Discours de l'honorable Jane Stewart Ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien à l'occasion du dévoilement de Rassembler nos forces : le plan d'action du Canada pour les questions autochtones

l'honorable Jane Stewart
Ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien
à l'occasion du dévoilement de
Rassembler nos forces :
le plan d'action du Canada pour les questions autochtones

Le 7 janvier, 1998
Ottawa (Ontario)

À vérifier au moment de l'allocution


Merci, Messieurs les Aînés, d'avoir bien voulu nous guider et nous donner votre bénédiction spirituelle.

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Introduction

Mesdames et messieurs, et parmi vous les aînés, les chefs, les commissaires, mes collègues, les dirigeants et distingués invités. J'attendais impatiemment cette occasion de vous parler des travaux de la Commission royale sur les peuples autochtones et de vous entretenir, dans une perspective plus large, des relations entre les Autochtones et les non-Autochtones de ce pays.

Nous sommes ici pour partager avec vous ce que nous avons appris de la Commission et vous exposer l'orientation que nous avons l'intention de suivre, maintenant que notre compréhension des questions autochtones s'est approfondie grâce à son rapport marquant.

Parmi les innombrables témoignages de personnes et d'organisations qu'ont entendus les Commissaires, celui d'une jeune personne, en particulier, me revient en mémoire aujourd'hui. Selon elle, un grand conseiller spirituel lui avait affirmé qu'il nous fallait retourner septgénérations en arrière, puis nous reporter sept générations en avant pour comprendre que nous représentons le point d'équilibre. La philosophie de la septième génération est un mode traditionnel de pensée et de décision qui nous montre le lien entre le passé et l'avenir. Cette philosophie nous prévient qu'il faut être conscient des répercussions durables de nos décisions présentes sur l'avenir et qu'il faut faire de notre mieux pour les générations à venir.

Je crois qu'aujourd'hui, nous en sommes vraiment au point d'équilibre. Nous avons tiré des leçons de notre expérience passée, surtout grâce aux travaux de la Commission, et nous pouvons voir les possibilités que nous offre l'avenir. Nous devons faire preuve de prudence : nous vivons aujourd'hui avec les conséquences du passé, et nous vivrons pendant de nombreuses générations avec les conséquences de nos actes présents.

Permettez-moi de situer le rapport dans son contexte. Le mandat des commissaires était très ambitieux. On leur a demandé de tout examiner, depuis les origines et les structures des gouvernements autochtones jusqu'à la nature des revendications territoriales; de la Loi sur les Indiens aux préoccupations d'ordre social, économique et culturel.

J'aimerais remercier les commissaires en chef, messieurs Erasmus et Dussault, ainsi que tous les autres commissaires, leur personnel et les témoins qui ont contribué à faire du Rapport de la Commission royale un ouvrage aussi complet. Les commissaires ont parcouru le pays et recueilli les propos des peuples autochtones du Canada. Leur rapport, publié en cinq volumes, compte 3500 pages et 440 recommandations. Leur tâche était colossale et le poids des conclusions tirées était énorme. Une fois le rapport en main, le gouvernement fédéral s'est trouvé à peu près dans la même situation que les commissaires au début de leurs travaux; ses représentants ont dû se demanderpar où commencer et comment procéder.

Il va sans dire que ces travaux d'importance historique ont profondément influencé les personnes et les institutions. Pour en avoir parlé avec les commissaires, je sais que ces travaux les ont véritablement transformés. Ils ont aussi considérablement modifié l'opinion d'autres personnes - dont moi-même - sur les questions autochtones, et ont approfondi leur compréhension à cet égard.

L'an dernier, nous en sommes venus à comprendre que nous avions déjà réalisé des progrès conformes aux suggestions de la Commission. Nous connaissons maintenant les domaines qui nécessitent de nouveaux efforts, ceux qu'il est possible d'examiner un peu plus tard en partenariat avec d'autres intervenants et, enfin, ceux où nous ne pourrons peut-être pas prendre de mesures.

Dans quelques minutes, je vais vous exposer quatre séries d'objectifs et les initiatives qui en découlent. Ils s'inspirent des travaux de la Commission royale et constituent le fondement d'un plan d'action pour ce gouvernement. Avant d'entrer en matière, il nous faut toutefois comprendre ceci: ce qui importe encore plus que les centaines de recommandations formulées par les commissaires, c'est de nous pencher, comme ils nous ont incités à le faire, sur la façon dont les Autochtones et les non-Autochtones ont coexisté dans ce pays.

Les commissaires ont cerné quatre périodes dans l'évolution des relations entre les Autochtones et les non-Autochtones : d'abord, l'existence de mondes distincts, avant l'arrivée des Européens au Canada; ensuite, le contact et la coopération, à l'époque où les pionniers et les Autochtones s'appuyaient mutuellement; uis la détérioration des relations causée par les réinstallations et l'assimilation, durant une période qui va du début des années 1800 jusqu'à il y a environ 30 ans, alors que les gouvernements coloniaux imposaient leur mode de vie aux Autochtones. Enfin, le renouveau, qui présente à notre génération actuelle une possibilité de corriger les erreurs du passé et d'aller de l'avant en renouant une relation fondée sur la coopération.

Bref, les commissaires nous ont transmis un message très significatif. Ils nous ont dit : « c'est une mauvaise ligne de conduite qui a été suivie pendant plus de 150 ans par les gouvernements coloniaux et par les gouvernements canadiens ultérieurs ».

Aujourd'hui, nous sommes ici pour dire que nous avons écouté et que nous avons compris. Le temps est venu de déclarer officiellement que l'époque du paternalisme et du manque de respect est révolue, et que nous nous engageons à changer fondamentalement la nature de la relation entre les Autochtones et les non-Autochtones au Canada.

Ceci étant dit, nous ne pouvons nous tourner vers l'avenir sans d'abord nous pencher sur le passé et affronter les conséquences de nos actes et de nos attitudes d'autrefois. L'histoire ne peut être réinventée. Toutefois, on doit la comprendre en tenant compte du fait que des gens, aujourd'hui, vivent avec les répercussions des décisions prises à une autre époque.

Le chef Steven Point, de la nation Sto:lo de Colombie-Britannique, peut retracer ces conséquences dans la vie quotidienne de sa collectivité. Cet avocat parle du « jour des Indiens » au tribunal de Chilliwack, c'est-à-dire la journée d'audience de toutes les causes des Indiens. Il arrive même à rire un peu quand il dit que ces journées d'audiences sont comme des réunions familiales, car on y trouve des pères, des mères, des fils et des filles, des frères et des soeurs, bref, des familles entières aux prises avec des problèmes. En tant que chef, M. Point dit qu'il n'y a pas assez d'heures dans une journée pour aider les membres de sa collectivité minés par l'alcoolisme, brisés par le suicide ou tentés par la criminalité parce qu'ils n'ont rien de mieux à faire. Il déclare qu'essayer de régler tous ces problèmes, c'est comme tenter de retenir de l'eau dans ses mains. Et pire encore, précise-t-il, c'est que les gens de son peuple ont peu d'espoir, peu de confiance en lui ou en eux-mêmes pour retrouver leur fierté et leur estime de soi. Il y règne une pauvreté de l'esprit, une pauvreté de l'âme.

Ce que décrit le chef Point reflète la douleur et la souffrance des Autochtones. Mais là où sévissent les problèmes et la détresse se trouvent aussi des leaders et des gens animés par une vision d'avenir. Le chef Point et les collectivités des Premières nations, d'Inuits et de Métis sont déterminés à restaurer l'espoir et à se fortifier. Je crois qu'ils le peuvent et qu'ils y arriveront. Je pense que le gouvernement fédéral doit, pour sa part, reconnaître le rôle qu'il a joué dans la relation du passé. Ainsi, nous pourrons prendre un nouveau départ.

À cette fin, le gouvernement du Canada tient à faire une offre solennelle de réconciliation :

Déclaration de réconciliation

Dans cette quête d'un renouveau entreprise ensemble par les Canadiens autochtones et non autochtones, il est essentiel de guérir les séquelles que le passé a laissées aux peuples autochtones du Canada, y compris les Premières nations, les Inuits et les Métis. Notre but n'est pas de réinventer l'histoire, mais plutôt d'apprendre de nos expériences antérieures et de trouver des façons d'éliminer les influences négatives que certaines décisions historiques continuent d'avoir sur notre société contemporaine.

Les ancêtres des Premières nations, des Inuits et des Métis, habitaient ce continent bien avant l'arrivée en Amérique du Nord des explorateurs en provenance d'autres continents. Pendant des millénaires avant la fondation du pays, ces peuples possédaient leurs propres formes de gouvernement. Ces nations autochtones vibrantes et pleines de diversité avaient, depuis la nuit des temps, adopté des modes de vie ancrés dans des valeurs fondamentales qui concernaient leurs relations avec le Créateur, l'environnement et leurs rapports mutuels, dans le rôle des aînés à titre de mémoire vivante de leurs ancêtres, et dans leurs responsabilités en tant que gardiens des terres, des eaux et des ressources de leur mère patrie.

L'aide et les valeurs spirituelles des peuples autochtones, qui ont accueilli les nouveaux arrivants sur ce continent, ont trop souvent été oubliées. L'apport de tous les peuples autochtones au développement du Canada ainsi que les contributions qu'ils continuent d'apporter à notre ociété contemporaine n'ont pas été reconnus suffisamment. Au nom de tous les Canadiens, le gouvernement du Canada veut aujourd'hui rendre hommage à ces contributions.

Malheureusement, notre histoire en ce qui concerne le traitement des peuples autochtones est bien loin de nous inspirer de la fierté. Des attitudes empreintes de sentiments de supériorité raciale et culturelle ont mené à une répression de la culture et des valeurs autochtones. En tant que pays, nous sommes hantés par nos actions passées qui ont mené à l'affaiblissement de l'identité des peuples autochtones, à la disparition de leurs langues et de leurs cultures et à l'interdiction de leurs pratiques spirituelles. Nous devons reconnaître les conséquences de ces actes sur les nations qui ont été fragmentées, perturbées, limitées ou même anéanties par la dépossession de leurs territoires traditionnels, par la relocalisation des peuples autochtones et par certaines dispositions de la Loi sur les Indiens. Nous devons reconnaître que ces actions ont eu pour effet d'éroder les régimes politiques, économiques et sociaux des peuples et des nations autochtones.

Avec ce passé comme toile de fond, on ne peut que rendre hommage à la force et à l'endurance remarquables des peuples autochtones qui ont préservé leur diversité et leur identité historique.

Le gouvernement du Canada adresse aujourd'hui officiellement ses plus profonds regrets à tous les peuples autochtones du Canada à propos des gestes passés du gouvernement fédéral, qui ont contribué aux difficiles passages de l'histoire de nos relations.

Un des aspects de nos rapports avec les peuples autochtones durant cette période, le système des écoles résidentielles, mérite une attention particulière. Ce système a séparé de nombreux enfants de leur famille et de leur collectivité et les a empêchés de parler leur propre langue, ainsi que d'apprendre leurs coutumes et leurs cultures. Dans les pires cas, il a laissé des douleurs et des souffrances personnelles qui se font encore sentir aujourd'hui dans les collectivités autochtones. Tragiquement, certains enfants ont été victimes de sévices physiques et sexuels.

Le gouvernement reconnaît le rôle qu'il a joué dans l'instauration et l'administration de ces écoles. Particulièrement pour les personnes qui ont subi la tragédie des sévices physiques et sexuels dans des pensionnats, et pour celles qui ont porté ce fardeau en pensant, en quelque sorte, en être responsables, nous devons insister sur le fait que ce qui s'est passé n'était pas de leur faute et que cette situation n'aurait jamais dû se produire. À tous ceux d'entre vous qui ont subi cette tragédie dans les pensionnats, nous exprimons nos regrets les plus sincères.

Afin de panser les blessures laissées par le régime des pensionnats, le gouvernement du Canada propose de travailler avec les Premières nations, les Inuits, les Métis, les communautés religieuses et les autres parties concernées pour résoudre les problèmes de longue date auxquels ils ont à faire face. Nous devons travailler ensemble pour trouver une stratégie de guérison en vue d'aider les personnes et les collectivités à affronter les conséquences de cette triste période de notre histoire.

Aucune réconciliation avec les peuples autochtones ne peut être faite sans évoquer les tristes événements qui ont entraîné la mort de Louis Riel, chef métis. Ces événements se sont produits, et nous ne pouvons retourner en arrière. Néanmoins, nous pouvons chercher, et nous continuons de chercher, des moyens de reconnaître les contributions des Métis au Canada et de refléter la place qu'occupe Louis Riel dans l'histoire de notre pays.  La réconciliation est un processus continu. Pour renouveler notre partenariat, nous devons veiller à ce que les erreurs ayant marqué notre relation passée ne se répètent pas. Le gouvernement du Canada reconnaît que les politiques qui cherchent à assimiler les Autochtones, tant les femmes que les hommes, n'étaient pas la meilleure façon de bâtir un pays fort. Nous devons plutôt continuer à trouver des solutions qui permettront aux peuples autochtones de participer pleinement à la vie économique, politique, culturelle et sociale du Canada tout en préservant et en améliorant les identités des collectivités autochtones et en assurant leur évolution et leur épanouissement futurs. C'est en travaillant ensemble à atteindre des buts communs que nous réalisons des bénéfices pour tous les Canadiens, tant autochtones que non autochtones.

L'Interlocuteur fédéral et moi-même avons signé aujourd'hui cette déclaration afin de manifester l'engagement du gouvernement à se réconcilier avec les Autochtones et à édifier maintenant avec eux un avenir meilleur.

Des gestes concrets doivent appuyer nos paroles. Il faut des efforts concertés pour aider les personnes, les familles et les collectivités autochtones à guérir les séquelles des sévices sexuels et physiques exercés dans les pensionnats. Aujourd'hui, le gouvernement fédéral fait un premier pas en engageant 350 millions de dollars qui seront consacrés à la guérison communautaire rendue nécessaire par suite des blessures causées par ces actes répréhensibles. Les Premières nations, les Inuits et les Métis eux-mêmes, avec l'appui de professionnels de la santé et des services sociaux, aideront à définir un soutien culturellement approprié aux conditions particulières des diverses collectivités. Je crois que nous pouvons apprendre beaucoup du projet sur les pensionnats mené par la Colombie-Britannique. Lancé par le Sommet des chefs de la Colombie-Britannique et appuyé par le gouvernement fédéral, ce projet vise à coordonner les services de soutien et d'aiguillage à l'intention des victimes de sévices. Il a également pour but de veiller à ce que les différents organismes concernés coopèrent de manière à ce que les limitations des domaines de compétences ne viennent pas nuire à la prestation des services aux victimes.

Le renouveau

Si le passé nous fait réfléchir, l'avenir nous offre certainement l'espoir. C'est le temps de construire, de rassembler nos forces. Et si nous voulons saisir la chance qui se présente à nous, il faut agir ensemble.

Je suis convaincue que la majorité des Canadiens appuient l'établissement d'un nouveau partenariat avec les Autochtones. Au cours de mes voyages, je me suis entretenue avec des ministres provinciaux et territoriaux, des dirigeants municipaux, des gens d'affaires et du milieu financier, des universitaires, des animateurs communautaires et des citoyens canadiens. Tous voient clairement la nécessité d'un changement.

Nous ne pouvons pas tout changer du jour au lendemain. La Commission royale elle-même préconise un processus de renouveau échelonné sur 20 ans. Mais nous pouvons sûrement commencer dès maintenant et c'est la raison de notre présence ici aujourd'hui.

Nous annonçons aujourd'hui un plan d'action complet qui se fonde sur les objectifs suivants :

Permettez-moi d'abord de vous exposer les réflexions qui nous ont amenés à fixer, à l'intention des Premières nations et des Inuits, ces grands objectifs et les buts sous-jacents à chacun d'entre eux. Mon collègue Ralph Goodale, l'Interlocuteur fédéral auprès des Métis et des Indiens non inscrits, vous parlera ensuite de ce qu'il veut accomplir pour ces groupes d'Autochtones, auxquels il se consacre au nom du gouvernement du Canada.

Renouveler le partenariat

Laissez-moi commencer avec notre objectif qui est de renouveler le partenariat.

Le partenariat. C'est un mot souvent employé sans définition précise de sa signification.

La Commission royale nous a mis au défi d'établir, entre les Autochtones et les non-Autochtones, des relations qui s'inspirent de la reconnaissance et du respect mutuels, de la responsabilité et du partage. Nous avons obtenu la base recherchée pour fonder notre partenariat. Cette assise regroupe les Autochtones et leurs organisations, tous les ordres de gouvernement, le secteur privé, les organismes à but non lucratif et les organismes de bénévoles, les autres intervenants concernés et tous les Canadiens. Elle implique la célébration de notre diversité dans le cadre d'une vision commune. Elle signifie également une relation de travail efficace et constructive.

Dans ce contexte, et plus précisément en ce qui concerne la relation de travail, notre engagement envers le partenariat consiste :

Dans cette salle, j'aperçois les membres des nouveaux grands partenariats dont je viens de vous entretenir. Il y a ici les dirigeants d'organisations nationales autochtones représentant les Premières nations, les Inuits, les Métis, les Indiens non inscrits, les Autochtones vivant hors des réserves et les femmes autochtones. Il y a des jeunes Autochtones et des aînés, des entreprises autochtones et des organisations sociales. Des représentants des ministères fédéraux de la Santé, de la Justice, du Développement des ressources humaines, de l'Industrie et des Ressources naturelles, qui aideront à faire en sorte que nos relations soient concrètes et productives. Des dirigeants des secteurs bancaires et des ressources qui peuvent servir de modèles à suivre dans les transactions avec les collectivités autochtones. Des représentants d'autres secteurs de la main-d'oeuvre et des organismes sociaux qui reconnaissent la nécessité de donner aux Autochtones la place qui leur revient dans ce pays. Ces personnes et les représentants des autres ordres de gouvernement sont les partenaires auxquels nous voulons nous allier pour entretenir, avec les Autochtones, des relations multilatérales d'envergure.

Notre engagement a commencé à se concrétiser aujourd'hui avec la Déclaration de réconciliation et l'annonce qu'une somme de 350 millions de dollars sera consacrée à la guérison rendue nécessaire par les sévices sexuels et physiques exercés dans les pensionnats. Nous proposons maintenant trois autres initiatives de contribution au renouvellement du partenariat :

Renforcer l'exercice des pouvoirs par les Autochtones

J'aimerais maintenant aborder notre second objectif : renforcer l'exercice des pouvoirs par les Autochtones.

Le gouvernement doit se consacrer aux gens. Sa raison d'être, c'est d'améliorer leurs conditions de vie. Nous devons nous assurer que les Autochtones disposent des moyens et de la capacité de rehausser les conditions de vie de leurs citoyens. Pour faire preuve de réceptivité et de responsabilité envers les besoins des collectivités, les gouvernements autochtones doivent jouir de la légitimité et des pouvoirs nécessaires pour agir. C'est pourquoi nous avons la ferme intention d'aider les Autochtones à concevoir, à élaborer et à fournir les programmes et les services qu'ils attendent de leurs gouvernements.

L'autonomie gouvernementale passe par des ententes bien définies et négociées, comportant des responsabilités et des droits qui pourront être exercés de manière coordonnée. Ainsi, les autres gouvernements, le secteur privé, les autres particuliers et les institutions pourront facilement établir une relation avec les gouvernements et les collectivités autochtones et participer aux partenariats dont il est question.

Une assise économique plus solide est essentielle pour en arriver à ces résultats. Pour ce faire, il faut notamment travailler avec les Premières nations pour élargir l'accès aux terres et aux ressources. Nous devons continuer à aborder les revendications territoriales de manière juste et équitable. Le règlement des revendications au Yukon illustre bien la façon dont le développement économique et cette activité constituent, ensemble, la base d'une forte autonomie gouvernementale.

Cet engagement à mettre en oeuvre une solide autonomie gouvernementale et à tenir un dialogue ouvert nous guidera à mesure que nos partenaires et nous-mêmes progresserons dans l'établissement du Nunavut et dans l'élaboration d'une constitution pour la partie ouest des Territoires du Nord-Ouest.

Notre but est d'obtenir des réussites encore plus grandes, et d'établir de plus nombreux modèles de saine gestion des affaires publiques. À cette fin, nous mènerons les grandes initiatives suivantes:

Établir une nouvelle relation financière

Le renforcement de l'exercice des pouvoirs par les Autochtones est étroitement lié à notre troisième objectif, qui consiste à établir une nouvelle relation financière.

Dans le cadre d'une relation fondée sur le partage et l'obligation réciproque de rendre des comptes, l'un des gouvernements ne peut dépendre entièrement de l'autre à l'égard de son financement et de ses ressources. C'est simplement utopique. Nous voulons aider les gouvernements autochtones à devenir plus autosuffisants en leur accordant l'autonomie et la capacité financières indispensables à l'exercice de leurs responsabilités.

C'est tout un défi. Pour ce faire, notre système de transfert doit être prospectif et prévisible afin que les représentants dûment élus puissent planifier leurs activités, prendre des décisions éclairées en matière de dépenses et rendre compte de leurs choix. Il faut aussi que nous allions encore plus loin et que nous examinions les façons d'aider les Autochtones à développer leurs sources de recettes autonomes, y compris les impôts et les taxes.

Les gouvernements autochtones, à l'instar de tous les autres, doivent rendre des comptes sur le plan politique et financier. La légitimité des gouvernements autochtones dépend de leur capacité de rendre des comptes aux personnes qu'ils représentent. Les Canadiens veulent également s'assurer que nous investissons dans des gouvernements autochtones forts, efficaces et responsables. Actuellement, les gouvernements autochtones fonctionnent à l'aide d'un cadre de normes financières comparables à celles des autres ordres de gouvernement. Voilà les fondations sur lesquelles nous continuerons à édifier des gouvernements autochtones modernes, forts, transparents et responsables.

Les initiatives suivantes devraient faire partie de la nouvelle relation financière:

Renforcer les collectivités et les économies, et appuyer les gens

Fondamentalement, c'est notre quatrième objectif, soit « renforcer les collectivités et les économies, et appuyer les gens », qui nous ramène à notre raison d'être à titre de gouvernement : améliorer les conditions de vie des personnes. L'approche fondée sur le partenariat, le gouvernement responsable et la relation financière solide dont je viens de parler représentent le fondement nécessaire pour renforcer les collectivités et aborder les questions relatives à la vie quotidienne des particuliers : l'éducation, le logement, les soins de la santé, l'emploi et les possibilités économiques.

Il importe à chacun d'entre nous, les Canadiens, d'avoir un toit au-dessus de notre tête, de trouver de la nourriture sur la table et de procurer à nos enfants plus que nous n'avons reçu. Mais pour les Autochtones, l'insécurité et les besoins à ces égards sont bien plus grands.

Le taux de croissance de la population autochtone est deux fois supérieur à la moyenne nationale et totalise maintenant 3,8 p. 100 de la population canadienne. Cette population compte environ 1,3 million de personnes, dont la moitié ont moins de 25 ans.

Avec ces chiffres comme toile de fond, les conditions dans lesquelles vivent plusieurs collectivités autochtones apparaissent aberrantes :

Donc, le plan d'action que je vous ai exposé aujourd'hui se traduit par une chose bien simple : il faut, je le répète, améliorer les conditions de vie des Autochtones de ce pays. Il faut nous unir afin de redonner l'espoir aux adolescents qui voient le suicide comme une solution à leurs problèmes, de briser le cercle vicieux que représente l'aide sociale pour ceux qui en dépendent, et de créer des emplois. Le moment est venu d'enrichir les esprits appauvris.

Les initiatives fédérales suivantes sont conçues pour donner aux Autochtones et à leurs collectivités de l'espoir, une aide et des possibilités dans l'immédiat.

Voilà un bref aperçu des initiatives prévues dans le cadre de notre projet, qui consiste à renouveler les partenariats, à renforcer l'exercice des pouvoirs par les Autochtones, à établir une nouvelle relation financière et à renforcer les collectivités et les économies autochtones. Elles constituent, à mon avis, avec notre déclaration de réconciliation et les initiatives dont parlera le ministre Goodale, un solide plan d'action vers le progrès.

Nous ne partons pas à zéro dans nos efforts et c'est là un fait encourageant. Nous pouvons miser sur les réalisations majeures de notre premier mandat, comme la politique du gouvernement sur le droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, la politique d'approvisionnement auprès des entreprises autochtones, le règlement des revendications territoriales, la nouvelle politique de logement, la construction d'écoles, de systèmes d'approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées dans tous les coins du pays. En réfléchissant aux quatre dernières années, je me rappelle que lorsque nous avons pris le pouvoir en 1993, nous avons constaté l'urgente nécessité d'agir sur tous les fronts et nous avons immédiatement retroussé nos manches. Nous avons entrepris de freiner le dépérissement des collectivités autochtones et, simultanément, nous avons amorcé les travaux pour régler les revendications territoriales et stimuler le développement économique. Nous nous sommes rendu compte que le gouvernement fédéral ne pouvait pas y réussir seul et qu'il fallait établir des partenariats.

Aujourd'hui, nous allons plus loin. Les partenariats doivent désormais constituer le principe directeur de nos relations. Ils doivent tracer la voie à notre génération, à la prochaine et à celle qui suivra ensuite. Le partenariat est une chose sur laquelle vous devez travailler afin qu'il soit productif. Et permettez-moi de souligner que nous ne serions pas ici aujourd'hui sans les sages conseils et les recommandations des dirigeants autochtones qui se trouvent ici avec nous. Mon collègue, le ministre Goodale, et moi-même avons eu une série d'excellents entretiens avec nos homologues, M. Harry Daniels, du Congrès des Peuples autochtones, Mme Okalik Eegeesiak, la nouvelle présidente élue de l'Inuit Tapirisat du Canada, M. Gérald Morin, du Métis National Council, Mme Marilyn Buffalo, de la Native Women's Association of Canada, et M. Phil Fontaine, Grand Chef de l'Assemblée des Premières nations. Chacun d'entre vous a apporté un point de vue unique à nos discussions et a contribué à jeter les assises d'une relation permanente. Il y a encore place à l'amélioration, mais nous bâtissons un vrai partenariat. Ensemble, nous y parviendrons.

Conclusion

Et maintenant, quelle est la prochaine étape? Comme j'en ai convenu au terme de la rencontre des premiers ministres provinciaux avec les dirigeants autochtones en novembre dernier, je rencontrerai au cours des prochains mois les dirigeants autochtones ainsi que mes collègues provinciaux et territoriaux afin d'établir un plan d'action commun pour concrétiser le renouvellement des partenariats.

Ce n'est pas la fin des travaux de la Commission royale. C'est plutôt le début d'une démarche que nous pouvons entreprendre, maintenant que nous sommes forts de nouvelles connaissances et d'une nouvelle compréhension. Tout comme la création de la Commission correspond à un moment important de notre histoire, j'espère que nous nous rappellerons, plus tard, de la période actuelle comme un point tournant, c'est-à-dire le moment où, animés par un esprit plutôt semblable au principe de la septième génération, nous avons tourné la page dans le but d'édifier un avenir commun plus florissant.

Sur le plan international, nous projetons avec fierté une image de gardiens de la paix et de défenseurs de la justice. Aujourd'hui, je crois que l'offre de réconciliation que nous avons présentée est juste et opportune, et qu'elle nous apporte une occasion d'aller de l'avant. Depuis des années, les Nations Unies répètent que le Canada est le meilleur pays où l'on puisse vivre. Assurons-nous maintenant que tous les peuples qui l'habitent puissent en dire autant.

Les Autochtones et les non-Autochtones cohabitent dans ce grand pays. Dans la décision rendue récemment par la Cour suprême sur la cause Delgamukw, le juge en chef a écrit : « il faut se rendre à l'évidence, nous sommes tous ici pour y rester ». Cette phrase simple mais profonde doit tous nous tenir à coeur. Je m'adresse à chacun d'entre vous ici et sollicite votre engagement à établir des partenariats. Si nous rassemblons nos forces et notre volonté collectives à la table, nous pouvons réaliser des progrès considérables.

J'espère que les Autochtones pourront bientôt dire avec fierté qu'ils font partie intégrante de ce pays et qu'ils n'y sont pas simplement marginalisés. J'espère qu'en rassemblant nos forces, nous pourrons rétablir l'équilibre et changer de cap en partenariat.

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