Selon les rapports ultérieurs, le canal a été achevé vers la fin d'octobre.

La dernière semaine de juillet 2011, les coûts estimatifs de la lutte contre l'inondation avaient grimpé à 750 millions de dollars, outre que les champs inondés et en friche représentaient une perte pour l'économie d'au moins un milliard de dollars. C'est à ce stade que le journal a commencé à faire rapport de la situation des évacués, pratique qui s'est poursuivie jusqu'au printemps de 2012.

Fin novembre 2011, le ministre de Sécurité publique Canada a annoncé une avance de 50 millions de dollars au Manitoba en vertu du programme des Accords d'aide financière en cas de catastrophe. Il a aussi été annoncé que le gouvernement fédéral avait versé aux Premières Nations un soutien de 63,6 millions de dollars, et que les évacuations coûteraient au moins 23 millions de dollars. AADNC a déclaré que ces coûts étaient sans précédent, mais qu'il accordait la priorité à la sécurité des Premières Nations, et qu'elles avaient donc été évacuées. Au total, 27 Premières Nations en ont ressenti les effets; de plus, comme l'a fait observer AADNC, beaucoup ne touchaient pas encore à la fin de leurs épreuves, au contraire des années précédentes.

 

 

4 Constatations de l'examen - Pertinence

4.1 Besoin continu

La notion de risque est malaisée à définir, parce qu'elle intervient dans un vaste éventail de disciplines et d'activités. Un thème qui revient dans toutes les définitions est qu'elle renferme des éléments de chance et fait état de l'ampleur de la perte (ou conséquence) potentielle : elle est donc généralement exprimée comme le produit de la probabilité et des conséquences : Risque = Probabilité * Conséquence. En cas d'inondation, toutefois, cette explication peut être approfondie par l'application du modèle Source-Chemin-Récepteur-ConséquenceNote de bas de page 6 qui rend compte de ce qui suit :

  • La nature et la probabilité du danger (c.-à-d. la source);
  • Le degré d'exposition au danger (c.-à-d. le chemin);
  • La susceptibilité des gens qui vivent dans la plaine d'inondation (c.-à-d. le récepteur); et
  • La valeur du récepteur ou de l'élément à risque (c.-à-d. la conséquence).
Modèle de Source-Chemin-Récepteur-Conséquence
Description de la figure 2 : Modèle de Source-Chemin-Récepteur-Conséquence

La figure 2 montre une rivière dont la rive droite est remblayée pour empêcher les eaux en crue d'atteindre les maisons  de l'autre côté du remblai. La source de l'inondation est la rivière, qui doit  passer par-dessus le remblai (le chemin) pour atteindre les maisons, qui constituent le récepteur.

 

L'utilité de ce modèle pour comprendre les risques d'inondation découle du fait qu'il dissocie clairement les répercussions de l'inondation (c.-à-d. la conséquence) et la source (c.-à-d. le danger), et qu'il autorise une analyse complète de la façon dont le jeu entre les conditions naturelles et sociales qui on effet sur les conséquences. À titre d'exemple, la figure 3 (ci-dessous) présente deux diagrammes de Venn illustrant comment les conséquences d'une inondation découlent de la relation entre les trois autres éléments (source, chemin et récepteur). La conséquence (illustrée par le polygone rouge) est plus petite dans l'image à gauche que dans celle à droite en raison du mode d'intersection entre la source, le chemin et le récepteur.

Diagramme de Venn – Source-Chemin-Récepteur-Conséquence
Description de la figure 3 : Diagramme de Venn – Source-Chemin-Récepteur-Conséquence

La figure 3 présente deux diagrammes de Venn (diagrammes formés de trois cercles qui se chevauchent) qui illustrent comment l'intersection entre la source, le chemin et le récepteur donne lieu à des conséquences d'importance variable. Les cercles représentent la source, le chemin et le récepteur, et leur intersection forme un triangle ombragé qui représente la conséquence. Dans le premier diagramme, l'intersection (le triangle) est minime, ce qui représente une conséquence de portée limitée.  Dans le second diagramme, le recoupement entre les cercles est plus grand, ce qui illustre une conséquence plus importante.  On en conclut que l'importance de la conséquence dépend autant de l'interaction entre les trois variables que de l'ampleur de n'importe quelle variable.

 

La gestion des urgences est trop souvent axée à l'excès sur la source de l'inondation, plutôt que sur la relation entre la source, le chemin et le récepteur. Pour ne pas tomber dans ce piège, le restant de cette partie porte sur l'utilité du PAGU dans le contexte de l'inondation du Manitoba, en fonction des quatre éléments du modèle Source-Chemin-Récepteur-Conséquence qui agissent ensemble pour déterminer les conséquences d'un événement donné.

Description du risque de crue
Deux bassins fluviaux prédominent dans le Sud du Manitoba : ceux de la rivière Rouge et de la rivière Assiniboine. Ces deux rivières confluent à Winnipeg avant de s'écouler dans le lac Winnipeg, à environ 55 kilomètres au nord de la ville. Le bassin de la rivière Rouge draine une superficie d'à peu près 287 500 km2, la plupart au sud de la frontière entre le Canada et les États-Unis. La rivière Assiniboine et son affluent principal, la rivière Souris, partent de la Saskatchewan et drainent 182 000 km2 environNote de bas de page 7. Ces deux bassins forment un entonnoir qui draine une vaste région à travers une zone relativement exiguë.

Ces deux bassins fluviaux, alliés aux bassins hydrographiques du lac Manitoba et du lac Winnipeg, recouvrent quasiment la moitié sud du Manitoba. Le secteur au complet se compose largement d'argile dont la capacité d'absorption est généralement faible. De plus, l'inclinaison du versant est presque toujours faible, baissant de 3 à 4 cm par km seulement le long du lit de la rivière RougeNote de bas de page 8. Le caractère plat du paysage frappe presque tout visiteur du Sud du Manitoba, fait sur lequel il importe d'insister. En outre, la plaine d'inondation de la rivière Rouge est parsemée de levées naturelles où le lit de la rivière est plus élevé que les terres environnantes, c'est-à-dire que rien ne retient les eaux lorsqu'elles débordent de leur lit. En 1997, par exemple, la rivière Rouge s'est élargie à une quarantaine de kilomètres dans le Sud du ManitobaNote de bas de page 9.

Comme les rivières Rouge et Assiniboine drainent de vastes bassins (c.-à-d. que l'eau de surface d'une grande partie de l'Amérique du Nord passe par le Sud du Manitoba) et que le terrain dans le Sud de la province est relativement plat, le Manitoba a connu des inondations à intervalles relativement réguliers. Des témoignages anecdotiques font état d'inondations plus étendues à la fin des années 1700, et les premiers documents historiques signalent plusieurs grandes inondations dans les années 1800, les plus notables étant celles de 1826, 1852 et 1861. Le présent siècle a connu de grandes crues en 1950, 1966, 1979, 1996, 1997, 1999 et 2011 (voir la liste détaillée des inondations historiques à l'annexe A). Il a été souvent dit à l'époque que la crue de la rivière Rouge en 1997 était « l'inondation du siècle », mais elle n'était ni sans précédent, ni imprévue. Comme en concluait le rapport de l'International Red River Basin Task Force en 1997, Red River Flooding : Short-Term Measures, [Traduction] « l'inondation de 1997, ou même une de plus grande ampleur, peut se produire n'importe quelle année ».

Il demeure toutefois difficile de prédire une inondation, parce qu'elle dépend dans une large mesure de ce qui suit : a) l'humidité du sol au moment du gel (c.-à-d. l'automne précédent); b) le total de la précipitation hivernale; c) le taux de fonte des neiges; d) la quantité de pluie de printemps; e) un facteur temporel (c.-à-d. le moment auquel la fonte, le printemps et la précipitation conjuguent leur action pour orienter le bassin de drainage)Note de bas de page 10,Note de bas de page 11.

L'opinion générale veut que le changement climatique se traduise par une augmentation globale des cas d'inondationNote de bas de page 12,Note de bas de page 13, mais les modèles climatiques sont moins certains dans le contexte particulier du Manitoba. À titre d'exemple, selon Simonovic et al., la variabilité et le changement climatiques peuvent entraîner une augmentation dans le débit annuel du bassin aussi bien de la rivière Assiniboine que de la rivière Rouge, de même qu'avancer l'époque de début de leur inondation et de leurs pointes. Le modèle ne montre pas de différence notable dans l'ampleur de la pointe, mais il indique un accroissement dans la fréquence de grandes inondationsNote de bas de page 14.

Description de l'exposition de la Première Nation au risque de crue
Dans l'histoire des inondations de la rivière Rouge, la crue de 1950 – classifiée comme une grande catastrophe naturelle canadienne, en fonction du nombre de personnes évacuées et touchées par l'inondation – marque un moment décisif, car elle a révélé à quel point les peuplements le long de la plaine d'inondation, dans le Sud-Est du Manitoba, étaient exposés. De plus, le coût élevé des dégâts dus à l'inondation a conduit tous les ordres du gouvernement à chercher le moyen d'atténuer les risques à cet égard. En 1956, le gouvernement provincial avait établi une commission royale chargée de préparer une analyse coûts-avantages pour tout un éventail de projets de protection contre l'inondationNote de bas de page 15. Le rapport de la Commission a formé la base de la quasi-totalité des grands travaux de lutte contre l'inondation dans la province, y compris les approches structurelles traditionnelles pour limiter l'exposition de la collectivité (amélioration des canaux, davantage de systèmes de digues, réservoirs de régulation, déviation des eaux de crue pour protéger des secteurs particuliers). Le système complet de contrôle de l'inondation revenait plus ou moins à établir un vaste plan de dérivation des eaux autour de WinnipegNote de bas de page 16.

Cette approche est valable, puisque Winnipeg abrite plus de la moitié de la population du ManitobaNote de bas de page 17, mais de telles structures n'aident guère à protéger les Premières Nations – en fait, selon certaines personnes interrogées, elles risquent d'augmenter le risque d'inondation dans les collectivités de ces Nations. Ainsi, la dérivation dans le lac Manitoba au moyen du canal Portage a sans le moindre doute fait augmenter le volume du lac Manitoba et son écoulement à travers le barrage Fairford (puis dans le lac St. Martin). À l'occasion des événements de 2011-2012, les collectivités des Premières Nations en aval de ce barrage ont connu une grave inondation.

Bref, l'exposition d'une collectivité aux inondations est fonction du chemin entre la source (une rivière ou un lac) et la collectivité, et de l'absence partielle ou totale d'infrastructures qui entravent le chemin menant à la plaine d'inondation où vivent beaucoup des Premières Nations du Manitoba. De plus, il en coûte cher de construire et d'entretenir une infrastructure, laquelle a son efficacité optimale quand elle est combinée à des rajustements non structurels. À titre d'exemple, une planification efficace de l'aménagement des terres et de la déforestation offre d'énormes possibilités de modifier le chemin d'inondation.

Description de la susceptibilité des Premières Nations aux dommages par inondation (c.-à-d. le récepteur)
Au Canada et ailleurs, le concept de vulnérabilité est devenu un élément important, ou une nouvelle approche, de l'étude des catastrophes. Axée à l'origine sur les variables de l'exposition, la notion de vulnérabilité s'est vite élargie à un plus grand nombre de variables sociales, économiques et politiques pour expliquer les catastrophesNote de bas de page 18. Cela correspond au modèle source-chemin-récepteur-conséquence, c'est-à-dire qu'on détermine les variables sociales, économiques et politiques qui se répercutent sur la susceptibilité d'une collectivité aux conséquences de l'inondationNote de bas de page 19. À titre d'exemple, selon Wisner et al., les éléments conceptuels suivants servent à classifier et analyser les points vulnérables :

Tableau 1 : Déterminants clés des vulnérabilités communautaires

Causes profondes Pression dynamique Condition dangereuse
Accès réduit à ce qui suit :
  • Pouvoir
  • Structures
  • Ressources

Idéologies
  • Systèmes politiques
  • Systèmes économiques
Absence de ce qui suit :
  • Institutions locales
  • Formation
  • Compétences utiles
  • Investissements locaux
  • Marchés locaux
  • Liberté de la presse
  • Normes éthiques dans la vie publique

Macro-forces
  • Fluctuation rapide de la population
  • Calendriers de remboursement de la dette
Économie locale :
  • Gagne-pain à risque
  • Bas revenus

Relations sociales
  • Groupes spéciaux à risque
  • Absence d'institutions locales

Actions et institutions publiques
  •  
  • Absence de préparation aux catastrophes
  • Prévalence des maladies endémiques
 

Source : Tiré et résumé de «  At Risk : Natural Hazards, People's Vulnerability and Disasters »Note de bas de page 20

De récentes recherches ont détecté une série de points vulnérables qui se répercutent sur la capacité d'une Première Nation de faire face à des stresses extérieures, comme une inondation, entre autres la dépendance sur l'aide sociale, les problèmes sociaux (taux élevé d'alcoolisme, de toxicomanie et de violence), l'aménagement des terres, et la qualité et la conception du logementNote de bas de page 21. Il ressort aussi des entrevues que des doutes existent quant à la capacité des Premières Nations de faire face à l'inondation, au vu de leurs faibles capacités financières et institutionnelles, et de leur manque de sentiment d'engagement envers l'infrastructure communautaire. À défaut de capitaux suffisants pour financer l'intervention et le rétablissement, les Premières Nations demeurent à la merci d'une catastrophe, ou sont obligées de lancer des appels à l'aide à d'autres ordres du gouvernement. De surcroît, des intervenants signalent que des structures de gouvernance faibles ou floues, dans les collectivités des Premières Nations, limitent les prises de décisions efficaces, et font ainsi obstacle aux mesures à prendre en cas d'urgence.

 

 

5 Constatations de l'examen - Rendement

La gestion des urgences a été longuement étudiée et discutée en Amérique du Nord et dans le monde entier, et elle est de même largement mise en pratique. Dans les années 1990, des associations de normalisation (comme l'Organisation internationale de normalisation, l'Association canadienne de normalisation (Groupe CSA) et la National Fire Protection Association) ont commencé à établir des normes de gestion des programmes d'urgence, afin d'essayer de créer un ensemble commun de critères d'élaboration et d'application des programmes. Si le présent examen ne vise pas à évaluer le PAGU à la lumière de ces normes, il intègre néanmoins les thèmes et éléments fondamentaux de ces normes, en vue d'établir une base d'hypothèses sur la façon dont un programme de gestion des urgences devrait fonctionner.

De légères variations existent entre les différentes normes, mais en général les mêmes thèmes y reviennent. Tout d'abord, les programmes de gestion des urgences devraient se fonder sur le risque, c'est-à-dire cerner les risques d'une urgence (y compris les dangers et les points vulnérables) qui serviront de base de l'élaboration du programme. Le programme établit ensuite des stratégies d'atténuation en vue de prévenir ou de limiter les conséquences de l'urgence (ce qui est communément désigné comme la stratégie d'atténuation du risque), puis se prépare au risque résiduel (c.-à-d. le risque qu'il est impossible d'atténuer). Les préparatifs peuvent comprendre la planification, l'établissement de partenariats en vue d'une aide mutuelle, l'élaboration de procédures, la formation, etc. Quand une situation se présente, le programme y réagit par des mesures immédiates destinées à gérer les effets d'un incident, puis applique des stratégies de rétablissement pour remettre l'entité à un état acceptable.

Essentiellement, un programme de gestion des urgences est à mi-chemin entre la gestion du risque (évaluation, atténuation et préparation du risque) et la gestion des crises (intervention et rétablissement). Dans ce contexte, l'équipe d'examen a créé le cadre conceptuel suivant pour illustrer la relation entre ces éléments et un programme de gestion des urgences efficace :

Figure 4 : Cadre de la gestion des urgences

Cadre de la gestion des urgences
Description de la figure 4 : Cadre de la gestion des urgences

Source : Créé par l'équipe d'examen à partir de la Loi sur la gestion des urgences, de la Politique fédérale en matière de gestion des urgences (2009) et de la norme 1600 de la NFPA, Standard on Disaster/Emergency Management and Business Continuity Programs (2007).

Le cadre de gestion des urgences présenté à la figure 4 illustre comment un programme de gestion des urgences concilie essentiellement la gestion du risque (évaluation du risque, atténuation du risque et état de préparation) et la gestion de crise (intervention et rétablissement). Les modèles de programmes de gestion des urgences visent d'abord à évaluer les risques, fondement sur lequel on s'appuie pour élaborer le programme. Des stratégies d'atténuation et de préparation sont ensuite mises au point afin de limiter les conséquences d'un événement et de se préparer à de telles circonstances. Il s'agit là des deux composantes de la gestion de risque. Quand un incident se produit, le programme prévoit le recours à des mesures immédiates destinées à en gérer les effets, ainsi que l'application de stratégies pour assurer le rétablissement des lieux dans un état acceptable. Ce sont là les deux composantes de la gestion de crise. Le programme de gestion des urgences, qui concilie la gestion du risque et la gestion de crise, met l'accent sur la gestion des pouvoirs et l'atteinte des objectifs, tout en assurant la coordination des intervenants clés.

 

Le restant de cette partie porte sur le rendement du PAGU durant les inondations de 2011-2012 au Manitoba, y compris la façon dont le programme a appliqué ces concepts.

5.1 Efficacité de la gestion des urgences lors des inondations de 2011-2012 au Manitoba

Atténuation
Tous les intervenants clés ont signalé que les collectivités des Premières Nations n'avaient établi que très peu de mesures d'atténuation, structurelles et non structurelles, pour limiter les dégâts en cas d'inondation. Les autres collectivités canadiennes sont normalement conçues pour faire face à une crue centennaleNote de bas de page 22, mais peu d'indices donnent à penser que la conception des collectivités des Premières Nations tient compte de la possibilité de n'importe quelle inondation, comme en témoigne le fait qu'entre 2006-2007 et 2011-2012, le PAGU a investi environ 182 000 $ sur l'atténuation au Manitoba, contre 100 000 000 $ sur la préparation, l'intervention et le rétablissementNote de bas de page 23.

Il y a bien sûr des exceptions, avant tout la digue circulaire construite autour de la Première Nation des Anishinabe de Roseau River en 1966 pour donner suite à la Manitoba Royal Commission on Inondation Cost-Benefit de 1958Note de bas de page 24. De plus, le Programme d'immobilisations et d'entretien d'AADNC a fait savoir qu'il a appuyé quatre projets d'atténuation des inondations au Manitoba entre 2006-2007 et 2011-2012, d'une valeur totale d'environ 9,7 millions de dollars. Ces projets concernaient la stabilisation de la rive, le déménagement de foyers et la protection contre les inondations dans deux collectivités des Premières Nations. Comme les investissements sur l'infrastructure à des fins d'atténuation ne sont pas actuellement codés à ce titre, il est difficile de déterminer précisément si d'autres dépenses ont été faites. Les projets d'atténuation ci-dessus sont les seuls exemples que nous avons découverts dans les collectivités des Premières Nations.

Des représentants de programmes ont soutenu que la conception communautaire déborde la portée des conditions du PAGU, mais il existe des exemples de projet de gestion des urgences qui ont fait usage des dépenses de rétablissement pour influer sur la conception communautaire. Les Accords d'aide financière en cas de catastrophe de Sécurité publique Canada en sont un exemple : ils stipulent que les « coûts liés à la réparation ou au remplacement de structures ne sont pas admissibles si celles-ci se trouvent à un endroit qui, avant leur construction, était désigné, reconnu ou zoné comme zone inondable par les autorités provinciales ou municipales ». De plus, les structures mises en place avant l'entrée en vigueur de la délimitation d'une zone inondable sont admissibles à l'aide si elles ne sont pas ensuite reconstruites dans la zone inondable désignée, et si des mesures appropriées et suffisantes de protection contre les inondations (placer les structures derrière les digues, les construire sur des pilotis, des colonnes ou des monticules) ont été prises pour les protéger contre les conséquences d'une crue à récurrence de 100 ans (centennale)Note de bas de page 25.

Le PAGU n'est tout simplement pas conçues en vue de solutions à long terme aux problèmes d'inondation de façon semblable à l'exemple au-dessus. Présentement, le programme finance les collectivités afin de reconstruire les structures dans les conditions de pré catastrophe conformément à ce qu'est admissible sous l'Accord d'aide financière en cas de catastrophe de la Sécurité publique. Par contre, il ne met pas des conditions sur le financement afin de prévenir les Premières Nations à reconstruire dans précisément la même zone sujette aux inondations, avec précisément la même protection contre les crues, malgré des inondations répétées – et la certitude relative qu'elles se reproduiront. En réalité, les personnes interrogées ont communiquée que, si le risque de crue dans la collectivité n'a pas été pris en compte au moment de reconstruire, AADNC pourrait se voir obligé de payer à de multiples reprises des coûts d'intervention et de rétablissement pour les mêmes foyers, au lieu de s'attaquer aux causes profondes.

Malgré cette limitation , le bureau régional du Manitoba a pu s'appuyer sur les fonds d'intervention en cas d'inondation de 2011-2012 pour construire des digues en argile dans 13 collectivités; si elles sont laissées en place, elles protègeraient les collectivités en permanence jusqu'aux niveaux d'eau de 2011-2012. Ordinairement, le PAGU n'appuie pas la construction de structures permanentes comme des digues en argile, mais il avait été conclu, au vu du volume et de la durée de l'inondation de 2011-2012, que des digues temporaires en sacs de sable étaient impossibles du point de vue technique.

Recommandation 1 : Le PAGU devrait établir de meilleurs liens avec d'autres programmes d'AADNC, de manière à créer un système efficace d'appui à des solutions à long terme pour les dangers liés à la gestion des urgences et à la résilience des collectivités.

Préparation

En 2010, le bureau régional du Manitoba d'AADNC a préparé un plan de gestion des urgences, dans le cadre des préparatifs du Ministère, qui concorde avec les lignes directrices nationales d'AADNC pour la préparation de plans de gestion des urgences régionaux (2009). Mais comme il en a été question au point 5.2, le plan n'a pas été pleinement appliqué durant l'inondation de 2011-2012, ce qui donne à penser que le simple fait de préparer ce plan n'a pas suffisamment préparé le bureau régional à faire face à une urgence de grande ampleur. Une application efficace du plan aurait pu éviter le problème, mais les intervenants signalent qu'il n'a pas été mis à l'essai avant la crue en raison de la grande fréquence des inondations au Manitoba. Les urgences antérieures causées par une inondation étaient beaucoup moins graves, et n'ont tout simplement pas préparé le bureau à l'ampleur de l'inondation en 2011-2012. En fait, la dépense annuelle moyenne sur les urgences entre 2006-2007 et 2010-2011 s'est élevée à environ 5 000 000 $, contre à peu près 15 fois ce montant en 2011-2012Note de bas de page 26.

Les intervenants ont signalé que les 63 Premières Nations du Manitoba avaient mis en place un plan de gestion des urgences avant l'inondation. Trois spécimens de plan ont été soumis à notre examen : ce petit échantillon montre bien que les plans clarifient les rôles et responsabilités du chef et des conseillers, ainsi que de différents membres de la collectivité (comme les coordonnateurs du transport, les travaux publics, l'éducation, etc.) lors des urgences. Les plans précisent que le chef et les conseillers constituent l'autorité locale chargée de la préparation et de l'application des plans de gestion des urgences et des modalités connexes pour les Premières Nations. Selon ces plans, le chef doit prendre toute mesure qu'il juge nécessaire pour appliquer le plan d'urgence, ainsi que pour protéger les biens, la santé, la sécurité et le bien-être de la collectivitéNote de bas de page 27. Les plans fournissent aussi de l'information sur la préparation, par exemple l'analyse des dangers et l'information sur les risques chimiques, les préparatifs contre les inondations (par exemple comment construire des digues en sacs de sable) et la préparation aux tornades.

Le bureau régional ne possédait pas toutes les copies des plans des Premières Nations. Les intervenants signalaient aussi une absence généralisée de mise en application (ou de mise à l'essai) des plans des Premières Nations, de même que l'absence de coordonnateurs de la gestion des urgences spéciaux et une structure de gouvernance de la gestion des urgences peu claire au sein des collectivités des Premières Nations. Les intervenants estimaient que cela contribuait à semer la confusion sur la façon dont il convenait de prendre des décisions dans les collectivités, et créait aussi des difficultés de coordination des interventions.

Recommandation 2 : La DGUE devrait établir des lignes directrices, pour les plans de gestion des urgences des Premières Nations, contenant des protocoles d'accès à l'aide pour une Première Nation dont les ressources internes sont dépassées. Une fois ces lignes directrices en place, le bureau régional du Manitoba d'AADNC devrait collaborer avec les Premières Nations pour mettre à jour leurs plans et conserver des exemplaires des plans qui seront à la base du travail de coordination à venir.

Constatation 1 : Au 31 mars 2012, AADNC avait versé 78,8 millions de dollars à 27 collectivités des Premières Nations pour réagir à l'inondation, mais les données restreints sur le rendement interdit de déterminer l'efficacité de l'intervention.

À l'hiver de 2011, la Division de la gestion des ressources hydriques du Manitoba a publié plusieurs projections de crue qui ont soulevé des craintes touchant la possibilité d'inondations printanières dans toute la province. Par suite de ces projections, AADNC a versé des fonds à l'Association des pompiers autochtones du Manitoba pour aider les Premières Nations à mettre à jour leurs plans communautaires de gestion des urgences et à assister à une conférence sur la gestion des catastrophes. Organisée par l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba, la conférence consacrait une journée supplémentaire exclusivement aux Premières Nations, afin qu'elles se préparent à l'inondation prévue. Quelque 49 de ces Nations ont assisté à la conférence, qui a permis aux collectivités de mettre en commun l'information, et à l'Association des pompiers autochtones du Manitoba de mettre à jour ses listes de coordonnateurs de la gestion des urgences dans les collectivités. Le bureau régional a signalé que 20 Premières Nations ont collaboré avec l'Association des pompiers autochtones du Manitoba à la mise à jour de leurs plans de gestion des urgences, mais que seulement sept ont remis à l'Association les plans mis à jour.

Une fois que les effets sur des collectivités particulières ont été compris, AADNC a commencé à verser aux Premières Nations – et dans certains cas à l'Association des pompiers autochtones du Manitoba au nom des Premières Nations – une « avance comptable » en vue de la lutte contre l'inondation; ce soutien d'AADNC a été fourni à 27 collectivités des Premières Nations, sous forme la plupart du temps de dégagement de fossés de drainage, de chauffage à la vapeur de ponceaux pour en débloquer la glace, et de construction de digues pour empêcher l'écoulement de surface des eaux. Au bout du compte, il a fallu évacuer 12 collectivités; le PAGU a signalé que 2 445 personnes n'étaient pas revenues dans leur collectivité au 17 avril 2012. Le soutien fourni par AADNC visait à aider les Premières Nations à réduire ou éliminer les répercussions de l'inondation sur leur santé et sécurité, et sur l'infrastructure de leurs collectivités.

Le PAGU a réussi à protéger la santé et la sécurité immédiates des collectivités des Premières Nations.

La réussite de la protection de l'infrastructure communautaire, et de la santé et sécurité à long terme (comme dans le cas de la moisissure qui a envahi les maisons inondées), est beaucoup plus difficile à évaluer. Comme il en a été question ci-dessus, le PAGU aide 27 Premières Nations à engager les travaux nécessaires pour éviter que les crues recouvrent leurs collectivités. Les plans de travail relevant des ententes de financement avec les Premières Nations comprennent ordinairement de l'information sur le nombre de sacs de sable nécessaire, le nombre de ponceaux qu'il faut chauffer à la vapeur, etc. Ces plans fournissent en outre une ventilation du travail, y compris du nombre de gens et d'heures de travail nécessaires, et de la location ou de l'achat de tout matériel. Il incombait aux Premières Nations de dépenser l'avance des dépenses admissibles en vertu des Accords d'aide financière en cas de catastrophe de l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba, et de soumettre les factures et les feuilles de temps à ces Accords; à ce stade, AADNC recouvrait la totalité de l'avance comptableNote de bas de page 28. Une Première Nation qui réalisait un grand projet, comme la construction d'une digue permanente, était tenue de faire rapport des progrès à AADNC en fonction du plan de travail, sous forme du pourcentage de chaque tâche qui a été exécutée. Les plans de travail ne correspondaient pas aux plans de gestion des urgences des Premières Nations; ils n'obligeaient pas non plus ces Premières Nations à faire rapport de l'efficacité de leurs activités (c.-à-d. la mesure dans laquelle leurs activités réduisaient ou éliminaient les incidences de l'inondation sur la santé et la sécurité, de même que sur l'infrastructure, de la collectivité). Ce facteur, allié à l'absence de participation des Premières Nations à cet examen, a gravement nui à la capacité de l'équipe d'examen d'évaluer la qualité de l'intervention d'AADNC.

Le coordonnateur de la gestion des urgences était chargé non seulement de fournir un appui financier, mais aussi d'aider les Premières Nations à déterminer les ressources matérielles techniques exigées. Pour cela, il fallait au besoin mettre en contact les Premières Nations avec le gouvernement provincial, l'Association des pompiers autochtones du Manitoba, les sociétés d'ingénierie ou de construction, les entreprises de machinerie lourde, les entrepreneurs, etc. Ce rôle de coordination était un élément important des attributions du coordonnateur de la gestion des urgences. Des intervenants ont déclaré que le coordonnateur de la gestion des urgences s'acquittait de son rôle avec efficacité, mais que l'inondation de 2011-2012 était une urgence d'une telle ampleur qu'il était difficile de s'occuper de tous les problèmes en temps voulu

Constatation 2 : Le rétablissement est encore en cours, mais les intervenants ont des doutes sur l'efficacité du mécanisme actuel du Programme.

Les ententes de financement d'AADNC prescrivent que les Premières Nations et l'Association des pompiers autochtones du Manitoba doivent présenter une réclamation aux Accords d'aide financière en cas de catastrophe de l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba. Ces ententes précisent bien que les fonds versés par AADNC sont une avance comptable devant servir uniquement aux dépenses admissibles en vertu du programme provincial, et qu'après que la province a fourni un paiement pour les coûts admissibles, l'avance comptable au complet est recouvrée de la Première Nation ou de l'Association des pompiers autochtones du Manitoba.

Les intervenants ont fait part de certaines craintes quant à la capacité des Accords d'aide financière en cas de catastrophe de l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba de faciliter le rétablissement des collectivités des Premières Nations. En premier lieu, le programme s'appuie sur des inspections communautaires qui prennent beaucoup de temps. Souvent, les Premières Nations attendent de recevoir les fonds du Programme avant de commencer la reconstruction, délai qui peut donner lieu à des dommages excessifs (à titre d'exemple, omettre d'enlever sur le champ une cloison sèche inondée peut provoquer de gros problèmes de moisissure) entraînant une augmentation des coûts de rétablissement.

En deuxième lieu, le programme provincial donne aux bénéficiaires la permission uniquement de reconstruire à l'état préexistant, leur interdisant ainsi d'améliorer les structures touchées. Comme les structures dans une réserve avant une inondation étaient souvent insuffisantes, reconstruire à l'état préexistant ne réduit pas la vulnérabilité ou n'atténue pas le risque.

En troisième lieu, le programme provincial est destiné à aider le rétablissement, c'est-à-dire qu'il est conçu de manière que la victime assume sa part du fardeau. Deux exemples à cet égard : les dommages ne sont pas tous admissibles (les Premières Nations font savoir, par exemple, que la cloison sèche d'une maison endommagée est admissible, mais non le pare-vapeur); quand un coût est admissible, le Programme paie le prix moyen de la qualité moyenne de ce produit (c.-à-d. qu'il n'en paie pas le coût de remplacement). Ces exemples peuvent sembler insignifiants, mais ils peuvent faire pencher la balance en faveur de la reconstruction ou non dans certaines collectivités des Premières Nations possédant de très faibles moyens financiers.

5.2 Efficacité et utilité de la structure de gouvernance de la gestion des urgences au Manitoba

Constatation 3 : Le plan de gestion des urgences de la région du Manitoba d'AADNC a créé une structure de gouvernance et de coordination, mais celle-ci n'a pas été appliquée lors de l'inondation.

Structure de gouvernance d'AADNC
Le coordonnateur de la gestion des urgences est responsable, au sein du bureau régional du Manitoba d'AADNC, de recueillir l'information et d'orienter et de coordonner les opérations régionales de la région du Manitoba pour AADNC; pour sa part, l'agent des services de financement fait fonction de point de contact principal pour les Premières Nations. Le coordonnateur relève du directeur de Logement et infrastructure, qui est responsable d'autoriser les dépenses d'urgence. Le directeur général régional associé doit maintenir le contact avec ses homologues au gouvernement provincial et transmettre les demandes d'aide émanant d'autres ministères fédéraux à l'AC d'AADNC. Les opérations globales dans la région et la coordination des activités avec les autres ministères fédéraux relèvent de la responsabilité du directeur général régional. Ce dernier rend compte au sous-ministre adjoint principal, Opérations régionales, qui assure le soutien exécutif à l'AC d'AADNC lorsque le besoin d'une participation des autres ministères se fait sentirNote de bas de page 29.

Le directeur, Logement et infrastructure, et le directeur général régional sont responsables d'autoriser les dépenses relevant de leur autorité et de transmettre plus haut les demandes d'aide financière qui exigent une autorisation supplémentaireNote de bas de page 30. Toutefois, le plan régional n'est pas conçu pour s'adapter aux différentes ampleurs et gravités des urgences.

Le plan de gestion des urgences du bureau régional du Manitoba crée en outre plusieurs unités en vue d'un système de gestion des incidents qui relève du coordonnateur de la gestion des urgences. Ces unités exécutent les fonctions suivantes :

  • Une unité des opérations responsable de se tenir au courant des activités, préoccupations, priorités et besoins à l'échelle de la collectivité, de préparer des rapports sur la situation, et de rester en contact avec les centres d'opérations chez les Premières Nations et parmi les autres organisations.
  • Une unité de la planification responsable de documenter les plans de travail, de prévoir les problèmes et de collaborer avec les intervenants à l'élaboration de plans, et de garder le contact avec les centres de planification des Premières Nations et des autres organisations.
  • Une unité de la logistique responsable de déterminer les ressources que le bureau régional peut fournir à l'appui à la fois des Premières Nations, de l'ordonnancement et des besoins fondamentaux du personnel œuvrant au sein du bureau régional, ainsi que de garder le contact avec les centres de logistique des Premières Nations et des autres organisations.
  • Une unité de la communication responsable de rédiger les messages clés en réponse aux demandes de renseignements des médias et du grand public.
  • Un agent de liaison qui représenterait le bureau régional aux autres centres de coordination des urgences, pour garantir la circulation de renseignements exacts et cohérents entre les organismes engagés dans une urgence donnée, et pour détecter toute préoccupation ou possibilité de coopération.

Selon le plan de gestion des urgences du bureau régional du Manitoba, ces fonctions doivent être appliquées au fur et à mesure des besoins, en fonction du niveau d'intervention du bureau régional. Une urgence de niveau un est géographiquement circonscrite, et ne nécessite aucun soutien à la Première Nation. Une urgence de niveau deux concerne plusieurs collectivités, mais s'accompagne de peu de demandes d'aide opérationnelle, ou d'une faible demande. Selon la portée, la complexité et la durée de l'événement, une urgence de ce niveau fait intervenir une mise en application partielle du Système de commandement des interventions. Dans une urgence de niveau trois, de multiples collectivités demandent de l'aide. L'inondation de 2011-2012 répond clairement aux paramètres d'une urgence de niveau trois, niveau le plus haut dans le plan, selon lequel une intervention à une urgence de niveau trois nécessite – en raison de la portée, de la complexité et de la durée de l'événement – la mise en application complète du Système de commandement des interventionsNote de bas de page 31.

Rien n'indique que le bureau régional a officiellement activé l'un des systèmes de gestion des incidents lors des inondations de 2011-2012, ce qui veut dire que l'exécution de toutes les responsabilités d'AADNC en matière de gestion des urgencesNote de bas de page 32 durant l'événement (soit les opérations, la planification, la logistique, les finances, et l'administration et la liaison) a été largement laissée au coordonnateur de la gestion des urgences.

Même si le personnel régional a fait savoir que l'intervention a été un travail d'équipe et que chacun a fait son possible, le soutien a été au cas par cas et n'a pas permis de répartir certaines des responsabilités du coordonnateur de la gestion des urgences, comme le veut le plan de gestion des urgences du bureau régional du Manitoba. Voici des exemples de ce soutien :

  • Dans certains cas, de l'information sur la situation des collectivités a été communiquée aux agents des services de financement; l'information était alors transmise au coordonnateur de la gestion des urgences, mais les agents des services de financement n'étaient pas chargés de surveiller les collectivités, comme indiqué dans le plan de gestion des urgences de la région du Manitoba d'AADNC.
  • Des ressources supplémentaires ont été affectées pour permettre au coordonnateur de la gestion des urgences de communiquer à l'administration centrale l'information nécessaire pour obtenir des fonds supplémentaires. Mais comme le coordonnateur de la gestion des urgences était le seul à comprendre entièrement la situation et l'information nécessaire, cette aide s'est bornée à faciliter le processus.
  • Le bureau régional a fait beaucoup d'efforts pour réduire au minimum les perturbations des programmes et services offerts aux collectivités des Premières Nations. Ainsi, le Programme d'éducation a déployé énormément d'efforts pour garantir aux enfants évacués la possibilité de fréquenter des écoles parallèles. L'importance de ce travail ne doit pas être sous-estimée, mais il n'a pas aidé à acquitter les responsabilités d'AADNC en matière de gestion des urgences (il a plutôt acquitté celles d'AADNC touchant l'éducation).

Le manque d'activation du système de gestion des incidents a exposé AADNC à un fort niveau de risque. Le système de gestion des urgences reposait essentiellement sur une seule personne, ce qui est déraisonnable au vu de l'ampleur des questions qui se sont posées durant cette urgence, du nombre de collectivités en cause et de la nature incessante, 24 h sur 24, de l'urgence. En conséquence, le coordonnateur de la gestion des urgences était de fonction 24 heures sur 24 pendant des mois, consacrant l'essentiel de son temps à essayer de faire face aux crises qui se présentaient. Le bureau régional ne rémunère pas le coordonnateur de la gestion des urgences quand il fait fonction d'agent de serviceNote de bas de page 33.  De plus, même si le bureau régional a nommé un coordonnateur de la gestion des urgences suppléant, il n'a pas fait appel à ce poste durant l'inondation.

Dans tous les groupes d'intervenants, les répondants aux entrevues ont mentionné ce problème de capacité comme le problème principal à régler dans un proche avenir avant que le système commence à fonctionner convenablement.

Pour aider à minimiser ce risque, le PAGU a envoyé au Manitoba un soutien additionnel (désigné capacité de pointe) depuis l'administration centrale et les autres régions. Ces employés ont fait fonction d'agents de liaison au centre provincial de coordination des urgences, faisant le pont entre les représentants provinciaux et le coordonnateur de la gestion des urgences d'AADNC. Ils ont aussi aidé à préparer des documents d'information sur la situation pour l'administration centrale du PAGU. Leur soutien avait toutefois des limites, parce qu'ils connaissaient mal la géographie de la province, les organismes en cause et le mode de fonctionnement du bureau régional.

Recommandation 3 : La DGUE et le bureau régional du Manitoba devraient étudier des moyens de calibrer les rôles et responsabilités en matière de gestion des urgences en fonction de l'ampleur et de la gravité de l'urgence, y compris le moment où l'administration centrale doit participer à la prise de décisions au cours d'une intervention et la façon de le faire.

Recommandation 4 : Le bureau régional du Manitoba devrait acquérir la capacité d'appliquer le système de gestion des incidents au complet lors des urgences futures, comme l'indique le plan de gestion des urgences du bureau régional du Manitoba.

Structure de coordination d'AADNC
Pour la coordination, le bureau régional a pris part à une conférence téléphonique hebdomadaire avec l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba et d'autres représentants provinciaux. Dirigée par le directeur général régional, la conférence réunissait des représentants des différents secteurs du bureau régional (p. ex.. gestion des urgences et infrastructure, Développement des capacités et gouvernance, Programmes et partenariats, etc.). Cette conférence était indispensable pour assurer la coordination entre le Ministère et la province sur les différents problèmes causés par l'inondation.

Du point de vue des opérations, le plan de gestion des urgences du bureau régional du Manitoba crée une structure de coordination qui rend le bureau régional responsable de recevoir les demandes d'aide des Premières Nations, d'évaluer leurs besoins et de coordonner l'activité des autres organismes engagés dans le soutien aux Premières Nations. L'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba reçoit les demandes du bureau régional.

Le plan régional est clair sur cette structure, mais le Plan national de gestion des urgences l'est moins. À la partie Compétences et exigences législatives, par exemple, le plan stipule que « Les provinces et les territoires sont responsables des activités de gestion des urgences dans leurs champs de compétences ». Le Plan national indique ensuite une structure de coordination qui prévoit que les Premières Nations doivent communiquer directement avec les provinces. Le texte ajoute que des organisations de gestion des urgences provinciales ont négocié avec AADNC des ententes de financement sur la prestation de fonctions d'intervention en cas d'urgence dans les collectivités des Premières Nations, sans préciser toutefois que les Premières Nations situées dans des provinces sans entente de financement devraient communiquer avec le bureau régional d'AADNC. En réalité, le Plan national ne clarifie pas les rôles et responsabilités d'un bureau régional qui n'ont pas une entente de financement en placeNote de bas de page 34. Les Premières Nations et les autres intervenants ont mentionné que ce point prêtait à confusion.

Selon l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba, en raison de cette confusion, plusieurs Premières Nations ont communiqué directement avec elle. Pour y remédier, le protocole standard a consisté à diriger les Premières Nations vers le bureau régional d'AADNC. La province a toutefois également fait observer qu'au vu du volume de travail au cours de l'inondation, il n'était pas raisonnable de s'attendre à ce que le coordonnateur de la gestion des urgences réponde en temps voulu à toutes les demandes. Elle a aussi noté que le caractère urgent de la situation l'a obligée dans quelques cas à agir sans l'apport d'AADNC. Il s'agissait d'exceptions à la norme, mais cela pose un problème à l'Organisation, parce qu'il n'est pas clair si les actions répondent aux conditions du Programme d'aide à la gestion des urgences d'AADNC et donnent donc droit à un remboursement.

Constatation 4 : Le système de gestion des urgences d'AADNC s'appuie sur l'expérience et le jugement de quelques personnes clés, et compte peu de procédures, protocoles ou lignes directrices.

Processus d'AADNC d'appui à la lutte contre les inondations
Selon le plan de gestion des urgences du bureau régional du Manitoba, si les ressources locales sont dépassées par une urgence et qu'une aide est requise, il incombe aux Premières Nations de transmettre vers le haut les demandes d'aide à AADNC ou à l'Association des pompiers autochtones du Manitoba. Il n'existe pas de processus de demande formel, en raison du caractère imprévisible et rapide des interventions d'urgence. Les conditions du PAGU stipulent toutefois qu'il faut déclarer une urgence conformément aux exigences dans le guide d'intervention d'urgence, et que ce fait doit être communiqué à AADNC dès que possible. Rien ne donne à croire qu'un tel guide d'intervention existait ou a servi à déterminer l'admissibilité des Premières Nations aux fonds du PAGU. Le coordonnateur de la gestion des urgences s'est plutôt appuyé sur les projections d'inondation provinciales et l'expérience en gestion des urgences pour établir si une Première Nation risquait d'être touchée par des inondations et était donc admissible aux fonds du PAGU.

Dans quelques cas, des Premières Nations ont fait appel à des ingénieurs-conseils pour évaluer les risques d'inondation. Comme la province faisait des projections des inondations uniquement dans les municipalités, il fallait établir les niveaux d'eau attendus dans les collectivités des Premières Nations par interpolation, en fonction de leur propre géographie et d'une prévision pour un lieu voisin. Cette approche a clairement aidé à déterminer si une intervention s'imposait, mais les résultats n'ont pas été documentés parce que le Ministère ne l'a pas imposé.

Une fois la demande d'aide reçue et la nécessité d'une intervention établie, le coordonnateur de la gestion des urgences collaborait avec la Première Nation (ou parfois avec l'Association des pompiers autochtones du Manitoba au nom de la Première Nation) à l'élaboration d'un plan de travail. Le Ministère n'approuvait pas la modification de l'entente de financement dans les cas où le coordonnateur n'était pas d'accord avec le plan de travail. Il n'existait toutefois aucun processus clair pour évaluer ce qui est nécessaire dans la situation, et quel devrait en être le coût. À titre d'exemple, les représentants régionaux d'AADNC rapportent que les Premières Nations ont calculé le nombre de sacs de sable nécessaire en fonction des projections provinciales des inondations et d'une évaluation des cartes topographiques qui a déterminé la hauteur et la longueur des digues.

Les plans de gestion des urgences des Premières Nations présentent une évaluation générale de la probabilité d'une inondation, mais sans préciser les aspects de la collectivité qui sont en danger (ainsi, une carte des dangers permettrait de réaliser une évaluation détaillée des besoins de protection contre l'inondation) ou les mesures de lutte contre l'inondation qui conviennent. En fait, rien ne prouve que les plans de gestion des urgences des Premières Nations réalisés précédemment aient servi à établir les besoins d'intervention et à élaborer les plans de travail.

Les représentants régionaux expliquent qu'il est difficile de déterminer d'avance ce qui sera nécessaire, parce que les inondations sont dynamiques et imprévisibles dans toutes les collectivités du Manitoba. Il existe toutefois une différence fondamentale entre les Premières Nations et les municipalités : ces dernières se servent de leurs propres revenus pour réagir à une inondation (après quoi une portion des coûts est remboursée plus tard, en fonction de la taille globale et du coût de l'urgence). Ainsi, un incitatif naturel est intégré pour réagir comme il faut (c.-à-d. construire le nécessaire, sans plus), incitatif qui fait défaut dans le contexte des Premières Nations. En conséquence, il est arrivé que AADNC n'appuie pas des mesures qui auraient épargné de l'argent et évité des dommages dus à l'inondation, ou encore que des Premières Nations mènent des activités inutiles pour prévenir les dommages par inondation.

La situation a été exacerbée par l'absence d'une évaluation systématique des risques et par des processus d'établissement des coûts peu clairs. Les personnes interrogées ont déclaré que les plans de travail se fondaient plutôt sur l'expérience. À titre d'exemple, l'entente de financement du Ministère avec un spécimen de Première Nation a été modifiée quatre fois en vue de la construction avec des sacs de sable et des digues en argile :

Tableau 2 : Financement d'une Première Nation et produits livrables, conformément au spécimen de plan de travail

Mois Justification Montant Produits livrables
Avril Le besoin de 40 000 sacs de sable se fonde sur des estimations des besoins en cas d'une inondation de décile moyen. 59 040 $ (sacs de sable) 8 380 $ (ponceaux) Production de 40 000 sacs de sable et ouverture en avril 2011 de 25 ponceaux essentiels pour le drainage
Juillet Le besoin de 40 000 sacs de sable se fonde sur des estimations des besoins en cas d'une inondation de décile moyen, et aussi en réaction aux projections du risque d'inondation en juillet 2011. 298 905 $ Production de 40 000 sacs de sable en mai et juin 2011
Septembre Aucune justification fournie. 2 029 547 $ Construction urgente de digues, septembre 2011 (c.-à-d. digues en argile)
Octobre Aucune justification fournie. 1 200 000 $ Construction urgente de digues, octobre 2011 (c.-à-d. digues en argile)
 
 

Cet exemple illustre clairement les points ci-dessus :

  • Comme le plan de travail ne fait aucune référence aux projections d'inondation provinciales ou à toute autre évaluation du risque de crue (par exemple les niveaux des eaux prévus ou une description de l'inondation attendue), la raison pour laquelle chaque produit livrable est exigé n'est pas claire.
  • Le mode d'établissement du prix de chaque sac de sable est peu clair. En l'occurrence, ce prix a quintuplé entre avril et juillet. Aucune justification pour un changement de prix aussi important n'a été consignée.
  • Le plan de travail ne fait aucune référence au plan de gestion des urgences des Premières Nations élaboré précédemment.

Processus établis par AADNC pour appuyer les évacuations
Le plan de gestion des urgences du bureau régional du Manitoba prescrit que toute décision d'évacuation d'une collectivité doit être prise par consensus entre AADNC, la Première Nation, l'Association des pompiers autochtones du Manitoba et la Division de la gestion des ressources hydriques du Manitoba. Toutefois, le Manitoba déclare qu'il ne peut participer à une décision d'évacuer une Première Nation, parce qu'il ne détient aucun pouvoir sur les réserves. Selon les représentants régionaux, en outre, l'Association des pompiers autochtones du Manitoba, en qualité de fournisseur de services pour AADNC, est régie par une entente de financement qui ne lui donne pas le mandat de prendre des décisions sur l'évacuation des collectivités, mais qui réduit son rôle à celui de conseiller du coordonnateur de la gestion des urgences touchant l'état de la collectivité et la nécessité d'une évacuation.

Dans la pratique, la décision d'évacuer une collectivité est prise par consensus entre AADNC et la Première Nation. Selon l'examen d'un échantillon de trois plans de gestion des urgences des Premières Nations, une ordonnance d'évacuation ne peut être lancée qu'après qu'un état d'urgence local a été déclaréNote de bas de page 35, ce qui selon les plans relève de la responsabilité du chef et des conseillers. Toutefois, le processus décrit dans les plans de gestion des urgences contient un modèle de résolution de conseil de bande décrétant l'état d'urgence, qui renvoie à la Loi sur les mesures d'urgence duManitoba et aux pouvoirs qu'elle confère aux autorités locales au paragraphe 11(1)Note de bas de page 36. Les Premières Nations ne sont pas des autorités locales en vertu de cette Loi, et en fait le ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien, nommé en vertu de la Loi sur les Indiens, est désigné comme l'autorité locale à l'égard des réserves. Les plans de gestion des urgences des Premières Nations ne font pas référence aux rôles et responsabilités pertinents d'AADNC et ne font pas état de la position d'AADNC, à savoir que les décisions devraient être prises par consensus.

Pour compliquer les choses, AADNC indique que la déclaration d'un état d'urgence par une Première Nation n'attribue pas des pouvoirs supplémentaires au chef et aux conseillers, mais signale plutôt que les ressources locales sont dépassées et que la Première Nation demande une aide extérieure. Lorsque AADNC a reçu une demande lors de l'inondation de 2011-2012, il contrôlait le financement et se trouvait donc de facto en position d'approuver les demandes d'évacuation des Premières Nations (par opposition au modèle de prise de décisions par consensus). À titre d'exemple, les modifications de l'entente de financement indiquent que les évacuations d'urgence d'une Première Nation particulière ont été dirigées par Affaires indiennes et du Nord Canada (c.-à-d. AADNC). Malgré cette preuve que AADNC prescrivait l'évacuation à des Premières Nations, AADNC n'avait pas de lignes directrices sur les conditions nécessaires pour ordonner une évacuation des lieux, ou sur l'identité du responsable, au sein du Ministère, qui devrait prescrire cette évacuation aux Premières Nations.

L'Association des pompiers autochtones du Manitoba avait la responsabilité, après qu'une collectivité a été évacuée, d'accueillir les évacués, de conserver les feuilles de temps et les factures, et de les présenter aux responsables du programme des Accords d'aide financière en cas de catastrophe de l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba. L'entente de financement avec l'Association des pompiers autochtones du Manitoba ne lui fait pas obligation de tenir des listes des évacués ou de créer des modalités de règlement des différends qui surviennent entre l'Association et les évacués. D'après les représentants régionaux, la Première Nation a la responsabilité d'enregistrer les évacués et d'assumer les coûts s'il lui est impossible de rationaliser la liste. Cette responsabilité a été clairement communiquée aux Premières Nations; mais comme l'entente de financement était entre AADNC et l'Association des pompiers autochtones du Manitoba, la liste d'évacués n'était pas une condition du financement, ce qui a donné lieu à des cas de mauvaise tenue de ces listes d'évacués.

Le même vague a présidé à la décision de revenir après les évacuations. La façon dont cette décision a été prise n'est pas claire, puisque l'évacuation initiale n'a pas été dictée par des conditions particulières sur le terrain, ou à tout le moins la justification d'AADNC pour ordonner l'évacuation d'une Première Nation n'a pas été documentée à ce titre. Selon les plans de gestion des urgences des Premières Nations, la décision de revenir ne peut être prise que si les dirigeants de la collectivité et l'équipe d'intervention d'urgence ont conclu que la situation d'urgence est close et que ce retour à la collectivité ne pose pas de danger (il faut veiller entre autres à ce que l'air, l'eau et les terres soient en bon état, et à ce que les services de base – comme l'eau et la chaleur – soient en place). Les plans donnent à penser en outre que les travailleurs essentiels (police, incendies, santé) se trouvent dans la collectivité avant le retour de l'ensemble de la population. Toutefois, il n'est pas clair dans quelle mesure ces critères sont pris en compte, parce que les documents financiers ne mentionnent pas les plans de gestion des urgences.

Recommandation 5 : En consultation avec les bureaux régionaux d'AADNC, la DGUE devrait établir des procédures, protocoles ou lignes directrices clairs pour les évaluations du risque et le soutien aux interventions d'urgence (y compris des activités comme la lutte contre les inondations et les évacuations).

Constatation 5 : La structure de financement est inefficace et expose AADNC et ses partenaires à un risque indu.

Une fois qu'il était établi qu'une Première Nation avait besoin d'aide pour répondre à une urgence, AADNC a versé une avance comptable à la Première Nation en vue des coûts d'intervention d'urgence futurs. Cela était nécessaire parce que les Premières Nations, au contraire des municipalités, ne disposent pas de revenus autonomes susceptibles de financer une interventionNote de bas de page 37. Les Premières Nations étaient tenues d'utiliser ces fonds pour régler les suites de l'inondation et pour présenter des réclamations au programme des Accords d'aide financière en cas de catastrophe du Manitoba (l'admissibilité des dépenses des Premières Nations à ce dernier est une condition du versement des avances comptables).

Une fois les réclamations soumises au programme des Accords d'aide financière en cas de catastrophe du Manitoba, les responsables mènent un examen détaillé de la réclamation pour déterminer l'admissibilité, puis remboursent la Première Nation en conséquence. Il appartient alors à la Première Nation de rembourser l'avance comptable à AADNC, ainsi que de distribuer le montant pertinent du remboursement à ses membres ayant engagé des coûts admissibles. Si les Premières Nations ont bien rendu compte des dépenses, le remboursement à AADNC est simple, puisque les réclamations au titre des Accords d'aide financière en cas de catastrophe du Manitoba sont égales aux dépenses engagées sur l'avance comptable.

Si des dépenses sont inadmissibles (c'est-à-dire que le programme des Accords d'aide financière ne les soutient pas), la Première Nation devra passer par un processus de remboursement qui pourrait prendre des années. La situation se complique du fait que, selon les intervenants, AADNC savait que certaines dépenses légitimes entraînées par les inondations n'étaient pas admissibles au remboursement dans le cadre du programme des Accords d'aide financière en cas de catastrophe du Manitoba lorsque les plans de travail ont été approuvés. Ainsi, les dépenses admissibles en vertu du programme provincial comprennent « Les coûts des mesures d'intervention suite aux directives d'un fonctionnaire autorisé pour : ... la construction ou le retrait de digues temporairesNote de bas de page 38 », mais les personnes interrogées ont noté qu'au vu du volume d'eau et de la durée de l'inondation dans certaines collectivités, des digues temporaires n'étaient pas faisables sur le plan technique et que des digues en argile étaient donc nécessaires. Ces digues en argile rendent compte d'environ 40 % des dépenses du PAGU au cours de l'inondation. L'admissibilité de ces digues au programme provincial n'a pas encore été déterminée.

Si une province démontre qu'elle a épuisé toutes les façons raisonnables, légales et pratiques de recouvrer les fonds auprès d'individus ou d'organisations considérés comme responsables des coûts selon les tribunaux, le partage des coûts des pertes admissibles irrécouvrables sera envisagé, au moyen des Accords d'aide financière en cas de catastrophe de Sécurité publique CanadaNote de bas de page 39. Dans une telle situation, la province présente une réclamation à Sécurité publique Canada, y compris les remboursements faits aux Premières Nations, puis Sécurité publique Canada examine la réclamation au cours des quelques années à venir et rembourse la province en conséquence. La province a soulevé deux principales préoccupations à l'égard de ce modèle. Premièrement, c'est le Manitoba qui assume le poids de la dette liée aux dépenses dans le cadre du PAGU d'ici à ce que Sécurité publique termine le processus de vérification et rembourse la province, ce qui peut prendre jusqu'à six ans. Deuxièmement, il se peut que tous les paiements effectués dans le cadre du programme des Accords d'aide financière en cas de catastrophe du Manitoba ne soient pas admissibles dans le cadre du programme de Sécurité publique Canada, auquel cas le Manitoba ne dispose d'aucun mécanisme pour recouvrer les fonds versés aux Premières Nations.

En général, cette structure de financement comporte plusieurs transactions, chacune ajoutant des coûts de fonctionnement et exposant le système à des risques. Consulter l'annexe B pour plus de détails sur le processus de financement. Au lieu de cette structure de financement, AADNC pourrait présenter les réclamations à l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba au nom des Premières Nations; pour cela, le ministre des Affaires autochtones et du développement du Nord canadien serait tenu de présenter la réclamation en qualité d'autorité locale, en application de la Loi sur les mesures d'urgence du ManitobaNote de bas de page 40. Il reste à déterminer si cette loi provinciale est d'application générale, mais si elle l'est, cette méthode permettrait au gouvernement provincial de transmettre son remboursement directement à AADNC. Il s'agirait ainsi d'une façon de garantir, à tout le moins, un recouvrement à court terme des coûts admissibles en vertu des Accords d'aide financière en cas de catastrophe du Manitoba.

Constatation 6 : Une gouvernance de coopération contrainte peu clair.

Depuis l'épisode de l'incident de terrorisme de septembre 2001, une attention accrue est accordée à la confiance entre organisations, la communication de ressources et d'information, et les incidences de ces aspects sur la capacité de collaborer lors de la gestion d'une urgenceNote de bas de page 41,Note de bas de page 42,Note de bas de page 43.

Les urgences semblent se produire dans un environnement dynamique soumis à de multiples pressions externes, ce qui nécessite de perpétuelles adaptations. Comme le fait observer Comfort [Traduction], « les situations de crise, qui nécessitent une intervention intergouvernementale, exigent une coordination parmi les nombreux organismes qui ouvrent l'accès à de l'information valide et à la capacité de mener des recherches, de faire des échanges, et de réaliser une absorption et des adaptations de l'information. C'est l'essence même d'un système adaptatif complexe qui évolue tandis que la situation prend de l'ampleur, et qui réagit aux demandes de l'environnement de crise, de même qu'à la pression et au soutien des autres organisationsNote de bas de page 44 ». Selon Lichenstein et al., les organisations, dans des systèmes adaptatifs complexes, réagissent aux pressions aussi bien externes (de l'environnement) qu'internes qui naissent tandis que les organisations se débattent avec l'interdépendanceNote de bas de page 45. Cela est particulièrement net dans des situations comme les inondations au Manitoba (2011-2012) qui se déroulent sur quelques mois et dans différents territoires de compétence, mais dont l'intensité des répercussions a varié dans l'espace et le temps. Dans ce contexte, les interventions d'urgence font appel à la disponibilité de différentes organisations et s'appuient, du moins en partie, sur un système d'intervention interdépendant.

Les publications sur la collaboration intra et interorganisations définissent les paramètres essentiels qui autorisent des partenariats efficaces. La confiance entre organisations est qualifiée de catalyseur essentiel pour faciliter la coopération entre organisationsNote de bas de page 46; or cette confiance ne peut naître sans la transparence. Une organisation qui souhaite bâtir la confiance doit être ouverte et transparente, ce qui suppose l'existence de mécanismes de communication, ainsi que de reddition de comptes, qui font appel à une structure de gouvernance fondée sur des objectifs communs, une vision et des valeurs communes, et des procédures et processus communs clairement définis. Il ressort des entrevues avec les différents groupes d'intervenants (tant au sein d'AADNC que dans les autres organisations) qu'il y a actuellement un manque de vision, de valeurs et d'objectifs communs entre les partenaires de la gestion des urgences au Manitoba (c'est-à-dire des divergences d'opinions sur la façon de gérer les urgences parmi les collectivités des Premières Nations au Manitoba).

Selon Marcus et al., la coordination des ressources, de l'information et de l'expertise est nécessaire et indispensable pour gérer les urgences : [Traduction] « Des conflits surgiront entre les intervenants d'urgence si, durant la période préparatoire à l'événement, ils n'en arrivent pas à comprendre le besoin critique d'acquérir une capacité polyvalente de connectivité permettant de dresser un tableau cohérent et large des rôles et responsabilités distincts, cohérents et chevauchants nécessaires pour réagirNote de bas de page 47 ». Il faut donc que les plans, règles et procédures soient logiques, compris, mis à l'essai et appliqués avant que survienne une urgence.

Le rôle de l'AC durant l'inondation s'est borné à accéder à des fonds supplémentaires et à se tenir au courant de la situation. Quoique le plan national de gestion des urgences d'AADNC précise que le comité des opérations du Ministère détient le pouvoir d'examiner les questions de gestion des urgences et de fournir une orientation à leur égard, la mesure dans laquelle l'AC a fourni une orientation demeure incertaine. Allié au fait que le plan de gestion des urgences du bureau régional du Manitoba ne fait aucune mention de l'AC à titre de décideurNote de bas de page 48, ce qui le système de gestion des urgences durant l'inondation n'était pas conçu pour faire participer l'AC à la prise de décisions. Il faudra tenir compte, dans les programmes de gestion des urgences à venir, des rôles de leadership que les gestionnaires seront appelés à jouer.

Le modèle à la page suivante présente un aperçu des différents concepts discutés dans cette partie, et note les liens et les attributs pertinents. Ce modèle est ensuite reproduit, en faisant appel à l'information recueillie au cours de cet examen pour donner une description plus juste de l'expérience en matière de gestion des urgences au Manitoba.

Recommandation 6 : Une fois la structure et les processus de gouvernance clarifiés, la DGUE et le bureau régional du Manitoba devraient établir les partenariats nécessaires pour créer un système de gestion des urgences efficace pour les collectivités des Premières Nations du Manitoba.

En matière de gestion des urgences, le mariage de la confiance et de la coopération est une réponse efficace

En matière de gestion des urgences, le mariage de la confiance et de la coopération est une réponse efficace
Description de la figure : En matière de gestion des urgences, le mariage de la confiance et de la coopération est une réponse efficace

Le modèle conceptuel illustre la relation théorique qui existe entre la gouvernance, la transparence, la confiance et la coopération et les façons dont le leadership peut influer sur ces concepts. Un grand cercle portant l'inscription « Leadership visant à établir la confiance » entoure quatre cases représentant la gouvernance, la transparence, la confiance et la coopération interreliées par des flèches.

Confiance - Comprendre et valoriser

  • La culture organisationnelle
  • Les rôles et responsabilitiés organisationnels
  • Le domaine de compétence organisationnelle

Gouvernance - Définir

  • Énoncer un ensemble de principes qui appuient un système de gestion des urgences
  • Valeurs, visions et buts communs
  • Règles, processus et procédures clairs
  • Rôle et responsabilités de l'organisation
  • Professionnalisme

Transparence - Communication

  • Communication améliorée
  • Mise en commun de l'information
  • Relation réciproque

« Co » Opération - Appliquer

  • L'état d'esprit d'un groupe de travail
  • La résolution de problèmes
  • L'utilisation de ressources
  • Une résponse efficace
 

Gestion réelle des urgences lors de l'inondation de 2011 au Manitoba

Gestion réelle des urgences lors de l'inondation de 2011 au Manitoba
Description de la figure : Gestion réelle des urgences lors de l'inondation de 2011 au Manitoba

Le modèle conceptuel de la page précédente, mais y inclut des observations tirées de l'examen des circonstances entourant les inondations au Manitoba. Par exemple, l'équipe responsable de l'examen a remarqué que :

  • la culture organisationnelle n'était pas valorisée – effet de cloisonnement;
  • les rôles et les responsabilités de l'organisation n'étaient pas clairement définis;
  • la non-reconnaissance des domaines de compétence avaient entraîné un grave bris de confiance;
  • les données sur les finances et le rendement étaient insuffisantes.

Ces observations figurent dans la case « confiance ».  La case « gouvernance » comporte les observations suivantes :

  • le Plan de gestion des urgences du bureau régional d'AADNC avait été élaboré, mais il n'avait pas été mis à l'essai ou à l'œuvre;
  • la structure de gouvernance au sein des collectivités des PN et d'AADNC n'étaient pas clairement établie;
  • la structure de coordination faisait défaut;
  • le Plan de gestion des urgences des Premières Nations n'avait pas été transmis au bureau régional d'AADNC.

La case « transparence » inclut les observations suivantes :

  • le système de communication en place était défaillant;
  • l'échange de renseignements était limité et les documents clés, inaccessibles;
  • la relation entre les parties prenait appui sur une situation déroutante;
  • les données sur les finances et le rendement étaient insuffisantes.

Enfin, la case « coopération » comporte les observations suivantes :

  • l'esprit de groupe faisait défaut;
  • la capacité à résoudre les problèmes était limitée;
  • les ressources étaient utilisées de manière inefficace;
  • l'intervention était inefficace;
  • le Ministère s'exposait à des risques.
 

 

Annexe A : Niveaux de crue de la rivière Rouge les plus élevés entre 1800 et 1999

ANNÉEDÉBIT (m3/s)COMMENTAIRES
1826 6 400 (est.) Inondation qui a bouleversé la vie des colons du nouveau village de Selkirk, aujourd'hui Winnipeg. Bien que mal documentée, l'inondation de 1776 aurait dépassé en importance celle de 1826.
1852 4 700 (est.) Cette inondation s'est produite 26 ans seulement après celle de 1826.
1997 4 600 Plus forte inondation en 150 ans. Son débit a été un peu inférieur à celui de 1852, et environ de moitié plus que celui de 1950.
1861 3 500 (est.) Troisième inondation en importance au 19e siècle.
1950 3 060 Désastreuse pour Winnipeg et la vallée de la rivière Rouge, cette inondation a donné lieu à la construction d'un canal de dérivation dans les années 1960.
1979 3 030 Inondation à peine plus légère que celle de 1950, mais qui a moins dévasté les secteurs environnants.
1996 2 960 Deuxième en importance des trois inondations principales qui ont frappé le secteur entre 1996 et 1999.
1974 2 720  
1966 2 500  
1916 2 430 Dernière inondation importante en 32 ans; la prochaine ne se produira qu'en 1948.
1987 2 340  
1970 2 280  
1904 2 210 Les eaux de cette crue ont été les premières à passer par le canal de dérivation de la rivière Rouge qui entoure Winnipeg.
1999 2 180 Troisième inondation (en importance) entre 1996 et 1999.
1948 2 120 Première grande inondation depuis 1916. Les plus forts débits de pointe se sont produits dans les cinquante ans qui ont suivi.
1956 1 970  
1960 1 970  
1892 1 960  
1897 1 950  
 

Source : Débit de la rivière Rouge au pont Redwood, ministère des Ressources naturelles du Manitoba.

 

 

Annexe B : Processus de financement du PAGU

Annexe B : Processus de financement du PAGU
Annexe B : Processus de financement du PAGU
Description de l'Annexe B : Processus de financement du PAGU

L'annexe B contient un modèle d'enchaînement du processus de financement du Programme d'aide à la gestion des urgences (PAGU), que voici :

  • La Première Nation détermine la probabilité que l'urgence survienne;
  • La Première Nation définit les travaux à exécuter pour répondre à l'urgence;
  • La Première Nation demande à AANDC de traiter l'incident comme une urgence à financer conformément au PAGU;
  • AANDC détermine si l'incident est une urgence. Dans la négative, le processus prend fin;
  • Dans l'affirmative, AANDC modifie l'entente de financement de manière à verser les fonds à titre d'avance comptable;
  • AANDC demande à l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba de mettre en application ses lignes directrices, puis la Première Nation exécute les travaux requis en cas d''inondation;
  • La Première Nation prépare une réclamation faisant état des dépenses admissibles;
  • L'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba organise des inspections et des évaluations de l'infrastructure et des foyers;
  • L'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba évalue l'admissibilité des dépenses réclamées. Si les dommages ne sont pas trop importants et que les dépenses admissibles dépassent l'avance, AANDC modifie l'entente de financement de manière à couvrir les dépenses admissibles supplémentaires. Si les dommages ne sont pas trop importants et que les dépenses admissibles ne dépassent pas l'avance, la Première Nation rembourse à AANDC l'avance qui dépasse les dépenses admissibles autorisées. Dans l'un ou l'autre des cas, la Première Nation rembourse aux membres leurs pertes personnelles;
  • Si les dommages sont importants (c'est-à-dire qu'on a atteint le seuil fixé dans les accords d'aide financière en cas de catastrophe de Sécurité publique Canada), l'Organisation des mesures d'urgence du Manitoba indemnise la Première Nation pour les coûts admissibles encourus (y compris les pertes personnelles admissibles des membres de la Première Nation). Il appartient ensuite à la Première Nation de rembourser l'avance comptable à AANDC;
  • Les dépenses de la Première Nation sont vérifiées par le vérificateur général du Manitoba, puis la réclamation est présentée à Sécurité publique Canada;
  • Services de vérification Canada vérifie la réclamation du Manitoba;
  • Sécurité publique Canada rembourse les coûts admissibles au Manitoba.
 

 
 
 

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